Chapitre 4 : Les Enfers


Le château d'Heinstein. Hadès a bien délimité son territoire. La mort règne en despote en ces lieux. Alors qu'à quelques centaines de mètres de là, la verdure est omniprésente, les fleurs chatoyantes et la forêt imposante, la vie semble avoir été stoppée nette à l'entrée du château. Les tours menaçantes empêchent les curieux de s'approcher. Ceux qui ont été assez téméraires pour pénétrer à l'intérieur de l'enceinte ne sont jamais revenus pour raconter leur histoire. Des silhouettes menaçantes font le guet au pied de la muraille. A quelques kilomètres de là, une brillante lumière dorée apparaît. Au bout de quelques secondes, six formes humaines se dessinent. Six hommes.

- Où sommes-nous, Mû ?
- A trois kilomètres du château d'Hadès. Je n'ai pas voulu attirer l'attention sur nous en arrivant trop près. Il va falloir être très prudent. Les Etoiles Maléfiques se sont réveillées il y a quelques minutes. On peut estimer que seules une douzaine d'entre elles se trouvent aux Enfers. A mon avis, il doit y en avoir trois ou quatre au château.
- Allons-nous les affronter, interrogea Mime ?
- Non, la lyre d'Orphée devrait nous permettre de passer sans trop de problèmes. Mais, il faudra faire très attention à ne pas se faire remarquer en entrant dans le château. Si nous sommes découverts, il y a fort à parier que Pandore déchaînera contre nous tous les Spectres dont elle dispose, et nous aurons peu de chances de sortir vainqueurs.
- Pourquoi ? Nous sommes des chevaliers d'Or, non ?
- Oui, mais chacun des trois titans est au moins aussi fort que l'un d'entre nous si ce n'est plus. Ce qui fait qu'après nous risquons de nous retrouver à trois contre une dizaine d'adversaires… Il vaut mieux aller aux Enfers pour se battre en un contre un. Allons-y maintenant, le temps presse…

Ils se dirigèrent rapidement vers le château d'Hadès. Une fois arrivés là-bas, Mû regarda à travers une fenêtre. Il compta trois Spectres, dont un avait réellement une forme bizarre. On aurait dit… Oui, c'était cela, un crapaud ! Un peu plus loin, sur un trône, se tenait une femme. Elle était ravissante. De longs cheveux noirs lui retombaient presque jusqu'aux chevilles. Son visage était fin, délicat et semblait respirer la bonté. Toutefois, lorsqu'elle ouvrit les yeux, Mû comprit qu'il se trouvait devant la redoutable Pandore. Elle jouait de la harpe et semblait exclusivement concentrée sur sa musique. Mû comprit rapidement le parti qu'il pourrait tirer de cette situation. Il se retourna vers Orphée et lui fit un signe de tête. Le chevalier de la Vierge hocha la tête en retour et se mit à jouer.

Les dieux ont cessé leurs bavardages.

Les oiseaux ont cessé de chanter.

Les étoiles mêmes ont cessé de briller.

- Death Trip Serenade !

En quelques instants, les trois Spectres s'endormirent. Pandore mit un petit peu plus longtemps, mais referma bien vite les yeux.

- Bien, fit Orphée. Nous disposons de dix minutes pour franchir le " puits des âmes ".
- Et eux, interrogea Io ?
- Aucun danger. Lorsqu'ils se réveilleront, ils auront l'impression d'avoir écouté la musique de Pandore et s'être endormis à son contact. Pandore elle-même pensera s'être endormie de fatigue.
- Bien, fit Mû, allons-y. Le puits doit se trouver au centre du château.
- Pourquoi ?
- Parce que c'est logique.

