Partie 4 Chapitre 13 : When worlds collide


Et le 7ème jour, "Dieu" se reposa et contempla son oeuvre.

Un univers ordonné. Afin de donner forme, il avait imposé les dimensions et une distinction entre elles. Afin de donner mouvement, il avait crée le temps. Afin de donner vie, il créa la mort. Toute chose qui a été créée doit pouvoir être détruite. Afin de créer sa Lumière, il la sépara des Ténèbres.

Mais dans les Ténèbres veillait le "Démon". Et il regarda l'oeuvre de "Dieu", en ricanant. Un univers bien séparé, délimité par des barrières, appelées "Lois". Alors il décida d'user du pouvoir qui ferait toujours de lui à la fois l'égal et l'opposé de Dieu : si "Dieu" avait le pouvoir de créer et ordonner, alors lui avait celui de détruire, et rendre au Chaos. Cela obéissait à une Loi bien plus profonde, que ni l'un ni l'autre n'avaient définis.

Peut-être existait-il un Dieu, au dessus d'eux, au dessus de tout, pour le "Dieu" et le "Démon". Peut-être pas. Mais cela, ni l'un ni l'autre ne s'en souciaient. Ils avaient leurs pouvoirs, et leurs buts. Et ils leur fallaient l'accomplir.

Et ainsi le Démon décida d'introduire le Chaos dans l'Ordonné.

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Un couloir de la sombre forteresse, devenue labyrinthe par la volonté de cinq divinités démoniaques. Un labyrinthe supposé mener jusqu'au Dieu de la Guerre Destructrice, Arès.

"Que s'est-il passé ?" demande une jeune femme aux cheveux violets, parée d'une armure dorée majestueuse.

"Un choc a secoué la forteresse entière..." répond un homme en écaille également d'Or, portant un Trident, symboles de son rang de divinité.

"C'est même pire que cela, Déesse..." répliqua une voix fantômatique mais familière, sortie de nulle part.

"Qui est là ?!" lança Poséïdon, se plaçant devant Athéna, de toute sa prestance, en protecteur, voyant se matérialiser sous ses yeux l'image d'un jeune homme en armure dorée, à l'aspect indéniablement divin, à la chevelure bleue.

"Sa... Non, Kanon ?!" demande presque un Poséïdon incrédule.

Un sourire apparaît sur le visage de l'homme, bien que ce ne soit là qu'une simple projection.

"Appelez moi Sigma. Je ne suis plus ni Kanon ni Saga. Mais je reste au service d'Athéna."

-"Sais-tu quelque chose sur ce qui vient d'arriver ?" demande la Déesse inquiète.

-"Je ne peux qu'émettre une supposition, mais la décharge d'énergie d'Arès semble avoir fait s'effondrer le tissu dimensionnel entre Azura et la Terre... Ce qui agissait comme une sorte de voile entre ces deux mondes. Et peut-être également d'autres dimensions..."

-"Tu veux dire que... Les dimensions sont en train de se superposer ?!" réplique un Poséïdon effaré. "Ce que Zeus avait passé des millénaires à ordonner... La barrière entre les morts et les vivants, entre la terre et les enfers comme Azura... Arès... Jusqu'où iras-tu dans ton sacrilège ?!"

Il ne prononça pas ces mots, mais la fureur se lisait sur son visage.

La silhouette fantômatique du Chevalier Divin des Gémeaux plie un genou, comme si un effort intense lui était demandé.

-"C'est ce qui serait en train de se produire si je n'étais pas là pour tenter de maintenir cette barrière... Je suis piégé dans l'antichambre de Daath pour l'instant, mais si ce n'était que cela je pourrais revenir sans problèmes... Maintenir les barrières dimensionnelles me demande la totalité de mes forces... Je ne pourrai pas vous aider davantage pour l'heure..."

Athéna et Poséïdon échangent un bref instant un regard. Doute, détermination, tout cela est véhiculé en un instant avant de se muer en une conviction totale.

"Bien, Sigma. Fais de ton mieux. Nous ferons ce qui est en notre pouvoir pour ne pas te décevoir." répond une Athéna plus que jamais déterminée.

"Je peux au moins défaire le labyrinthe de la forteresse... et élargir le passage pour venir en aide à ceux qui sont en train de revenir vers nous... Seiya et Shiryu sont déja de retour... Hyoga, Shun et Ikki suivent leur trace."

"C'est plus de soutien que nous ne pouvions en espérer. Attelle-toi à ta tâche sans arrière pensée, Chevalier Divin des Gémeaux."

En ces mots l'Empereur des Mers vient de conforter le guerrier et de lui signifier toute sa sympathie. C'est un mince geste, mais il a son importance. Et Poséïdon réalise que jusqu'alors, rarement avait-il eu ce genre de gestes ou de paroles purement confortantes pour un guerrier, fut-il l'un de ses Marinas. La silhouette du guerrier en armure divine s'estompe alors, ce dernier mobilisant toutes ses ressources à maintenir la stabilité des dimensions.

"Est-ce cela ? Ces quelques sentiments, si minces et pourtant si forts, qui ont toujours fait leur force ?" réfléchit le Dieu des Océans. "Athéna, tu as de la chance d'avoir des guerriers aussi loyaux. On dirait même que tu as déteint sur moi... Moi qui étais comme un pauvre fou, noyé dans le pouvoir divin, prêt à perdre son âme, boursouflé d'orgueil..."



L'impression de n'être qu'une torche vivante, que chaque atome de son corps est en feu, chauffé à blanc. C'est la sensation qui traverse le corps de Camus malgré son Armure Divine. A ses cotés, Alexer ressent le même feu désintégrer son écaille en un clin d'oeil, avant de brûler sa peau à vif.

Il n'est même pas possible de hurler, même si cette douleur enflamme jusqu'à l'esprit. Ils sont noyés dans un océan de lave dont l'explosion aussi brusque qu'ardente a bien vite fait fondre la moindre trace de glace présente dans la salle aux fresques du Ragnarok, à l'unique exception de la statue de glace du Berserker Thor, qui elle même commence à souffrir de l'intense chaleur, si tant est que le mot soit assez fort.

Un rire sinistre retentit dans leurs esprits. Un rire féminin, à glacer le sang, tandis que le flux de lave s'atténue, laissant apparaître dans toute sa majesté, avec un aspect macabre, une silhouette féminine aux cheveux ébourrifés. Tenant dans sa main l'objet qu'Alexer allait empoigner l'instant d'avant. Une clé.

"Vous n'avez pas besoin de la clé menant à la Tour de la Discorde, Chevaliers... Puisque nous avons décidé..."

Sa phrase s'interrompt un bref instant avec un air d'hésitation feinte, lui laissant le temps de fixer les deux combattants étendus au sol, l'un portant les restes d'une armure fondue, l'autre portant une armure bien endommagée par le choc thermique.

"...de tous vous éliminer ici même." complète-t-elle en écrasant l'objet de métal dans ses mains, pour accentuer le caractère définitf de son acte.

Camus tente de se relever, posant une main au sol pour affermir sa prise sur le sol. Une situation semblable lui revient à l'esprit, deux ans avant, alors que l'essence de sa vie, renouvellée par Hadès, allait à nouveau le quitter. A jamais, avait-il cru à cet instant.

Cela avait ébranlé encore d'autres certitudes dans son esprit quant à la définition du mot "impossible". Que Hadès lui aie rendu une vie temporaire, il l'admettait, c'était là quelque chose que quiconque a étudié la mythologie savait. Mais que Quelqu'un lui aie rendu un souffle de vie réel, aussi neuf que cette vie qu'il avait reçu à sa naissance, était là un mystère, une chose qu'il croyait impossible jusque là. C'était une loi de l'univers qu'il connaissait. Au même titre que le Zéro Absolu était pour lui un idéal, une limite finale, comme l'infini. Une loi qui s'était elle aussi brisée sous ses yeux comme une barrière de verre.

"Peut-être mon univers est-il trop étriqué... Peut-être que..." avait pensé à cet instant le sage et calme Chevalier d'Or.

Hyoga lui avait montré la clé. Il suffisait de croire. Au-delà de toute rationnalité scientifique, ou plutôt, à sa limite. Cette fois encore où la flamme de sa vie menaçait de s'éteindre de façon définitive, cette fois il décida de son propre chef qu'elle ne s'éteindrait pas, et mobilisa sa volonté et ses forces. Et il se releva, faisant appel à son Cosmos, l'enveloppant en une barrière protectrice.

