Chapitre 12 : Nerval, la rose solitaire


Dans la maison du Verseau, le combat avait pris fin. Mélétos, chevalier de la Coupe, avait concentré son énergie et poussé con cosmos à son paroxysme pour réaliser l'impossible et égaler un instant la puissance de son maître…le spectre de la Chauve-Souris avait riposté en lançant, de toute sa force, son cri diabolique sur son adversaire. Le silence s'était fait depuis un moment dans le temple. Un froid épouvantable traversait maintenant l'édifice, un froid si intense que les murs de pierre épaisse qui le formaient s'étaient tous teintés de bleu, de même que les grandes dalles du sol. Les flammes des torches qui donnaient de la lumière avaient gelées sur place, et laissaient derrière elles des stalagmites acérées. Un homme normal n'aurait pas pu entrer en un lieu pareil, il serait mort de froid en une fraction de seconde, même couvert de la protection la plus épaisse.
Mélétos de la Coupe et Desmond de la Chauve-Souris étaient toujours debout face à face, leur corps immobile et devenus totalement bleus, eux aussi. Ils ne parlaient plus, ne bougeaient plus un sourcil. Mais ils pensaient. A leurs maîtres respectifs.

Mélétos : Maître Hippolyte…une fraction de seconde, j'ai réussi à maîtriser votre Exécution de l'Aurore…je n'ai pu garder la vie sauve, mais j'ai rempli ma mission. Je peux mourir en paix, je sais que vous détruirez, aux côtés d'Athéna, les maléfices d'Hadès…Adieu…
Desmond : Maître Rhadamanthe…J'ai échoué…je n'ai pu vous rejoindre…il n'y a désormais plus que vous dans cette grande bataille…j'ai au moins pu emmener avec moi l'un des chevaliers d'Athéna…puissiez-vous réussir…

Les deux corps inertes basculèrent vers l'avant et retombèrent l'un sur l'autre, tels des masses sans vie. En tombant sur le sol, ils éclatèrent en des centaines de morceaux, comme le verre le plus coupant, qui s'éparpillèrent un peu partout sur les dalles de pierre. Il ne restait plus rien du spectre et du chevalier d'Argent.
Non loin de là, dans la salle centrale du Temple, Aritaki, le chevalier de Pégase, allongé depuis un moment sans réaction, bougea une main sur le sol…

Plus haut

Le Grand Pope s'impatientait. Debout sur un des balcons de son temple, dans la nuit douce, il regardait l'Horloge de feu et écoutait le battement paisible des secondes qui s'égrenaient et consumaient, chaque fois un peu plus, la dernière flamme qui brûlait sur l'emplacement du signe des Poissons. Il suivait les combats à distance, captant chaque émission de cosmo-énergie dans les temples, et savait où la bataille en était. Il attendait une issue…proche, toute proche…quelqu'un allait sans doute bientôt franchir la double porte de la grande salle où il se trouvait…à moins que…
Il regarda une dernière fois le temple juste en contrebas du sien, qu'il distinguait au bas d'escaliers réguliers. Le douzième temple des signes du zodiaque. Puis il se décida à rentrer dans la grande salle, et à retourner s'asseoir sur son trône, pour ne plus en bouger jusqu'à l'issue finale.

Archinoald : Mélétos est mort, en emmenant le dernier spectre avec lui…
Il ne reste plus que Rhadamanthe en course !!
Nerval, chevalier à la rose, je compte sur toi !!


Temple des Poissons

Un corps élancé et massif, tout de noir vêtu, s'engouffra à travers les colonnes de l'entrée du Temple. Haletant, la respiration difficile, Rhadamanthe commençait à ressentir les premiers effets de la fatigue. Il avait beau être l'un des Juges des Enfers, il n'en restait pas moins homme et monter les longs escaliers menant au sommet de la montagne sacrée du Sanctuaire d'Athéna, relevait de l'exploit physique. Il eut cependant vite fait de reprendre ses esprits.

Rhadamanthe : Et voilà…ce temple est le dernier…j'en ai presque fini…je n'ai pas une seconde à perdre…dès que je verrai le chevalier qui garde ce lieu, je l'abattrai d'un coup, sans même lui demander son nom…et, ensuite…

Mais, alors qu'il ruminait de telles pensées en lui, il remarqua, à l'intérieur du temple, une sensation de chaleur perceptible, qui contrastait avec celle de froid du temple précédent. Une chaleur douce et agréable, qui n'était pas seulement due à une augmentation de température…mais à une sorte de parfum enivrant, indéfinissable…

Rhadamanthe : Mm, comme cela sent bon, d'un seul coup…mais, pas de temps à perdre. Allez !!

Et il se mit à foncer à vive allure devant lui, en courant de toutes ses forces, sans même se soucier de ce qui pouvait provoquer l'odeur en question. Il n'en avait cure et, de toutes manières, rien n'allait pouvoir l'arrêter dans sa course désormais !!
Il courut ainsi dix, quinze, vingt secondes, et les colonnes défilaient autour de lui, semblant ne jamais devoir s'arrêter…il savait pourtant bien que la sortie allait bientôt apparaître à sa vue…mais, alors qu'il était désormais bien avancé, un bruit de courant d'air, presque impalpable, lui caressa les oreilles en même temps que les narines.

Rhadamanthe : Agh !

Une piqûre à la figure venait de le perturber dans sa course. Il agita sa main gauche devant sa figure, comme si un insecte, un moustique, l'avait dérangé. Mais, en relevant la paume de sa main, il constata que ce ne pouvait en être un. Du sang s'écoulait de son cartilage nasal !

Rhadamanthe : Mais comment est-ce possible ? Oh !

Il regarda au sol et vit une rose rouge flamboyante au sol, devant lui, aux pétales arrachés. Il ne pouvait croire qu'une simple fleur l'avait fait saigner. Mais il ne voulut même pas en savoir plus et se remit à courir, sans se poser de questions…rien ne devait le déranger.
Pourtant, quelques mètres à peine plus loin, un nouveau bruit de frottement d'air se fit…puis d'autres…et une série de roses rouges s'abattirent sur lui, comme surgies de nulle part. Il les chassa avec ses mains et commença à s'énerver.

Rhadamanthe : Grr…rien ne m'empêchera de passer ! Par la Prudence du Wyvern !!

La force brute du coup fut nette et fit éclater tous les pétales des roses, qui tombèrent au sol comme des feuilles mortes. Rhadamanthe continua sa route…mais, cette fois, dans l'obscurité du couloir, faiblement éclairé, une silhouette apparut. On ne distinguait rien de son apparence mais des éclats qui scintillaient dans le noir laissaient deviner une armure aux couleurs vives.

Rhadamanthe : C'est toi qui me lances ces fleurs ridicules ? Et qui veux m'empêcher de passer ? Désolé, je n'ai pas le temps ! Yaahh !!

