Chapitre 1 : Réveil


Un champ de fleurs parcouru par la brise printanière, quelques pétales qui s'envolent et se dessinent dans le regard vide d'un jeune garçon. Il n'est âgé que de quatorze ans et déjà sa vie est derrière lui. Assis dans un fauteuil roulant, il est là sans vraiment y être… privé de son âme. Son corps a pourtant survécu aux nombreuses batailles meurtrières qu'il a livrées contre des ennemis ô combien redoutables et bien souvent plus puissants que lui, et chaque fois, il s'est relevé ; sa volonté indomptable lui a non seulement permis de survivre mais aussi de triompher, jusqu'à ce jour où… son Cosmos s'est éteint, quand la lame léthale du Seigneur des Enfers s'est enfoncée dans son cœur. Le jeune garçon n'est plus que l'ombre du héros qu'il était jadis, ombre sur laquelle veille la personne la plus chère à ses yeux, qu'il avait longtemps cherchée en vain et qu'il venait à peine de retrouver : sa sœur. Seiya n'est plus, le Chevalier Pégase a cessé de faire brûler son Cosmos et n'a même pas pu étreindre sa grande sœur. Seika s'agenouille devant lui et laisse reposer sa tête sur les genoux de son petit frère, serrant fort dans ses mains celles de celui qu'elle cherchait elle aussi à retrouver depuis tant d'années. Une larme perle sur sa joue, le frère qu'elle a retrouvé n'est plus celui qu'elle aurait voulu revoir. Elle n'a ressenti sa présence que durant un bref instant, quand il avait combattu aux Champs Elysées et que l'appel de son Cosmos lui avait fait recouvrer la mémoire. Même l'image de Seika dans les yeux de Seiya ne l'a pas tiré de sa léthargie fatale… Le vent envole quelques feuilles venues des bois alentours, deux ombres humaines apparaissent dans le sous-bois.
- Seiya, murmure une douce voix masculine empreinte de tristesse, ainsi donc c'était vrai… La dernière Guerre Sainte t'a été fatale… (Soupirant…) Je sais ce que je dois faire désormais, je n'ai plus le choix…
A quelques dizaines de mètres du champ de fleurs, à l'opposé de la forêt, se dresse l'imposante demeure de la famille Kido. Par la fenêtre d'une pièce située à l'étage de la résidence de son grand-père, Saori regarde tristement les deux adolescents. La réincarnation de la Déesse Athéna ne s'est jamais vraiment remise de ce qui est arrivé à Seiya il y a pourtant plusieurs semaines de cela. Elle avait tant espéré qu'il reviendrait lui aussi vers le monde de la lumière, qu'il pourrait à nouveau vivre, rire, courir, partager avec ses amis de nouveaux moments privilégiés… Mais ce miracle ne s'est pas produit. Elle-même avait cru à sa propre fin après les ultimes paroles du Seigneur des Enfers qui lui avait promis qu'elle périrait avec ses Chevaliers dans la destruction des Champs Elysées. Mais elle, elle était revenue, avec les quatre Chevaliers de Bronze encore vivants, et… le corps de Seiya… Le corps blessé et meurtri d'un Chevalier dont le Cosmos et la volonté inébranlable avaient fini par être terrassés… Aujourd'hui encore, les larmes coulent dans les yeux de Saori.
Quelques mètres derrière elle, un jeune garçon serre les poings en silence. Jabu ne parvient pas à cacher sa peine et sa fureur intérieures.
- Tu n'avais pas le droit de partir, Seiya, songe-t-il, comment peux-tu nous avoir fait ça ? ! Je ne peux rien faire pour soulager le chagrin de Saori ! Pourquoi ? ! Seiya, pourquoi ne te réveilles-tu pas ? !
Il s'en veut terriblement parce qu'il se révèle impuissant pour apaiser les souffrances de celle qu'il a juré de protéger et qui représente tant pour lui. Mais il en veut aussi à Seiya, car celui-ci n'avait pas le droit de mourir !… Mourir ? Seiya est-il seulement mort pour permettre à tous ceux qui l'aimaient de faire son deuil ? Même pas… Les médecins de la Fondation Graad avaient réussi à soigner toutes les blessures de son corps, mais malgré tous leurs efforts, l'âme de Seiya n'est jamais revenue. Le Chevalier de la Licorne avait fini par admettre que Marine avait eu raison ce jour-là, quand Saori et les Chevaliers Divins étaient revenus du royaume d'Hadès.
- Son Cosmos s'est éteint, avait-elle murmuré, le Cosmos est la source de la vie… la vie de Seiya s'est envolée. Il est parti rejoindre les étoiles… puisse-t-il veiller sur nous…
Le bruit d'une porte qui s'ouvre sort Saori de sa rêverie mélancolique et interrompt la pensée de Jabu : Tatsumi entre dans la pièce et vient glisser quelques mots à l'oreille de la maîtresse des lieux. Acquiesçant d'un signe de tête, Saori suit son majordome à l'extérieur de la pièce. Resté seul, Jabu s'approche de la fenêtre, serrant son poing de plus belle alors que l'image lointaine de Seiya lui apparaît.