"Impressionnant, Chevalier du Verseau. Je ne pensais pas que tu te relèverais si facilement. Ou en tout cas plus facilement que ton ami... Puis-je le considérer déja hors jeu, étant donné que son écaille n'a pas résisté à mon accueil ?" lache-t-elle non sans ironie, fixant le général aux cheveux blonds.

Alexer semble retrouver ses esprits à cette phrase, serrant son poing et grinçant des dents. La déesse de flammes a frappé juste. Une nouvelle fois il se retrouve démuni face à un adversaire divin. Une nouvelle fois l'échec lui est montré en face. Mais cette fois, au lieu de se laisser aller à la fureur ou au désespoir, celui qui a porté l'instant d'avant l'Ecaille du Kraken se focalise sur le combat et sur la meilleure chose à faire en cet instant. Et c'est à son tour d'enflammer son Cosmos, pour autant que le terme s'applique à un Chevalier du Froid.

"Alexer... Crois-tu sincèrement les Ecailles de Poséïdon si faibles ?" résonne une voix dans l'esprit du Général du Kraken. Ce dernier est encore au sol, tentant de se relever, non pas désespérément, mais pour reprendre le combat, bien décidé. La voix le surprend, mais il la reconnaît bien vite.

Une seule voix peut lui faire cette impression de puissance, de majesté et désormais de chaleur. C'est l'Empereur Poséïdon, il n'y a aucun doute.

"Fais exploser ce qui dort en toi. Les Ecailles des Mers révèlent leur pouvoir pour les braves, pour ceux qui connaissent, qui ont confiance en leur valeur, et qui ont la volonté de se dépasser. Ce sont là les qualités qui ont manqué aux Marinas quand ils ont défié les Chevaliers d'Athéna..."

C'est au tour de Némésis de voir la surprise s'afficher sur son visage. "Qu... ?! La barrière dimensionnelle d'Azura ne devrait pas..."

Ce simple changement suffit à rendre confiance à Alexer, à lui faire penser qu'il détient désormais un léger avantage. Alors qu'il se relève à son tour, intensifiant son Cosmos de plus en plus. C'est là plus qu'il n'en faut à la Déesse de la Vengeance pour se laisser aller à sa fureur, alors qu'un éclat sanguin illumine ses yeux, fixant droit ceux du Général du Kraken, désormais incapable de faire un geste, paralysé par ce regard empli de haine.

"Oh non... Ne te crois pas tiré d'affaire si vite, pauvre imbécile. Cette fois, je ne laisserai PERSONNE m'empêcher de t'infliger un traitement... dont ton âme ne se remettra pas !"

Son index s'étend en un geste déja vu par le Chevalier du Verseau, figé d'horreur, incapable de réagir à temps.

"PSUCHÈ EIS SKOTOS BAPHTHÈTW !!!" lance la Déesse de la Vengeance, en une incantation qui correspond au nom grec antique de la terrible illusion du Prince des Ténèbres, alors qu'elle transperce le front d'Alexer d'un simple rayon rouge sang.

"Cette fois, rien ni personne ne te protègera. Tu es coupé du monde extérieur, et ton mental est définitivement fermé, tu es livré à toi-même. Voyons donc si ton esprit parviendra à se sortir du labyrinthe de ténèbres tout seul, toi, un pauvre pion des Dieux..."

Némésis lache ces mots avec ironie, avant de partir d'un rire suffisant, tandis que Alexer glisse au sol en silence, un bruit sourd marquant sa chute. C'est alors qu'elle se tourne vers le Chevalier du Verseau, dont le réflexe est de se mettre en garde, une certaine angoisse visible sur son visage habituellement impassible.

"Et bien, Chevalier du Verseau ? Qu'espères-tu ? Ton ami ne peut plus être sauvé... que par lui-même, s'il a la force de se surmonter. Même pour moi, il est impossible de briser un esprit qui s'est définitivement refermé sur lui-même. Considère le comme mort, car aucun humain, à part les rares élus à posséder totalement le 8ème sens, ne peut briser le labyrinthe de son âme."

Camus se contente de concentrer encore son Cosmos, conscient de la différence de niveau entre lui et son adversaire. Pourtant il sait aussi que son coup portera, ne serait-ce qu'un tant soi peu. Si seulement...

"Art de la glaciation absolue..." entonne le Chevalier du Verseau alors que les flocons dansent autour de lui, à une température si basse qu'elle en est irréelle, tenant en échec l'aura ardente de Némésis. Camus a croisé les bras contre son torse, concentrant toutes ses ressources.

"Encore cette technique ? Elle a vaincu Thor, mais ce sera inutile contre moi."

Camus est prêt à déclencher une nouvelle fois un enfer gelé autour de lui, capable de créer une sphère où toute activité atomique serait figée. Il n'hésite pas un instant, décroisant les bras, libérant cette formidable technique...

"INTERDICTION DE L'HIVER!"

Et l'enfer de glace se déchaîne, se propageant, gelant en une fraction de seconde le sol, l'air, à une vitesse dépassant la perception mortelle.

"BOILING EARTH REVENGE!!!!" déchaîne Némésis, libérant une vague de magma de sa main. Une technique simple comme celle qu'elle avait utilisé quelques instants avant, mais unidirectionnelle et dénuée d'effet de surprise.

L'impact ne se fait pas attendre, provoquant un choc thermique d'une violence inouïe, repoussant les deux adversaires. Camus est propulsé contre le mur à plusieurs mètres derrière lui, incapable de se rétablir totalement, encastré dans le minerai, tandis que Némésis, bien qu'ayant reculé, reste pafaitement stable et digne.

"Pas mal. Tu t'étais donc retenu contre Thor ? Mais ça n'a pas suffi. Il faudra trouver mieux que ça si tu penses pouvoir me vaincre."

Camus fixa l'Armure de son ennemie. Une fine couche de givre s'était formée, ayant attaqué le métal en profondeur, mais elle s'évaporait déja. Il avait sous-estimé la capacité régénératrice des Armures Démoniaques. Et son dernier atout avait échoué. Alors qu'il voyait la Déesse dégainer son épée et avancer lentement, comme le chat qui va achever la souris, il restait tétanisé.

Quand un nouveau bruit rompit le silence. Camus n'en crut pas ses yeux, quand il vit Alexer faire un mouvement. Sa main venait de bouger et de servir de point d'appui pour se relever. Ce que le Général avait fait difficilement mais sûrement. Némésis fixa Alexer avec un intérêt renouvellé et une surprise non dissimulée, sans rien dire. Elle attendait.

Et elle croisa le regard du Blue Warrior Alexer. Dénué de vie. Au point d'en être effrayant, même pour une Déesse. Même pour elle, qui avait projeté l'attaque mentale qui l'avait plongé dans cet état. Il ne restait dans son regard qu'une détermination pure. Il était devenu en ses yeux une lame acérée.

"Némésis... Tu m'as dit que j'étais un imbécile... Mais je dois te remercier."

Comme son regard, ces mots sont lachés d'une voix monocorde, trahissant l'absence d'âme et de sentiments en lui.

"Tu as bel et bien détruit mon âme avec ton assaut... Les regrets, la haine, tout ce que j'ai éprouvé l'a dévorée comme les flammes..."

"Mais tu n'as pas pu détruire une seule dernière pensée : je dois te vaincre, au moins pour la cause que mes amis et mon Dieu ont juré de défendre. Quel qu'en soit le prix pour moi."

Le Cosmos d'Alexer se déploie alors, devenu désormais froid et lisse comme de la glace.

-"Et c'est toi, un pathétique humain, un simple pion, qui prononce ces mots ? En as-tu seulement le droit alors que tu as mené une vie entâchée de déshonneur et de honte ? Goûtes une nouvelle fois à l'enfer !"

Un geste de la Déesse démoniaque, et de nouveau les flots de lave se déclenchent, aussi violents qu'un volcan, aussi violents que la première fois. Et à nouveau ils s'apprêtent à engouffrer Alexer du Kraken, démuni d'armure en cet instant.

"Comme tu l'as dit, Poséïdon, il est temps pour moi de te donner une preuve que tu as eu raison de me confier cette armure !"

"Alexer, NON !" hurle Camus alors qu'il voit Alexer se jeter sur le torrent de lave qui a failli déja leur coûter la vie quelques instants auparavant.

