Chapitire 3 : La Terre des Rêves


Sanctuaire d'Athéna - Grèce - Dans les mêmes temps.

Shun avançait d’un pas tranquille dans l’antichambre du palais. Ses pas résonnaient sourdement sur le sol dallé et le son se répercutait sur les hautes voûtes de la salle. Il portait sa tenue habituelle : tee-shirt et salopette et marchait lestement vers la salle du Pope, curieux de connaître la raison pour laquelle on l’y demandait lui. Cinq jours avaient passé depuis le départ de Hyôga du sanctuaire. Saori avait envoyé Jabu et Natchi en Russie en mission de reconnaissance et aux dernières nouvelles, ils n’avaient trouvé aucune trace des mystérieux chevaliers filmés par la fondation. Et pendant ce temps-là, les autres chevaliers rongeaient leur frein au sanctuaire, impatient qu’un nouveau rebondissement vienne débloquer l’affaire. Ikki était particulièrement furieux : on l’avait fait appeler d’urgence et voilà que cela était pour attendre ! Il cachait mal sa mauvaise humeur et Shun le soupçonnait même de ne pas essayer. Heureusement, les occupations – à défaut de distractions – ne manquaient pas au sanctuaire. Les derniers jours passés ici avaient permis aux quatre amis de faire plus ample connaissance avec les autres chevaliers et dans d’autres conditions que des guerres éprouvantes. Ils s’étaient également promenés dans les camps d’entraînement où ils avaient donné quelques leçons aux nouveaux apprentis à la demande de Mu et d’Athéna. En fait, ils n’avaient pas vraiment le temps de s’ennuyer mais malgré tout, ce qui attirait véritablement leur attention restaient les chevaliers Kiaï.
Shun parvint enfin devant l’immense porte de la salle du Pope. Deux soldats y montaient la garde et le saluèrent avec respect.

- La princesse m’a fait demander. Je suis Shun d’Andromède.

Ces dernières paroles firent sourire le garde : il savait bien qu’il était Shun d’Andromède ! A présent au sanctuaire, les cinq chevaliers de bronze jouissaient d’une plus grande notoriété que les chevaliers d’Or eux-mêmes et chacun avait son favori parmi les cinq amis. Le garde ouvrit la grande porte et s’effaça devant Shun avant de clamer :

- Le chevalier Shun d’Andromède !

Shun qui n’était guère habitué à tant de civilités s’avança timidement dans la grande salle en direction du trône. Saori y était installée et se trouvait en grande conversation avec Mu et Shaka. Le jeune chevalier une fois arrivé devant le trône ploya le genou en disant :

- Vous m’avez fait appeler, princesse. Je suis à votre service.

Les deux chevaliers d’Or partirent d’un bon rire.

- Eh, bien, quelle courtoisie mon garçon !
Pour le coup, Shun se trouva stupide.
- Allons Shun, remets-toi, intervint Saori. Je t’ai fait venir ici car j’ai une mission pour toi.

Shun se redressa avec surprise.

- Une mission ?

- Exactement. Comme tu le sais sûrement déjà, la patrouille que j’ai envoyée en Russie n’a rien donné. Nous avons pensé que vu l’emplacement présumé de cet ordre de chevalerie, à savoir la Russie du nord, l’aide de Hyôga qui est du pays nous serait extrêmement précieuse. C’est pourquoi je te demande de te rendre en Sibérie et de convaincre Hyôga de t’aider dans tes recherches…

- Laissez moi y aller à sa place !

Tous se retournèrent et virent la haute stature d’un homme se découper dans l’embrasure de la porte. Il s’avança et quand il fut à quelques mètres, ils reconnurent Milo. Il ne portait pas son armure et Shun s’étonna de lui trouver l’air si jeune et si doux. Il ne devait être guère âgé, lui aussi. Milo s’agenouilla à son tour devant le trône.

- Pardonnez-moi cette entrée si irrespectueuse de vos personnes mais je tiens absolument à remplir cette mission à sa place.

- Et pourquoi cela ?

- Peu importe pourquoi, je vous demande cela comme une faveur et vous promets de la mener à bien.