***

Un immense planétarium… La jeune fille, à nouveau seule, s'avance en son sein, le cœur mélancolique. Elle renoue avec les racines de son passé humain… C'est dans un endroit comme celui-ci qu'il y a encore quelques mois, elle venait se ressourcer, en communiant avec l'essence de son défunt grand-père, Mitsumasa Kido. Le planétarium dans lequel elle avait l'habitude de venir " écouter " les conseils de son aïeul avait jadis été détruit, mais il y a peu, Tatsumi avait ordonné qu'il soit reconstruit. Les Chevaliers de Bronze n'avaient jamais beaucoup apprécié le fidèle serviteur de feu Mitsumasa Kido, pour bien des raisons que Saori pouvait comprendre, de la même manière qu'elle avait fini par accepter que ceux-ci puissent haïr son grand-père, tout comme ils avaient pu la mépriser, elle… Mais avec elle, Tatsumi s'était toujours montré des plus prévenants et des plus attentifs. Sa fidélité envers la famille Kido et la Fondation Graad n'était plus à prouver : cette fois, Tatsumi avait redonné vie au souvenir de son grand-père.
Saori lève les yeux, les étoiles de Seiya brillent sur le dôme étoilé : les treize étoiles qu'il avait si souvent dessinées avec ses mains pour porter son attaque devenue légendaire. Les larmes coulent à nouveau sur le doux visage de la déesse… quand une étoile filante traverse la constellation de Pégase et vient illuminer le centre de la pièce. Saori se redresse, elle reconnaît la silhouette imposante et rassurante qui se dessine au sein du halo qui vient de naître… Ce qu'elle voit est inattendu, tant elle avait cru que jamais plus elle ne pourrait revivre de tels moments, quand bien même chimériques…
- Ce n'est pas possible… Grand… Grand-père… Est-ce toi, grand-père ?
- Saori, lui répond l'image de Mitsumasa Kido vêtu de son kimono, ma petite fille, mon petit cadeau des dieux… Tu ne dois pas te laisser aller au désespoir, il ne l'aurait pas voulu ainsi… Et tel n'est pas le comportement de la Déesse Athéna.
- Mais grand-père…
- Saori… Ce garçon comptait bien plus pour toi que tu n'as jamais voulu te l'avouer réellement, je le sais, et tu le sais aussi. Et c'est cet amour que tu t'es découvert lui porter qui t'a donné la force de terrasser ton ennemi. Mais la guerre n'est pas finie, et tu devras continuer à te battre… N'oublie jamais la force que t'a donné tout cet amour… L'amour que tu portes aux hommes, l'amour que tu portes à ceux qui te sont chers, l'amour que tu portes à Seiya…
- Grand-père… Mais sans Seiya…
- Seiya… Malgré tout ce que je lui ai fait, il t'a fidèlement servi… Son destin… j'en suis entièrement responsable… Et jamais je n'ai espéré qu'il me pardonne, j'ai juste souhaité qu'il te suive, ce dont je n'ai jamais douté un seul instant. Et jusqu'au bout il te suivra, Saori, par delà les obstacles les plus insurmontables. Ne laisse pas son souvenir devenir un poids dans ta lutte, qu'il soit ta force…
- Grand-père… Pourquoi dis-tu que je dois lutter ? Les Guerres Saintes ne sont-elles pas terminées ? Poséidon et Hadès ont été vaincus…
- Poséidon, reprend le fantôme, ne t'a-t-il point averti ? Souviens-toi, Saori…
Les sueurs se mêlent aux larmes… Saori se remémore les paroles prophétiques de l'Empereur des Mers, quand elle l'avait enfermé à nouveau dans l'Urne Sacrée qui repose dans les profondeurs sous-marines.
- Tu regretteras d'avoir coopéré avec ces imbéciles d'humains, et un jour, c'est toi Athéna qui recevras le châtiment des Dieux de l'Olympe ! Souviens-t'en bien, Athéna !
- Poséidon, avait-elle répondu à l'esprit prisonnier, si tu dis que d'avoir soutenu les humains est une faute, je me battrai même si je dois me mettre à dos tous les Dieux de l'Olympe… Car c'est la mission d'Athéna descendue sur terre !

Le dôme du planétarium est à présent parcouru par une multitude d'étoiles filantes, un ballet magnifique symbolisant le rassemblement des Chevaliers d'Athéna, toujours prêts à la soutenir. Se ressaisissant, la jeune déesse prend conscience que ses victoires sur Poséidon et Hadès n'avaient pas écarté toute menace. Les étoiles filantes qui traversent le planétarium semblent lui redonner force et espoir, elle les observe, les reconnaît… Le Dragon… le Cygne… Andromède… le Phénix… et… Pégase… brillent plus que toutes les autres, créant une lumière extraordinaire.
- Oui, nous sommes revenus dans le monde de la lumière, la lumière est l'espoir qui chasse les ténèbres qui veulent s'abattre sur le monde. ShiryûHyôgaShunIkki… Seiya… Vous m'avez toujours accompagnée dans mes combats, et je sais que si prochaine bataille il y a, je pourrai toujours compter sur vous tous.

