Chapitre 1 : Les bergers


Jérusalem, 23ème année du règne de l'empereur Auguste

Cela faisait maintenant 3 heures qu'il attendait Gabriel sur les marches du temple et Simon commençait à s'inquiéter du retard de son frère, ou plutôt de celui qu'il avait toujours considéré comme son frère depuis que ce dernier l'avait recueilli suite au décès de ses parents. Ceux-ci avaient péri lors d'une répression aveugle ordonnée par le gouverneur d 'alors suite à une révolte contre "l'allié " romain. L'orphelin âgé d'à peine 5 ans avait alors eu la chance de croiser au milieu des ruines encore fumantes de son village le chemin du jeune berger itinérant prénommé Gabriel. Depuis ce jour Gabriel veillait sur Simon et lui enseignait tout son savoir de berger. Ce savoir était très vaste : Gabriel savait lire, il connaissait le nom de toutes les étoiles dans le ciel, pouvait réciter la bible, il était même versé dans l'art du combat ce qui ne manquait pas de surprendre de la part d'un jeune berger. Ce dernier prétendait avoir acquis cette science au contact des légions romaines et les curieux devaient ce satisfaire de cette explication car Gabriel répugnait à évoquer son passé. Depuis 7 ans que Simon suivait l'enseignement de son frère ce dernier avait toujours fait preuve de la plus grande précision aussi Simon trouvait-il son retard pour le moins surprenant lorsque soudain un cri attira son attention : mais avant qu'il n'ait put comprendre l'origine de ce cri une ombre se jeta sur lui.

Ses années d'entraînement firent alors la preuve de leur efficacité et il envoya l'agresseur voler dans l'étalage d'un marchand. L'agresseur se releva : c'était un homme, grand, robuste, visiblement un paysan mais son regard était étrange, comme animal. Sa bouche restait ouverte dans un affreux rictus carnivore et ses narines expulsaient l'air à la manière d'un taureau féroce. L'homme chargea et Simon le fit à nouveau voler dans le décor. Autour d'eux les gens impressionnés par l'aspect sauvage de l'homme s'étaient écartés formant un cercle. L'homme se releva sans laisser paraître la moindre gêne suite à sa chute puis il chargea à nouveau et subit pour la troisième fois la parade de Simon. Mais l'homme se releva, et la même danse se répéta encore, une fois, deux fois, trois fois, Simon commençait à sentir des douleurs dans ses muscles qui à chaque assaut encaissaient le poids de son infatigable adversaire : il fallait en finir au plus vite en utilisant les techniques enseignées par Gabriel. Mais alors que Simon préparait son attaque, il fut interrompu par une clameur : " place à la troupe ! ".

Les gardes du gouverneur venaient rétablir l'ordre. Ils pointèrent leurs lances sur les deux combattants. L'homme lâcha alors un rire hystérique et alors que les soldats surpris s'interrogeaient du regard, vif comme un serpent l'homme empoigna deux de ses lances et les enfonça entre les yeux ébahis de leurs propriétaires puis profitant de l'effet de surprise brisa la nuque à deux autres soldats. Les survivants horrifiés reculaient et l'homme affichait un air triomphant lorsque Simon, semblant jaillir de nulle part, lui décocha son attaque " galatic clash ". C'était son attaque la plus puissante et bien que Gabriel lui avait interdit de l'utiliser en publique, la sauvagerie de son adversaire avait déchaîné Simon. Fort heureusement Simon la maîtrisait suffisamment pour pouvoir la concentrer sur un adversaire sans atteindre la foule qui, en raison de la vitesse de l'attaque ne s'était rendue compte de rien si ce n'est un déplacement instantané des deux guerriers. Simon se redressa essoufflé mais alors qu'il cherchait du regard le corps de son adversaire sous le nuage de poussière il sentit un mouvement dans son dos. Trop tard : la lance allait le transpercer et alors que conscient de sa mort imminente il esquissait un ultime réflexe de protection, la lance se planta dans son cœur. Non, il était toujours vivant ! Ouvrant les yeux il découvrit alors Gabriel tenant fermement cette lance. Alors ce dernier croisa les mains dans une posture inconnue de Simon et, fermant les yeux, psalmodia une étrange incantation dans une langue mystérieuse. A ces mots l'homme poussa un cri déchirant et s'effondra. Alors que la rue reprenait doucement vie, Gabriel se pencha sur Simon : " Tu n'as rien ? Tu t'es bien débrouillé, je suis fier de toi ". Simon porta alors son regard sur le cadavre de l'agresseur autour duquel les curieux s'étaient agglutinés :

_Il… il est mort ?
_Il était mort bien avant le combat
_Comment çà ?
_En venant j'ai été retardé par trois de ses semblables… regarde ses yeux…"

La foule empêchait Simon d'apercevoir le cadavre mais il se rappelait très bien du regard particulier de l'homme, un regard effrayant comme celui d'un serpent, comme celui de ces êtres des légendes que lui contait Gabriel : un regard de démon !
" Ne restons pas là si nous ne voulons pas avoir à faire à la garde…". Il prit la main de Simon et tous deux s'évanouirent dans les ruelles de Jérusalem.