Le poing vers l'avant, Rhadamanthe fondit sur le chevalier comme un boulet de canon, prêt à transpercer le corps du malheureux sans même prononcer l'incantation de son attaque. Mais, alors qu'il arrivait à sa hauteur, il fut repoussé par un bouclier protecteur invisible et retomba quelques mètres en arrière ! Il se remit très vite sur ses pieds sans perdre de sa superbe, et regarda le chevalier, qui n'avait pas bougé d'un centimètre. Il tenait les mains paumes ouvertes devant lui, et faisait osciller imperceptiblement les doigts pour produire un mouvement d'air duquel une douce odeur s'échappait…une odeur apaisante, d'effluves de roses qui lui chatouillaient les narines…

Rhadamanthe : Je ne sais pas comment tu as fait mais tu vas me laisser passer ! Par la Prudence…
- Roses sanguinaires !!

Les roses se formèrent dans l'aura même du chevalier, apparaissant ex nihilo, et foncèrent sur l'attaque du spectre en annihilant peu à peu celle-ci ! Les deux forces s'annulèrent. Rhadamanthe n'en revenait toujours pas. Il regarda attentivement son adversaire, médusé. Son visage apparaissait maintenant et laissait voir des traits doux et efféminés, aux cheveux blonds mi-longs. De grands yeux bleus d'un regard profond le fixaient attentivement. Son armure était la plus atypique qu'il lui ait été donné de voir au fil des douze maisons. Une armure très couvrante, d'un blanc éclatant, aux reflets roses, et aux contours bordés de pointes en de nombreux endroits. Elle dessinait certainement une rose une fois reconstituée. Rhadamanthe revint sur ses ambitions de franchir le temple sans s'arrêter et convint qu'il allait devoir se battre, même si le combat allait être de très courte durée.

Rhadamanthe : Qui es-tu ?
Le chevalier : Je suis Nerval, chevalier de la Rose, et gardien de ce dernier temple…je te félicite d'être arrivé jusqu'ici, Rhadamanthe…je me doute qu'il s'agit de toi, étant donné que tous les autres spectres ont mordu la poussière…je vois que ton armure est déjà ébréchée en plusieurs endroits, et je vais finir le travail qui a été commencé…
Rhadamanthe : Tu n'espères tout de même pas me vaincre, avec tes roses ridicules ? Et d'abord, qu'est-ce que c'est que cette armure et cet accoutrement ? Tu es bien ridicule !!
Nerval : Si tu étais en mesure de pouvoir traverser ce temple sans même m'affronter, ce serait déjà fait…or, j'ai un gros avantage sur toi, c'est que le temps joue contre toi et ta mission…en effet, je suis le dernier à pouvoir encore te barrer la route, et je me battrai au péril de ma vie…mais, même si je meurs, ce ne sera pas avant que la dernière flamme ne s'éteigne !
Rhadamanthe : Assez parlé, je n'ai pas le temps de discuter !! Par la Prudence du Wyvern !!
Nerval : Dansez, roses sanguinaires !!

Une attaque peu commune s'opposa à la redoutable Prudence du Wyvern. Dans un halo de lumière rose, une pluie de roses rouges surgit de nulle part et fondit sur le spectre. Mais la force de ce dernier était telle qu'il ne pouvait pas y résister longtemps. Il prit toute l'énergie de plein fouet et s'envola dans les airs pour retomber au sol. Il tomba tête la première, mais son casque le protégea et se détacha de sa tête pour rouler sur le côté mais, lorsqu'il se releva entièrement, il ne portait nulle trace de coup apparente.

Nerval : Ahh…quelle force…ce qu'on dit sur ce Rhadamanthe est donc vrai…
Rhadamanthe : Je suis bien surpris qu'un petit chevalier s'en sorte sans dommage ! Tu es tombé sur la tête et ton armure n'a pas une rayure…j'ai détruit la protection de nombre de tes condisciples avec la même attaque…
Nerval : Peu importe ; en attendant, tu n'es toujours pas parvenu à passer…(sourit) Toi qui voulais te dépêcher, c'est raté…(le nargue) l'heure tourne, tourne…tu vas devoir courir plus vite encore que d'habitude…
Rhadamanthe : Grr…tais-toi, insolent ! Je VAIS passer !! Par la Prudence du Wyvern !!
Nerval : Roses Sanguinaires !!

L'attaque de Rhadamanthe fut plus puissante que la dernière fois et balaya le chevalier de la Rose, qui s'envola à nouveau dans les airs. Cette fois, il alla s'écraser de tout son poids contre un mur…mais, de plus en plus curieusement, son armure ne portait toujours aucune marque d'impact. Il ne portait plus son casque et un filet de sang s'écoula de sa tempe. Il retomba lourdement et s'essuya le visage…tandis que Rhadamanthe avait, une nouvelle fois, pris la poudre d'escampette. Mais il entendit un bruit de collision qui le satisfit. Il regarda et vit Rhadamanthe allongé au sol, cogné par un nouveau mur de protection !

Rhadamanthe : Qu'est-ce que cela veut dire ? C'est comme avec l'autre dans le temple du Verseau…il a créé une barrière magnétique qui bloque le passage…si je comprends bien, cette barrière vaudra tant que tu seras en état de te battre…

Et, à sa grande surprise, le chevalier se relevait encore, sans trop de dommage, avec l'intention de continuer le combat. Bien que touché, il avait réussi à supporter l'attaque du spectre sans trop en souffrir. Il faisait brûler son aura, une douce aura d'un rose pâle qui se confondait presque avec ses longs cheveux, d'un blond pâle eux aussi. Le bouclier qui bloquait le passage scintillait de plus en plus, et laissait apparaître la forme de roses immatérielles qui flottaient dans les airs. Une odeur des plus agréables, un parfum délicieux, s'en dégageait…

Rhadamanthe : Qu'est-ce que ça signifie !? Moi, Rhadamanthe, être bloqué par ce minable !!
Nerval (se relève) : Je te l'ai dit…tu sous-estimes toujours tes adversaires…tu te crois toujours capable de vaincre n'importe qui…tu oublies que la force physique ne fait pas tout…la ruse, l'intelligence, l'esprit sont aussi des facteurs importants…et, le plus important de tous…

Et son aura augmenta subitement, comme augmenté par des énergies surgies d'ailleurs.

Nerval : La foi en la justice et la victoire du bien !! Pour Athéna !!
Rhadamanthe : Et puis d'abord, qu'est-ce que c'est que cette armure que tu portes ? Je n'en ai jamais vu de telle…ça ne ressemble pas à de l'argent…de quelle catégorie es-tu donc, chevalier ? Ne me fais pas croire que tu n'es qu'un simple chevalier de bronze !
Nerval : Ni de bronze, ni d'argent, ni d'or, si c'est ce que tu veux savoir…
Rhadamanthe : Comment cela ?? Qui es-tu donc, alors ?
Nerval : Je suis simplement Nerval, chevalier à la rose, et je n'ai pas à répondre à tes questions !! (se concentre) : Roses sanguinaires !!