***

Les rayons du soleil baignent de leur étincelante radiance l'orée du bois qui jouxte les jardins de la propriété Kido. Seika, toujours en train de veiller sur Seiya, se relève brusquement. Elle distingue clairement au milieu de la lumière deux silhouettes venues de la forêt qui s'avancent dans leur direction.
- Qui… Qui est là ? demande-t-elle timidement.
La plus grande des silhouettes sort de la lumière alors que celle qui l'accompagne s'arrête pour rester dans l'ombre. L'homme est plutôt grand et fort, c'est un Européen, il de beaux cheveux blonds bouclés étincelants, ses yeux bleus respirent la pureté, il porte une grande cape blanche couvrant tout son corps et réfléchissant la lumière du soleil. Un charisme exceptionnel se dégage de son aura.
- Je m'appelle Angelo, dit-il doucement d'une voix agréable. Et toi, tu es Seika, la sœur de Seiya ; Marine m'a parlé de toi…
- Marine… Vous connaissez Marine ?
D'un petit geste de la tête, Angelo fait signe à son compagnon de s'avancer… ou plutôt à sa compagne… Sortant de l'ombre, Marine retire la capuche de son manteau, laissant apparaître son visage masqué.
- Ma… Marine, bégaie Seika, tu es finalement…revenue au Japon…
- Seika, dit Marine d'une voix froide, tu devrais rentrer dans la maison et nous laisser avec Seiya.
- Mais… Pourquoi ? Je… Je ne veux plus le laisser… Qu'est-ce que vous voulez faire avec lui ? Tu as dit toi-même qu'il n'y avait aucun espoir de le sauver. Cet homme qui t'accompagne pourrait-il…
- Je suis désolé, l'interrompt le mystérieux inconnu tout en fermant les yeux, je ne peux rien pour lui.
Pendant un bref instant, un fin et imperceptible halo de lumière est venu nimber le corps d'Angelo. Marine tourne son visage masqué vers son compagnon, comme si elle attendait qu'il lui fournisse une réponse particulière, laquelle ne se fait pas attendre.
- Tu avais raison Marine, le Cosmos de Seiya ne brûle plus, sa flamme s'est éteinte, et avec elle, sa vie…
- Je ne comprends pas, s'immisce Seika, son cœur bat toujours pourtant, et si vous ne pouvez rien faire pour lui, pourquoi êtes-vous venus ici ? Marine, pourquoi avoir amené cet homme si ce n'est pour réveiller Seiya ? Je suis convaincue qu'un jour, il se réveillera, que lui aussi reviendra dans le monde de la lumière.
- Seiya a perdu l'usage de ses sept sens, répond Angelo, il n'a plus aucun moyen d'interagir avec ce monde et ne pourra malheureusement jamais revoir ou ressentir la lumière. Son âme défunte est restée prisonnière de son enveloppe charnelle. J'ignore pourquoi… Est-ce là une malédiction du Seigneur des Enfers ? Ou le tourment d'une âme qui ne parvient pas à accepter sa mort ni à trouver le repos éternel qui devrait être le sien ? Le Cosmos est la source de la vie, l'Ultime Cosmos est le septième sens que Seiya avait appris à maîtriser bien au-delà du commun des mortels et des guerriers sacrés. Or le Cosmos n'existe plus en lui. Tant qu'il reste une étincelle, le Cosmos est immortel et un Chevalier peut toujours se relever, mais l'Empereur de la Mort a visiblement détruit cette dernière étincelle qui lui avait auparavant toujours permis de revenir… Seika… Il t'avait retrouvée… Il ne te cherchait plus… Quand il t'a retrouvée, tu as fait brûler en lui cette étincelle pour la dernière fois…
- Vous… Vous voulez dire que c'est… ma faute…
- Non, tu n'es pas responsable, poursuit Marine. La fautive c'est moi seule. Je sais pourquoi Mitsumasa Kido vous a séparés, Seiya et toi, le vieil homme savait depuis le début que Seiya deviendrait le plus fervent protecteur d'Athéna et qu'il ne succomberait jamais car il existait en lui quelque chose qui toujours raviverait cette étincelle de vie : ce qui a toujours animé son âme, c'était toi. Seiya ne pouvait pas mourir tant qu'il ne t'avait pas retrouvée. C'était son destin, et Mitsumasa Kido le savait, c'est pour cela qu'il vous a séparés. Si je ne t'avais pas retrouvée, Seiya serait sans doute encore vivant.
Les terrifiantes paroles d'Angelo et de Marine revêtent une signification bien trop douloureuse pour la jeune fille, c'est au-delà de ses forces, elle s'effondre à terre, à genoux, pleurant. Marine s'avance pour la relever, et l'écarte, commençant à la raccompagner vers la résidence. Dans le même temps, Angelo s'avance au devant de Seiya, le regardant tristement.
- Chevalier Divin de Pégase, je suis sincèrement désolé mais je n'ai pas le choix. Tant que ton corps vivra, ton âme ne pourra jamais connaître le repos éternel. Je suis venu pour te libérer… Marine, Seika, pardonnez-moi…
Dans un sursaut, Seika se retourne en hurlant, échappant à Marine, et se précipite vers son frère.
- NON ! Ne le tue pas !
Angelo lève son bras droit en direction de la jeune fille, son Cosmos s'intensifie. Seika se retrouve aussitôt projetée en arrière, rattrapée par Marine.
- Marine ! clame Angelo. Dépêche-toi de la ramener à l'intérieur. Je préfère en finir avec cette douloureuse mission le plus rapidement possible. Il y a déjà eu bien trop de souffrances.
Seika tente de se débattre, mais cette fois Marine ne lui permet plus de s'échapper. D'un geste brusque, le Chevalier de l'Aigle saisit le poignet de l'adolescente pour la retourner face à elle, et de son autre poing, lui assène un coup bien placé au niveau de l'abdomen : Seika s'effondre dans ses bras, inconsciente, après avoir crié un dernier mot.
- Seiyaaaaaaaaaa !
Angelo se tourne à nouveau vers le Chevalier Pégase, lequel n'a jamais eu la moindre réaction depuis le début des événements. Il ferme son poing nimbé d'une douce lumière.
- Je t'interdis de toucher à Seiya !
La voix est venue de l'entrée de la résidence. Une silhouette se précipite en courant à une vitesse incroyable en direction d'Angelo. Son corps tout entier est baigné d'une puissante aura violette. Neuf étoiles filantes jaillissant du vestibule de la résidence le suivent et convergent rapidement vers le corps du nouvel intervenant. Plastron ! Ceinture ! Jambières ! Epaulettes ! Manches ! Et enfin le casque ! Un Chevalier d'Athéna vient de s'interposer entre Seiya et Angelo, et frappe l'assassin. Le Chevalier de la Licorne traverse le mystérieux guerrier, mais il ne l'a pas touché. Jabu manque de trébucher après s'être retrouvé derrière son adversaire. Aussitôt, il se retourne pour se remettre en position de combat.
- Arrête Jabu ! lui ordonne Marine. Si tu as l'intention de te battre contre cet homme, tu n'as aucune chance.
- Tais-toi, Marine ! répond le Chevalier de Bronze en colère. Comment est-ce que tu peux le laisser tuer Seiya ? C'est ton élève !
- Ainsi tu t'appelles Jabu, dit Angelo sans se retourner. Je n'ai pas envie de me battre contre toi, tu n'es pas mon ennemi. Alors ne te mets pas en travers de ma route.
- Ah oui ? Parce que tu comptes m'empêcher de sauver Seiya ? Tu crois peut-être que je vais te laisser le tuer sans rien faire !
- Pauvre inconscient ! crie Marine. Cet homme a plus de pouvoir qu'un Chevalier d'Or, comment pourrais-tu t'opposer à lui !
D'un bond, le Chevalier de l'Aigle ôte sa cape et la jette sur Jabu, lequel, troublé dans sa perception, ne voit pas la femme Chevalier lui foncer dessus. Une prise immobilisante, aussitôt suivie d'une violente projection. Le Chevalier de la Licorne se retrouve plaqué au sol à plusieurs mètres. Marine s'accroupit, appuyant sa main derrière la tête de Jabu, pour l'empêcher de se relever.
- Ne t'en mêle pas Jabu ! De toutes façons tu ne peux rien. Laisse-nous faire ce pourquoi nous sommes venus.
- Tuer… Seiya ? râle Jabu.
- Oui, répond-elle froidement.
Dans le même temps, Angelo pose son regard sur la résidence, baissant les yeux d'un air tristement résigné. Puis il pose un genou à terre. Dans l'encadrement de la porte, Saori le fixe sévèrement. Elle s'avance.
- Sa… Saori… pleure Jabu.
- Athéna… murmure Marine.
- Seiya est l'un des Chevaliers qui m'ont été les plus fidèles, déclare la déesse. Je ne peux pas te laisser le tuer.
- Ton Cosmos a retenu mon bras, divine Athéna, répond Angelo. Mais vouloir sauver Seiya à tout prix ne sert à rien, il est temps d'accepter sa mort, et d'enfin le laisser reposer en paix.
- Seiya a tout donné pour moi, jusqu'à sa vie, et tant qu'il restera une étincelle de cette vie en lui, je garderai l'espoir.
- Malheureusement cette étincelle n'existe plus, Athéna, il faut s'y résoudre.
- Je ne suis pas de ton avis, mais quand bien même tu aurais raison, cela ne te donne pas le droit de le tuer.
- Je comprends votre réaction à tous. Je vous dois une explication.
Saori s'arrête à quelques mètres de son interlocuteur. Angelo laisse retomber l'énergie de son Cosmos, il a compris que tant qu'Athéna ne saura pas pourquoi il doit tuer Seiya, elle ne le laissera jamais accomplir sa mission. Marine se relève, libérant Jabu de son étreinte, et vient rejoindre Angelo ; à son tour, elle pose un genou à terre.
- Je m'appelle Angelo de Prométhée, je suis le Champion Olympien du tout-puissant Empereur du Ciel, le Seigneur Zeus. Et je n'appartiens ni à ce temps ni à ce monde.