Rome, capitale de l'empire

Un deuxième barreau céda tout aussi silencieusement que le premier et l'homme drapé de noir s'introduisit dans l'un de ces corridors sombres et humides qui serpentaient sous la préfecture centrale de la capitale impériale. L'inconnu progressait sans un bruit dans la clarté orangée des torches murales qui animaient son ombre le long des murs lisses et interminables sur lesquels résonnaient les bruits de pas d'une sentinelle, loin… trop loin pour l'inquiéter… L'homme continuait sans jamais hésiter, prenant à droite, à gauche puis encore à droite et ainsi de suite… les portes et les intersections défilaient toutes identiques mais pas pour l'inconnu qui visiblement savait où aller. Il s'arrêta enfin devant une petite porte de bois marquée du numéro CVXVI. D'un geste précis et rapide il fit céder la serrure et décrocha une torche du mur avant de franchir le seuil. La pièce était petite, et s'il n'y avait eu cet invraisemblable amoncellement d'objets exotiques emplissant la pièce d'un mur à l'autre, aurait pu faire office de cachot. Comme guidé par une mystérieuse force, l'individu se dirigea droit vers un coin de la pièce et du tas d'objets hétéroclites ne tarda pas à exhumer une petite boîte en bronze. Puis la levant triomphalement il murmura : " Seigneur Azrael ! L'heure de votre triomphe est enfin arrivée ! " avant de l'enfouir sous sa toge et de repartir par le chemin d'où il était venu.

C'était une nuit magnifique pour des bergers mais, auprès du feu qui crépitait, Simon ne voyait plus ces étoiles qui d'habitude le faisaient tant rêver. Depuis l'incident et durant toute la journée, Simon s'était muré dans ces interrogations et ni lui ni Gabriel n'étaient revenu sur l'événement.

_ Simon ! La voix de Gabriel le tira brusquement de ses rêveries. " Tu t'interroges sur ton adversaire de ce matin, n'est-ce pas ?
_Il avait l'air tellement étrange, il paraissait … inhumain.
_Cet homme était possédé Simon
_Comme ce vieil homme qui prophétisait la fin du monde ?
_Non. Ce vieillard n'était qu'un fou. L'homme de ce matin était contrôlé par une entité démoniaque. "

Déjà les implications de ce fait, car Simon ne doutait jamais des propos de son frère, ce faisaient jour dans l'esprit de Simon : les démons, les anges, les anges déchus, les guerres angéliques…

_Ce n'était qu'un démon mineur investissant le corps d'un mort d'une façon très grossière. Le plus grave, je le crains, reste à venir car il ne fait aucun doute que les anges rebelles sont derrière tout cela…
_Mais pourquoi s'attaquer à nous ? Et pourquoi aujourd'hui ? demanda Simon
_Tu te souviens de ce que je t'avais raconté sur les prophéties d'Elie ?
_Il annonçait la venue d'un être exceptionnel, un messie.
_Exactement, que feraient les forces d 'en bas à l'approche de cet événement ?
_ Tu crois que l'envoyé du dieu suprême va bientôt arriver ?
_Oui bientôt, très bientôt…"

" Que les griffes de la mante religieuse te déchirent ! " Malheureusement pour Eligol, l'ange destructeur de la vigueur, ce n'était pas la première fois qu'il employait cette attaque contre cet adversaire et celui-ci n'eut aucune difficulté à l'éviter. Eligol à moitié surpris marqua une pause et sauta sur le toit de la petite ferme puis se redressa tournant le dos à une immense pleine lune laissant ainsi se dessiner la silhouette de son étrange armure. " Saul ! cria-t-il, il est encore temps de reconnaître la supériorité des anges rebelles. Cesse de défendre les hommes et joins-toi à nous, car la bataille qui vient s'annonce comme notre victoire. " Eligol était grand, avec de longs cheveux blonds désordonnés et c'est tout ce que laissaient deviner son armure et son masque facial. Son armure avait l'aspect d'une carapace insectoïde et ses doigts se prolongeaient par d'immenses griffes. Son adversaire paraissait être sa parfaite antithèse : les cheveux bruns et courts, la peau mate, la barbe naissante qui masquait difficilement sa jeunesse et ne portant face à l'armure d'Eligol qu'un simple manteau de paysan.

"_Tu te trompes Eligol et ton attaque est bel et bien la preuve de votre échec : nous vous avons déjà vaincu à de multiples reprises mais vous êtes bornés et aujourd'hui vous revenez en appliquant toujours les mêmes plans pourtant comme ton attaque de la mante religieuse dont j'ai percé le mystère depuis plusieurs incarnations déjà !
_Tu fais erreur mon cher et en voici la démonstration : PAR LES GRIFFES DE LA MANTE RELIGIEUSE ! "

Saul bondit de côté mais alors qu'il esquivait les griffes de son adversaire il sentait ses mouvements de plus en plus entravés et alors qu'Eligol terminait son attaque, Saul réalisa que son corps était prisonnier d'une immense toile d'araignée. " Voilà le petit plus qui va signifier ta fin : alors que stupidement tu évitais mes griffes, celles-ci tissaient autour de toi cette toile qui désormais te rend toute esquive impossible. " Mais Saul se détendit, il souriait même : " La mante se prend pour l'araignée ? Quelque insecte que tu sois, tu as sous-estimé le pouvoir des soldats de Dieu, Eligol ! " Et sur ces mots une aura d'un blanc immaculé entoura l'ange prisonnier alors que la toile s'évaporait et, tandis qu'Eligol pris de panique se ruait toutes griffes déployées sur Saul, celui-ci joignit les mains et lança son attaque : " ANGELIQUE REDEMPTION ! " Une immense explosion de lumière illumina la nuit.

Simon fut réveillé par une soudaine sensation de vertige. Il faisait encore nuit et debout près du feu, l'air soucieux, Gabriel avait le regard fixé sur le lointain.

_Çà y est ! La guerre a commencé… Simon, il est temps de passer à l'épreuve finale de ton entraînement.
_L'épreuve finale ?
_Oui, après cette épreuve tu seras un guerrier à part entière. Suis-moi ! La route est longue et nous n'avons que très peu de temps. "

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Cette fiction est copyright Eric Lhommeau.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.