Une pluie de roses s'abattit à nouveau sur le spectre. Les roses étaient plus puissantes, plus rapides et plus nombreuses que les première fois. Une odeur délicieuse et envoûtante s'en échappait. Mais Rhadamanthe n'en avait cure. Il abattit toutes les roses une par une, à mains nues, tout en avançant devant lui. Il n'avait qu'une seule envie : passer, franchir ce temple, ce dernier obstacle avant la victoire. Mais de nombreuses questions le turlupinaient à présent. Qui était ce chevalier de la rose, quels secrets abritait-il ? Et puis, pourquoi lui et les autres, chevaliers d'argent ou de bronze, et pas les chevaliers d'or ?

Rhadamanthe (abat les dernières roses) : Et voilà ! Tes roses misérables ne sont que d'aimables caresses pour moi ! (nargue Nerval) Ce n'est pas chevalier que tu devrais être, mais jardinier ! Tu as raté ta vocation !
Nerval : Toujours est-il que tu es toujours là, et que tu n'as toujours pas pu passer…
Rhadamanthe : Ce n'est qu'une question de secondes !

Et il concentra son cosmos, décidé à frapper son adversaire d'un grand coup pour en finir au plus vite. Son aura se mit à grandir. Une couleur pourpre foncé, presque noir, qui contrastait avec la douce chaleur rosâtre qui enveloppait le chevalier de la Rose. Son visage disparut presque dans un nuage de cosmos sombre…Lorsqu'il le revit, ses traits avaient changé. Ses yeux assassins semblaient lui lancer des éclairs.

Nerval (pensant) : Quelle force effroyable…Il est vraiment l'un des spectres les plus puissants…peut-être même le plus…on reconnaît bien là l'un des juges des Enfers de la mythologie…
Rhadamanthe : Et maintenant, adieu !! PAR LA TERREUR DU WYVERN !!!

Une détonation retentit dans le temple des Poissons et résonna très loin à l'extérieur, perceptible à plusieurs maisons de distance en contrebas de la montagne. Quelques simples gardes postés en faction devant la maison du Bélier virent même, au loin dans la nuit, une lumière intense éclairer brièvement la douzième maison, et devinèrent qu'il ne pouvait s'agir que d'une déflagration.
Dans le temple des Poissons, lorsque le calme revint, le corps ensanglanté de Nerval de la Rose était allongé au sol, sans mouvement, son armure désormais fissurée en de nombreux endroits. Une expression de terreur se lisait sur son visage figé, les yeux ouverts. Nerval hoqueta toutefois et donna ainsi un signe de vie au spectre.

Rhadamanthe : Il…il n'est pas encore mort, alors que je l'ai frappé avec toute ma force ? Pas le temps de l'achever, je n'ai que celui de m'enfuir !!

Et il tourna les talons et se remit à courir vers la sortie. La protection magnétique qui barrait la passage, semblait avoir enfin disparu. Mais…

- Dansez, roses sanguinaires !!
Rhadamanthe : Ah !!

Par surprise, des roses griffèrent le visage de Rhadamanthe et le firent à nouveau saigner. En un instant, le chevalier de la Rose s'était relevé et remis debout devant son adversaire ! Mais son élégance avait disparu derrière une armure abîmée, un visage rougi par de nombreuses égratignures et des cheveux en désordre.

Rhadamanthe : Tu en veux encore ?? Tu es coriace, tu sais ?!
Nerval : Je…te l'ai dit tout à l'heure…je défendrai ce temple au péril de ma vie…je suis presque sur le point de réussir ma mission…bientôt, la dernière flamme s'éteindra…et tu disparaîtras avec…
Rhadamanthe : Comment ??

La phrase assénée d'un coup avait déstabilisé Rhadamanthe. Le spectre savait qu'il avait douze heures pour parvenir au bout des douze maisons…mais, à y réfléchir, Hadès ne lui avait jamais expliqué ce qu'il devait se passer au terme de ce délai…un instant, il se demanda si ce que Nerval disait n'était pas vrai…

Nerval (sourire) : Alors, spectre d'Hadès, on commence à douter ?
Rhadamanthe : Tu ne m'as pas répondu tout à l'heure…vas-tu enfin me dire qui tu es vraiment ?
Nerval : Cela t'importe t-il tellement ? Je croyais que rien n'était plus important à tes yeux que de franchir cette maison…on dirait que quelque chose te fait peur…
Rhadamanthe : De quoi aurais-je peur ? Ma mission est d'atteindre Athéna dans la chambre sacrée, qui se trouve juste après ce temple, et je suis sur le point d'y parvenir !
Nerval : Je sais que les douze heures que dure cette bataille sont une règle imposée depuis les temps reculés…mais, je ne vois pas pourquoi tu veux tant atteindre Athéna…
Rhadamanthe : Le seigneur des Ténèbres nous a confié une mission…celle d'atteindre Athéna, pour l'emmener avec nous et la forcer à comparaître devant lui ! C'est aussi simple que cela, vois-tu…c'est que je me suis efforcé de faire comprendre à tes petits camarades que j'ai rencontrés depuis la maison du Bélier…et, à cause de leur entêtement, tous ou presque y ont laissé la vie…
Nerval : Et tu crois que, quand bien même tu y parviendrais, Athéna sera disposée à te suivre ?
Rhadamanthe (sourire aux lèvres) : Je vais t'apprendre quelque chose que tu ignores…Athéna est obligée de nous suivre…il s'agit là d'un rite établi depuis l'aube des Temps…la bataille des douze maisons est la première bataille dans la guerre que se livrent Athéna et Hadès…cela qui la remporte prend un sérieux avantage sur la suite des évènements…si j'atteins Athéna avant que la dernière flamme ne soit éteinte, elle est obligée de me suivre…de toutes façons, il n'est pas dans ses habitudes d'attaquer son adversaire…c'est là sa trop grande faiblesse…cet amour aveugle qu'elle porte aux hommes…Mais, assez parlé ! Tu vas enfin me dire qui tu es !! Et où sont passés les chevaliers d'or, qui auraient dû se trouver là depuis le début !!
Nerval : J'ai déjà répondu à ta question…je suis Nerval, chevalier de la Rose…et cette armure que je porte, je la dois au pouvoir de mon maître…
Rhadamanthe : Je n'ai jamais entendu parler d'une constellation de la Rose…si tu n'es pas l'un des 88 chevaliers d'Athéna, d'où te vient cette protection ?
Nerval : Elle est l'émanation du seul pouvoir de mon maître…c'est à lui que je dois tout…son pouvoir est immense…
Rhadamanthe : Dans ce cas, pourquoi n'est-ce pas lui qui se tient en ce moment devant moi, dans cette maison ? Où sont les chevaliers d'or ???

Mais cette dernière question n'eut pas de réponse ; Nerval se contenta de répondre par un sourire satisfait. Il se délectait de faire enrager Rhadamanthe…qui ne put garder longtemps son sang-froid.