Saori réfléchit un instant et échangea quelques mots avec Mu avant de dire :

- Je regrette Milo, mais Shun est le meilleur ami de Hyôga. Il est le plus à même de réussir. De plus, je souhaite que les chevaliers d’Or restent au sanctuaire jusqu’à nouvel ordre. Est-ce bien compris tous les deux ?

Milo réprima un geste de rage et hocha la tête en même temps que Shun.

- Très bien princesse. Je partirai dès aujourd’hui.

- Parfait. Nous attendrons de tes nouvelles.

Shun prit congé et se retira, suivi de prés par Milo. Il retourna au colisée d’entraînement où les autres l’attendaient. Lorsqu’ils le virent, Seiya, Shiryu et Ikki se précipitèrent pour l’interroger :

- Alors ?

- Je dois partir pour la Sibérie dès aujourd’hui.

- Et que dois-tu y faire ? interrogea Seiya. Ramener Hyôga pieds et poings liés ?

Shun partit d’un bon rire.

- Bien sûr que non ! Je n’en aurais pas la prétention ! Je dois simplement le convaincre de m’aider à retrouver ces fameux guerriers Kiaï qui d’après Saori seraient quelque part dans le nord de la Russie. Elle pense que Hyôga étant russe, cela nous facilitera la tâche.

- Cela n’est pas idiot, souffla Seiya. Reste à convaincre cette tête de mule de Hyôga…

- Je suis sûr qu’il n’y aura aucun problème, rétorqua Shun. Ce sera justement une bonne occasion de savoir qui de lui ou nous a raison.

Shiryu approuva.

- Shun a raison. C’est une bonne idée.

- En tous les cas, tu devrais aller te préparer Shun. Le climat là-bas ne ressemble guère à celui d’ici… ajouta Ikki en donnant une tape amicale à son frère.

Puis il ajouta :

- En tous cas, tu as de la chance : tu vas pouvoir te distraire un peu…

Seiya se mit à rire.

- Ce bon vieux Ikki ! Il a la chance d’être en quasi-vacances au soleil de la Grèce et il préférerait courir la glaciale Sibérie !

Les autres se mirent à rire à leur tour.

- Allons, profites-en tant que tu le peux. L’action pourrait revenir plus vite qu’on ne le souhaite…

Sur ces mots, Shun embrassa son frère et ses amis et s’éloigna.

Le soir.

Milo était assis sur les marches qui précédaient son temple et ruminait son échec de l’après-midi en contemplant le ciel étoilé lorsqu’il ressentit une puissante cosmo-énergie s’approcher. Instinctivement, tous ses sens se mirent en alerte et il se prépara à toute éventualité. Au bout de quelques dixièmes de secondes, une forme se matérialisa à ses côtés et il put entendre un rire franc.

- Tu es bien nerveux Milo ! Ce sont les chevaliers Kiaï qui te mettent dans cet état ?

Le scorpion poussa un soupir de soulagement.

- Ah , c’est toi.

- Désolé de t’avoir effrayé, fit le nouvel arrivant d’un ton ironique. Ce n’était pas mon intention.

- Tu ne m’as pas effrayé, protesta Milo. Mais par les temps qui courent, on ne saurait être trop prudent…

La lumière de la cosmo-énergie se dissipa et la haute stature d’Aiolia apparut distinctement aux yeux de Milo.

- Quel bon vent t’amène ?

- Tu as l’air plutôt contrarié de me voir, ricana Aiolia. J’ai entendu parler de ta petite visite de cet après-midi chez Athéna. Et comme je m’interrogeais sur tes motivations, je me suis dit que le mieux serait de venir t’interroger directement.

Aiolia se tourna alors vers Milo et le vit pensif. Puis un sourire lointain éclaira son visage avant qu’il ne redresse la tête et dise sans même regarder son interlocuteur :

- Vois-tu, Camus a été un très bon ami. De ces amis rares et précieux que la vie n’accorde que peu de fois à un individu. Je lui dois beaucoup. Avant qu’il ne meure, je lui ai fait une promesse. Celle de veiller sur son disciple comme il l’aurait fait lui-même s’il avait vécu.