"BOILING EARTH REVENGE!!!!"

"Pardonne-moi, Natacha..." pense Alexer alors qu'une larme perle à ses yeux, avant de faire place à une détermination absolue.

"BLUE IMPULSE !!!"

Alexer charge, dénué de protection, alors que la lave entre en contact avec son corps. Et qu'il y est englouti tout entier.

"Pauvre fou... Voilà la mort que tu désirais." pense Némésis avec mépris. Juste avant qu'elle réalise que l'orbe d'énergie pure d'Alexer est en train de surgir du torrent de lave et de foncer droit sur elle, sur son visage.

Elle n'a pas le temps d'exprimer sa surprise que déja le coup l'a frappée et fait voler son casque au loin, transformé en une sculpture de glace.

"Comment ?!"

Le torrent de lave est brisé, et l'on peut alors voir... la silhouette d'Alexer, tenant sur ses jambes, horriblement brûlé... mais couvert d'une majestueuse écaille dorée, aux atours de celle du Kraken, mais indéniablement divins. Alexer se contente de sourire avant de s'écrouler au sol, épuisé par son ultime effort, satisfait d'avoir pu se montrer digne de Poséïdon, digne de quelqu'un, avant de rendre enfin son dernier souffle.

"Alexer !" lache Camus, qui accourt vers le corps de son ami. "Non !"

-"Pauvre insecte... Régénérer son armure ne lui aura servi à rien en fin de compte... A rien d'autre qu'à m'égratigner." dit la Déesse d'une voix mal assurée. Quelque chose l'a mise mal à l'aise, pour la première fois elle a vu un véritable miracle. Et ce n'est pas l'un des cinq Champions qui l'a accompli.

Un temps court se passe. Au bout duquel un nouveau Cosmos se fait ressentir... Familier, également froid, et infiniment plus puissant.

"Non, Némésis, ce que Alexer a fait n'a pas été inutile."

"Qui est là ?!" hurle Némésis.

"Il t'a prouvé par son sacrifice que tout humain, quels que soient ses actes passés, a toujours en lui la force de changer et de renaître, plus fort qu'avant."

"En cela tu as perdu ton combat contre lui, toi qui es désormais figée et devenue l'archétype de la Vengeance."


"Cette voix..." lance la Déesse, désemparée. "Comment peux-tu apparaître en cet endroit ?!"

Alors apparaît dans un flash de lumière dorée un jeune homme au cheveux blonds, portant un bandeau sur l'oeil gauche, et paré d'une armure à l'éclat doré indéniablement divin.

Némésis reconnaît le Chevalier du Cygne vêtu de l'Armure Divine de sa constellation, endommagée, mais émettant une impression de vie débordante à nouveau, comme si elle venait de retrouver la faculté de respirer. L'état du Chevalier n'est pas reluisant, il semble avoir livré un terrible combat contre la mort elle-même. Pourtant il s'efforce de n'en rien laisser paraître.

-"Je n'en ai pas la moindre idée. J'ai probablement été guidé par Seiya et Shiryu... Mais c'est comme si l'espace s'était ouvert à moi. Quelqu'un a voulu que je me retrouve ici."

Hyoga fixe la Déesse d'un regard de défi, impatient de poursuivre ce duel qu'il avait déja livré contre elle sans le savoir, dans le volcan du Mont Fuji.

Némésis, pour sa part, semble visiblement contrariée par cette tournure inattendue des évènements, mais elle est également assez intelligente pour comprendre qu'il lui faut garder son calme et réfléchir aux implications de ce qui vient de se produire. Elle a vaincu un des Généraux de Poséïdon, il reste un Chevalier d'Or qui bien que mal en point peut représenter une gêne, et un nouveau Chevalier Divin vient de revenir par on ne sait quel moyen d'une dimension maudite réputée sans retour. Elle a donc face à elle deux adversaires nuisibles, et qu'il faut éliminer au plus vite. Et pour cela, inutile de faire preuve de fioritures.

Croisant les bras autour de sa poitrine, son énergie se concentre, résonnant avec les lieux, comme si elle ne faisait qu'un avec eux. Instantanément Hyoga et Camus se mettent en garde, côte à côte, échangeant un regard, en un clin d'oeil. Le maître éprouve un soulagement sans bornes à revoir son élève sain et sauf, et le sentiment est réciproque.

"BOILING..."

C'est le moment que Némésis choisit pour libérer une nouvelle fois sa terrible attaque, semblant venir de partout à la fois.

"...EARTH REVENGE!!!!"

En réponse à l'attaque, Hyoga laisse son Cosmos exploser, élevant ses deux mains jointes en une jarre, reproduisant un arcane si familier au Chevalier du Verseau...

"PAR L'EXECUTION DE L'AURORE !!" lance Hyoga, projetant un souffle d'air glacé, un faisceau de fins cristaux de glace au visage de la Déesse de la Vengeance. A sa grande surprise, le souffle glacé se dissipe, glissant comme une brise sur le visage de Némésis, ce visage que Hyoga aurait pu considérer comme beau s'il n'était pas préoccupé par un combat à mort. Un instant de surprise paralyse le Chevalier Divin du Cygne, alors que son maître le pousse en arrière d'un geste brusque, croisant et étendant ses bras en un mouvement rapide, rapellant presque celui du Chevalier du Bélier.

"FREEZING WALL !"

Bien vite, la situation précédemment observée se répète. Le flux de lave est stoppé net par l'aura glacée du Chevalier du Verseau, se structurant en une barrière de glace parfaitement lisse, s'opposant à la volonté de la Déesse de la Vengeance.

"C'est là tout ce que tu sais faire, Némésis ? Nous avons déja vu ta technique plusieurs fois... Et nous avons les moyens de la parer aisément, comme tu peux le voir." lance un Camus étonné de la simplicité de l'attaque, tandis que Hyoga se remet en garde, éprouvant malgré lui un certain malaise malgré l'action de son maître l'instant d'avant.

Un sourire se dessine sur le visage de Némésis, alors qu'une fissure se laisse voir sur la glace, à la surprise des deux Chevaliers.

"Erreur, Chevaliers. Vous commettez une énorme erreur. La température n'a plus d'importance, dans un tel combat. Votre mur de glace vous protège effectivement tant que le flux naturel de la lave ne vous touche pas, mais..."

Un rictus démoniaque apparaît sur son visage, sur lequel se dessinent désormais de macabres marques guerrières de couleur noire, alors que la fissure dans le mur de glace se fait de plus en plus ample, devenant bien vite une brèche.

"...qu'en est-il si une Déesse lui vient en aide, comme MAINTENANT ?"

Surgissant de tous les murs à la fois, autour des deux guerriers du froid, le flux de lave incandescent et surnaturel se rue sur eux. En un clin d'oeil Hyoga et Camus réagissent, laissant une nouvelle barrière sphérique se former autour d'eux. Hyoga ne peut s'empêcher d'éprouver un certain malaise, alors qu'il voit une situation qu'il a déja connue se reproduire.

"La situation est grave, maître... Nous nous sommes pris au piège nous-mêmes... Nous ne pouvons que nous défendre... Et il est impossible de porter la moindre attaque."

-"Elle a décidé de nous écraser par la force brute. Notre barrière ne tiendra pas, c'est une question de minutes..." lache un Camus tout aussi conscient du danger imminent que son disciple, alors que leur bouclier de glace se couvre déja de fissures dues tant à la pression qu'à la chaleur.

-"Vous ne ferez pas long feu, serviteurs d'Athéna... Allez-vous tolérer de faire pâle figure face à Alexer ? Je sais que vous pouvez mieux, bien mieux !" ricane la Déesse, savourant chaque instant de détresse de ses proies prises au piège.

Camus semble avoir du mal à croire que Némésis consente à formuler un compliment à l'attention d'un de ses ennemis, mais il est bien obligé de l'accepter. Une fraction de seconde de réflexion lui permet de comprendre que la Déesse a été touchée par le geste d'Alexer, qui était prêt à mourir, ne serait-ce que pour la toucher. Et il regarda la position dans laquelle ils se trouvaient. Pensant à se protéger avant de riposter.

"Hyoga... Je crains que nous ne puissions pas nous en sortir indemnes dans ce combat." lache un Camus qui semble avoir accepté l'idée de perdre quelque chose.

