Chapitre 10 : L'armure maléfique


Tout était calme. Seul le doux murmure d'une brise légère troublait le silence. Ce vent à peine perceptible caressait l'escalier de marbre presque sans le moindre bruit. Il était tôt, le soleil peinait encore à étendre ses rayons sur le Sanctuaire. Tout au plus venaient-ils effleurer la surface lisse des dalles froides, sans parvenir à y imprimer leur chaleur réconfortante. Tout était calme.

Brusquement tout changea. Un choc brutal, celui d'un poing qui percute la chair. Deux respirations haletantes, entrecoupées d'exclamations étouffées. Il n'était pas sept heures du matin, qu'ils étaient déjà plongés dans un affrontement d'une rare violence. Shiryu, chevalier divin du Dragon. Hyoga, chevalier divin du Cygne. Ils ne portaient pas leurs armures, mais étaient aisément reconnaissables. Soudain, le premier stoppa net son mouvement, et tourna la tête dans la direction opposée à son adversaire. Vers la mer. Hyoga saisit l'opportunité, et asséna un coup brutal à son demi-frère. Celui-ci se vit projeter à quelques mètres, mais se releva sans difficultés. Le Cygne s'apprêtait à s'élancer vers son ennemi, mais interrompit lui aussi son geste. Il venait d'avoir la même sensation que Shiryu.

- Tu as ressenti ça fit-il, essoufflé ?
- Bien sûr, répondit le Dragon, pensif. Hyoga, cela venait de très loin d'ici, en pleine mer. Tu crois que...
- Evidemment, il n'y a pas de doute possible. Je reconnaîtrais le Cosmos d'Ikki entre mille. Et j'ai senti qu'il changeait brutalement de forme, comme si un autre avait pris sa place.
- Ca s'est produit en quelques secondes. Je perçois encore la Cosmo-énergie du Phénix, mais elle me semble radicalement différente. Pourtant, celles de Shun, Kanon et Saga n'ont pas changé.
- Exactement, et ça m'inquiète beaucoup. A ton avis, qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire ?
- Je n'en ai aucune idée, mais cela ne me dit rien qui vaille. La seule chose que ce phénomène évoque en moi, c'est le souvenir du Cosmos d'Ikki lors du tournoi intergalactique. Empli de haine... Sans vouloir être pessimiste, j'ai l'impression que leur voyage sur l'Atlantide ne s'est pas déroulé comme prévu.
- Le plus pénible, c'est qu'il nous est impossible d'en savoir plus. Tout au plus pouvons-nous capter les vibrations de leur Cosmos. On ne peut rien faire. On est condamnés à rester ici, en spectateurs, dans l'espoir qu'ils parviendront à résoudre leurs ennuis tout seuls.
- Avez-vous fini de dramatiser la situation, fit une voix douce et familière ?

La silhouette de Mû se profila à contre-jour, avant de descendre l'escalier pour rejoindre Hyoga et Shiryu. Il ne portait pas son armure, et ses cheveux lui tombaient en bataille sur les épaules.
Il s'avança vers les chevaliers divins, et parla d'un ton tranquille.

- J'ai ressenti comme vous ce qui s'est passé, et je n'ai malheureusement aucune interprétation à vous offrir. Effectivement Shiryu, le Cosmos d'Ikki tel qu'il est à présent n'est pas sans rappeler celui qui était le sien il y a quelques mois encore. Quant à ceux des autres, ils n'ont subi aucune transformation. C'est peut-être ça le plus étrange.
- Et tu ne t'inquiètes pas fit Hyoga, soupçonneux ?
- Evidemment que je m'inquiète, car je n'ai aucune explication. Mais comme tu l'as dit, on ne peut rien faire de plus que ressentir leurs Cosmos. Il est probable en effet qu'ils ont des ennuis. Ils savaient qu'ils couraient ce risque, et ont quand même choisi de partir. A présent ils sont forcés de se débrouiller seuls, sans votre aide. On ne peut qu'espérer, sans avoir la moindre idée de ce qu'ils sont en train de vivre.