Rhadamanthe : Je n'aime pas qu'on me parle ou qu'on me nargue avec ce ton…ton silence en dit long…puisque tu ne veux pas répondre, je vais en finir !! (brûle son cosmos) Tu dois d'avoir survécu à ma dernière attaque, à cette armure que tu portes…je ne sais pas d'où elle sort, mais elle est résistante…mais vois comme j'en suis venu à bout, malgré tout ! A ma prochaine attaque, elle va se briser net et tu ne pourras plus y résister !
Nerval : Il a raison…je n'ai aucune chance de le vaincre…il est trop fort…Mais il faut que je tienne…je dois rester en vie, au moins jusqu'à ce que la dernière flamme s'éteigne…Athéna…donnez-moi la force de résister !!
Rhadamanthe : Allez !! Adieu, chevalier ! Par la Terreur du Wyvern !!
Nerval : Roses Sanguinaires !!

Les roses eurent peu d'effet sur le spectre du Wyvern, qui fondit de tout son corps sur le chevalier de la Rose…il y eut une explosion, moins puissante que la dernière fois…l'armure de la Rose éclata et Nerval s'effondra sur le sol.

Rhadamanthe : Cette fois, c'est la fin ! Ton bouclier protecteur a disparu pour de bon…adieu !

Mais, au moment de se remettre à courir vers la sortie, une vision furtive attira son attention. Nerval rassemblait encore ses dernières forces pour se relever…son armure, brisée sur toute la partie supérieure, laissait apparaître des vêtements…et le chevalier vit, par la forme qu'il dessinait, que Nerval avait des seins développés…

Rhadamanthe : Mais…non, c'est impossible ! Ne me dis pas que tu es… !!

Nerval rougit et mit aussitôt ses mains sur sa poitrine, instinctivement, pour cacher ce que Rhadamanthe venait d'entrevoir…mais le mal était fait.
Rhadamanthe n'en revenait pas, et fulminait. Cet adversaire redoutable, qui le retenait dans le temple des Poissons depuis de nombreuses minutes, l'empêchant de passer…
Lui, le spectre du Wyvern, l'un des trois Juges suprêmes des Enfers, était mis en difficulté par une femme !!

Très loin de là

Non loin du Détroit des Dardanelles, à l'est de la Grèce, un petit groupe de chevaliers venait de gagner la terre ferme, en pleine nuit, après une pénible traversée en barque qui avait vu périr deux d'entre eux, dévorés par des requins. Un spectre de plus avait été vaincu, mais le petit groupe, décidé à gagner la Chine au plus vite, ne comptait plus que huit membres. A la surprise générale, le mystérieux inconnu qui escortait le groupe s'était révélé aux yeux de tous…et un ancien chevalier du Sanctuaire, gardien de l'une des douze maisons, avait fait son apparition. A présent qu'ils avaient franchi le Détroit, ils n'allaient pas tarder à se remettre en route, à travers les montagnes de l'Asie Mineure. Mais tous voulaient savoir. Pourquoi, et comment, était-il revenu ?

Rémos, chevalier du Burin : Jason du Bélier…il est temps de tout nous raconter…comment es-tu revenu ? Pourquoi tout le monde te croyait-il mort depuis des mois ?
Pélops, de l'Autel : oui, c'est vrai ! Lors de la bataille contre Apollon, voilà plusieurs mois, tu avais été retrouvé sans vie dans le temple du bélier, lors d'une épreuve qu'Athéna avait organisée entre les chevaliers d'or et nous autres…je t'y avais affronté amicalement, et je n'avais d'ailleurs jamais pu franchir le seuil de ta maison…
Ganylos, du Petit Cheval : Nous t'avions même enterré, de nos propres mains ! Comment…comment as-tu pu revenir à la vie ?

Des regards dubitatifs fusèrent. Etait-il bien vivant ? Etait-il réellement de leur côté, comme il le prétendait…ou était-il passé aux côtés d'Hadès ? Il y eut de longues secondes de silence, avant que Jason ne se décide enfin à parler.

Rémos : Alors ?? Parle ! Raconte-nous ce qui s'est passé !!

Mais, à cette sollicitation, Jason eut du mal à répondre…une larme coula même discrètement sur sa joue. De douloureux souvenirs lui revenaient en mémoire.

Jason : Il y a de cela plusieurs mois, en effet, lors de l'Epreuve qu'Athéna avait organisée, vous aviez tenté de traverser les douze maisons, pacifiquement, et la mission des douze chevaliers d'or était de tester le niveau des chevaliers de bronze et d'argent de l'armée de la déesse, pour déterminer lesquels l'accompagneraient dans sa garde rapprochée, face à son ennemi…

Tous s'étaient arrêtés de parler et l'écoutaient maintenant attentivement, immobiles. Allaient-ils enfin comprendre ?

Jason : …Alors que cette Epreuve battait son plein, j'ai commencé à observer un comportement étrange chez un dénommé Baruch, alors chef de la garde spéciale des soldats du Grand Pope…Ce Baruch venait très souvent dans mon temple sans me demander la permission, en prétextant à chaque fois être missionné par le Grand Pope…il observait les combats de l'épreuve, caché à travers les colonnes de mon temple, et je commençais à m'étonner d'un tel comportement…Les autres chevaliers d'or, avec qui je discutais, n'avaient rien remarqué d'anormal. Un jour, j'ai alors décidé de l'interpeller, pour savoir enfin ce qu'il voulait précisément. Mais il s'est alors enfui…et j'ai décidé de le suivre…
Rémos (coupe Jason) : …Ce Baruch, c'était bien ce dénommé Moebius contre qui Doko s'est ensuite battu à Delphes ? Celui qui avait usurpé l'identité du vrai serviteur du Pope ?
Jason : Oui…Baruch, comme le Pope, portait un masque et il était donc impossible de savoir qui se cachait vraiment dessous…mais je commençais à avoir des soupçons…et je l'ai alors suivi…il est sorti du Sanctuaire…et a pris la direction de Delphes…malgré mon peu d'expérience, j'avais entendu parler, par le Grand Pope lui-même, des guerres qu'Athéna avait livrées contre Apollon par le passé…j'ai alors compris…le vrai Baruch avait été tué…un imposteur avait pris sa place…quelqu'un qui voulait comploter contre Athéna…Il a retiré son masque, une fois à Delphes…et, presque sous mes propres yeux, a libéré Apollon et Artémis de leur sommeil…
Astyanax, du Fourneau (l'interromp encore) : Mais…tout cela, nous le savons déjà…quel rapport avec cette guerre contre Hadès ? Comment es-tu revenu à la vie ?
Jason : …Le comportement de ce Moebius était étrange…comme si quelqu'un possédait son esprit…je me suis dit que ce ne pouvait être qu'Apollon lui-même…mais, en le voyant face à ce dernier, j'ai compris que cela était quelqu'un d'autre…une fois que le sceau s'est déchiré de l'urne, Apollon est revenu à la vie, et a rassemblé peu à peu ses sept Phébus…en faisant de Moebius l'un d'entre eux…mais…

Sa voix se troubla alors, tout à coup.