Hyoga semble surpris un instant, avant de se souvenir de ce qu'il a traversé. S'il est impossible de se défendre efficacement contre un tel adversaire, il faut tout donner et attaquer sans relâche. Mais même l'arcane du Chevalier du Verseau s'est montré inefficace.

"Il n'y a qu'une seule technique qui fonctionnera... L'arcane dont le souvenir a été transmis par mon maître Kyriel, l'Interdiction de l'Hiver... Les arcanes du froid ordinaires sont des attaques unidirectionnelles, qui ne marcheront pas contre Némésis. Si nous, qui avons retrouvé le secret de cette technique, l'exécutons à deux, nous devrions pouvoir au moins blesser grièvement Némésis... Mais nous manquerons de temps pour l'exécuter..."

Il hésite un bref instant, car ses paroles sont lourdes de conséquences. Mais il lit dans le regard de Hyoga qu'il a déja compris ce que cela signifie.

"L'un de nous va probablement y laisser la vie... peut-être même plus." annonce Camus, plongeant ses yeux dans le regard de Hyoga, qui lit avec tristesse et horreur l'intention de son maître de se sacrifier.

"Non, Hyoga. Tu ne dois pas hésiter. J'ai déja vécu mon temps sur Terre, j'aurais déja dû mourir il y a bien longtemps et ce par deux fois." dit le Chevalier, froidement. Il a accepté son destin. "Si nous devons nous rencontrer à nouveau, c'est que les Dieux auront décidé que mon temps n'est pas encore venu."

Silencieusement, âprement, il acquiesce, luttant contre ses sentiments comme à chaque combat qu'il a eu à livrer... Et son âme s'abandonne à son esprit de combat, tout comme Alexer quelques minutes auparavant.

"Devenir une lame acérée... Et frapper au coeur du Mal, sans m'arrêter..."

Bien vite, le visage de Hyoga devient inexpressif, presque mort alors qu'il se tourne vers Némésis. Son Cosmos cesse de l'envelopper alors que l'énergie qui maintenait la barrière sphérique de glace se retrouve concentrée en lui, prêt à lancer un arcane dévastateur. Imité par Camus, toute énergie quitte la barrière de glace, qui se couvre de fissures en une fraction de seconde avant de céder.

"Cosmos... Concentre-toi... Intensifie-toi... JUSQU'AU ZERO ABSOLU !" pensent à l'unisson Hyoga et Camus, nimbés d'une aura blanche et dorée, majestueuse, à l'instant où ils vont être engloutis par le flot de lave meurtrier.

"Vous avez donc abandonné le combat ? Sage décision... Je vous promet une mort rapide... Mais hélas pas sans souffrances !" ironise la Déesse.

"Art de la glaciation absolue..." entonnent les deux voix des Chevaliers d'Athéna, d'une voix monocorde et dénuée d'émotions, de doute et d'hésitation, alors que la lave est supposé les avoir engloutis, et brûler leur chair et leur armure au delà de tout seuil de douleur et de fusion.

"Non... C'est impossible !" lache Némésis, abasourdie, alors que le flux de lave se sépare naturellement, révélant les deux Chevaliers, leurs armures quasiment détruites par la température extrême, leurs corps probablement meurtris au-delà de tout soin possible. Leur posture est majestueuse, ils sont dos à dos, les yeux fermés, dans un état de concentration parfaite, nimbés d'une aura blanche irréelle, le froid gelant le sol autour d'eux, menaçant de geler jusqu'à l'air dont ils ont besoin pour respirer.

Quand soudain, à l'horreur de la Déesse au service d'Arès, ils ouvrent les yeux, comme transfigurés, possédés par une puissance divine hors du commun. Tout dans leur regard indiquait une connaissance, une confiance absolue en eux-mêmes, et la volonté de se transcender et de vaincre. Quel qu'en soit le prix pour eux. Et c'était ironiquement cela qui leur permettait d'échapper à ce funeste sort. L'accepter.

"INTERDICTION DE L'HIVER!" lancent les deux Chevaliers, dos à dos, à l'unisson alors qu'un enfer glacé s'étend instantanément, ignorant le flux de lave, le transformant tout aussi instantanément en une roche solide avant de la désintégrer sous l'effet du choc thermique, amplifiant l'onde de choc de l'attaque.

Némésis est forcée d'admettre que ses adversaires ont réussi à déjouer ses pouvoirs divins... Ce qui signifie avoir réussi à effleurer des dons divins, et les utiliser contre elle. Voilà ce qu'elle pense alors que l'onde de glace, combinée à l'onde thermique la touche enfin, transperçant son Armure Démoniaque en une fraction de seconde, lacérant son corps et le plongeant dans un enfer au zéro absolu, stoppant toute activité atomique.

L'effluve de lave s'éteint, laissant la glace prendre chaque parcelle de minerai rouge sang de la pièce, désormais privé de la volonté de Némésis et de la volonté de résister. Camus s'effondre au sol, le corps recouvert d'une Armure Divine du Verseau gravement endommagée, un sourire paisible sur le visage. Juste avant que son corps ne heurte le sol, Hyoga se saisit du corps de son maître, le posant délicatement. Instant auquel la majestueuse protection se retire en une explosion dorée du corps de son défunt porteur pour se reformer, pièce par pièce, en la statue de Ganymède, serviteur de Zeus, porteur de la jarre.

"Maître... A présent vous vivrez véritablement en moi. Votre âme vivra en moi et ne rejoindra pas le Monde des Morts. Ensemble nous accomplirons la volonté d'Athéna..."

"Psuchè eis skotos bapthtètw..." sussure une voix derrière Hyoga, alors qu'un fin rayon rouge sang traverse son crâne, provoquant un spasme sur le corps du Chevalier Divin, alors que son corps semble paralysé.

"Némésis... Tu n'es pas... ?" lache Hyoga, sans surprise aucune, comme si une simple caresse l'avait effleuré.

"Aurais-tu oublié qu'un Dieu n'est plus retenu par le carcan de la matière physique ? A plus forte raison les Démons... L'âme de Surtr n'avait pas été piégée par la formidable technique qui a réussi à détruire mon enveloppe charnelle."

"Dans ce cas je vais achever le travail. Et geler jusqu'à ton âme." dit Hyoga, alors que le décor autour d'eux se transforme en glace, et qu'il se retourne, pour faire face au fantôme macabre de Némésis, la fixant d'un regard qui lui aurait arraché un sursaut de surprise si elle possédait encore un corps. Un regard où on lisait à nouveau cette détermination froide à vaincre, à trancher comme une lame parfaitement aiguisée, à percer comme une lance guidée par une force divine inébranlable. Le regard d'une machine à tuer froide et sans émotions.

Avec horreur elle se sentait percée par le regard du Chevalier du Cygne, auquel se superposait celui du Chevalier du Verseau. Avec horreur elle visualisait son esprit, comme s'il s'agissait de son propre corps, pris dans la glace à mesure que le Cosmos de son adversaire s'intensifiait. Refusant la réalité de cette situation, elle tentait de se débattre... Comment se pouvait-il que son âme soit prise au piège dans les glaces, tout comme un vulgaire corps de chair et de sang ?!

"Non... L'illusion du Prince des Ténèbres... Elle ne t'a pas... touché... et tu me l'aurais... renvoyée ?!"

"Exactement, Némésis... Elle n'a que glissé sur mon esprit. L'attaque qui enferme l'âme dans des Ténèbres si profondes que seul celui qui y tombe peut s'en délivrer... C'est bien toi même qui l'a dit, je me trompe ?" annonça avec ironie le Chevalier du Cygne, avec une intention subtilement différente, qui n'échappa pas à Némésis, dont le "corps" semblait désormais pris jusqu'au torse.

Mentalement, elle serre les dents de surprise, du moins si elle avait encore eu un corps, c'est là ce que la Déesse aurait fait. Elle réalise avec une pointe d'ironie que son adversaire a compris... et décidé de faire abstraction du combat physique. Au-delà du Cosmos, de la température, du Zéro Absolu... Un duel de volonté. Un duel dans lequel elle a failli se retrouver à son désavantage. Elle pense alors à briser la glace. Non, elle la brise. D'un simple acte de volonté, telle la Déesse qu'elle était. Mais bien vite elle commence à se reformer.