- Et en quoi cela t’aurait-il servi de te rendre en Sibérie à la place de Shun ? Hyôga n’est pas en danger que je sache. Nous ne le sommes peut-être pas nous-mêmes.

Le visage de Milo devint sombre.

- J’ignore pourquoi, mais je sens peser sur lui une grave menace…

Hyôga s’étira sur son lit en bâillant. Puis il bondit sur ses pieds et regarda par la fenêtre. Le temps était superbe. Plein d’entrain, il attrapa ses vêtements épars dans sa chambre et commença à s’habiller. A cet instant, la porte s’ouvrit avec fracas et Ayan parut sur le seuil.

- Eh ! Tu pourrais frapper ! s’écria Hyôga qui était à moitié nu en se jetant sous son lit.

Ayan éclata de rire.

- Excuse-moi ! J’ignorais que tu étais pudique ! Dépêche-toi, une grande journée nous attend !

Puis elle sortit toujours en riant. Hyôga se releva en grommelant et finit de s’habiller. Lorsqu’il fut prêt, il sortit de sa chambre et rejoignit Ayan dans le salon. Cette dernière riait toujours.

- ça y est, tu as fini ? Dans mes souvenirs, tu n’étais pas si pudique !

- Non, mais qu’en sais-tu d’abord ? répondit Hyôga toujours furieux.

- Je crois me souvenir qu’Isaac et toi vous baigniez tous nus dans les sources chaudes de la montagne assez souvent…

- Mais avec Isaac, c’était différent. Nous étions deux garçons…Et des enfants !

Ayan fit la moue.

- Bien je m’excuse encore cher Hyôga d’avoir gêné votre chasteté !

A ces mots, Hyôga devint écarlate.

- Ayan !

- Allons, un peu de sérieux. Aujourd’hui, nous partons pour la Terre des Rêves.

- La Terre des Rêves ?

Ayan hocha la tête.

- La Terre des Rêves est notre refuge en quelque sorte. Un haut lieu à connaître pour toi qui est un chevalier d’Athéna. Pense que dans les temps anciens, les chevaliers d’Athéna ont cherché cette terre sans jamais la trouver ! Tu seras le premier à la découvrir !

Elle disait cela en riant. Mais Hyôga, lui, repensait à ce qui s’était passé au sanctuaire quelques jours plus tôt. Il était assez probable qu’à présent, des chevaliers s’étaient lancés à la recherche des Kiaï. Et lui allait y être conduit tout droit ! Quelle ironie du sort, pourquoi devait-il encore être tiraillé entre son devoir envers Athéna et ceux qu’il aimait ? Ayan, si tu savais…

- C’est à deux jours de marche d’ici vers le sud-ouest. Je suis sûre que cela va beaucoup te plaire et j’aimerais te présenter à mes amis, ils sont impatients de te connaître. Je leur ai souvent parlé de toi.

- Vraiment ?

Hyôga se sentit flatté par ces paroles et oublia un peu ses noires pensées.

- Bon, on y va. Tu me suis ?

Hyôga hocha la tête et suivit Ayan à l’extérieur.

Ils marchèrent deux jours. Si le premier jour avait été relativement facile, le deuxième qui se situait dans une région très montagneuse fut beaucoup plus dur. Un vent glacial soufflait avec une violence inouïe, menaçant de les emporter comme de vulgaires fétus de paille et il soulevait de gigantesques rafales de neige qui leur fouettaient le visage et leur glaçaient le corps malgré leur extraordinaire résistance au froid à tous les deux. La raideur et l’étroitesse du chemin qu’ils suivaient n’arrangeaient rien. Même Ayan qui connaissait parfaitement les lieux avait parfois du mal à se repérer dans de telles conditions. De fait, alors qu’ils touchaient au but, ils tournèrent un long moment en rond, passant et repassant devant l’entrée de la grotte qui abritait la Terre des Rêves avant d’enfin l’apercevoir.

- Enfin ! fit Ayan en se laissant tomber sur le sol. Ici nous sommes à l’abri du vent, on va pouvoir se reposer un peu avant de continuer.

Elle disait vrai. Alors que le vent soufflait en furie à peine à quelques mètres d’eux à l’extérieur, ils n’en ressentaient aucun effet à l’intérieur de la grotte.