Jason : C'est alors qu'il est apparu…
Les autres : Mais qui ?? Explique-toi !!
Jason : Vous ne comprenez donc pas ? Hadès, le seigneur des Ténèbres !! Il était là depuis le début !! C'est lui qui a commandé à ce Moebius d'aller libérer Apollon !!

Un éclair de lucidité traversa alors le regard des sept chevaliers qui écoutaient parler Jason.

Jason : J'entendais sa voix résonner dans le vide…bien qu'à l'état d'esprit immatériel, Hadès pouvait se manifester…il communiquait directement avec Moebius, en lui parlant…une voix d'outre-tombe, mais qu'on ne pouvait confondre avec une autre…je l'ai écouté, caché derrière des piliers du temple de Delphes…il parlait de sa prochaine résurrection, expliquant qu'une nouvelle guerre sainte était imminente...Moebius était un véritable pantin, il faisait tout ce qu'Hadès lui commandait, presque vidé de son esprit…son pouvoir de contrôler les esprits est immense…
Rémos : Mais…pourquoi Hadès lui a-t-il demandé de ressusciter Apollon ?
Jason : Pour affaiblir l'armée d'Athéna, tout simplement…il s'est dit qu'une première bataille d'Athéna contre Apollon causerait la mort de nombreux chevaliers de son armée…il augmenterait ainsi ses chances de remporter la victoire…Apollon avait déjà affronté Athéna par le passé, à plusieurs reprises…il ne devait plus jamais ressusciter, après qu'Athéna l'ait enfermé pour de bon, à l'aide du pouvoir du chevalier des Gémeaux…mais le seul ennemi qu'Athéna ait jamais eu, c'est Hadès !!

A la prononciation du nom, tous frémirent un instant, et se rendirent compte…la véritable bataille ne faisait que commencer…

Jason : …Cette première bataille de Delphes n'a été qu'un prélude…plusieurs chevaliers d'Athéna y ont déjà laissé la vie…Hadès a presque réussi ce qu'il souhaitait…
Pélops : Mais !! Tu savais tout cela !! Tu connaissais l'imposture de Baruch, ou plutôt de Moebius !! (Scandalisé) Pourquoi n'as-tu jamais averti Athéna ou le grand Pope de tout cela ? Pourquoi n'as-tu rien fait pour empêcher cette bataille ?
Jason : …Calmez-vous…je reconnais que c'est là mon erreur…(regarde le ciel sans étoiles) Qu'Athéna me pardonne…j'avais bien l'intention de prévenir Athéna, avant qu'il ne soit trop tard…mais, malheureusement, alors que Moebius s'apprêtait à regagner le Sanctuaire, après avoir ressuscité Apollon, je me suis fait repérer…
Rémos : Quoi ?? Il t'a vu ??
Jason : Oui, hélas…je ne me le suis jamais pardonné…il a vu que je l'espionnais…j'ai juste eu le temps de me sauver, à mon tour, mais, désormais, il savait que je savais…j'étais devenu un témoin gênant pour la réalisation de ses desseins…
Astyanax : Alors il t'a tué !! Il est venu te trouver et…
Rémos : …Mais comment es-tu revenu à la vie ? Et avec cette armure ?
Jason (scandalisé à son tour) : Pourquoi voulez-vous que je sois revenu à la vie étant donné que je ne suis jamais mort ??

Tous furent interloqués devant une telle révélation !

Jason : Croyez-vous qu'un vulgaire combattant de seconde main peut abattre un chevalier d'or de cette manière ? Jamais ce Moebius n'aurait été en mesure de le faire !!
Les autres : Mais alors !!
Jason : C'est là que j'ai pris une décision, une initiative…je savais que Moebius allait venir me trouver pour essayer de me tuer…mais je savais aussi que la menace d'Hadès était plus que jamais présente…il pouvait en profiter pour attaquer le Sanctuaire en l'absence d'Athéna…
Je me suis alors dit que, puisque ce Moebius s'était infiltré dans le Sanctuaire…j'allais faire comme lui…pour espionner Hadès !!
Astyanax : Comment ??
Jason : Je le reconnais…j'ai pris de gros risques…et Athéna ne me pardonnera peut-être pas mon geste, lorsqu'elle l'apprendra…lorsque Moebius est venu me tendre une embuscade, dans la maison du Bélier, je me suis laissé toucher, sans réagir…j'étais blessé, mais jamais ce guerrier n'aurait pu me tuer…j'ai donc simulé la mort…

Parmi les sept chevaliers composant son auditoire, la plupart commençaient à le regarder avec un sentiment de traîtrise.

Jason : Oui, je sais ce que vous pensez…je suis peut-être un déserteur…mais, une fois que tout le monde me croyait mort et enterré, Athéna comme Hadès, j'avais le champ libre pou agir…j'avais toutefois pris mes précautions…pour défendre la maison du Bélier, j'avais déjà désigné Sion comme mon digne successeur…lors de l'Epreuve d'Athéna, j'ai pu constater à quel point il surpassait la puissance d'un chevalier d'argent…il portait alors l'armure d'argent de la Fleur de Lys, et je savais qu'il mériterait de porter l'armure d'or du Bélier…il a par la suite confirmé ce que je pensais, et ne m'a pas déçu…

En pensant à Sion, il eut alors une nouvelle larme qui perlait sur sa joue, mais se reprit vite. Toutefois, les autres chevaliers n'étaient pas encore tous satisfaits par les explications.

Ganylos : Mais à quoi cela t'a-t-il servi de rester caché pendant tout ce temps ?? Alors qu'il t'aurait suffi d'abattre ce Moebius, et de révéler à tout le monde sa traîtrise ??
Jason : Vous oubliez qu'à ce moment-là, Apollon était déjà réveillé !! Autrement dit, la bataille contre lui était déjà en marche, et il n'était plus possible de l'éviter ! Une fois que j'ai été mis en terre, je suis ressorti de la tombe qu'on croyait m'avoir donnée…et j'ai recommencé à suivre Moebius. A ma grande surprise, il ne s'est pas dirigé vers Delphes tout de suite…mais il a pris la route de l'est, celle que nous empruntons en ce moment même !!
Rémos : Tu veux dire que… !
Jason : Oui !! Hadès avait le véritable contrôle de l'esprit de Moebius, et l'a ramené à lui dans un premier temps !! J'ai donc pu le suivre…c'est ainsi que j'ai pu découvrir l'entrée du Royaume des Enfers !! Il est, en principe, impossible à quiconque de pénétrer en vie dans ce royaume…mais j'ai tout de même réussi à y pénétrer, en pistant Moebius…
Astyanax : Ne nous dis quand même pas que c'est là que tu es resté caché pendant plusieurs mois ??!
Jason : Vous le croirez ou non…mais j'ai pu observer les allées et venues de tous les spectres du seigneur des Ténèbres…et j'ai appris quantité de choses à leur sujet, qui pourront nous servir dans cette guerre sainte…bien sûr, je ne pouvais pas me montrer et tenter de les affronter, car j'étais seul et, sans Athéna, j'aurais été mis à mort pour de bon…mon entreprise aurait échoué…

Tous les éléments du récit commençaient à coïncider, et la clarté se faisait peu à peu…mais, une dernière question, d'importance, restait à poser.