-"C'est toi qui as engagé le combat sur le plan spirituel et qui t'es ainsi exposée, Némésis... A toi d'en assumer les conséquences." réplique froidement le Chevalier du Cygne.

C'était trop pour la Déesse de la Vengeance, qui, fidèle à son nom, n'allait pas se laisser insulter sans réagir. Alors qu'elle menaçait d'être emprisonnée dans les glaces, parallèlement, des flammes ardentes apparaissaient sous la silhouette du Chevalier du Cygne, menaçant de lui infliger un sort au moins aussi funeste.

"Ne me fais pas rire, Chevalier du Cygne ! Nous voilà à égalité, ce duel est au premier de nous deux dont la volonté cèdera, et tu le sais aussi bien que moi !" réplique hargneusement Némésis.

-"Nous verrons cela... Mais ce combat pourrait fort bien durer mille jours et mille nuits, comme tu le sais... Es-tu prête à accepter cela ?" demande calmement Hyoga, visiblement déterminé, bien qu'au fond de son esprit, il lui soit inacceptable de combattre pendant autant de temps.

Un éclair de rage passa au travers des yeux de Némésis, face à cette dernière provocation. Elle venait de se retrouver prise entre le choix de laisser sa rage prendre totalement le dessus ou penser aux plans de son maître. Elle savait que même si elle était vaincue, son rôle pourrait se perpétrer. Atteindre l'Ultime Chaos au nom d'Arès. Même si elle perdait ce combat, cela n'avait pas d'importance. Elle pouvait atteindre son but. Et réfléchissant froidement et calmement pour la première fois depuis ce combat, elle se permit un sourire mauvais, réalisant qu'elle avait rempli son objectif. Indirectement. Elle avait forcé son ennemi à révéler un potentiel chaotique supérieur, indéniablement égal au sien. Et il était temps de le tester.

Elle laissa librement exploser son Cosmos et son essence divine, renonçant à sa conscience, devenant puissance divine pure. Hyoga se contenta de fermer les yeux, et d'imiter son adversaire, en libérant tout son Cosmos. Le contact de leurs souffles de froid et de flammes, de leurs cosmos, de leurs âmes même, provoqua une nouvelle explosion thermique d'une puissance démesurée... Réduisant à néant une nouvelle tour du Bastion d'Azura dans une déchirure cosmique, exilant le lieu de l'extérieur et de la réalité.



"Némésis... Ma soeur... Toi aussi ?!" lache une Déesse en un autre lieu, constatant froidement l'annihilation mutuelle qui vient de se produire. Trois des Généraux Démoniaques ont été vaincus. Trois verrous sur la porte menant à la salle du trône d'Arès sont tombés.

Et Arès qui a prévu cette éventualité, non, qui l'attend, même. Eris sait déja ce que son Seigneur a déclenché en guise de contre-mesure. Cela signifie d'ores et déja la défaite prochaine d'Azura, elle le sait.

Il ne reste plus qu'à se consacrer entièrement au combat, il n'y a plus d'enjeu. Regardant la porte de la salle de sa tour, fixant le métal sanglant, fixant son reflet déformé dans le métal, au delà de son reflet, elle voit. Elle voit la forteresse entière, et le flux de Cosmos. Un Cosmos perturbe le labyrinthe dimensionnel, un Cosmos qui maintient le tissu dimensionnel. Et un homme s'approche d'elle, tenant en main une des clés menant aux tours Démoniaques.

"Sorento de la Sirène. L'homme dont la flûte ensorcèle et transporte l'âme dans les profondeurs des Océans." énonce la Déesse de la Discorde, calmement et froidement, se reconcentrant sur son devoir, tandis que la porte s'ouvre.

-"En effet, c'est bien moi." répond une douce voix, alors que dans un bruit de pas égal et harmonieux se révèle la silhouette du jeune Général de la Sirène, arborant fièrement ses écailles. "Et vous allez devoir m'accorder la faveur d'être mon adversaire, Eris..."

-"Tu désires donc te mesurer à moi, connaissant la différence qu'il existe entre un être comme toi et une Déesse ?" réplique, presque amusée, la Déesse. Un bref instant avant de considérer l'être, Sorento, l'humain, dans toute son entièreté. De regarder au delà de la chair et de l'armure, et de sentir jusqu'à l'âme et au Cosmos.

Et elle lit en lui... Dévotion pure, conviction ancrée, connaissance du bien et du mal. Elle lit son combat contre Erèbe, qui lui a fait comprendre les motivations de cette guerre. Il n'agit pas par fanatisme... Ni par pure loyauté pour Poséïdon. Par loyauté pour ce monde et cette ère que Arès et les siens tentent d'écraser et effacer. Tristesse il y a, mais aussi espoir. L'image d'Athéna et son merveilleux chant y sont gravés. Il n'y a en cet esprit d'artiste aucune passion qui consume son âme, juste des sentiments et des pensées qui la teintent et la définissent. Une âme parfaitement équilibrée et au premier abord imprenable. Un défi digne de la Déesse de la Discorde... pense-t-elle avec un sourire.

"Ce que vous avez lu vous a-t-il appris quelque chose, Déesse de la Discorde ?" demande laconiquement Sorento, extrayant Eris de sa contemplation de l'âme de son ennemi.

"Tu... en étais conscient ? Alors c'est ton combat contre Erèbe qui..." lache une Eris légèrement surprise. "Evidemment. J'aurais du le deviner..." se reprend-elle, d'un ton assuré.

Sorento fronce ses sourcils, sentant le combat sur le point de commencer, portant son instrument d'or à ses lèvres, fermant les yeux, s'abandonnant à l'étreinte de son Cosmos, couleur d'océan, laissant ses cheveux flotter comme si véritablement il se trouvait dans l'eau.

"Dead End Symphony..." lache Sorento alors qu'il entame la mélodie mortelle pareille au chant des Sirènes, qui frappe directement le coeur.

"Qu'espères-tu donc, Sorento ? Tu n'es qu'un mortel, un simple mortel, bien que je l'admette, doué de talents artistiques hors du commun."

Chose rare. Sorento daigne interrompre son récital, rouvrant les yeux pour croiser froidement le regard de la Déesse, sans se départir de l'aura de puissance qui l'entoure, faisant briller son armure de milles feux.

"Sachez, Déesse, que même le grand Hadès fut charmé jadis par la musique d'Orphée... C'est là une musique qui touche l'âme, et Dieux ou humains, il n'y a là nulle différence... Dieux et humains sont égaux face aux émotions qui vivent en eux."

-"Que de belles paroles. Mais tu vas découvrir une chose, pour ton malheur..."

La déesse révèle alors un sourire démoniaque, un rictus propre à ceux qui vont sortir leur atout maître et qui savent d'ores et déja quel en sera l'impact.

"Ecoute... Le chant de la Discorde... Ecoute l'appel des ténèbres au plus profond de toi... "DARKNESS'S CAROL!""

C'est au tour de Sorento de sonder son adversaire, à présent... Alors qu'elle entonne un chant... sombre, majestueux, guerrier, puissant... Et dans cette harmonie, il entend, il voit, il sent, il lit... les Ténèbres pures. L'âme d'Eris est pareille à celle d'Erèbe, un brasier noir... Ardent, chaotique, mais parfaitement maîtrisé. Une flamme noire qui peut prendre toutes les formes. Une énergie qui incarne la dissonance et la corruption. Une capacité destructrice subtile... Mais pour quel but ?

Au delà de ces ténèbres infinies, Sorento perçoit... Lumière. Ténèbres. Lumière. Ténèbres. En un cycle infini. Avec une puissance telle, qu'il se sent projeté au milieu de l'univers, grain de poussière au milieu de l'espace, observant le cycle des astres, le soleil qui nait et s'éteint, l'univers qui s'étend et se contracte, un nouveau Big Bang, et une nouvelle annihilation. Tout cela dans l'âme de la Déesse de la Discorde. C'est là sa vision de l'univers, une répétition de cycles. Et pour elle la Terre est en train de basculer vers un cycle d'ombre.

La sueur coule du front de Sorento, alors qu'il vient de mesurer la puissance de vision, la force d'esprit dont un Dieu est capable. Il se sent fléchir un instant, comme s'il devait presque s'excuser d'accomplir un sacrilège en s'opposant à un cycle universel que Eris représenterait. Un rictus se dessine alors sur le visage de Némésis.