- C’est incroyable, fit Hyôga. Il n’y a rien qui protège l’entrée de la grotte et pourtant le vent ne s’y engouffre pas comme il le devrait.

- La grotte est protégée par les puits du pouvoir. C’est ainsi que nos ancêtres ont pu échapper à leurs poursuivants.

Hyôga alla s’asseoir prés d’elle.

- Tu en veux toujours au Sanctuaire pour ce massacre ?

Ayan se mit à rire.

- Tu plaisantes ou quoi ? Ce sont de vieilles histoires. Et n’ai-je pas grandi entourée de deux futurs chevaliers d’Athéna et de leur maître, fidèle au sanctuaire et à sa déesse jusqu’à la mort ?

Hyôga hocha la tête et se sentit soulagé.

- On continue ?

Ayan se releva et prit la tête.

- Nous ne sommes plus très loin tu sais.

De fait d’après les estimations de Hyôga, ils marchèrent encore environ un kilomètre à l’intérieur de la grotte.

- Les puits du pouvoir sont-ils eux aussi dans cette grotte ?

- Non, ça n’a rien à voir. Ils sont beaucoup plus au nord. Tiens, nous arrivons.

En effet, Hyôga vit la lumière du jour se profiler à quelques mètres d’eux. Ils débouchèrent hors de la grotte et l’aveuglante lumière du soleil força Hyôga à fermer les yeux. Lorsqu’il s’habitua enfin à la luminosité ambiante, il s’aperçut qu’Ayan et lui était sur une corniche rocheuse qui surplombait de plusieurs dizaines de mètres une magnifique vallée entourée d’imposantes montagnes : celle-ci était découpée de part en part par une rivière qui brillait comme l’azur à la lueur du soleil et était entièrement recouverte de fleurs de toutes couleurs. ça et là une hutte en rondins dépassait du tapis de fleurs et des chemins de terre joignaient les unes et les autres. Dans le lointain, Hyôga devinait la masse d’un bâtiment plus imposant, tout en pierre qui dominait tous les autres. Brusquement il vit une brume colorée se soulever du sol et s’envoler.

- Qu’est-ce que c’est ?

Ayan sourit à la mine émerveillée de son ami, pas peu fière de son effet.

- Ce sont des papillons. Il y en a des milliers ici.

- C’est incroyable, c’est fantastique ! On dirait le paradis !

- Qu’en sais-tu ? répondit joyeusement Ayan. Tu n’y as jamais mis les pieds ! Allez viens, on descend.

Ayan entreprit de descendre un petit chemin de pierre escarpée qui descendait vers la vallée. Hyôga s’élança à sa suite.

- Mais comment un endroit aussi merveilleux peut-il exister ici ? Tout autour de cette vallée, au delà de ces montagnes, c’est le vent, la neige et le froid et ici on dirait un climat tempéré et le sol est couvert de fleurs et non de glace ! Ayan, dis-moi, comment est-ce possible ?

Ayan riait, courant devant Hyôga d’un pas si léger qu’elle semblait avoir des ailes aux talons.

- Il n’y a aucune explication, c’est ainsi !

Hyôga la suivait tout en observant le spectacle splendide qui s’offrait à lui et manquait à chaque pas de s’étaler de tout son long en trébuchant sur une pierre. Lorsqu’ils arrivèrent en bas, Hyôga vit un groupe d’enfants se précipiter vers eux.

- Ayan, Ayan ! Tu es revenue !

- Qui c’est lui ?

Ayan se mit à rire.

- Hyôga, je te présente les enfants de la cité. Quant à vous, je vous présente Hyôga, le chevalier du Cygne.

- Le chevalier du Cygne ? C’est lui que tu as connu quand tu avais notre âge alors ?

- Oui, c’est bien lui. Et si vous êtes sages, il vous montrera comment on gèle les pierres.

- Toi aussi, tu peux geler les pierres, c’est vrai ?

Hyôga ne savait comment réagir face à toutes ces questions, il n’avait guère l’habitude de côtoyer des enfants. Heureusement Ayan vint à son secours :

- Allons, dites-moi où est Alkaïd, il doit m’attendre.