Mû tourna la tête vers la mer, l'air rêveur et les yeux dans le vague. Sa voix se fit plus douce, perdue quelque part sur une lointaine et légendaire île de Méditerranée. Il soupira.

- Nous devons leur faire confiance. Je suis certain qu'ils reviendront bientôt sains et saufs.

Mû aurait voulu croire sincèrement à ce qu'il disait. Mais c'était si difficile...

***

Eileen et son fils avaient marché pendant des heures avant que la Grande Prêtresse n'avoue finalement qu'ils étaient perdus. Le labyrinthe que formaient les grottes qu'ils avaient successivement parcouru était pratiquement insoluble : toutes les grottes semblaient identiques et il ne paraissait y avoir aucun moyen de déceler si on y avait pénétré auparavant. Finalement, Shun arracha son t-shirt et en laissa un petit morceau au milieu de chaque grotte qu'ils traversaient. Cela leur permit de se rendre compte qu'ils ne cessaient de tourner en rond. Lorsqu'à la fin, harassés de fatigue par plusieurs heures de marche, ils se laissèrent tomber à même le sol, le chevalier d'Andromède prit la parole.

- Tu n'as vraiment aucune idée de l'endroit où nous nous trouvons ?
- Si, une idée, j'en ai une. Je pense que nous sommes dans l'ancien temple, situé dans les catacombes de l'Atlantide.
- Et ?
- C'est un labyrinthe bâti par les Anciens, vraisemblablement du temps d'Alana. Si on ne connaît pas la clé pour sortir, il est impossible de le quitter.
- Mais comment se fait-il qu'en tant que Grand Prêtresse, tu ignores cette clé ?

Eileen haussa doucement les épaules.

- Personne ne s'est soucié de ce temple depuis plusieurs siècles déjà. J'en avais pratiquement oublié l'existence moi-même.
- Je vois… As-tu au moins une idée de la dimension de ces catacombes ?
- Oui. Elles font le tour de l'île et se prolongent un petit peu sous la mer.
- Ce qui veut dire qu'on ne peut même pas prendre le risque de casser la voûte pour sortir par le haut… C'est pas gagné. Et si j'appelais mon armure ? Ma chaîne saurait probablement nous guider hors d'ici !
- C'est un temple dédié à l'Empereur Poséidon. Selon la légende, sa cosmo-énergie empêche quiconque n'est pas un de ses guerriers de revêtir son armure en ce lieu.
- Mais qu'est-ce qu'on fait alors, maman ?

L'emploi du " maman " par son fils amena Eileen au bord des larmes. Elle se rendit compte également que son fils, qui s'était toujours plus ou moins débrouillé par lui-même, avait maintenant une certaine tendance à trop vouloir se reposer sur sa mère. Sentiment finalement assez normal chez un adolescent de 12 ans. Pourtant Eileen, et c'est assez compréhensible, n'avait guère l'instinct maternel. Elle était ravie de retrouver ses enfants, c'était certain, mais elle n'avait pas encore eu vraiment le temps de s'y habituer. Aussi la relation de dépendance qu'était en train d'instaurer Shun, probablement à son insu d'ailleurs, l'agaçait fortement. Pourtant, sous peine de peiner son fils inutilement, elle ne pouvait rien dire. Restait donc le problème de la sortie. Heureusement, la mousse qui poussait sur les parois était suffisamment lumineuse pour leur permettre d'y voir. Toutefois, restait le problème épineux des vivres. En tant que chevaliers, ils pouvaient rester deux jours sans manger ou boire et conserver la majorité de leurs capacités physiques. Toutefois, au-delà…

***

Kanon suivit la galerie que lui avait indiquée Alana. Vaguement éclairé par la mousse, le chevalier des Gémeaux devait néanmoins plisser les yeux pour voir à plus de dix mètres. Il marcha ce qui lui sembla être des heures, alors que cela était plus proche de dizaines de minutes, avant de parvenir à une gigantesque " salle ", à défaut de terme plus approprié. On eut dit l'endroit où Alana lui avait parlé. Pourtant, il se dégageait de ce lieu un certain mysticisme. Kanon se demanda si cet endroit n'était pas celui où l'on offrait des sacrifices au Dieu des Océans. Il y avait de nombreuses colonnes de chaque côté et au milieu un autel.