Effectivement, le puits se trouvait au centre du château. Mû se contenta de hausser les épaules devant le regard interrogateur de ses compagnons. La première véritable difficulté se trouvait à présent face à eux : ils devaient descendre dans le monde des morts, en tant qu'êtres vivants. Mû savait qu'il était assez puissant pour élever son cosmos jusqu'au huitième sens. Orphée avait déjà prouvé qu'il pouvait le faire. Mais les quatre autres… Bien qu'ils soient remarquablement forts, il n'était pas certain qu'ils parviennent au huitième sens. Mû sentit alors confusément qu'il faisait fausse route. Ses compagnons et lui étaient investis d'une mission de la plus haute importance. La survie du monde reposait sur leurs épaules. Il devait leur faire confiance. Ils parviendraient à franchir le puits. Mû fit brûler son cosmos, très vite imité par les cinq autres chevaliers d'Or. Ils se regardèrent une dernière fois, un pâle sourire aux lèvres, et sautèrent.

***

Lorsque Siegfried reprit connaissance, il était allongé à même le sol, sur des espèces de gros cailloux. Il se leva avec précautions, histoire de vérifier s'il n'avait rien de cassé. Il regarda alors autour de lui et commença à chercher ses compagnons. A sa grande surprise et profonde stupéfaction, il n'en vit que deux : Io et Orphée. Ils dormaient encore profondément. Siegfried les réveilla rapidement.

- Pfiouu, siffla Io, quelle chute. Ainsi voilà le monde des Enfers. Si on m'avait dit qu'un jour, je me retrouverais ici, je ne l'aurais jamais cru... Mais, ajouta-t-il tout à coup, où sont les autres ?
- Je me posais la même question, figures-toi. Orphée, qu'en penses-tu ?
- Je ne vois qu'une seule explication et elle ne me plaît pas du tout.
- Laquelle ?
- C'est qu'ils n'ont pas pu s'éveiller au huitième sens et qu'ils sont morts.
- Mais c'est impossible ! Mû est le plus puissant d'entre nous !
- Peut-être, mais les faits sont là !
- Qu'allons-nous faire ?
- Ce pour quoi nous sommes venus. Même si la tâche, de difficile à six, devient presque impossible à trois.
- Bon, alors vous venez ou quoi ? Vous êtes les seuls morts aujourd'hui ?

Les trois chevaliers d'Or se retournèrent ensemble. L'homme qui venait de les apostropher de la sorte se tenait sur une barque. Il portait une armure, signe qu'il était un des Spectres d'Hadès.

- Mais… Mais vous êtes vivants ! ! !
- Quelle faculté d'observation, fit Orphée.
- Mais c'est impossible ! Comment avez-vous pu arriver jusqu'ici ?
- Une autre fois les questions philosophiques, tu veux bien ? Pour l'instant, tu vas nous emmener de l'autre côté de la rive.
- Hors de question ! Il faudra me vaincre d'abord !
- Si tu y tiens, fit Siegfried en s'avançant vers lui.

Lorsqu'il était le guerrier divin d'Alpha, Siegfried avait pour réputation d'être invulnérable. Bien sûr, Shiriu puis Seiya avaient démontré qu'il n'en était rien ; toutefois, le nouveau chevalier du Lion conservait une prestance et une puissance qui faisaient de lui un guerrier redoutable. Lorsqu'il s'avança vers son adversaire, Io et Orphée s'écartèrent naturellement.

- Qui es-tu, demanda l'homme ?
- J'ai pour nom Siegfried et je suis le chevalier d'Or du signe du Lion.
- Un chevalier d'Athéna ? ! ! ! Mais par quel prodige ?
- C'est sans intérêt ici.
- Soit. Prépares-toi à mourir. Moi, Charon de l'Achéron de l'Etoile Céleste Intermédiaire, vais te détruire.
- Voyons cela.
- Tu l'auras voulu ! Rolling Oar !

La rame de Charon se mit à tournoyer sur elle-même et envoya une succession de coups en direction de Siegfried. Oubliant un instant qu'il ne portait plus son armure divine d'Alpha, il oublia de parer le coup de son adversaire, persuadé qu'il ne l'atteindrait pas. C'est pourquoi il fut touché. Sous le choc, il recula de quelques mètres. Interloqué, il regarda le point d'impact et vit que son armure d'Or avait absorbé le coup. Pendant Charon riait.