- Il est à la maison, répondit l’un des enfants, et il arrête pas de dire que tu es en retard !

Ayan se mit à rire.

- Eh bien, je vais essayer de ne pas être encore plus en retard ! Viens, Hyôga.

Hyôga suivit Ayan à travers les petites huttes en bois qu’ils avaient aperçu d’en haut avec curiosité. Bientôt Ayan frappa à une porte et entra dans l’une des huttes. Hyôga l’y suivit. L’intérieur était très modeste et la pièce petite. Une grande tenture la coupait en fait en deux et au moment où ils rentrèrent un jeune homme qui se trouvait derrière l’écarta du bras et parut devant eux. Il était grand et fin, avait les cheveux châtains légèrement ondulés qui lui arrivaient juste au-dessus des épaules, des yeux noirs en amande et le teint halé. Il portait une tunique vert bouteille comme celles que portaient les gens au sanctuaire et une sorte de drapé écru qui partait de ses épaules comme une cape et s’enroulait partiellement autour de son torse. Hyôga lui trouva une majesté extraordinaire malgré la simplicité de ses vêtements.

- Hyôga, je te présente Alkaïd, l’un de mes meilleurs amis. Voici Hyôga.

Le nouveau venu tendit la main au chevalier Cygnus qui la prit et fut gratifié d’une chaleureuse poignée de mains.

- Mon nom est Alkaïd de Shedar. Je suis heureux de te rencontrer. Ayan m’a souvent parlé de toi.

- Shedar... Alpha de Cassiopée ? interrogea Hyôga.

- C’est cela même, répondit Alkaïd en souriant. Shedar est mon étoile protectrice.

Hyôga sembla réfléchir une seconde avant de se tourner vers Ayan :

- Mais et toi ? Ton nom est bien Ayan de Melburry et pourtant, Melburry n’est pas une étoile...

Ayan éclata de son rire clair qu’aimait tant Hyôga.

- Ne me dis pas que tu prétends connaître le nom de toutes les étoiles du ciel ! Je ne te croirais pas, même si tu insistes ! Mais pour répondre à ta question, sache que mon étoile protectrice est Deneb que je ne te ferais pas l’affront de présenter puisque nul autre que toi ne la connaît aussi bien...

- Et pourquoi cela ?

Les trois jeunes gens se retournèrent au son de cette nouvelle voix. Un jeune garçon se tenait nonchalamment appuyé contre le cadre de la porte, un sourire aux lèvres. Il était blond aux cheveux courts, un peu en bataille et avait les yeux clairs mais d’une couleur indéfinissable. Sa peau à lui aussi était bruni par le soleil et il était plus petit et râblé qu’Alkaïd et Hyôga. Il avait surtout un petit air malicieux qui tranchait avec le sérieux apparent d’Alkaïd. Il fit un pas à l’intérieur et Hyôga vit alors qu’il portait la même tunique qu’Alkaïd mais jaune et beaucoup moins soignée. Lui par contre ne portait pas de drapé. Mais en guise de ceinture, il avait un très large ruban de soie noire qui retombait sur son côté et dont le raffinement dénotait étrangement avec son allure de petit sauvage.

- Salut Ayan ! Enfin de retour ? - Puis se tournant vers Hyôga- Mon nom est Mirhyu d’Altaïr.

Puis il serra la main de son interlocuteur qui répondit :

- Je m’appelle Hyôga. Heureux de te rencontrer.

Le nouveau venu hocha la tête puis s’affala dans une chaise en demandant :

- Pourquoi donc connaît-il Deneb si bien que ça ?

- Hyôga est le chevalier du Cygne, répondit Alkaïd de sa voix calme et profonde. Et Deneb est l’étoile alpha de Cygnus.

Mirhyu ouvrit de grands yeux à ces mots.

- Mais alors tu es le double d’Ayan ?

- Le double ? interrogea Hyôga, surpris.

Ayan eut un petit sourire avant de répondre :

- Oui, tu es mon double. Ou alors c’est moi qui suis ton double. C’est comme tu préfères ! Dans les temps anciens, on racontait qu’il existait un lien entre un chevalier Kiaï et le chevalier d’Athéna protégé par la constellation à laquelle appartient son étoile. Leurs cosmo-énergies sont liés pour la vie. C’est notre cas à tous les deux : je suis protégée par Deneb qui est l’étoile alpha de Cygnus qui est ta constellation : à ce titre tu es mon double.