Sur cet autel trônait, majestueuse et insolente, la seconde armure d'Or des Gémeaux. Echaudé par les deux précédentes fois où il avait cru tenir cette armure et où elle s'était volatilisée, il resta d'abord immobile pendant de longues minutes. Puis, à pas de loup, il s'approcha de son rêve. Au moment de la toucher, il hésita une nouvelle fois ; il se souvint de toutes les mises en garde qu'il avait reçu. Et si cette armure était réellement maudite ? Si elle avait été placée là afin que personne n'y touche jamais ?

Pourtant, une autre voix qu'il avait du mal à reconnaître comme sienne, lui susurrait de s'en saisir. Comme hypnotisé, Kanon avança son bras droit et toucha l'armure.

Immédiatement, elle se mit à briller. Kanon retint son souffle. Cette fois, c'était la véritable armure des Gémeaux qui se trouvait devant lui. Cette dernière se disloqua rapidement et vint le recouvrir. Un grand sentiment de puissance s'empara alors de lui. Ses rêves de conquête et de grandeur, longtemps, trop longtemps enfuis en lui, venaient de réveiller. Il allait dominer la terre !

Caché derrière l'une des colonnes, Arès jubila. Il avait savamment orchestré sa mise en scène. Après tout le plan de ces chevaliers de Vermeil n'était pas si stupide que cela. A présent, il disposait de quatre guerriers pour abattre les chevaliers d'Andromède, le second des Gémeaux et bien entendu celle de Cassiopée. Arès saliva à l'avance en pensant au combat qui allait mettre aux prises les deux jumeaux. Il allait de soi que si par hasard leur combat se transformait en un duel de mille jours et mille nuits, il se ferait un plaisir d'aider Kanon. Pourtant, il ne fallait surtout pas que ce dernier sache qu'il ne devait ses pouvoirs qu'au Dieu de la Guerre. Il fallait impérativement qu'il croie agir de lui-même : il n'en serait que plus facile à manipuler…

***

Saga et Minéos avancèrent avec précaution. Ils longèrent les couloirs des catacombes en rasant les murs pour éviter d'être vus. Pendant plusieurs heures, ils marchèrent sans dire un mot. Soudain, Saga s'arrêta net. Minéos, qui marchait devant, mit quelques secondes à s'apercevoir que son compagnon ne le suivait plus. Il se retourna et vit le chevalier des Gémeaux qui semblait plongé dans une intense réflexion. Il revint sur ses pas. Ils se trouvaient dans une grotte qui comptait trois galeries.

- Que t'arrive-t-il, Saga ?
- Regarde ce bout de tissu.
- Oui, et alors ?
- Ah oui, c'est vrai, tu ne le connais pas. Ce bout de tissu, comme tu dis, est de la même couleur que celle du t-shirt de Shun.
- Le chevalier d'Andromède ?
- Oui. Je suis à peu près certain qu'ils sont passés par ici. Il faut impérativement les retrouver.
- Mais comment ? C'est un vrai dédale par ici !

Saga se concentra brièvement et essaya de localiser Shun grâce à son cosmos. " Etrange, fit-il à mi-voix, et pourtant je sens qu'il n'est pas loin. " Il tendit l'oreille, essayant de capter le moindre son, ou la moindre vibration de pas…

- Par là, fit-il au bout d'un moment, en se précipitant vers la galerie de droite.
- Saga, attends-moi !

Instinctivement, alors qu'il ne pouvait pas connaître l'endroit qu'il cherchait, Saga choisissait sa route à travers les catacombes.
Minéos dut bien vite reconnaître que son compagnon avait raison car il entendait des voix de plus en plus fort. Il identifia la voix de la Grande Prêtresse et se mit alors à courir encore plus vite. Ils débouchèrent enfin sur une énième galerie, où ils virent Eileen et Shun dans les bras l'un de l'autre.