***

Au-delà des nuages, un lieu ignoré des hommes, résidence des Dieux… l'Olympe. Deux immenses grilles d'or se dessinent dans les cieux. Un Sceau Sacré les maintient fermées. Un seul nom écrit en grec ancien : Zeus. Un écho lointain et majestueux résonne dans le ciel alors que les silhouettes fantomatiques de nombreux hommes, femmes et enfants ailés se rassemblent… Des anges…
- Anges du Ciel ! L'Empereur du Ciel Zeus a choisi de se retirer. Aussi longtemps que son Sceau gardera fermées les Portes de l'Olympe, notre mission sera limitée. La volonté de notre Seigneur doit être respectée : les Chevaliers d'Athéna protègeront la terre, et nous leur apporteront notre assistance si nécessaire.

***

Saori plonge ses yeux pers dans le regard profond d'Angelo, se remémorant d'antiques connaissances mythologiques, du temps où le seigneur Zeus régnait encore dans les cieux.
- Tu es un guerrier sacré de l'Empereur du Ciel Zeus, le maître de l'Olympe ? s'interroge Athéna. Et tu dis être un Champion Olympien ? C'est étrange, je n'ai jamais entendu parlé de vous. Zeus a disparu depuis des temps mythologiques et d'après ce que je sais, ses guerriers sacrés s'appelaient les Anges.
- C'est exact, poursuit Angelo. Je suis moi-même l'un des sept Archanges du tout-puissant Zeus, les plus puissants des Anges, mais la plupart d'entre nous ne se sont pas réincarnés à cette époque, puisque notre Seigneur a disparu depuis bien longtemps. Les Champions Olympiens ne sont pas les guerriers sacrés de Zeus. Chaque Dieu de l'Olympe a son propre Champion Olympien. Je suis celui de Zeus… tout comme Seiya est le tien, Athéna.
- Que dis-tu ?
- Je vais tout t'expliquer. Avant sa disparition, l'Empereur Zeus a créé cet ordre de guerriers sacrés, il a choisi le plus puissant des combattants de chacune des divinités de l'Olympe, afin que celui-ci devienne son Champion, pour la défendre au sein même de l'Olympe. Il y a autant de Champions Olympiens que de Dieux dans l'Olympe : Zeus l'Empereur du Ciel, Héra, Apollon, Artémis, Poséidon l'Empereur des Mers, toi-même Athéna, Déméter, Aphrodite, Héphaïstos, Hermès, Hestia et Hadès l'Empereur de la Mort. Les douze Dieux de l'Olympe de la légende… Mais la mort d'Hadès avait été prévue de longue date, et c'est la raison pour laquelle son temple dans l'Olympe a été remplacé par celui de Dionysos, le dernier des Dieux à y être entré.
- Depuis les temps mythologiques, reprend Athéna, mes Chevaliers ont livré de terribles batailles contre certaines de ces divinités : Poséidon et Hadès notamment, mais ils ont eu aussi à faire face à d'autres menaces, comme celle des Géants, mais aussi celle d'Arès le dieu de la guerre. Je croyais qu'il aurait fait partie des Dieux de l'Olympe…
- Arès a été banni de l'Olympe il y a bien longtemps. Il n'a donc pas de Champion Olympien pour le représenter. En revanche, bien qu'il soit mort… définitivement… il est possible que le Champion d'Hadès existe toujours.
- Je vois, mais je ne comprends pas pourquoi le Seigneur Zeus t'enverrait tuer Seiya…
- Seiya de Pégase est ton Champion Olympien, c'était son destin. De tous temps il l'a été. Déjà, à l'époque de la mythologie, souviens-toi, il est celui qui avait blessé le corps mythique d'Hadès au cours de ta première Guerre Sainte contre le Dieu des Enfers. Mais malgré tous les efforts que Zeus avait déployés pour l'époque actuelle, Seiya n'a pas survécu…
- Les efforts de Zeus ? Que veux-tu dire ?
Angelo fait un signe de tête à Marine, laquelle prend la parole.
- Déesse Athéna… Le Seigneur Zeus a toujours fait en sorte que les Champions Olympiens puissent avoir une raison de survivre, et pour s'en assurer, il leur a accordé à chacun un Ange Gardien.
- Un Ange Gardien ? Tu veux dire que Seiya avait un Ange Gardien pour veiller sur lui ?
- Oui, poursuit Marine. Mitsumasa Kido le savait. Depuis le début, votre grand-père adoptif savait que Seiya était promis à une grande destinée. Tout comme le Seigneur Zeus l'avait chargé de veiller sur vous après qu'Aioros vous a confié à lui, il lui avait demandé de mettre Seiya sous la protection d'un Ange Gardien… (Hésitante…) Déesse Athéna, je vous demande de me bannir de l'Ordre de la Chevalerie…
- Comment ? répond la déesse surprise de la dernière phrase de Marine. Mais pourquoi ferais-je une chose pareille ?
- Parce que j'ai failli à ma mission, poursuit-elle. J'étais l'Ange Gardien à qui votre grand-père avait confié la destinée de Seiya… Je savais tout de Seiya bien avant qu'il n'arrive au Sanctuaire, car Mitsumasa Kido m'y avait envoyée bien des années auparavant. Je savais que Seiya connaîtrait un grand destin, peu commun…
- Je comprends à présent, réfléchit Saori ne cachant pas son étonnement. C'est pour ça que tu as écrit à Seiya de me protéger sur le sable ce jour-là, quand tu es venue au Japon avec les Chevaliers d'Argent, tu savais que j'étais la véritable réincarnation d'Athéna depuis le début… parce que…
- Parce que Mitsumasa Kido m'avait tout dit, il m'avait raconté tout ce qu'Aioros lui avait confié, et tout ce que l'esprit de Zeus lui avait révélé… C'est aussi pour cela que je suis intervenue au Sanctuaire, pour aider Seiya à rejoindre la Chambre du Grand Pope lors de la bataille des Douze Maisons.
- Et c'est aussi pour cela que tu es partie à la recherche de Seika !
- Oui…Mais ce fut une erreur, car ayant retrouvé sa sœur, Seiya perdait ce qui le poussait à rester en vie… J'ai détruit ce que Mitsumasa Kido avait construit pour le protéger… Son Cosmos s'est éteint par ma faute. Mon devoir de Chevalier aurait dû me pousser à combattre Poséidon et Hadès aux côtés des autres Chevaliers, et mon devoir d'Ange Gardien aurait dû me convaincre de ne pas faillir aux ordres de Mitsumasa Kido : Seiya ne devait pas retrouver sa sœur tant que les Guerres Saintes n'étaient pas terminées. J'ai failli à mon devoir, je ne mérite plus d'être ni Chevalier, ni Ange…
- Mais aujourd'hui, continue Angelo, les choses sont graves, car Hadès a tué la dernière étincelle de Cosmos qui brûlait en Seiya… Il te faut donc un nouveau Champion, Athéna, mais telle destinée ne pourra se porter sur un autre de tes Chevaliers tant que l'âme de Seiya ne reposera pas en paix. C'est pour cette raison que je dois à présent le tuer définitivement.
- Non attends Angelo, je n'ai pas besoin d'un autre Champion Olympien. Si c'est le destin de Seiya, alors il se réveillera un jour pour l'accomplir.
- Seiya ne se réveillera pas, Athéna, je suis désolé, et tu as besoin de ton Champion Olympien. Sans lui tu ne pourras pas sauver la terre du danger qui la menace, car les Dieux sont sur le point de se réveiller, et de livrer bataille pour dominer la terre.