"Non... C'est impossible! Elle... Ce ne peut être la vérité!" pense Sorento, continuant sa mélodie mortelle, ses doigts presque détachés de son corps, tant il est habitué à ces gestes.

-"Et pourtant si, Général... Cet univers dans lequel nous sommes, régi par Zeus, Poséïdon, Athéna et Hadès, orchestré par Zeus il y a de cela des millénaires, est une construction qui devra prendre fin un jour... Il est déja en train de pourrir, et nous, les Démons, ne sommes là que pour lui porter le coup de grâce... Une chose qui naît grandira, flétrira, vieillira et enfin pourrira. C'est là un mouvement inévitable dans le cycle universel. Tu as vu la Vérité, le Crépuscule est arrivé. Ou alors, montre-moi donc que ce monde que tu aimes ne doit pas prendre fin."

-"Tu es en train de me dire que je devrais vous laisser porter atteinte à tout ce qui représente le bien, le sacré en ce monde ?! Que c'est vous qui incarnez l'ordre universel ?!"


-"Si c'est là la réponse que ton âme daigne trouver... Qu'il en soit ainsi." lance mentalement la Déesse alors qu'elle continue son cantique de ténèbres, fixant d'un regard malveillant Sorento. "C'est pour cela que le conflit du bien contre le mal doit avoir lieu en permanence. Pour forcer l'humanité à réaffirmer ce qu'elle souhaite perdre et ce qu'elle souhaite protéger... Mais comme Erèbe te l'a dit, elle n'est pas capable de nous résister. Par conséquent elle doit être détruite et recrée, plus forte qu'avant!"

-"Assez de mensonges ! C'est... impossible !" réplique par la pensée le Général de Poséïdon alors qu'il sent son esprit plier sous le choc de ce qu'il a vu.

L'instant fatidique arrive, Sorento laisse tomber son instrument d'or au sol dans un teintement, ayant perdu toute contenance. Les yeux de la Déesse démoniaque s'étrecissent, constatant la chute de l'instrument, signe de renoncement, alors que Sorento tombe à genoux, écrasé par le Cosmos de la Déesse, qui broie son Ecaille comme une feuille de papier, laissant de simples miettes retomber au sol.

"Tout comme les serviteurs divins, tu es limité, Sorento... Tu incarnes harmonie et stase, mais tu ne connais pas les ténèbres et tu refuses de les voir en face. Tu ne souhaites pas voir ce monde que tu connais disparaître. Mais cette disparition est une chose inévitable qui doit arriver, maintenant. Car c'est nous, les Généraux Démoniaques aux ordres d'Arès qui avons pour mission d'amener l'Apocalypse ! Embrasse ta part de ténèbres, celle que tes Dieux t'ont si longtemps renié !"

La voix de la Déesse de la Discorde prend alors un ton dissonnant, devenant une onde capable de déchirer jusqu'à l'âme. Sorento réalise alors avec horreur la similitude avec le principe du Dead End Symphony, tandis qu'il se voit, transposé dans un lieu sombre, dénué de lumière et de chaleur... et qu'il sent son être consumé petit à petit par une présence familière... La sienne... Sans être la sienne. Une présence ténébreuse. Comme un reflet sombre dans un miroir. Une présence qui se glisse en lui insidieusement, sans douleur physique, mais en inspirant en lui une terreur sans fin. Une expression de dégoût tord les traits du guerrier de Poséïdon, alors qu'il pousse un hurlement.

"NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON !!!"

Il est rare de voir un homme d'exception comme le Général Sorento, le calme et lucide combattant, se perdre ainsi en exclamations de désespoir, réalise Eris avec un rictus amusé alors qu'elle voit se débattre le Général de la Sirène... tandis que son sombre Cosmos s'infiltre petit à petit dans son corps, l'enveloppant dans la même aura noire qu'elle, alors qu'elle lui rend cette part sombre. Cette part de ténèbres que chaque être devrait posséder en lui... Et dont l'association a été interdite par une loi universelle il y a des millénaires.

"Es... Est-ce là la vérité ? La véritable nature humaine ?" demande tremblant le Marina.

Eris s'avance d'un pas égal et calme vers le Général démuni de protection, avec un sourire démoniaque. Elle lève la main, avant de l'abattre paume ouverte en direction de Sorento, libérant une pression invisible et démesurée.

Incapable de parer le coup, encore moins de réagir, dans un tel état de choc, Sorento est balayé et projeté contre le mur avec une pression inouïe... Assomé sur le coup.

-"Hin... Et maintenant que tu es souillé, corps et âme, crois-tu seulement que tes amis t'accepteraient encore ? Alors que tu as découvert la part de ténèbres qui te revenait de droit ?"

Instant de silence, pendant lequel Eris attend une réponse qui ne peut venir.

"OUI !!!!!"

Eris réalise alors que ce n'est pas Sorento qui a hurlé ce mot. Comme frappée par un coup d'une violence inouïe, elle se retourne, et aperçoit avec horreur derrière elle, fusant à la vitesse de la lumière... Une chaîne dorée prolongée d'une extrêmité pointue et tranchante...

D'un rapide, agile et majestueux saut, malgré l'ampleur de l'Armure Démoniaque qu'elle revet, elle esquive l'assaut, bien que de justesse. Et à son bout, Eris peut apercevoir... une silhouette encore dans l'ombre, mais parée d'une armure indéniablement divine.

"Shun d'Andromède ?!"

-"Lui-même." réplique sur un ton froid et glacial qui lui était encore inconnu il y a peu, le Chevalier Andromède.

Eris elle-même a peine à croire que c'est bien le même Shun d'Andromède que celui qu'elle connaît qui vient de parler à l'instant, tant son ton est dénué de la candeur et l'innocence qui en quelque sorte le définissaient.

Se tournant vers Sorento, son regard semble s'adoucir pour redevenir celui qui lui était familier.

"Sorento, qu'importe si tu vois les Ténèbres en toi, cela ne change rien. Qui donc peut décider que parce que tu as désormais en toi une part d'ombre, tu n'es plus apte à protéger ce monde ?"

Ses mots semblent lancés dans le vides, mais il n'en est rien. C'est plus pour lui-même que Shun vient de les prononcer que pour Sorento.

-"Sais-tu seulement de quoi tu parles, Chevalier Andromède ? Il ne s'agit pas simplement d'un passé tragique d'assassin comme ce fut le cas pour des gens comme Sergueï, Shiva ou Alexer... Ce que je lui ai fait voir est totalement différent..." réplique une Eris amusée par le discours du Chevalier Andromède.

-"Tu lui as donné une part de cette 'flamme des ténèbres', c'est bien de celà qu'il est question ?" répond Shun instantanément, presque surpris lui-même par la certitude et la spontanéité de sa réponse.

C'est au tour d'Eris d'être ébahie. Mais elle sait que les cinq Chevaliers Divins sont passés par l'Endless Void. Au coeur des ténèbres pures d'où sont issus les Démons et la fameuse Flamme de Ténèbres dont il vient de parler.

-"Effectivement. Et cela fait donc de lui un être différent des simples humains que vous êtes... Il n'est plus limité comme le sont les serviteurs divins! Et il a vu la vraie nature de l'univers, et l'hérésie que Zeus et les siens ont bâtie !"

-"Effectivement, comme tu viens de le dire... Tu n'as fait que rendre Sorento plus puissant. Son esprit n'est pas assez faible pour sombrer dans la folie simplement à cause de cela." réplique laconiquement Shun.

Eris sonde le Cosmos du Chevalier Divin face à lui. Il est de ceux qui ont compris l'essence du 8ème sens, la capacité à contrôler changement et stase. Pour l'instant, son aura est... insondable. Vide. Seuls ressortent la détermination et la vision d'un futur radieux, inondé de lumière. L'image d'un guerrier en armure ailée transperçant l'armure d'un autre guerrier paré d'ailes de démon parvient à son esprit. Eris écarquille les yeux alors qu'elle lit en lui tout ce qu'ils ont vu par leur passage dans l'Endless Void. Elle voit, relatée par Aiolia et Aiolos, dans ce futur d'apocalypse, sa propre mort par la main de Shaka, être également doté d'une part de ténèbres et de lumière, ayant atteint ainsi la complétion.

Se retournant vers Sorento, toujours hagard et déconnecté de la réalité par le choc, une sueur froide commençant à se former, elle considère presque avec terreur ce qu'elle vient d'engendrer et qu'elle croyait déja devenu un Démon de plus.