- Et bien Shun, c'est du propre, fit un Saga narquois ! Nous nous crevons le cul à te chercher et voilà que nous trouvons en train de jouer les jolis cœurs… Avec une fille de cet âge, en plus !

Eileen étouffa un petit rire pendant que le visage de Shun virait au cramoisi.

- Tu… Tu n'y es pas du tout, Saga… C'est ma mère.
- Ta QUOI ? ? ?
- Ma mère, celle d'Ikki aussi par la même occasion.

Saga partit d'un franc éclat de rire, avant de redevenir plus grave au bout de quelques secondes.

- Ikki… Je suppose que vous avez senti vous aussi…
- Oui, répondit Eileen. C'est très inquiétant. A présent, nous avons un Dieu en face de nous.
- Bah, ce n'est pas la première fois, fit Saga en haussant les épaules.
- Excusez-moi, interrompit Minéos nerveusement, j'ai rêvé ou je vous ai entendu parler d'un DIEU ? ? ?
- Ah oui pardon, fit Saga. Shun, je te présente Minéos, un nouvel allié. Minéos, voici Shun, chevalier divin d'Andromède. Donc un dieu. Avec une telle cosmo-énergie remplie de haine, il n'est pas bien difficile de savoir à quel dieu nous avons à faire : Arès…
- Je suis navré, mais je ne comprends toujours pas, dit un Minéos qui se demandait de plus en plus dans quelle galère il était allé se fourrer.
- En résumé, Shun et Ikki sont frères. Ikki est le chevalier divin du Phénix. Ces deux-là avec trois autres chevaliers divins ont sauvé Athéna et la Terre à plusieurs reprises. Pour des raisons que nous ignorons, il semble qu'Arès se soit réincarné dans son corps. Ce qui fait de lui notre plus dangereux ennemi.
- Et tu as dit que ce n'était pas la première fois que vous affrontiez un Dieu ?
- Non, répondit Shun. Nous avons déjà affronté et vaincu deux Dieux : Poséidon et Hadès.
- Nom de Zeus ! Et ben ça promet !

A ce moment-là une violente déflagration se fit entendre. Comme si un cosmos très puissant venait de se réveiller. Eileen se mit à gémir pendant que Shun et Saga se regardaient d'un air entendu et attristé.

- Ainsi, la légende disait vrai, dit le chevalier des Gémeaux. La seconde armure est belle et bien maléfique et mon frère a été de nouveau perverti.
- Ce qui veut dire qu'à présent Kanon et Ikki sont contre nous, fit Shun. Saga, va-t-on devoir nous battre contre nos propres frères à nouveau ?
- J'en ai bien peur, Shun. Et la partie est loin d'être gagnée, étant donné le fait que les déplacements à la vitesse de la lumière sont impossibles sur l'Atlantide. Détail que l'on a malencontreusement oublié de nous transmettre, ajouta-t-il en jetant un regard appuyé vers Eileen.
- Je ne pensais sincèrement pas que vous auriez besoin de vous battre. Mais comme je le disais il n'y a pas si longtemps, votre venue sur l'île a mis le feu aux poudres.
- Bien, résumons-nous, reprit Saga. Nous savons qu'Ikki est devenu un Dieu ; il peut compter sur Kanon qui a revêtu l'armure maléfique des Gémeaux. Il a également avec lui trois des quatre chevaliers de Vermeil. Quant à nous, nous avons dans nos rangs un chevalier divin qui déteste la violence, un chevalier d'Or renégat et néanmoins repenti, un chevalier de Vermeil et un guerrier sans armure. Cela pourrait ne pas être désespéré comme combat si nous n'étions pas privés en plus de notre vitesse de déplacement. Grâce à leurs armes, les chevaliers de Vermeil nous sont donc clairement supérieurs à l'heure actuelle. Ai-je oublié quelque chose ?
- Oui, répondit Eileen. Il est fort probable qu'Arès cherche à se venger d'Athéna. Si jamais il quitte cette île, le Sanctuaire sera sa prochaine destination. De plus, il sera libéré de la cosmo-énergie de Poséidon qui l'empêche de faire appel à ses légions.
- Je me demandais justement pourquoi il ne l'avait pas encore fait. C'est donc le cosmos de Poséidon qui l'en empêche ?
- Je ne vois que ça comme explication plausible.