- Comment peux-tu être aussi sûr de cela ?
- Je ne serais pas venu ici, dans ce temps et dans ce monde qui ne sont pas les miens, dans ce temps et dans ce monde où le Seigneur Zeus a disparu, si je n'étais pas certain de tout cela. Mes actions sont la volonté du Seigneur Zeus, qui t'a confié la protection de la terre, Athéna, et qui ne souhaite pas que celle-ci soit détruite dans la dernière Guerre Sainte que se livreront tous les Dieux de l'Olympe et qui la conduira vers sa destruction totale. Tu es la seule qui puisse sauver le monde de la terrible menace qui plane sur lui. Et sans ton Champion Olympien, tu n'as aucune chance. Seiya ne peut plus être celui-ci, la tâche reviendra donc à un autre de tes Chevaliers… quatre d'entre eux peuvent y prétendre… Mais pour cela, Seiya doit mourir définitivement. Réfléchis Athéna : c'est la vie de Seiya, qui n'est déjà plus rien, contre la sauvegarde de la planète !
- Il n'en est pas question, répond la déesse sur un ton paisible. Je continuerai de protéger la terre, avec ou sans Seiya, et même si je dois combattre tous les Dieux de l'Olympe. Mais je ne te laisserai pas commettre un meurtre qui ne servirait à rien.
- Quelle dévotion ! s'exclame Angelo. Mais cela en devient presque ridicule. C'est lui qui a voulu donner sa vie pour que tu continues à défendre la terre, pour te protéger. Tu dois faire ton deuil de Seiya, Athéna ! C'est la volonté de l'Empereur Zeus, c'est ce qu'aurait voulu Mitsumasa Kido, et c'est ce que souhaite Marine, qui a pourtant été l'Ange Gardien et le maître de Seiya et…
- Athéna, intervient Marine. Mon cœur saigne de voir disparaître le Chevalier Pégase pour toujours, mais il est déjà parti. Je t'en prie, laisse-le reposer en paix…
Les larmes de Marine coulent sur les bords de son masque d'argent. Saori ne peut que ressentir l'énorme souffrance de son Chevalier. Dans le même temps, derrière eux, Jabu relève Seika, qui n'a toujours pas repris connaissance. Levant la tête, Marine porte la main à son masque, qu'elle ôte un bref instant, le temps de montrer à la déesse Athéna son visage. Un long silence s'ensuit. Dans l'encadrement des portes, Tatsumi sort de l'ombre, baissant la tête comme si la honte s'était posée sur lui.
- Pardonnez-moi de ne pas vous l'avoir dit, mademoiselle, mais votre grand-père me l'avait interdit…
- Marine… Alors…
- Oui, dit-elle en remettant son masque. Perdre à nouveau Seiya provoquera en moi une grande peine. Mais il n'y a hélas pas d'autre solution. Il faut laisser Angelo… tuer Seiya.
Tatsumi ferme les yeux alors que Saori l'interroge du regard. De son côté, Jabu ne comprend pas pourquoi la déesse semble tout à coup dans le désarroi le plus profond. Angelo se redresse et à nouveau, marche vers le fauteuil où est assis Seiya. Jabu adosse Seika contre un arbre et fait mine de se précipiter vers le Chevalier Pégase quand la voix de Tatsumi l'interpelle.
- Ne t'en mêle pas Chevalier !
- Quoi ? ! Mais tu es devenu fou toi aussi ? !
- Jabu, déclare solennellement la voix calme de Saori, je t'ordonne de ne pas intervenir…
- Comment… ?
Le visage du Chevalier de la Licorne reflète à la fois l'étonnement, l'indignation et l'incompréhension. Après Marine et Tatsumi, c'est au tour de Saori de se résigner à voir partir Seiya pour toujours. Jamais il n'aurait cru être devenu le dernier à vouloir le protéger. Gagné par la colère, Jabu se jette sur le Champion de Zeus en intensifiant son Cosmos au maximum, ignorant l'ordre de sa déesse.
- Par le Galop de la Licorne !
Un éclair de lumière. Le Chevalier de la Licorne est projeté au sol, mordant la poussière, il n'a même pas vu le coup que lui a porté Angelo. Jabu ne bouge plus, son Armure portant les traces de mille éclats, son corps meurtri et recouvert de son sang.
- Tu as beaucoup de chance d'être encore en vie, Chevalier, car je n'ai touché aucun de tes points vitaux, mais tu ne t'interposeras plus désormais, tu n'es plus en mesure de le faire.
Le Champion de Zeus se dresse maintenant devant Seiya, son Cosmos doré luisant autour de son corps, de plus en plus lumineux. Il lève son poing droit au niveau de son épaule, bientôt celui-ci s'enflamme.
- Chevalier Divin de Pégase. Tu auras été le plus grand héros de ton époque. Je te ferai l'honneur de t'accorder le repos éternel que tu mérites. Repose en paix, Seiya… Par le Feu Céleste !
Angelo projette son poing enflammé sur Seiya, une boule de feu sacré le percute, le fauteuil vole en éclat, le corps du Chevalier Pégase est projeté dans les airs, s'embrasant dans les flammes qui lèchent maintenant sa dépouille. Tandis que le Champion se retourne pour rejoindre Athéna, Tatsumi et Marine, le bruit du corps retombant à terre se fait faiblement entendre. Mais… le visage de Tatsumi exprime une stupeur subite. Et un sourire se dessine sur les lèvres de Saori. Telles réactions ne sont pas sans surprendre Angelo, dont le réflexe est de se retourner aussitôt. Et ce qu'il voit…
- Mais… C'est impossible ! Il est… DEBOUT !
Les flammes continuent de lécher le corps de Seiya, mais celui-ci, après avoir reçu la puissante attaque d'Angelo sans avoir eu la moindre possibilité de se défendre, est retombé debout, alors que son corps n'aurait pas dû résister.
- Il ne bougeait pas ! Comment son corps peut-il tenir debout alors que son âme ne l'habite plus ? Je ne ressens toujours pas l'once d'un Cosmos à travers lui. (Se calmant…) Non… Je comprends… Même privé de son âme, même privé de son Cosmos, même privé de ses sept sens, le corps du Chevalier Pégase porte en lui comme les gènes de sa volonté inébranlable. Le dernier soubresaut du corps d'un homme dont les actions ont conduit à sauver le monde. Les flammes du Feu Céleste viendront à bout de son corps, mais je ne te ferai pas souffrir davantage, ni ceux que tu aimes et qui pourraient voir en ton dernier sursaut un espoir. Je te ferai l'honneur de te tuer avec une attaque digne de toi.
Angelo commence à effectuer une gestuelle qui n'est pas sans rappeler celle des Météores de Seiya. A demi-mort, Jabu ouvre un œil, qu'une larme vient baigner alors qu'il prend conscience que l'image d'un Seiya debout dans les flammes est certainement la dernière qu'il verra de lui vivant.
- Seiya… Mais… Qu'est-ce que c'est…
Un phénomène étrange est en train de survenir sur le corps de Seiya. Serait-ce un effet du Feu Céleste d'Angelo ? Du sang vient recouvrir le corps du Chevalier Pégase en de nombreux endroits, pourtant il ne semble pas y avoir de plaies… Et étrangement, ce sang commence à luire… Une imperceptible lumière dorée… Saori, un doux sourire aux lèvres, lève ses yeux vers le soleil.
- Merci, dit-elle, merci Chevalier d'Or…

