Chapitre 10 : Athéna


Le coeur de Sakura battait plus fort à chaque pas. Elle voyait les lourdes portes de bronze se rapprocher de plus en plus. Sentant sa nervosité, Shun tenta de la rassurer.

Shun : Ne t'inquiète pas, c'est peut être une déesse, mais elle est très humaine. Tes oncles Ikki et Seiya se permettent même de la tutoyer et de l'appeler par son petit nom.

Kiki ouvrit les portes et laissa passer les hôtes d'Athéna. Celle-ci les attendait assise sur son trône avec un sourire radieux.

Athéna : Shun, Shina, je suis bien contente de vous revoir. Vous n'avez guère changé en quinze ans.

Les deux intéressés restèrent un moment interdits. Saori était presque méconnaissable. Son teint bien sur s'était halé avec le temps, mais ses cheveux étaient plus courts et onduleux et ses yeux étaient à présent pers. Sa tenue aussi avait subi des changements, elle ne portait plus une robe mais une tunique d'entraînement propre aux femmes chevaliers d'un blanc immaculé. Elle avait troqué ses talons aiguilles pour des sandales.

Shun : Sa... Saori ? Quelle métamorphose !

Le sourie de la déesse s'effaça pour laisser place à une expression de sévérité.

Athéna (à Kiki) : Tu ne leur as rien dit ?
Kiki : Je pensais que c'était à vous de le faire.

Le visage de Saori se radoucit, mais c'est de la tristesse que l'on pouvait lire à présent.

Athéna : Tu as raison Kiki, ce n'est pas à toi que revient cette tache. Tu peux te retirer.
Kiki : Très bien Athéna, je vais prévenir les autres.

Kiki sortit de la salle.

Athéna (à Shun et Shina) : Chevaliers, je dois vous faire part d'une triste réalité. L'esprit de celle que vous appeliez Saori Kido a disparu il y a bien longtemps. Elle a de son propre chef décidé de me laisser le contrôle total de son corps en disparaissant. C'est donc Athéna en personne qui vous parle et non un être humain que j'aurais investi de ma puissance divine.

Shun pour qui toute vie était importante peinait à retenir ses larmes.

Shun : Q... Quand s'est elle sacrifiée ?
Athéna : Elle a fait ce geste courageux il y a presque quinze ans. Quand elle vous a envoyés à Paris, c'était aussi dans l'optique de mettre fin à ses jours sans que vous le sachiez. Kiki était le seul dans la confidence. Si je n'ai rien dit à personne lorsque j'ai pris possession de ce corps, c'est que je voulais faire l'expérience de l'amitié que vous portiez à Saori. Mes précédentes réincarnations étaient vénérées mais pas aimées. Même si j'ai honte de vous avoir trompés, je ne le regrette pas. Le lien qui m'unit à mes chevaliers n'a jamais été aussi fort. Même quand j'ai cessé cette divine comédie ils ont continué à me traiter comme une amie, avec toutefois un peu plus de déférence.
Shina : Pouvons nous savoir quand, vous avez cessé cette supercherie ?
Athéna : J'ai attendu que vous soyez définitivement installés au Japon pour me révéler à mes chevaliers.
Shina : Pourquoi avoir caché la vérité à mon mari et à moi ?
Athéna : Au début je voulais tout dire à mon retour des enfers, mais votre désir de quitter le Sanctuaire m'a fait reculer l'échéance. Les raisons qui ont poussé Saori à se suicider vous aurait empêchés de vivre un semblant de normalité voire même de partir.
Shun : Quels étaient ces raisons déesse Athéna ?
Athéna : Après sa victoire sur mon oncle Hadès, Saori a entrevu le futur. Elle y a vu de nouvelles batailles plus féroces que les précédentes. Craignant de ne pas être à la hauteur de la tache, elle a décidé de s'effacer afin que je puisse vous guider en personne vers la victoire.
Shina (outrée) : Comment peut on être d'une telle lâcheté, abandonner le combat avant qu'il ne commence !

Athéna n'apprécia pas la réflexion de Shina, elle se leva de son trône et fit brûler son cosmos avec une telle intensité que ses convives durent fermer les yeux.

Athéna (courroucée) : Comment peux tu te permettre de juger cette femme que tu connaissais à peine ? Alors qu'elle n'était pas initiée, elle vous a menés par trois fois à la victoire, à chaque fois elle s'investissait de plus en plus dans la bataille. Sache qu'à part elle, toutes mes réincarnations ont subi l'entraînement propre aux femmes chevaliers, les grands popes étaient leurs maîtres. Jusqu'à présent mes représentantes étaient éduquées pour me ressembler. Saori n'a rien eu de cela, elle a été élevée comme une fille de riche. Son caractère n'a pas été forgé pour subir les affres de la guerre. A sa place j'aurais craqué après la bataille du Sanctuaire. Elle a fait montre d'un courage et d'une abnégation sans faille. Elle ne s'est pas tuée pour ne pas avoir à vivre les futurs combats, mais pour vous donner une chance de les remporter.

A la surprise de son mari et de sa fille, Shina se mit à plat ventre en signe de soumission.