Puis elle se souvient. Ce combat n'a plus d'enjeu réel. Elle n'a fait que créer un agent de plus pour apporter l'Ultime Chaos. C'est là bien suffisant. Et cette seule pensée suffit à taire instantanément le doute en elle. Sorento a désormais acquis la possibilité de s'éveiller en tant qu'Ange ou en tant que Démon s'il le choisit... Mais cela n'a désormais plus d'importance. Il est devenu un pion d'une puissance incroyable dans ce jeu de pouvoir. Et cela va dans le sens du plan de son Seigneur et maître, Arès.

"A présent, Eris, bats-toi."

Eris semble surprise à nouveau. C'est le Chevalier Andromède lui-même qui vient de demander le combat. Et son regard indique qu'il a parfaitement compris qu'il s'agissait d'un combat à mort. Son regard est celui d'un innocent qui a été contraint de tuer contre son gré une fois de trop. La vision d'une tempête d'apocalypse s'impose à son esprit alors qu'elle voit une centaine de cadavres balayés. Un sursaut, et elle réalise que ce n'est pas simplement elle qui a lu dans l'esprit du Chevalier... C'est le Chevalier lui-même qui a décidé de lui montrer cela. En un dernier avertissement. Avant le point de non-retour.

"A ta guise, Andromède... Montre-moi si ta conviction peut entraver l'Apocalypse!"

Eris se met en garde, et dégaîne enfin son Epée Démoniaque, pendant jusque là à sa ceinture.

"Je vais briser jusqu'à ton âme, Andromède... "SHATTER THE SOUL!!!"" lance la Déesse de la Discorde alors que la lame de l'épée s'abat en direction d'Andromède, fendant l'air.

Froncement de sourcils chez Shun. Il a déja entendu parler de cet arcane. Une succession d'images aperçues alors qu'il remontait le cours de la réalité et des dimensions lui revient à l'esprit. C'est bien la même technique qu'Eris avait alors utilisée. Un simple déplacement de côté, et la vague d'énergie le manque... avant, à sa grande surprise, de s'incurver et de se diviser pour mieux le frapper.

Rolling Defense. Sans même prononcer le nom de l'arcane, la majestueuse chaîne dorée prend sa position en un tourbillon d'or pour protéger son possesseur, qui se permet un sourire reconnaissant à l'adresse de son instrument. Mais c'était sans compter l'attaque divine. Vitesse, puissance ou technique n'importent plus. Eris voulait toucher, et elle toucha. Shun avait baissé sa garde mentalement, et prit l'attaque de plein fouet.

"Et à la fin de l'envoi, je touche, Andromède. Toi aussi, découvre les affres des ténèbres."

Shun sentit l'attaque frapper sa psyché, l'assaillir par une décharge d'émotions positives et négatives, tiraillant son âme dans toutes les directions. Non. L'attaque ne vient pas de l'extérieur. Elle est directement induite dans son esprit pour le déchirer, et engendrer un conflit mental qui aboutira en une annihilation. Un bref instant surpris par le coup, Shun se reprend vite, à l'instant où comme si le coup d'épée faisait son effet, son âme semblait se déchirer entre lumière et ténèbres.

Et alors apparaît devant Eris l'image, la silhouette de lumière d'un jeune homme à la longue cheveleure, portant un long sceptre...

"Que... ?!"

Eris se rétracte, se mettant en garde, plaçant son épée à la lame lisse et sombre en posture défensive. Et elle réalise que ce n'est qu'une vision de son esprit.

"Alors c'est grâce à cet homme que vous êtes revenus sur cette Terre ? C'est lui la raison pour laquelle ton esprit ne cèdera pas ?" crache une Eris prise au dépourvu et remplie de rage.

-"Exactement, Némésis. Cet homme, Atropos de la Carène ainsi que ses frères, a sacrifié sa vie pour nous permettre de revenir. Même si mon âme doit être réduite en miettes, je ne peux pas abandonner alors qu'il nous a confié ses rêves... J'ai vu l'Enfer sur Terre, ravagé par Arès et Hadès..."

Soudain le son d'une flûte s'élève à nouveau dans l'air, à la surprise d'Eris.

"Sirène ?!" hurle la Déesse de la Discorde alors qu'elle se retrouve encerclée par Shun et le Général des Mers.

Le regard du Marina est de nouveau déterminé, alors que son Cosmos pur comme l'océan se déploie, plus puissant que jamais.

"Merci, Shun... De m'avoir rendu l'espoir... Moi aussi je vais me battre ! Seigneur Poséïdon... Prêtez moi la force..." émet mentalement le Marina, absorbé par sa musique.

-"Imbécile ! L'être que tu es ne peut plus être protégé par un Dieu ! Tu es maintenant un guerrier déchu !" réplique Eris, incrédule.

-"Erreur, Eris. Je te l'ai dit, tu sous-estimes l'humanité. Tu lui as fait mordre le fruit défendu, mais cela ne le condamne pas à devenir mauvais." corrige un Shun qui a lui-même commencé à intensifier son Cosmos.

-"Vos belles paroles ne changent rien... Vous êtes tous les deux... Des hommes morts !"

Alors qu'elle prononce ces mots avec venin, Shun sent la nausée l'atteindre alors que le Cosmos d'Eris se déploie, l'auréolant de noir... Anti-cosmos, réalise vite Shun, alors qu'il porte sa main à sa bouche pour réprimer un vomissement. Elle est en train de tordre la trame de la réalité selon sa volonté, alors que de macabres marques guerrières sombres apparaîssent sur son visage. C'est ce dégagement d'énergie qui provoque en lui un tel dégoût. Un regard vers Sorento lui indique qu'il en ressent plutôt de la surprise que du dégoût.

"S'il a véritablement reçu une part d'anti-Cosmos, c'est normal que son esprit puisse accepter cela... Mais que...!" pense Andromède.

Soudain, il écarquille les yeux de stupeur alors qu'il sent la présence d'Eris... devant lui. Derrière lui. Sur sa gauche. Sur sa droite.

"Quoi ?!" pense Shun alors que le retour d'information de ses sens, non pas physiques, mais cosmiques, atteint son esprit, et est classé par ce dernier comme "impossible", voire "paradoxal".

La déesse semble véritablement s'être démultipliée dans la grande salle où le combat a lieu, à la surprise de Shun.

"La Discorde... C'est donc ça ?!" s'exclame Sorento alors qu'il contemple le spectacle... Le donjon, la salle de minerai rouge, où dansent dans les airs, plusieurs manifestations macabres de la Déesse de la Discorde.

"Exactement, Shun, Sorento. La Discorde est un concept... par lequel j'existe, par lequel j'agis... Il ne s'agit pas simplement de briser l'harmonie des esprits ou de semer le conflit... La Discorde peut corrompre jusqu'à la trame de la réalité... Et c'est ce à quoi vous assistez en ce moment. Le Paradoxe, une de mes autres facettes." annonce la voix désincarnée d'Eris, à travers toutes ses matérialisations.

"A présent, nous allons jouer à un petit jeu, mes chers amis... Un jeu où vous risquez votre vie, et où vous finirez par mourir. Définitivement."

Shun et Sorento frémissent à ces mots, se mettant en garde, alors qu'Eris, ou plutôt, chacune de ses réflexions, dégaîne son Epée Démoniaque, pour porter un coup d'estoc à la vitesse de la lumière. Autant de lames d'énergie pure à esquiver.

En un éclair, Shun se jette en avant vers Sorento, conscient que ce dernier ne pourra pas se protéger, et risque une mort certaine au premier coup, dénué de protection qu'il est. Et en un tourbillon doré, la Rolling Defense se déploie, sans que Shun n'aie eu à y penser. La chaîne a agi d'elle même en réponse à la volonté de Shun de protéger son ami.

"Impressionnante chaîne..." ironise l'une des ombres d'Eris, alors qu'une lame d'énergie s'abat sur la sphère d'or formée par la chaîne d'Andromède autour des deux combattants.

"Mais tiendra-t-elle ?" ajoute une autre avec perfidie, abattant une nouvelle fois l'Epée de ténèbres.

"J'en doute, j'en doute ! Bien vite tu vas mourir, Andromède !" lache avec une voie suraigüe d'Erynie une des autres ombres.