***

1982. Sanctuaire, Grèce. Le jeune Seiya, alors âgé de neuf ans, mord la poussière, quatre jeunes garçons plus âgés que lui ont visiblement décidé de lui donner une bonne leçon. Le courageux petit Japonais se relève, couvert de terre et de sang, sous les ricanements de ses adversaires.
- Pauvre petit Asiatique, tu n'as aucune chance ici.
- C'est ce qu'on va voir ! hurle Seiya en se jetant sur eux.
Les quatre garçons reculent tout à coup, mais Seiya se sent retenu par quelque chose. Il tourne la tête alors que son corps est soulevé de terre. C'est alors qu'il comprend pourquoi ses couards d'adversaires avaient reculé.
- Cassios !
- Ha ha ha ! Misérable avorton ! Je vais m'amuser un peu avec toi !
Le mastodonte ne le fait pas attendre pour lui faire subir un traitement bien pire : Cassios le jette à terre, le piétinant sauvagement. Et rapidement Seiya se retrouve abandonné, à demi-mort, après avoir été rossé de coups.
Eveil. Un jeune homme qu'il reconnaît est en train de panser ses blessures, un jeune homme qui l'avait toujours encouragé à se relever, à ne pas abandonner, à ne pas se laisser dominer par les Grecs parce qu'il était japonais…
- Aiolia
- Allons viens, Seiya, ne te laisse pas abattre. Un jour tu leur montreras à tous que même un Japonais peut devenir un vrai Chevalier !
Aiolia, le Chevalier d'Or du Lion. Celui qui avait le premier reconnu la déesse Athéna en Saori et avait défié le Grand Pope. Le noble Chevalier d'Or qu'il avait dû combattre pendant la bataille des Douze Maisons parce que celui-ci était sous la domination mentale du Grand Pope. Il avait fallu le sacrifice de Cassios, au nom de l'amour que celui-ci éprouvait pour Shina, pour faire retrouver ses esprits au Chevalier du Lion. Le frère d'Aioros qui avait donné son sang pour redonner vie à l'Armure Sacrée de Pégase après la bataille du Sanctuaire, ce même sang qui a fini par imprégner le corps du Chevalier de Bronze qu'il était… Le sang du Chevalier d'Or.