Pélops : Pourquoi, si tout ce que tu dis est vrai, es-tu revenu au Sanctuaire, caché ?
Jason : Je pensais que les chevaliers d'or s'y trouveraient…je n'avais pas pensé qu'Athéna aurait pu prendre les devants et partir d'elle-même en Chine…je devais absolument parler à Doko de la Balance…
Galynos : Et pourquoi cela ??
Jason : Il porte un lourd secret, qu'il ignore…et, indirectement, il est à l'origine de cette guerre sainte contre Hadès…il faut absolument l'avertir, avant qu'il ne soit trop tard…
Pélops : Comment ça ?? Qu'est-ce que tu veux dire ?

Mais, à cette ultime question, il n'y eut pas de réponse. Jason s'abstint de répondre.

Jason : Navré mais, à cette question, je ne peux répondre…du moins, pas pour l'instant…il faut absolument que nous le retrouvions, lui et Athéna !! A présent, je vous ai tout dit. Vous devez me faire confiance. Remettons-nous en route, et ne ménageons pas nos efforts !!
Les autres : Oui !!

Et le groupe se remit à courir, comme si la traversée du Détroit des Dardanelles n'avait été qu'une pause anodine. Mais une dernière chose laissait Pélops perplexe.

Pélops : Attends, Jason !
Jason : Quoi ??
Pélops (curieux) : Je me demandais juste d'où te venait cette armure que tu portes…quel est le métal qui la compose…
Jason : Oh…même si Sion a revêtu l'armure d'or, je reste, comme lui, chevalier d'or du Bélier...comme tu le sais, le chevalier qui porte cette armure a le pouvoir de redonner vie aux armures mortes, abîmées après un combat…mais ce pouvoir permet aussi de les recréer…disons que celle que je porte est une reproduction…je l'ai forgée moi-même, d'un mélange sibyllin de plusieurs matériaux qui entrent dans la composition des armures d'or…même si ce n'en est pas une, sa solidité est presque la même…voilà pour répondre à ta question…

Et, quelques instants plus tard, huit étoiles filantes avaient fui vers l'Est.

Rémos (pensant) : Il n'a pas tout dit…il a gardé pour lui un secret, qu'il n'a pas voulu nous révéler…de quoi peut-il donc s'agir… ?

Temple des Poissons

Rhadamanthe : Une femme…j'ai été malmené par une femme…

Le spectre du Wyvern, avec un mépris non dissimulé, regardait son adversaire au sol, blessée, qui avait révélé un lourd secret.

Rhadamanthe : Et d'abord, je croyais que les femmes chevaliers devaient porter un masque !! Cela n'est-il pas vrai ? Comment cela se fait-il que tu n'en aies pas ?
Nerval (tente de se relever) : Personne…dans ce Sanctuaire, à part mon maître, n'en a jamais rien su…tous me croyaient homme…il n'est pas facile pour une femme, dans ce monde, d'être prise avec considération…Je crois malgré tout t'avoir prouvé, à présent, que j'ai ma place parmi les chevaliers d'Athéna…
Rhadamanthe : Tu es malgré tout mal en point…et ton armure en miettes…elle a été résistante, je l'admets, et t'a permis de tenir bon jusqu'ici…mais, à la prochaine attaque, tu n'y résisteras pas !! Je vais te tuer !!
Nerval : Je te l'ai dit…je n'ai pas peur de mourir…car je remplirai ma mission, malgré tout…

Et, tandis qu'elle parlait, un très léger bruissement résonna depuis l'extérieur du Temple. La flamme du Poissons commençait à vaciller !! Il devait rester vingt minutes tout au plus, désormais…l'échéance approchait…et Nerval pouvait se délecter de sentir une tension nerveuse dans les muscles de son adversaire.

Nerval (fait brûler son cosmos) : Rhadamanthe !! Tu es toujours mon adversaire !!
Rhadamanthe : Plus pour longtemps !! Je dois passer ce temple et tu ne m'en empêcheras pas !! Par la Prudence du Wyvern !!

Le coup partit du poing du spectre comme un éclair jaillissant soudainement…mais Nerval ne voulait pas faiblir…un instant, juste un instant, elle devait tenter l'impossible…pour intensifier son cosmos comme jamais auparavant…

Nerval (pensant) : Il y a une règle dans la chevalerie d'Athéna…un même coup ne marche pas deux fois sur un chevalier…j'ai déjà reçu cette attaque plusieurs fois…même s'il est peut-être plus puissant qu'un chevalier d'or, il ne fait pas exception à cette règle…Athéna !! Prêtez-moi votre force, une fraction de seconde !!

Et, en un temps imperceptible, Nerval se concentra et joignit les deux paumes de ses mains ouvertes, pour recevoir la Prudence du Wyvern…la déflagration fut impressionnante…Nerval reculait, ses pieds glissaient sur le sol et la poussaient vers l'arrière…elle grimaçait, les yeux fermés…et pourtant…
Elle tint bon ! Son armure ne pouvait plus la protéger, et elle s'écroula à nouveau sur le sol, épuisée…pourtant, son cosmos se remit à briller aussitôt…et ses mains bougèrent doucement…
L'attaque fit demi-tour et partit vers Rhadamanthe !! Lequel, saisi, ne put l'éviter et fut frappé en pleine poitrine. Elle n'était plus aussi puissante que la première fois et il s'en sortit sans dommage, ni pour son corps, ni pour son surplis…Mais une telle chose tenait du miracle !!

Rhadamanthe (yeux écarquillés) : Mais comment !! Comment une femme peut-elle avoir la force de me renvoyer la Prudence du Wyvern ??
Nerval (se relève encore) : Alors, Rhadamanthe ? Quel effet cela fait-il de recevoir sa propre attaque ??
Rhadamanthe : Grr…tu es finie, Nerval de la Rose !! JE VAIS TE TUER !! PAR L…
Nerval : Voici le parfum de la Rose !!

Avant que Rhadamanthe n'ait eu le temps de dégainer et de prononcer son attaque une nouvelle fois, Nerval envoya une rose rouge vers lui. La rose éclata dès qu'elle arriva au niveau de son visage…mais un parfum délicieux se répandit, interrompant Rhadamanthe dans son entreprise. Il paraissait désormais sans expression, comme s'il s'était mis à dormir les yeux ouverts.

