Chapitre 1


C'est un univers entier de ténèbres et de chaos. Les bannis, maudits par Zeus lui-même sont condamnés à errer en cette dimension de désolation et de néant pour l'éternité. Seuls des événements improbables pourraient leur donner une opportunité utopique de tenter une évasion. Jamais cela ne s'était vu auparavant.

*****

Un vent glacé soufflait sur les étendues gelées d'Asgard. Toute la chaleur en ces lieux venait du cosmos qui s'était embrasé quelques instants plus tôt devant le Palais d'Hilda de Polaris, Grande Prêtresse d'Odin et Souveraine du Royaume d'Asgard.

" Tes efforts sont simplements inutiles, Siegfried. " siffla une voix pourtant tremblante par dessus les hurlements du vent et les exclamations incrédules de spectateurs de la scène.
" Vraiment ? "interrogea Siegfried " Alors pourquoi te débats-tu tant ? Aurais-tu peur ? "

Siegfried était revêtu d'une armure aux teintes sombres. Il incarnait sans aucun doute l'un des légendaires Guerriers Divins, protecteurs du Royaume Nordique. Ses bras puissants étaient refermés autour du torse de son interlocuteur, dont il bloquait ainsi les moidres mouvements. Le prisonnier portait une armures dorées, aux courbes s'achevant en arêtes et en pointes, rappelant par ses motifs les écailles des poissons. Il tenait dans sa main droite une flûte, qui lui était désormais sans utilité. Son cosmos brûlait, mais en vain contre l'étreinte du légendaire Guerrier Divin d'Alpha, Siegfried de Dohl, invulnérable depuis son bain dans le sang du dragon dont son armure était à l'effigie. Du sang coulait pourtant des oreilles du fier combattant, comme s'il avait tenter de se protéger contre la mélodie qu'aurait pu produire l'instrument de son captif.
D'autres combattants aux armures fissurées, ou même pulvérisées assistaient, ébahis au spectacle qui s'offrait à eux. Deux cosmos étaient en train de se sublimer.C'était une scène à laquelle seuls de rares privilégiés avaient pu assister. Les éclairs commençaient de strier les airs autour des Chevaliers. Une étrange sensation de flottement envahissait les environs.

*****

Au milieu du Néant, dans lesténèbres impénétrables de Latium, deux yeux brillants se mirent soudainement à s'ouvrir lentement. Ils scintillaient de bleu et de jaune. Autour de cette paire d'yeux vinrent peu à peu s'en agglutiner d'autres, à l'affut de la faille, de l'opportunité.

*****

Le prisonnier de Siegfried, l'air inquiet, continuait de se débattre.

" Tu sais que même si tu parvenais à me tuer, cela ne vous avancerait à rien ! "

Siegfried eut soudain un sourire en coin.

" Alors comme ça, tu reconnais que je pourrais te tuer ? " fit-il " Et saches que tu te trompe, cela servira, au contraire, je vengerais ainsi l'affront qui par la faute des tiens a été infligé à mon peuple et à ma souveraine ! Trop de vaillants guerriers sont morts pour rien, à cause des manigance de celui que tu sers. Tu vas payer de ta vie celles de mes compagnons. Il en va de mon devoir. "

Le dernier Guerrier Divin encore vivant en Asgard intensifia encore plus son cosmos. Le décor se troubla, voilé par l'énergie dégagée sous laquelle ployait la réalité. Les traits du prisonnier de Siegfried se figèrent dans un rictus d'effroi.
Un murmure indistinct parcourut l'assemblée : " Il va faire appel à l'Ultime Dragon ! "
Enfin, Siegfried, toujours en maintenant fermement son adversaire contre lui, commença à s'élever dans les airs. Il lança vaillamment un " Adieu à vous, Défenseurs d'Athéna. Merci pour les preuves que vous nous avez apportées de votre bravoure et votre courage.La Terre est entre de bonnes mains ! "
Peu à peu, les deux corps atteignaient des vitesses de plus en plus vertigineuses, s'élevant de plus en plus haut jusque dans les couches les plus externes de l'atmosphère. Un veritable torrent d'éclairs se déversa dans leur sillage alors qu'eux-mêmes, échauffés par le frottement de l'air, commençaient à se consumer dans un brasier violet-pâle.
Le sol tremblait.
Loin dans le ciel, l'étoile filante qu'étaient devenus les deux hommes explosa. Les spectateurs de la triste scène laissaient les larmes couler péniblement sur leurs visages meurtris. Il avait fallu tant de batailles pour en arriver là… Pour arriver à ça !

*****

L'intensité lumineuse des yeux réveillés dant les limbes de Latium s'accentua en flèche.

" Maintenant !" fit le détenteur des yeux bleus et jaunes.

La distorsion des dimensions en était à son paroxisme quand quatorze silhouettes menaçantes se mirent en route vers la dimension où demeurait Athéna, chevauchant les ombres.
Une vague pensée, ironique, traversa l'espace et le temps, suivie d'un rire menaçant :

" Merci à toi, Siegfried, guerrier -et héros !!! Ah ah ah ah… … "