***

- Par les Météores de Prométhée !
Angelo décoche une pluie de coups en direction de Seiya, debout, dont le corps continue de brûler. Dans le même temps, une aura dorée se déploie autour de Seiya, et l'image d'un lion d'or qui rugit se mêle à la silhouette naissante d'un cheval ailé d'une blancheur immaculée.
- Aiolia, chuchote Marine… Le sang d'Aiolia guide l'âme de Seiya vers son corps.
Un choc inattendu. Le poing d'Angelo est bloqué dans sa charge par… la main de Seiya… une main couverte de sang doré… Le Champion Olympien n'en revient pas : Seiya redresse son visage, son corps bouge !
- C'est impossible ! J'ai cru voir la silhouette d'un Chevalier d'Or ! Se pourrait-il que l'esprit de l'un d'entre eux soit venu animer le corps de Seiya ? Aaaaaaaaaaaaaaaaah !
Une puissante décharge d'énergie envoie valser le Champion Olympien contre un arbre. Les mains de Seiya se reflètent alors dans ses yeux. Il les observe. Les flammes autour de son corps se sont taries. Angelo se relève et se rapproche, stupéfait.
- Je sens un Cosmos. Non, ce n'est pas celui d'un Chevalier d'Or, ce n'est que le sang du Chevalier d'Or qui a… Ainsi donc ton âme aurait réussi à reprendre le contrôle de ton corps ? Mais comment est-ce possible ? Comment as-tu pu t'opposer à la divine volonté d'Hadès ?… A moins que… Non, ce n'est pas possible. Même les Champions Olympiens ne le maîtrisent pas… Même les Dieux de l'Olympe… Je dois en avoir le cœur net. Par les Météores de Prométhée !
L'attaque d'Angelo frappe Seiya de plein fouet, lequel est projeté au sol, encastré dans la terre. Le Cosmos qui venait de briller semble avoir de nouveau disparu. L'air emprunt de perplexité, Angelo s'approche lentement du corps.
- C'est bien ce que je pensais. Le sang du Chevalier d'Or qui avait imprégné ton corps t'a permis de manifester ton Cosmos pour la dernière fois. A présent, ton âme repose en paix.
- Sei… Seiya…
La voix de Seika… La jeune fille tente de reprendre conscience, elle appelle son petit frère.
- Sei… Seika…
- Non ? ! s'exclame Angelo en entendant la voix de… Seiya !
- Je n'ai pas rêvé, marmonne Jabu, c'est bien sa voix…
L'aura du Chevalier Pégase renaît à nouveau, s'intensifiant. Dans le même temps, le Cosmos d'Athéna réagit. Le corps de Seiya à nouveau se recouvre de sang… un sang qui semble en harmonie avec le Cosmos de la Déesse. Le sang d'Athéna. Seiya se relève, son Cosmos atteignant son paroxysme.
- Il n'y a pas de doute possible ! se rend compte Angelo. Le Chevalier Pégase a retrouvé l'usage de ses sept sens. Cette puissance ne peut que résulter de l'Ultime Cosmos, source de vie. Réponds-moi Seiya ! Comment as-tu fait pour revenir à la vie ? Comment as-tu fait pour ne pas laisser ton âme rester prisonnière du royaume des morts ?
- Je ne te connais pas, déclare lentement la voie d'outre-tombe de Seiya, mais puisque tu essaies de me tuer, c'est que tu es mon ennemi. Je vais toutefois répondre à ta question. Je suis un Chevalier d'Athéna, et je me battrai jusqu'au bout pour elle. Le sang des Chevaliers d'Or coule en moi, il m'a réveillé. Et tu vois ce sang qui coule maintenant sur mon corps ? C'est le sang d'Athéna !
Le sang se met alors à bouillonner, comme s'il se transformait, adoptant la forme de la protection suprême des Chevaliers Sacrés. Seiya est en train de revêtir son armure : l'Armure Divine de Pégase ! Elle brille plus encore que l'or le plus pur, ce n'est plus une Armure de Bronze depuis bien longtemps, mais une Armure Divine…
- Seiya ! Tu as recouvré l'usage de tes sept sens, grâce au sang du Chevalier d'Or. A présent tu as revêtu ton habit sacré grâce au sang de ta Déesse. Ton Cosmos est en communion avec celui d'Athéna. Mais tout cela ne peut pas suffire pour t'avoir arraché aux griffes de la mort ! Maîtriserais-tu le huitième sens, Chevalier ? Je sais que pour te rendre au Royaume d'Hadès, tu as dû nécessairement t'y éveiller un bref instant, sinon tu n'aurais pas survécu à ton voyage vers l'Enfer, et ton âme serait devenue une ombre, assujettie à la volonté de l'Empereur de la Mort. Mais depuis…Le maîtriserais-tu à la perfection ? Car c'est la seule explication qui puisse justifier que ton âme n'ait pas pu trouver le repos et qu'elle ait pu réintégrer ton corps ! Ton Cosmos était éteint, complètement éteint !
- Mon Cosmos était éteint, dis-tu ? reprend Seiya tout en dessinant sa constellation avec ses mains. Mais pourtant je n'étais pas mort, tu as voulu me terrasser avec tes assauts, et tu as meurtri mon corps, mais je vais t'apprendre une chose, qui que tu sois, c'est que même si nos corps sont brisés, le Cosmos, lui, est immortel ! Brûle, mon Cosmos ! Par les Météores de Pégase.
- Par les Météores de Prométhée ! réagit aussitôt Angelo.
Les deux guerriers décochent une pluie de coups d'une puissance phénoménale. Leurs deux Cosmos s'intensifient au-delà de l'imaginable. L'aura d'un cheval ailé défie celle d'un ange majestueux.
- Extraordinaire, commente Angelo tout en portant ses coups et mobilisant ses efforts pour parer ceux de Seiya. Tu décoches tes météores à la vitesse de la lumière, comme moi, ce qui prouve que tu as recouvré l'ensemble de tes capacités. Ta maîtrise du septième sens égale la mienne, ce qui ne peut que me conforter dans l'idée que tu as pu maîtriser le huitième sens que je n'ai moi-même qu'entraperçu. Tu es bien un Champion Olympien, Seiya de Pégase, le Champion Olympien d'Athéna…
La cape d'Angelo est emportée par le souffle, révélant à la lumière un magnifique habit sacré doré, recouvert d'une sorte de tabard blanc semblant d'une solidité exceptionnelle. Deux ailes majestueuses se déploient dans son dos, et une auréole blanche se dessine dans son aura au-dessus de sa tête.
- Tes coups sont aussi puissants que les miens, c'est extraordinaire, poursuit-il. Mais tu vois, Chevalier, notre combat n'est pas prêt de s'arrêter. Car aussi longtemps que ton Armure Divine te protégera, et que mon Aube fera son office, aucun de nos coups ne pourra nous être fatal, et sais-tu dans ce cas que ce qui attend une lutte entre deux Champions Olympiens, c'est un combat de Mille Jours et Mille Nuits.
- Qu'est-ce que tu dis ?
- Tu as bien entendu, c'est la même chose que lorsque deux Chevaliers d'Or s'affrontent. C'est pourquoi je te suggère de mettre un terme à ce combat.
- Tu abandonnes ?
- Oui, car je n'ai plus aucune raison de te tuer, Champion Olympien d'Athéna…
D'un mouvement élégant mais efficace, Angelo fait un saut, esquivant les Météores de Pégase, tout en cessant de lancer ses météores. Les deux combattants s'observent un instant, leurs Cosmos s'apaisent. - Tu as gagné, Chevalier Pégase, tu m'as convaincu. Tu es digne de tous les espoirs que le Seigneur Zeus a fondés en toi.
- Je ne comprends rien à ce que tu me racontes, et d'abord qui es-tu ? Et pourquoi me parles-tu de Zeus ?
- Athéna t'expliquera, Champion Olympien. Pour ma part, ma mission est accomplie.
Dans un élan de joie, Seika se précipite vers son frère en criant son nom, elle se jette dans ses bras. Seiya a à peine le temps de réaliser ce qui lui arrive. Quelques minutes auparavant, il était comme mort, et il lui semble être à présent entré dans un rêve, il est avec sa sœur qu'il n'a plus revue depuis près de sept ans.
- Sei… Seika… Ma sœur… C'est bien toi ? réalise-t-il en la serrant tout contre lui, oubliant aussitôt les énigmatiques paroles de son mystérieux adversaire.
Saori ne cache pas sa joie mais doit réfréner son désir de courir rejoindre Seiya, elle se déplace doucement. Derrière elle, Tatsumi affiche un franc sourire. Jabu se relève, les yeux remplis de larmes. Angelo rejoint Marine, laquelle s'est retirée dans le sous-bois.
- La mission est un succès inespéré, Marine, déclare Angelo. Je préfère cela, la volonté du Seigneur Zeus pourra s'accomplir. Nous avons prévenu Athéna du danger à venir, nous n'avons plus rien à faire ici.
- Oui, allons-y.
- Avant de partir, ne désires-tu pas toi aussi serrer Seiya dans tes bras ? Tu ne veux pas lui parler ?
- Je préfère partir de suite…
- Marine… (En pensée…) Je sais que tu meures d'envie toi aussi de retrouver Seiya, mais tu continues de faire passer ton devoir bien avant tes sentiments personnels… Contrairement à ce que tu penses, tu n'as pas failli à ta mission… Tu mérites ton titre d'Ange Gardien… et de Chevalier d'Athéna…
Alors que tous savourent les joies des retrouvailles avec un Seiya " vivant ", Marine et Angelo s'éclipsent discrètement vers les bois. Seul Tatsumi les regarde s'éloigner.