Shina : Je vous prie humblement de me pardonner déesse Athéna.
Athéna (apaisée) : Relève toi chevalier, j'accepte tes excuses.

Athéna prit son sceptre et avança vers Sakura. Elle se mit à la dévisager.

Athéna (à Shun et Shina) : Je vais m'entretenir seule à seule avec votre fille. Ne vous inquiétez pas, je suis au courant de son franc parler et ne me fâcherais pas contre elle.

Athéna guida Sakura jusqu'à une petite pièce.

Athéna : Cela fait bien longtemps que je ne t'ai vue ma filleule, tu as grandi en force et en beauté. Tu ressembles étonnamment à ton père, je me demande ce que tu as hérité de ta mère.
Sakura : Il parait que j'ai son caractère, mais pourquoi m'appelez vous votre filleule ?
Athéna : Parce que je suis ta marraine, j'ai béni ta venue au monde, comme j'ai béni l'union de tes parents. Ils ne t'avaient rien dit ?
Sakura : Je commence à croire qu'à force de vivre dans le secret, me cacher des choses soit devenu une habitude chez eux.
Athéna : Sois un peu indulgente avec eux, je suis certaine qu'ils ont souffert de t'avoir menti.
Sakura : Peut être, mais maman souffrait certainement moins que papa.
Athéna : Qu'est ce qui te fait dire ça ?
Sakura : Son corps est couvert de cicatrices, elle ne m'a jamais dit d'où elles provenaient, ni même inventé une histoire à leur sujet.
Athéna : Sache qu'il y a des blessures qui ne se referment jamais, malheureusement elles sont souvent invisibles à l'oeil. Tu comprendras un jour.
Sakura (presque inaudible) : Non Athéna, je ne comprends que trop bien. J'ai moi aussi une blessure secrète.

Sentant qu'elle s'aventurait sur un sujet épineux, Athéna décida de changer de conversation.

Athéna : Il y a une chose qu'il faut que tu saches, tu as failli ne pas voir le jour.
Sakura : Oncle Ikki m'a déjà parlé de son instant de folie.
Athéna : Tu te trompes ma filleule, ton destin faillit être celé avant ce tragique événement. Quand ta mère est venue m'annoncer qu'elle était enceinte et surtout la façon dont elle l'était devenue, je me voyais dans l'obligation de sévir. Logiquement je devais lui laisser le choix entre deux punitions : l'exil accompagné de l'abandon de son titre de chevalier, ou l'avortement. Mais je savais qu'elle désirait te garder. Elle aurait choisi l'exil sans l'ombre d'un remords. Cependant, j'hésitais à lui imposer l'avortement. Non pas que je me souciais de la vie en elle, mais les femmes qui possèdent le cosmos ont une conscience accrue de leur corps et donc du foetus qu'elles portent. L'avortement est une terrible épreuve pour elles car c'est comme si c'était elles que l'on tuait. Le choc émotionnel est tel qu'elles ne s'en remettent jamais vraiment. Je ne pouvais prendre le risque de perdre un chevalier de sa valeur. Il fallait pourtant que je fasse mon devoir. J'allais rendre ma divine justice quand ton père est arrivé pour annoncer sa paternité. Il ne le sait pas mais ce jour là il te sauva une première fois la vie car c'était bien l'avortement que j'avais fini par choisir comme châtiment. Si Shun était intervenu quelques secondes plus tard, il n'aurait rien changé car ma décision aurait été irrévocable.

Après cette révélation Athéna craignait une réaction trop vive de Sakura. A son grand étonnement, elle se contenta de la fixer avec un regard triste.

Sakura : Je ne crois pas que vous auriez pris cette décision. Vous saviez que ma mère était une guerrière dans l'âme, et comme l'aurait dit Edmond Rostand :"vous voulez la punir ? Privez la de danger". Elle même m'a dit qu'elle avait longtemps hésité avant de décider de suivre papa au Japon. Je suis certaine que l'exil était la sentence que vous alliez annoncer bien que vous étiez sur le point de choisir ma mort.
Athéna : Peut être, mais pendant près de quinze ans je me suis reproché d'avoir songé à attenter à la vie d'une innocente. Sakura, si j'ai voulu te parler seule, c'est que je voulais te demander de me pardonner d'avoir voulu ta mort.
Sakura : Comme vous me l'avez dit, vous deviez sévir pour l'attitude de ma mère, bien sur que je vous pardonne.
Athéna : Tu es bien comme ton père, tu es trop bonne.
Sakura : C'est la première fois que l'on me prête un de ses traits de caractère, d'habitude on me compare à maman.
Athéna : Je suppose donc que tu dois souffrir de ne pas pouvoir devenir chevalier ?
Sakura : Comment êtes vous au courant ?
Athéna : Je connais ton père, je sais que jamais il n'accepterait que tu portes une armure sacrée, surtout en temps de guerre. C'est fort dommage car tu as une puissante cosmoénergie, tu es probablement la plus forte de tes cousines.
Sakura : Vous pourriez peut être intercéder en ma faveur.
Athéna : Désolé ma filleule, j'avais déjà promis à tes parents que si jamais tu t'éveillais au cosmos, je refuserais de te prendre comme chevalier. Et même sans cette promesse, je n'ai aucune envie de me mettre deux de mes plus puissants chevaliers à dos.
Sakura : Est ce que vous n'exagérez pas un peu la force de ma mère ? Elle beaucoup moins forte que papa et mes oncles après tout.