- Ah, ah, ah ! C'est là la puissance des fameux chevaliers d'Or ? Un seul coup pour te toucher ? Cela en est risible ! Préparez-vous, messieurs, ajouta-t-il en se tournant vers Orphée et Io, ça va bientôt être ton tour.

Pour toute réponse, Orphée s'assit et se mit à jouer. La musique était superbe, mais triste. Io regarda son compagnon.
Il était visible que cette musique n'était pas une attaque. Alors pourquoi Orphée jouait-il ? Charon devait se poser la même question car il intervint à ce moment-là.

- Pourquoi joues-tu, chevalier ?
- Tu vas bientôt mourir, alors il est normal de te jouer un requiem.
- Tu crois que je vais me faire battre par ton camarade ? Tu rêves ?
- Regarde par toi-même.

Siegfried s'était remis en garde. Une puissante aura l'entourait. Charon, involontairement, fit un pas en arrière.

- Spectre, tu t'es moqué de la puissance des chevaliers d'Or. Tu vas payer ton insolence. Que l'Epée d'Odin te transperce !

Un trait lumineux jaillit de la main de Siegfried. Un instant plus tard, Charon était à terre, transpercé en plein ventre.

- Charon, ta dernière heure a sonné. Que te transperce à nouveau l'Epée d'Odin !
- Non, attends !
- Quoi, tu demandes grâce ?
- Non, mais si tu me tues, tu ne pourras pas accéder sur l'autre rive du Styx. Moi seul connais le chemin. Si vous prenez ma barque sans moi, vous dériverez indéfiniment.

Siegfried se pencha, saisit Charon par le col et le redressa.

- Je te préviens, si tu tentes de nous jouer un sale tour, tu le regretteras amèrement.

Sans répondre, Charon rejoignit lentement sa barque. La blessure que lui infligée son adversaire n'était pas mortelle, mais douloureuse. Les chevaliers d'Or embarquèrent et la barque se dirigea silencieusement vers Giudecca, but ultime des chevaliers d'Or.

Au bout d'environ deux heures de voyage, la barque accosta. Au moment de descendre, Siegfried se saisit de la rame de Charon.

- Eh, fit celui-ci, comment vais-je faire, pour repartir ?
- Tu ne repars pas. En plus sans cet instrument, tu es aussi inoffensif qu'un bébé.

Charon attendit que les trois chevaliers d'Or lui tournent le dos pour lâcher.

- Ca, c'est ce que vous croyez ! A moi, Edding Current Crusher !
- Que les Flammes du Dragon te consument !

Le Spectre fut touché de plein fouet par l'attaque de son adversaire. Il s'écroula une deuxième fois, sans pouvoir cette fois se relever.

- Tu savais, interrogea Io ?
- C'est pour ça que j'ai pris sa rame. Je voulais le forcer à attaquer, pour le neutraliser définitivement. Bien, allons-y.

Siegfried jeta négligemment la rame au sol et les trois chevaliers d'Or reprirent leur route.

***

- Aïe, ma tête, fit Isaak en se relevant. Par Poséidon, quelle chute ! Où sommes-nous, Mû ?
- Je n'en ai pas la moindre idée. Je ne suis jamais venu ici.
- Vous vous trouvez au cœur de la première prison, et ce lieu sera votre tombeau.
- Qui a parlé ?

L'homme s'avança en pleine lumière. Ses longs cheveux blonds raides lui tombaient jusqu'aux jambes. Il ne portait pas son casque et l'on pouvait lire sur son visage le mépris qu'il portait à ses adversaires.

- Je suis Rune de Balrog de l'Etoile Céleste du Talent.

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Cette fiction est copyright Emmanuel Axelrad.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.