***

Quelque part en Allemagne, les décombres d'un château détruit. Deux ombres noires s'avancent lentement dans le crépuscule. Des rictus grimaçants ornent leurs visages qui bien que cachés dans la pénombre, semblent effrayants et couverts de cicatrices. Il est difficile de distinguer l'un de l'autre, tant ils sont semblables.
- Il est ici, murmure l'un d'eux.
- Oui, répond son compagnon, je ressens sa présence. Cela fait si longtemps que nous ne l'avions pas sentie.
- Mais la destruction des Enfers a été salutaire pour nous. Il était prisonnier, et il a pu s'échapper.
- Quand je pense que c'est grâce à notre ennemi ancestral que notre seigneur a pu être libéré…
La vision d'un Sceau gravé du nom de la Déesse Athéna volant dans le tumulte d'un monde détruit. Une lumière rougeoyante se faufilant à travers le chaos, se réfugiant à l'abri d'un corps pourtant meurtri et prêt à rendre son dernier soupir.
- Et la chance… ou plutôt le destin a voulu, que le corps idéal pour l'accueillir, se soit trouvé là.
- Oui, et je crois que nous l'avons trouvé.
Les deux hommes s'arrêtent alors. A leurs pieds, gît un corps inerte. A voir son état, couvert de plaies, tout pourrait laisser croire qu'il est mort. Ils lèvent les yeux vers l'horizon, comme attirés par d'étranges lumières lointaines.
- Regarde, mon frère, c'est notre œuvre qui commence.
- Oui, les Dieux de l'Olympe sont en train de se réveiller.

Scrutant toujours le corps étendu à leurs pieds, les deux êtres patibulaires affichent leur satisfaction. Apparemment le réveil des Dieux n'est pas pour leur déplaire.
- Relève-toi ! crie l'un d'eux à l'adresse de l'homme étendu.
Ce dernier amorce un léger mouvement, ses longs cheveux bleus frémissant au gré du vent.
- Tu es le plus puissant des guerriers que cette époque connaisse, poursuit le second homme. Le corps idéal pour accueillir notre seigneur.
- Toi qui as su pousser vers le mal un être dont la pureté n'était plus à démontrer, toi qui as su manipuler et tromper un Dieu, toi qui es même devenu le plus puissant des guerriers du camp qui était auparavant ton ennemi. Tu as la force, ton caractère ambivalent et dual n'est pas non plus pour nous déplaire. Tu es l'hôte idéal.
- Tu aurais pu mourir des suites de tes blessures, après ton dernier combat contre le plus puissant des Spectres d'Hadès, que tu as terrassé. Mais juste à temps, tu as croisé ton destin…
- Lève-toi, tueur de Spectres, Général de Poséidon et Chevalier d'Athéna ! Lève-toi, Dragon des Mers ! Lève-toi, Chevalier d'Or des Gémeaux !
Péniblement, Kanon se redresse, mais très rapidement, il précipite ses mains vers sa tête qu'il saisit, comme s'il était pris de violentes douleurs, poussant un hurlement terrifiant.
- Ne résiste pas, laisse notre maître prendre le contrôle de ton corps.
- De toutes façons, malgré ta force, tu n'es pas assez puissant pour résister au pouvoir d'un Dieu.
- Même si ce Dieu a été banni de l'Olympe il y a longtemps…
- Il reste le redouté Dieu de la Guerre.
- Arès !! achèvent-ils de concert.
Les yeux de Kanon deviennent rouge sang. Ses cheveux commencent à virer de couleur, adoptant la même couleur que ceux de Saga quand celui-ci basculait de personnalité et passait du bien au mal. La couleur bleue de sa chevelure a bientôt entièrement laissé place au gris.
- Je suis… un Dieu ! Je suis Arès ! hurle-t-il.
Les deux hommes posent un genou à terre devant le nouvel Empereur de la Guerre.
- Nous avons tout préparé, Seigneur Arès, dit le premier.
- La terre connaîtra bientôt à nouveau les affres de la guerre. Et pas seulement les hommes… les Dieux de l'Olympe vont se livrer une bataille sans merci.
- Aaaaah ! soupire la voix du Dieu. Ces imbéciles regretteront de nous avoir un jour banni de l'Olympe. Où sont les Berserkers ? Les avez-vous rassemblés ?
- Oui, Seigneur Arès, ils vous attendent sur le " Champ de Bataille ".
- Les quatre armées attendent vos ordres.
- Parfait ! reprend la voix divine. Vous avez fait du bon travail, mes fidèles écuyers.
- Deimos, la Crainte, à votre service…
- Phobos, la Terreur, à votre service…
Les deux écuyers du Dieu de la Guerre se redressent et marchent maintenant dans le sillage de leur Seigneur, lequel s'avance dans la nuit sombre.
Au même moment, en différents endroits du monde, plusieurs jeunes gens prennent conscience qu'ils ne sont pas simplement des femmes ou des hommes, mais les Dieux de l'Olympe !

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Cette fiction est copyright Laurent Habault.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.