Bien, alors que faisons-nous, interrogea Minéos ? Si j'ai bien compris, nous sommes en plein territoire ennemi, sans véritable plan d'action…

Minéos disait vrai. Saga réfléchit rapidement. Shun et Eileen n'étaient pas en état de combattre, c'était certain. Pourtant, le jeune chevalier Andromède avait livré de maintes batailles dans un état physique et psychique calamiteux. Il pourrait le faire une fois de plus. Quant à Eileen, Saga n'était pas trop inquiétant. Il y avait fort à parier que la sauvegarde de son île serait une motivation suffisante pour les prochains combats.

Non, c'était plutôt pour lui-même que le chevalier des Gémeaux était anxieux. A la pensée de devoir à nouveau affronter son frère, Saga frissonna. Il venait à peine de se réconcilier avec lui et peut-être allait-il devoir le tuer. Treize ans après, les deux jumeaux allaient probablement à nouveau se mesurer l'un à l'autre. Peut-être valait-il mieux ne pas rester ici. Minéos venait de faire remarquer leurs faiblesses. Oui, la solution la plus acceptable était le repli. Après seulement on envisagerait une véritable stratégie. Saga venait de prendre sa décision.

Il n'eut aucun mal à convaincre la Grande Prêtresse et son fils. Shun s'appuya sur Saga et Eileen sur Minéos. Malheureusement, il était impossible pour eux de repartir par là où ils étaient arrivés. Il était impensable d'envisager l'escalade de la falaise. L'ancienne prison était tout aussi inaccessible, il fallait donc en trouver une autre. Et cela était plus facile à dire qu'à faire. La voix de Shun se fit alors entendre:

- Je vais peut-être dire une bêtise, mais… Saga, tu es le spécialiste des dimensions. Seul, tu n'as aucune chance de passer la barrière de Poséidon, mais si nous allions nos forces ?
- Hum, répondit l'interpellé. Il y a une idée dans ce que tu dis. Si Poséidon était réincarné, tout effort de ce genre serait vain. Mais comme il est enfermé dans son urne, peut-être… Très bien, nous allons essayer. Je vais concentrer mon cosmos au maximum et vous de même. Prêts ?

Pour toute réponse, trois cosmo-énergies se mirent à briller intensément. Saga les imita.

- Que se crée une Autre Dimension !

Pendant un instant, on crut que cela fonctionnait. Un léger bourdonnement s'immisça dans les oreilles de chacun, et une lueur apparut entre les mains ouvertes de Saga. Quelque chose sembla s'entrouvrir une fraction de seconde, un sorte de trou béant qui laissait apercevoir l'infini. Puis il y eut un bref tremblement, comme si un grondement avait agité le tunnel. Et tout s'interrompit sèchement, mettant fin aux espoirs. Ils comprirent alors que Poséidon, enfermé ou pas, ne les laisserait pas s'enfuir de cette façon.

- Je crois qu'on n'a guère le choix, soupira Saga en baissant les bras.

Il échangea un regard de connivence avec ses compagnons.

- Ne perdons pas de temps, fit Minéos. Puisque nous sommes coincés ici, trouvons ces Dissidents. Une bonne bataille vaut mieux que cette minable partie de cache-cache !

C'est alors qu'une voix se fit entendre.

- Je vous salue, chevaliers d'Athéna. Je suis chargé de vous amener auprès d'Arès, notre seigneur.
- Solagar, fit Eileen !
- Oui, Grande Prêtresse, répondit l'intéressé d'un ton ironique ?
- Je t'ordonne de cesser ta rébellion. Si tu rejoins nos rangs, je ne t'infligerai qu'une légère punition.
- Trop aimable de votre part. Mais j'ai cessé de vous obéir. Mon maître est à présent le Dieu de la Guerre. Grâce à lui, nous allons réduire Athéna et ses chevaliers à néant.
- Inconscient, hurla Shun! Ne comprends-tu pas qu'une fois qu'il aura accompli ses desseins, Arès vous tuera tous ?
- Peut-être… Venez-vous?