Nerval : Ceci n'est pas vraiment une attaque…les roses d'Alrisha ont le pouvoir de raconter des histoires…en voici une pour toi…médites-là un instant…

Dans la tête de Rhadamanthe, les images se déformèrent, se reformèrent…il n'était plus dans le temple des Poissons. Un nouveau décor avait fait son apparition. Une vaste prairie, dans les faubourgs d'Athènes, inondée de fleurs. Des marguerites, des violettes à perte de vue…et une roseraie au bord d'une maison. Une cabane de pierre et de mois mêlés, isolée, au beau milieu de la prairie.
Une fillette d'une dizaine d'années, aux longs cheveux blonds et à la robe blanche, jouait dans les fleurs, faisant des bouquets de toute sorte, avec des papillons pour compagnie. Une enfance insouciante…ses parents étaient dans la cabane, au milieu de la prairie, et l'attendaient pour manger bientôt…
Soudain, une odeur suspecte vint chatouiller les narines de la petite fille. Ce n'étaient plus des fleurs mais…une odeur de bois brûlé. Elle se retourna. La cabane où elle vivait était en feu !!

La fillette : Papa !! Mamaaannn !!

Elle courut de toutes ses forces en laissant tomber le bouquet qu'elle composait. Elle trébucha sur un caillou, se releva et se remit à courir…alors qu'elle arrivait au niveau de la cabane, elle vit plusieurs chevaux s'enfuir. Des hommes les montaient et se sauvaient en hurlant de satisfaction. Des pillards, une fois de plus…la région en était pleine, en cette période. Mais leurs méfaits ne se limitaient pas à dérober les biens de leurs proies. La cruauté les poussait à semer la mort et la désolation en guise de signature.

La fillette parvint à la maison, mais ne put y pénétrer, les murs étant dévorés par les flammes. Elle sanglotait bruyamment. Elle savait ce qui venait de se passer. Et ce qu'elle trouverait dans les restes de la maison, une fois tout le bois brûlé.

Quelques heures plus tard…après avoir pleuré toutes les larmes de son corps, allongée dans les fleurs, la fillette pénétra dans le tas de pierres qui constituait les restes de sa maison. Elle chercha ses parents, les appelant désespérément, comme persuadée qu'ils allaient lui répondre. Mais il ne restait rien, sinon des tas de cendres éparpillées. Rien qui aurait pu lui indiquer les restes de deux corps calcinés. L'isolement de la cabane, au beau milieu de la prairie, laissait la fillette désormais livrée à elle-même…
Pourtant, près d'un mur de la maison, à l'extérieur, l'enfant découvrit un parterre de roses, que cultivait son père, et qui avait survécu à l'incendie. Des roses rouges comme le sang, qui brillaient d'un éclat particulier en cet après-midi ensoleillé.
Intriguée par ce miracle de la nature, elle voulut cueillir l'une des roses pour la déposer à l'endroit où ses parents avaient péri. Mais, au moment où elle tendait la main, elle vit une silhouette massive apparaître et former une ombre devant elle. Elle se retourna et vit un homme, grand et corpulent, se tenir derrière elle ! Saisie d'effroi, pensant que les pillards étaient revenus, elle se sauva en hurlant et se cacha derrière les pierres d'un reste de mur. L'homme insista, avec une voix douce.

L'homme : N'aie pas peur…je ne veux pas te faire de mal…(s'approche)
La fillette (sanglotant) : Laissez-moi !! Allez-vous en !!
L'homme : Je…je veux seulement t'aider…

Deux jeunes garçons de son âge, une dizaine d'années, apparurent derrière lui, et vinrent à la rencontre de la fillette pour lui parler. Le contact finit par se faire et la petite fille commença à parler et à raconter ce qui était arrivé.

La fillette : …mais vous ne m'avez toujours pas expliqué…que faisiez-vous ici, au milieu de cette prairie ?
L'un des garçons : Nous nous promenions avec maître Alrisha pour chercher des fleurs…il adore jardiner et cultive des roses…nous avons vu une roseraie près d'ici, et nous voulions seulement savoir à qui elles étaient…
La fillette : Maître Alrisha …? (Regarde l'homme) C'est votre maître d'école ?
Garçon 2 : Oui et non…il ne nous apprend pas à lire, mais à nous battre !! C'est un des hommes les plus forts du monde, et nous voulons être comme lui quand nous serons grands !! Nous nous entraînons très dur pour cela !!
La fillette : Si j'avais été forte, moi aussi, peut-être que j'aurais pu affronter les pillards qui ont tué mon père et ma mère …!!
Alrisha (s'approche) : Nous ne pouvons pas te laisser là…nous allons t'emmener dans la ville d'Athènes, et te confier à un orphelinat…tu y seras en sécurité…
La fillette : Non !! Je ne veux pas !! Apprenez-moi à me battre, moi aussi !! Emmenez-moi avec vous !!
Alrisha (gêné) : Tu sais, l'endroit où nous habitons n'est pas vraiment pour les petites filles…tu serais bien mieux…
La fillette : Non !! Dans ce cas, je m'habillerai en garçon, et personne ne saura qui je suis vraiment !!

Finalement, les deux petits garçons supplièrent leur maître Alrisha d'accepter…el la petite Nerval s'installa au Sanctuaire d'Athéna avec sa nouvelle famille d'adoption, devenant une apprentie d'Alrisha, chevalier d'or des Poissons…il n'y avait plus d'armure pour elle à conquérir parmi les quatre-vingt huit que possédait l'armée d'Athéna, mais son maître lui avait promis de la faire devenir chevalier, malgré tout…et, un jour…

Plusieurs années avaient passé, et la fillette était devenue une jeune femme, belle bien que s'efforçant de masquer toute trace de sa féminité. Sa poitrine était comprimée par des bandages qu'elle dissimulait sous sa chemise de tissu. Son corps portait de nombreuses blessures et cicatrices d'affrontements passés, et les traits de son visage s'en trouvaient endurcis. La scène se passait un soir, dans une grande roseraie, quelque part dans une montagne. Face à elle, le même homme que des années auparavant, mais quelques cheveux en moins, et les premières rides faisant leur apparition sur le coin de ses yeux, quand il souriait.

Alrisha : Le moment est venu pour toi de me montrer les progrès que tu as fait…tu connais tout du pouvoir des roses, et il est temps que tu me montres ce que je t'ai appris…
Nerval : Dans ce cas…Par les Roses Sanguinaires !!

Des quantités de roses apparurent de ses mains, surgies de nulle part, et tourbillonnèrent avec force et élégance en direction d'Alrisha. Une pluie qu'il savait arrêter facilement…et qu'il contra par une attaque plus personnelle.

Alrisha : Dansez, roses Piranhas !!

Des roses noires jaillirent de son cosmos et firent éclater toutes les roses rouges qui passaient sur leur chemin. Les roses semblaient être plus que des végétaux, et dévorer les obstacles sur leur passage. Elles devinrent si nombreuses que certaines allèrent toucher Nerval. Mais la jeune femme concentra son cosmos…

Nerval : Yaahh !!