Shun serre les dents alors qu'il réalise la vérité dans ces mots. Il est sur la défensive et est en situation peu favorable. Toute divine que son armure soit, la chaîne a ses limites, pense Shun, alors qu'il voit déja des maillons se fissurer sous l'impact des coups d'épée d'Eris.

Sorento reste muet, incapable de détacher son regard de Shun, dont le visage affiche une détermination et une concentration froides, si différentes de ce qu'il lui avait été donné de voir chez lui. Il semble attendre quelque chose, placide, les yeux fermés, alors que sa défense est sur le point de tomber.

Enfin, un maillon de la chaîne d'or cède, laissant une ouverture dans la sphère d'or pur.

"Maintenant."

En un éclair Shun rouvre les yeux, et un éclair doré s'engouffre par la brêche, peu avant que la chaîne défensive ne tombe en pièces, usée par les assauts répétés.

"THUNDER WAVE !!!" hurle Shun, alors que l'éclair doré cesse d'être un simple éclair, pour devenir un fouet de métal doré pur, fendant l'air, en ondulant, frappant une ombre, puis une autre, à la suite, semblant fendre les dimensions à la recherche de sa cible.

"Pas encore... Pas encore..." pense Shun, alors qu'il voit, ombre par ombre, les répliques d'Eris se faire traverser de part en part, par la pointe de sa chaîne.

Bien vite, chaque ombre dans la pièce est transpercée par la chaîne. Le mouvement n'a même pas duré une demi-seconde. Et les ombres de la Déesse se dissipent, s'effondrant en une poussière noire qui disparaît au sol...

"Je te tiens, Eris !" lance fièrement Shun, alors que sa chaîne achève sa course folle, dans ce qui semble être un trou noir, fendant les dimensions.

Impact du métal contre le métal, une Epée qui vole et glisse au sol aux pieds de Shun, alors que la chaîne s'enroule autour du poignet de la véritable Eris.

"Félicitations, Andromède... Tu t'es remarquablement bien sorti de ce piège..."

Un rictus mauvais apparaît sur le visage de la déesse, ce visage qui aurait pu être angélique si ce n'était pas celui d'une divinité démoniaque.

"... Mais tu as trop de réflexes humains pour me vaincre."

Un frottement léger du métal sur le sol, et voilà l'Epée Démoniaque qui lévite d'elle-même pour se planter dans le dos d'un Shun pris au dépourvu. Douleur, surprise se mêlent alors que Shun sent la lame transpercer ses entrailles, et qu'il plie genou, la douleur déformant ses traits. Non pas une simple douleur, mais l'impression d'être transpercé par un pieu métallique porté au rouge. L'impression que l'essence du mal est en train de ronger son âme.

"Privé de ta chère chaîne défensive, tu ne pouvais pas esquiver ce coup. Echec et mat."

La chaîne offensive se détache du bras de la Déesse, semblant également privée de vie.

"Je ne crois pas." lance un Sorento décidé à se battre, malgré son absence de protection et une chance de victoire à peu près équivalente.

-"Sirène, tu n'as pas ta place dans ce combat. Tu n'es pas de taille, et tu ne portes même plus de protection. Qu'espères-tu ?" lance une Eris amusée. "Me divertir ? Tu ferais un excellent bouffon."

Sorento se saisit de sa flûte, et se met à jouer une mélodie que Shun identifie comme... la Dead End Symphony. La musique s'imprime dans son esprit, mais contrairement à la dernière fois qu'il lui a été donné de l'entendre, elle n'induit pas douleur et souffrance, au contraire... Elle apaise la douleur, du coeur et de l'âme.

Eris quant à elle, peut ressentir l'assaut qui est fait à son esprit. Elle se sent touchée par la musique de Sorento. Il n'y a plus de doute en lui, maintenant qu'il connaît les réponses à ses interrogations. Il a décidé de défendre ce en quoi il croyait en cet univers. Cela se ressent dans la majesté qui émane de son Cosmos, plus puissant qu'avant, que jamais.

"J'ai enfin réalisé... A quel point j'étais stupide de douter. Au fond, Eris, tu n'as fait que me faire perdre du temps. Que je sois Ange, Démon, ou quoi que ce soit d'autre, je suis moi. Et je souhaite défendre ce monde que j'aime, et me battre pour le rendre meilleur encore. Il n'y a rien d'autre qui compte."

Comme pour accompagner ces mots, non prononcés, mais réels, le corps de Sorento est enveloppé d'une douce lumière bleu océan qui recouvre petit à petit son corps pour reprendre la forme de l'Ecaille de la Sirène Maléfique... Non, une forme approchante, mais quelque peu différente réalise Shun, surpris. Un expression de joie et de reconnaissance se dessine sur son visage alors que la lumière s'estompe pour laisser place à une Ecaille similaire à celle que portait le Marina, mais indéniablement plus belle et plus puissante.

-"Non... Tu veux dire que Poséïdon te reconnaîtrait toujours comme un de ses guerriers malgré cela ?! Je refuse de le croire..."

-"Pourtant c'est là un fait. Poséïdon ne m'a pas abandonné." réplique Sorento, désormais de nouveau en pleine possession de ses moyens, et conscient d'agir pour une cause juste, soutenu en cela par son Seigneur.

-"Les Dieux ont vraiment changé... Ils craignent donc tant que cela l'Apocalypse ?" pense la Déesse, alors que ce qui était là pour elle une occasion de s'amuser aux dépends de ses proies semble s'envoler.

-"Eris, Déesse de la Discorde, nous allons désormais mettre un terme à tes agissements." ajoute Shun, alors qu'il se relève, intensifiant son Cosmos, à un tel degré qu'Eris elle-même ne peut réprimer un sursaut de surprise. Un Cosmos tel que l'Epée se retrouve contrainte de quitter d'elle-même le corps de sa victime, tant elle sent sa pureté l'affecter.

La Déesse tend la main alors que l'arme lui revient sans le moindre ordre, prête à de nouveau attaquer. Avec horreur elle constate que la lame a perdu de son éclat, comme rongée par la pureté du Cosmos de Shun.

"Shun, il faut la détruire corps et âme... J'aurai besoin de ta force... et toi de la mienne... Il faudra que tu déclenches ta plus puissante Tempête Nébulaire... En la combinant aux effets du Dead End Climax..."

Sorento n'achève pas sa phrase, tant la fin en est évidente. Shun acquiesce à l'échange mental qui vient d'avoir lieu, intensifiant son Cosmos de plus belle. Eris observe ses deux ennemis calmement, comprenant bien quelle tournure va prendre ce combat à présent. Rien ne servirait de les vaincre, maintenant. Mais avant cela...

"Vous voulez donc vous battre avec l'énergie du désespoir... Hin..." lache une Eris qui a désormais baissé sa garde, comme si le combat venait de perdre tout intérêt à ses yeux.

"Dans ce cas..." achève-t-elle alors qu'elle croise les bras devant son torse, intensifiant son Cosmos en une aura sombre, comme elle l'avait fait l'instant d'avant. De nouveau la sensation de nausée, infiniment plus forte. Et un mouvement de Cosmos familier, déja ressenti, par le Chevalier Andromède.

"Elle est complètement folle... Ce mouvement de Cosmos... Mais oui ! C'est similaire en tout points à..."

Shun écarquille les yeux, avec horreur.

"L'Ultime Dragon! Elle va... consumer tout son Cosmos!" pense Shun avec horreur.

-"Tu veux dire qu'elle va... s'auto-détruire ?!" réplique un Sorento tout aussi horrifié.

Eris se permet un dernier sourire, le sourire de ceux qui ont dans sa défaite obtenu une forme de victoire. Qu'Arès gagne ou qu'Arès perde, l'engrenage est désormais en marche. Et rien ne l'arrêtera. C'est avec un regard exalté qu'elle prononce ces derniers mots...

"Je vais vous donner à la fois la victoire... et la défaite !"

"MOURREZ, CHEVALIERS !!!"

Explosion d'anti-énergie pure. Surprise pour les deux guerriers, qui souffrent d'une fraction de seconde d'hésitation avant de réagir, avant de changer l'hésitation et la peur en détermination. Un regard est échangé, un accord passé. Et les deux se jettent dans la bataille.

"ULTIMA NEBULA STORM !!!"

"DEAD END CLIMAX !!!"


Et un nouveau bastion d'Azura s'effondre...

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Cette fiction est copyright Stéphane Lapie.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.