Devant l’air ébahi de Hyôga, Alkaïd ajouta :

- Tu sais aujourd’hui, ce sont des notions qui sont quasiment oubliées. Le lien entre le sanctuaire et les Kiaï s’estompe d’année en année…

- Mais quel est le rôle des doubles ?

- Rien de spécial, fit Mirhyu. La seule chose que l'on sait, c’est que les cosmo-énergies sont liées…

- Liées, mais comment ?

Mirhyu haussa les épaules.

- Nous n’en savons rien. Tout ça a disparu de nos jours. Nous n’avons jamais eu l’occasion de répondre à cette question.

- Nous devrions te faire visiter la cité, interrompit Alkaïd. Cela devrait beaucoup te plaire.

Hyôga hocha la tête.

- Allons-y.

Ils sortirent de la cabane et Hyôga fut de nouveau surpris par la forte luminosité. Les trois Kiaï le menaient à travers la vallée, le présentant à tous ceux qu’ils rencontraient. La cité des Rêves ne ressemblait que peu au sanctuaire : il y vivait aussi de nombreuses personnes qui n’étaient pas des guerriers. Hyôga vit notamment de nombreux agriculteurs qui travaillaient aux champs et il aperçut également des femmes et des hommes faire la classe à des enfants.

- Quel est ce bâtiment que l’on aperçoit dans le fond ? demanda Hyôga en désignant la grande bâtisse qu’il avait aperçut en descendant dans la vallée avec Ayan.

- C’est le centre de la cité si tu veux. C’est là que réside notre chef, Sirius et que s’entraînent les guerriers. Nous allons y aller.

Alkaïd prit la direction du bâtiment en question suivi de près par le reste du groupe. Il leur fallut à peine quelques minutes pour parvenir au fond de la vallée où se trouvait leur but. La bâtisse dénotait fortement avec le reste de la terre des Rêves.

- On dirait l’architecture grecque…commenta Hyôga.

- Cela n’a rien d’étonnant, sourit Alkaïd. N’oublie pas que nos ancêtres sont originaires du sanctuaire.

De fait, il s’agissait d’un imposant bâtiment de marbre blanc que devançaient d’énormes colonnes. Hyôga pensa que cela ressemblait un peu à la salle du grand pope, qui domine tout le sanctuaire, au delà des douze maisons du zodiaque. La bâtisse était en fait appuyée contre la paroi rocheuse de la montagne et autour d’elle il n’y avait plus de champs mais des pierres couvraient le sol. A l'est du bâtiment, Hyôga devinait un renfoncement d’où lui provenait la présence de plusieurs cosmo-énergies.

- Qu’y a-t-il par là ? interrogea-t-il.

- Ce sont les entraînements, répondit Ayan. Probablement les apprentis et les lieutenants de Sirius. Allons voir.

Ayan s’engagea dans la direction indiquée suivie par les trois garçons. Au bout d’une dizaine de mètres ils arrivèrent au bord d’une petite corniche. Ils se trouvaient en effet au bord d’un immense creux rond dont Hyôga évalua le rayon à une vingtaine de mètres et la profondeur à une dizaine. Plusieurs garçons s’y trouvaient et s’entraînaient au combat. Le regard de Hyôga fut attiré par un jeune homme qui portait la même tunique que Mirhyu et Alkaïd mais bleu sombre. Il était debout sur le côté et semblait superviser l’ensemble. Il se tenait très droit et l’incroyable dureté de son visage étonna le jeune russe. Il était en tout cas clair qu’il n’appartenait pas à la même classe que la somme des apprentis.

- Qui est-ce ?

- Miliaïd. Répondirent en chœur les trois Kiaï. C’est le premier Lieutenant de Sirius notre chef. Le meilleur combattant de la cité. L’un des plus avisé aussi. Nous le respectons beaucoup. Mais on ne peut pas dire qu’il soit très sociable. Il est très rare de le voir décrocher un mot.