*****

La tempête acheva de se déchaîner sur les landes d'Asgard. Le vent soufflait en rafales puissantes qui formaient des congères sur le moindre arbre. Les corps sans vie de nombreux Guerriers d'Odin se recouvraient peu à peu de linceuls gelés.
Une étrange mélodie retentissait encore, en adieu, à même les esprits des Chevaliers d'Athéna. C'était un air de harpe, qui les réchauffait contre le climat apocalyptique qui les assaillait. C'était le souvenir de leurs vaillants adversaires aux destins tragiques et brisés. Mime de Benetach, Guerrier d'Hêta, jouait par-delà la mort cet hymne à la mémoire des héros de son peuple, et de ceux qu'ils avaient attaqués injustement, les entraînant dans un combat stérile, vain. Sous la neige reposaient les corps de Cyd et Bud de Mizar, jumeaux maudits victimes d'un cruel destin et des us de la Noblesse de leur pays, vaillants Guerriers de Zeta, qui ont passé leurs vies soit à s'ignorer, soit à se hahir, et n'ont trouvé le repos que dans la mort ; la dépouille d'Hagen de Merak, pleuré par Freya, sœur de la prêtresse Hilda, était abandonnée aux flammes de son volcan, lui le fier Guerrier de Bêta, aveuglé par la foi en son monde au point d'ignorer l'évidence et de mourir pour des idéaux erronés ; Fenrir d'Alioth, le solitaire Guerrier d'Epsilon, trahi par les siens jadis et haissant le monde des humains gisait lui aussi sous les éboulis de glace, aux côtés des seuls amis qu 'il ait jamais eu, ses loups… ; le géant Thor de Phecda Guerrier Divin de Gamma, mort pour l'honneur tout en sachant sa Souveraine manipulée, était abandonné des quelques rares carnivores qui rôdaient dans les parages, son cadavre étant depuis longtemps entrepris par le gel… ; même l'ignoble traître Alberich de Megrez, perfide Guerrier de Delta, qui avait en toute connaissance de la situation profité des faiblesses du Royaume pour s'en emparer, était pleuré dans cette ode jouée par le spectre de son defunt compagnon, mort des suites du conflit, mais librement, dans un combat pour l'honneur contre le Chevalier Phoenix.
Les notes lancinantes chevauchaient les tourments des vents déchaînés. Elles enveloppaient telles des bulles les survivants de la tragique bataille qui s'était achevée par le sacrifice de Siegfried de Dohl, Guerrier d'Alpha, meurtri par la perte de ses compagnons d'armes et aveuglé par l'amour pour Hilda, qui n'avait supporté l'intervention -et les révélations- de son dernier adversaire. Les Chevaliers affaiblis n'étaient plus en état de percevoir la menace qui se dirigeait vers eux, pourtant, eux seuls en eussent été capables, en des circonstances moins extrèmes.
La silhouette, redevenue frêle, d'Hilda de Polaris s'approcha du groupe de Seiya et ses compagnons, qui s'appuyaient les uns sur les autres.

" Je vous prie de m'excuser " ,dit-elle, " Nous avons tous été des jouets aux mains de ce mystérieux individu. Dire qu'il nous a utilisés afin de détruire le Sanctuaire… " Elle se tourna vers Seiya qui portait le corps inanimé de Saori tandis qu'Ikki et Shun le soutenaient tant bien que mal. " Athéna et vous nous avez montré ce qu'étaient vraiment la Justice et le Courage. Notre Royaume sera à jamais endetté envers le Sanctuaire et Ses Chevaliers. La moindre des choses que nous pouvons faire est de vous offrir l'hospitalité, le temps que le climat s'appaise et que vous puissiez rejoindre le Japon. "

Hilda se retourna vers ce qui restait du Templa d'Odin et s'agenouilla. " Partez, les gardes vous accueilleront au château. Quant à moi, je dois reprendre mes prières à Odin. Il me faut pour cela être seule. " Freya s'avança vers sa sœur, inquiète. " Tu ne devrais pas, tu es toi aussi affaiblie et… "

" Non ! Laisse-moi ! Ca me répugne de me montrer une fois de plus dure avec toi, ma sœur, mais même si je te dois à toi aussi des excuses, je les dois avant tout à Odin, à Asgard, au Sanctuaire, et au Monde. Si je suis trop faible pour survivre, telle est la volonté d'Odin… "
" Mais… " commença Freya
" Il n'y a pas de mais. J'ai par ma faute causé la perte de tant de braves, et corrompu leurs destins ; je me dois defaire face seule à mon destin. Ainsi en est-il des prêtresses d'Odin, comme de tous les mortels. Puisse-tu ne jamais devoir affronter une telle situation. "

Le ton déterminé d'Hilda eut raison des protestation de la jeune princesse. Freya baissa les yeux et prit la tête des Chevaliers en direction du château.
Les distorsions dimensionnelles se poursuivaient, plus faiblement, à l'insu de tous.

*****

Aux confins de l'Espace et du Temps, 14 Cosmos aux amplitudes incommensurables fusaient à des vitesses vertigineuses, guidées comme par un phare, visant une cosmo-énergie douce et paisible, somnolante mais d'une puissance remarquable. Alors que dans les dimensions visitées la luminosité se faisait de moins en moins diffuse, les lueurs des yeux étaient rejointes des reflets stridents sur les armures aux formes encore masquées par les ombres et des traits encore indistincts de visages aux rictus revanchards.

*****
La lumière dorée baignait le hall majestueux. Les colonnes de marbre blanc ou bleu ou rose étaient finement ciselées et gravées ; les bas-reliefs des murs racontaient les plus grandes batailles des Temps Anciens ; l'or et l'encens paraient les vases et les meubles en bois d'Erymanthe, fin et noble d'entre tous les bois, disparu depuis plus de douze mille ans.
Un homme athlétique, habillé d'une courte toge et d'une sorte de pagne s'avançait dans le couloir. Au seuil d'une porte immense qui n'avait d'égale que la grandiosité des lieux, l'homme prit de sa main gauche un casque ailé, en or blanc. Il avait dans sa main droite un parchemin roulé.
La porte s'ouvrit. L'homme avança. À ses pieds, de petites ailes frémissaient aux talons de ses sandales.

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Cette fiction est copyright Florent Potel.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.