Athéna ne répondit rien. Elle s'approcha d'un piédestal sur lequel reposait un livre relié de cuir rouge. Elle le prit dans ses mains et s'adressa à Sakura.

Athéna : Personne n'a idée de la réelle puissance de Shina, elle même l'ignore. Sakura, je vais avoir besoin de ton aide, mais il faut que tu me fasses une confiance absolue.
Sakura : Vous êtes la personne la plus franche que je n'ai jamais rencontrée, ma confiance vous est toute acquise.
Athéna : En ce cas, quoique je fasse, empêche ton père d'intervenir.

Athéna n'attendit pas la réponse de Sakura et retourna dans la salle du trône où attendaient Shina et Shun.

Athéna : Shina, j'ai ici un objet qui t'appartient. Ce sont les mémoires de Milo, il te les destinait.

Athéna tendit le manuscrit, Shina s'approcha pour le prendre. Au moment où elle le saisit, Athéna plongea sa main au niveau de son plexus solaire transperçant l'armure comme un simple morceau de carton. Shina s'écroula par terre et fut parcourue de spasmes. Le spectacle de sa femme en train d'agoniser mit Shun dans une colère noire. Il s'élança prêt à frapper celle qu'il avait juré de protéger. Mais avant que son poing n'atteigne sa cible, Sakura s'interposa.

Shun : Sakura, écarte toi.
Sakura : Je suis désolée papa, mais si Athéna a fait ça, c'est qu'elle avait une bonne raison.
Athéna : Ta fille a raison Shun, je vais tout t'ex...

Avant que la déesse ne finisse sa phrase, l'urne de l'armure d'Ophiucus déboula dans la salle comme animée d'une vie propre. Elle s'ouvrit et l'armure de Shina quitta son propriétaire pour reprendre sa forme totémique, elle retourna ensuite dans son réceptacle. Celui-ci se mit alors à émettre des pulsations de cosmos en synchronisation avec les spasmes de Shina. Chaque soubresaut du chevalier s'accompagnait d'un accroissement phénoménal de sa cosmoénergie.

Athéna : Ça vient de commencer.
Shun (à Athéna) : Mais qu'avez vous fait ?
Athéna : J'ai touché plusieurs de ses points vitaux afin de libérer son véritable cosmos.

Soudain une vague d'énergie d'une puissance exceptionnelle explosa, obligeant Shun et sa fille à fermer les yeux. Quand ils les rouvrirent, Shina se tenait debout face à son urne métamorphosée, elle n'était plus en argent mais en or. Machinalement mais avec hésitation, Shina posa la main dessus. Elle s'ouvrit laissant apparaître un totem doré totalement différent. Il représentait le buste d'un homme tenant un immense serpent dans les mains. Le totem se fragmenta et alla recouvrir la femme chevalier. Les parties anthropomorphiques se placèrent judicieusement sur le corps et les bras. Le serpent quant à lui se sépara en trois parties, le corps se fendit en deux et alla protéger les jambes, la tête elle, se détacha pour former le casque.
Sakura et son père regardaient éberlués Shina recouverte de son armure d'or, Athéna quant à elle arborait un sourire de satisfaction.

Shina : Athéna, pouvez vous me dire ce qu'il vient de m'arriver ?
Athéna : C'est tout simple Shina, tu viens enfin d'accéder à ton véritable rang dans ma chevalerie. Tu es le treizième chevalier d'or, celui de la constellation d'Ophiucus. Après moi tu es à présent le grand commandeur des autres chevaliers, même les chevaliers divins te doivent respect et obéissance. Ton autorité dépasse celle du Grand Pope.
Shina : Mais pourquoi seulement maintenant ?
Athéna : Tes pouvoirs avaient été mis en sommeil par Milo lors de ton entraînement, car ton corps n'était pas encore prêt à supporter cette puissance. Saga savait qui tu étais réellement, et ne voulant pas perdre le pouvoir qu'il avait usurpé, a tout fait pour t'empêcher de découvrir ta vraie nature. Tu sauras les détails de cette histoire dans le livre que je t'ai donné.

Shun s'approcha de sa femme et s'agenouilla.

Shun : Chevalier, je tiens à être le premier à reconnaître ton autorité.
Shina : Relève toi Shun, tu es ridicule.
Athéna : À présent il faut te faire reconnaître des autres chevaliers. Shun, Sakura, restez dans le temple qui est à présent votre demeure. Sachez que pendant les retrouvailles familiales Kiki a rapporté vos affaires ici. Une servante va venir vous faire visiter vos cartiers pendant notre absence.

Athéna brandit son sceptre et disparut avec Shina.

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Cette fiction est copyright Benjamin Gelbard.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.