Elle fit exploser celui-ci et aucune des roses noires d'Alrisha ne parvint à l'atteindre…les deux attaques s'étaient annulées d'elle-même.

Alrisha (ravi) : Impressionnant, vraiment…
Nerval (dépitée) : Maître ! Je n'aurai jamais le pouvoir de vous imiter, et de produire des roses noires, comme vous…
Alrisha : Détrompes-toi, tu possèdes une très grande force, et la facilité avec laquelle tu t'es défaite du piège des roses Piranhas, en témoigne. Tu viens de me prouver que tu es digne de rejoindre les rangs d'Athéna…

Et Alrisha concentra son cosmos dans ses deux mains. Une énergie intense, comme il n'en avait jamais vue, qui dégageait une chaleur brûlante. Le corps de Nerval fut enveloppé de cette chaleur, qui ne lui causa toutefois aucune sensation. Bientôt, une armure d'un blanc tirant sur le rose, apparut comme par enchantement et recouvrit chaque partie de son corps. Nerval était devenu chevalier !

Nerval : Mais… !! Quelle est cette armure ??
Alrisha : Elle émane de mon pouvoir…tout comme des roses, je peux également matérialiser cette protection, lorsque je suis en danger…elle est l'essence même de ma cosmo-énergie, et je te l'offre. A partir de maintenant, tu es le chevalier de la Rose !!

Les images se déformèrent, se firent plus floues…tout disparut…et Rhadamanthe se retrouva à nouveau, les yeux ouverts, conscient, dans le temple des Poissons.

Rhadamanthe (reprend ses esprits) : Agh !!
Nerval : Alors, spectre ? Qu'est-ce que cela t'inspire ? Tu connais mon histoire, désormais…
Rhadamanthe : C…combien de temps suis-je resté dans cette léthargie ?
Nerval : Oh, quelques secondes à peine, rassures-toi…je n'ai, hélas, pas le pouvoir de retenir ton esprit plus longtemps…mais tu sais maintenant combien est grand le pouvoir d'Alrisha des Poissons !
Rhadamanthe : Je comprends mieux maintenant…tu n'es pas l'un des 88 chevaliers officiels d'Athéna…tu n'es qu'un " ajout " de sa part…mais tu l'as dit toi-même, tu dois tout à ton maître !! Et j'ai déjà brisé ta magnifique armure, tu n'as donc plus rien pour te défendre !!

Rhadamanthe concentra aussitôt son cosmos…mais en dégageant une force plus puissante que d'habitude…Nerval pouvait palper son cosmos…il semblait devenir plus puissant que celui des chevaliers d'or…

Nerval : J'ai épuisé tous mes recours pour le retenir…je ne peux plus rien faire…cette puissance…à la prochaine attaque, je vais sans doute y laisser la vie…mais j'ai accompli ma mission…grand Pope…il ne reste plus que vous…
Rhadamanthe : Comme tu le sais, je n'ai plus le temps de rester ici, et j'ai une mission à remplir !! Adieu, femme !! PAR LA TERREUR DU WYVERN !!!

Une véritable boule de feu explosa dans la maison des Poissons et résonna loin à l'extérieur. Une lueur orangée éblouit tout l'intérieur du temple…et, lorsque le calme revint, Rhadamanthe, triomphant, se tenait devant le corps ensanglanté et agonisant de Nerval, chevalier de la Rose, qui vivait ses derniers instants.

Rhadamanthe : Et voilà…tu as été coriace, mais j'ai finalement réussi…j'ai abattu le dernier chevalier qui protégeait encore les douze maisons…(se tourne vers la sortie) Et maintenant… - Par le Poing de Pégase !!

Le coup surgit du fond du temple, du côté de l'entrée, et, avec l'effet de surprise, Rhadamanthe ne put l'éviter, bien qu'il s'en sortît sans la moindre égratignure. Aritaki, le chevalier de bronze de Pégase, venait de faire son apparition…

Rhadamanthe : Ce n'est pas vrai !!Encore ?!? (Ulcéré) Mais quand ce microbe va-t-il enfin mourir ??

Les deux adversaires étaient à nouveau face à face.

Aritaki : Eh bien, Rhadamanthe, notre combat n'est pas fini !!
Rhadamanthe : Maintenant, il l'est !! PAR LA PRUDENCE DU WYVERN !!

Le corps d'Aritaki fut balayé comme un fétu de paille et son armure, déjà abîmée par les précédents combats, se fissura un peu plus au niveau du plastron. Il s'écrasa sur un mur et retomba au sol de plus belle.

Rhadamanthe : Allez ! Adieu, chevalier de la Rose !! C'en est fini de cette bataille des Douze Maisons ! J'ai atteint mon but !! A nous deux, Athéna !!

Il se mit alors à courir vers la sortie…mais, alors qu'il avait fait plusieurs pas, il entendit un rire derrière lui. Il vit Nerval de la Rose qui riait en hoquetant convulsivement, dans les premiers spasmes de la mort.

Rhadamanthe : Quoi ?? Pourquoi ris-tu, alors que tu vas mourir ??
Nerval (dans un dernier murmure) : Tu crois avoir ga…gagné…mais tu te trompes…tu risques…d'avoir une surprise désagréable…en atteignant la chambre du Gr…Grand Pope…
Rhadamanthe : Quoi ?? Mais pourquoi donc… ?
Nerval : Athéna…ne s'y trouve pas ! Ha ha ha ha…oh…

Et le chevalier de la Rose rendit son dernier soupir.

Rhadamanthe : Comment ça…(fulmine de rage, un frisson dans le dos) Qu'est-ce qu'elle a voulu dire… ??
Athéna serait…
(serre les poings avec force) Grr…NON !! ELLE MENT !!!

Et il se mit à courir à toute allure vers la sortie du temple. Il n'y avait plus aucune barrière de protection qui l'empêchait de passer. Il atteint la sortie du temple en quelques instants à peine, et plongea dans la nuit noire.
Devant lui, il restait quelques escaliers à gravir pour parvenir quasiment au sommet de la montagne. Et, au bout, un temple, plus large, massif et somptueux que les douze autres qui le précédaient.
La chambre du Grand Pope.

Rhadamanthe : Je n'ai pas fait tout ça pour rien !!
Me voila, Grand Pope !!

Et il se mit à courir à toute allure en gravissant les marches trois par trois. Dans son empressement, il n'avait pas remarqué qu'Aritaki de Pégase s'était encore relevé et qu'il le poursuivait à distance, derrière lui…

Sur l'Horloge de feu, non loin de là, la dernière flamme commençait à vaciller…

Chapitre précédent - Retour au sommaire - Chapitre suivant

www.saintseiya.com
Cette fiction est copyright Christophe Becquet et Fabrice Willot.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.