Hyôga hocha la tête. Il n’avait pas l’air commode à vrai dire. Mais il se dégageait de lui une impression de pouvoir et de supériorité fascinante. Hyôga détailla la silhouette fine, les cheveux noirs de jais, les muscles saillants, la peau bruni par le soleil, les yeux verts sombres. Il ne ressemblait vraiment à aucun autre. Les quatre compagnons se déplacèrent sur la périphérie du cercle, Ayan et Alkaïd commentant à Hyôga ce qu’ils voyaient. Celui qu’ils avaient appelé Miliaïd ne fit pas attention à eux et parut même les ignorer, semblant uniquement se concentrer sur les jeunes apprentis. Hyôga ne pouvait en détacher son regard si bien qu'Ayan finit par le remarquer.

- Et bien Hyôga, qu'est-ce qui t'intrigue ainsi ?

- Rien, répondit pensivement le russe avant de rectifier : en fait, je m'interrogeais sur le rôle de celui que vous avez appelé Miliaïd.

Ayan eut un sourire avant de répondre :

- Comme je te l'ai dit, Miliaïd est le premier lieutenant de Sirius, c'est à dire qu'il est le deuxième personnage le plus important de la cité après Sirius. Il s'occupe généralement de l'entraînement de certains apprentis. Il est le seul des lieutenants de Sirius à le faire, les autres trouvent que ce n'est pas un travail à leur niveau…

Hyôga sentit une pointe à la fois d'ironie et de colère dans la voix d'Ayan dans ses dernières paroles mais elle n'ajouta aucun commentaire.

- Combien y a t-il de lieutenants ?

- En comptant Miliaïd, ils sont trois. Ils sont choisis parmi les guerriers les plus méritants sur des critères qui sont propres à Sirius.

- Et tu n'en fais pas partie ? demanda Hyôga, surpris.

Ayan eut un rire franc.

- A l'époque où le deuxième et le troisième lieutenants ont été désigné, je me baladais dans les puits du pouvoir, alors ça risquait pas…

Elle se tut un instant et ajouta :

- Mon frère de lait par contre est le troisième lieutenant…

- D'ailleurs… commença Alkaïd.

Hyôga se tourna vers lui, attendant la suite. Mais elle ne vint pas : Ayan jeta un regard bref mais noir à son ami qui se tut instantanément.

- J'ignorais que tu avais un frère de lait, commenta Hyôga subitement curieux.

- En fait, nous avons été élevé tous les deux par notre maître. Nous avons grandi ensemble entre ici et la Sibérie. Il s'appelle Oyan. Oyan de Bételgeuse.

Elle s'arrêta de parler, semblant perdue dans de lointaines pensées. Hyôga se rendit compte alors qu'il ne savait que peu de choses d'elle. Encore moins qu'il ne le croyait. Il y eut un long silence qui fut finalement rompu par Alkaïd.

- Venez, nous rentrons.

Hyôga passa quelques jours sur la terre des rêves. Ayan et lui coururent les environs les journées durant. Elle lui fit découvrir de nombreux coins, plus beaux les uns que les autres dans les montagnes qui abritaient la terre des rêves. En sa compagnie, le jeune homme se sentait enfin revivre, il retrouvait un nouveau but à sa vie, un but autre que le devoir et la guerre, que même l'amitié de Seiya et les autres chevaliers de bronze n'avait pu lui apporter. Enfin, après tant d'années de déroute, il se sentait heureux.

Le soir, après les heures passées tous les deux dans les montagnes, ils descendaient dans la vallée passer les soirées en compagnie d'Alkaïd et de Mirhyu dont la joie de vivre communicative contribuait également à ramener le sourire sur le visage de Hyôga. Parfois pourtant le russe se sentait redevenir sombre. Car tout cela allait-il durer, se demandait-il ? Le bonheur lui avait tant échappé jusqu'à présent que la peur de le voir s'évanouir à nouveau l'empêchait de profiter de celui qui s'offrait à lui au moment même. Les dieux jusque là n'avaient guère entendu ses prières, en serait-il autrement cette fois-ci ?

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Cette fiction est copyright Stephanie Fabrer.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada et Toei Animation.