Sans répondre, Eileen s'avança. Minéos, Saga et Shun les suivirent à quelques pas.

L'heure du combat approchait.

***

Loin de l'Atlantide, dans un lieu inconnu des hommes

Un éclair soudain zébra le ciel. Puis un autre. Puis encore un autre. Il ne pleuvait pas et pourtant une pluie d'éclairs était en train de s'abattre. Les deux hommes - hommes ? - qui étaient assis en train de jouer aux échecs jetèrent un œil vers le ciel.

- Je crois que Père est furieux, fit le premier.
- Furieux ? Vraiment, Apollon, parfois je me demande si tu le fais exprès ! Il est fou de rage, tu veux dire !
- Hermès, Hermès, cria une troisième voix qui s'approchait.
- Allons, allons, tu ne devrais pas te fatiguer ainsi, Ganymède.

Le dénommé Ganymède entra alors dans la pièce, essoufflé.

- Hermès, Zeus veut te voir. Immédiatement.
- Curieux. D'habitude, lorsqu'il m'appelle de manière aussi précipitée, c'est qu'il est amoureux. Là, je ne crois pas, ajouta-t-il après avoir jeté un nouveau coup d'œil vers le ciel.

Hermès se leva et se prépara à partir lorsque Apollon lui dit.

- Nous n'avons pas fini notre partie, Hermès.
- Ah oui, c'est vrai.

Le Dieu des Voleurs se retourna et examina l'échiquier quelques secondes ; il prit une pièce, la posa devant le roi adverse et dit.

- Echec et mat, Apollon. Tu progresses, mon frère, mais tu n'es pas encore au niveau.
- Disparais, insolent, avant que je ne te réduise en cendres !
- Oh, ça, j'ai peur que Père s'en charge avant.

Comme il disait ces mots, un nouvel éclair vint détruire l'échiquier.

- Tu vois ce que je disais, fit Hermès avec un clin d'œil. Allons-y Ganymède, où nous subirons le même sort.

Zeus fulminait. Et le mot était faible. Le Roi des Dieux ne cessait d'abattre son poing sur l'un des accoudoirs de son trône et, ce faisant, déclenchait des éclairs à chaque fois. Lorsque Hermès parut, sa colère sembla empirer.

- Ah te voilà, toi ! Peux-tu me dire pourquoi je n'ai pas été mis au courant que mon fils Arès ait choisi le chevalier Phénix pour sa réincarnation ? Sur six milliards d'humains, il a fallu qu'il prenne le seul qui pouvait nous être funeste ! Alors, je t'écoute.
- Puissant Zeus, je ne suis pour rien.
- Pour rien, rugit Zeus ! Pour rien ! Mais vil manant, dois-je te rappeler que je t'ai chargé de surveiller mon fils depuis qu'il a formé ses projets de destruction de la Terre ?
- Non, Zeus, je le sais. Mais Héra, ta divine épouse, m'a commandé de cesser cette surveillance il y a une quinzaine d'années humaines. J'ai fait comme tout bon serviteur ; j'ai obéi à la femme de mon maître.
- Héra ! ! ! Ganymède, va sur-le-champ me chercher cette garce !
- Oui, Zeus.

Ganymède parti, Zeus sembla se calmer. Il regarda son fils avec un air abattu.

- Tu sais ce que cela veut dire, n'est-ce pas Hermès ?
- Oui, Père. Le fait qu'Héra ait permis à Arès de se réincarner dans le corps de celui qui sera…
- Chut ! Tais-toi ! Nul autre que toi et moi doit le savoir. Qu'allons-nous faire ?
- Je ne sais pas, puissant Zeus. Prier peut-être ? Si jamais Arès parvient à convaincre Ikki de fusionner avec lui, il pourra déclencher l'Apocalypse…

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Cette fiction est copyright Emmanuel Axelrad et Clément Baudot.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.