Chapitre 5 : Le combat des Deux Soleils


Résumé de la chronologie de St Seiya Next Generation
1986-87 : Batailles de Seiya et ses compagnons
1989 : Bataille de l'Olympe
2010 :
23-27/07 : Le groupe se forme autour de Kotori Kido : Arkhan, Eric, Anton, Krell, Kassim.
27-31/07 : Kotori et ses amis partent aider le Sanctuaire de Quetzalcoatl contre celui de Amon-Râ.
01/08 : La bataille du temple du Serpent :
Lanz, Isamu, Khal, Lise, Rody, Yrugo et Paulo, du temple de Quetzalcoatl, sont tués.
Thot, Osiris, Isis, Sebek, et Horus, du temple d'Amon-Râ, sont tués.
Krell et Anton, ainsi que Juan, sont inconscients après leurs derniers combats.
Anubis vient d'éliminer Ryan et Kassim



Eric jeta à peine un regard vers les deux corps étendus dans le couloir menant à la salle du trône. Le corps sans vie d'une femme à la peau dorée ; celui, inanimé, mais en qui pulsait encore un soupçon de vie, d'un guerrier au visage ensanglanté.

Non qu'il fût froid et distant au point de ne pas vouloir s'attarder sur le sort de ces deux personnages, mais Eric était fatigué, sa blessure le faisant terriblement souffrir, et son attention tout entière était concentrée sur la simple action de marcher droit devant lui.

La porte du temple ouverte devant lui, il pénétra enfin dans le lieu où se déroulait le dernier combat. Il vit immédiatement que la situation se présentait mal : Kassim, étendu dans une flaque de sang, et Ryan, inconscient et mutilé, assis dans un coin. Kotori et Viracocha se tenaient près du trône avec le Voyant, et seul Arkhan s'interposait encore entre eux et le terrible Anubis. Il était temps de lui venir en aide.

"Il est temps d'en finir !" fit le dieu noir.
"Tout à fait !" lui répondit ironiquement Eric, faisant converger vers lui le regard de toutes les personnes dans la pièce, et qui n'avaient pas encore vu son arrivée.

Eric tituba un peu pour se placer aux cotés de son compère Arkhan, et se positionner ainsi en tant que dernier défenseur des deux jeunes divinités.

"Il y a eu trop de morts aujourd'hui, Anubis ! Tu seras le dernier de la série, parce que ça doit cesser ! Viens te battre si tu l'oses !"

Anubis ne répondit pas, puis éclata de rire.

"Ah ah ! Et que peut donc faire un blessé contre moi ? Regarde-toi, tu tiens à peine debout ! Tes poumons sont touchés, n'est-ce pas ? Tu dois souffrir horriblement."

"Ca ne m'empêchera pas de me battre !" fit le guerrier divin.

"Ah ah ! Mais te battre dans de telles conditions revient à te suicider ! Avec cette douleur, tu ne dois pas pouvoir bouger comme tu l'entends, le moindre mouvement brusque te ferait perdre conscience. Tu n'esquiveras pas mes attaques."

"Alors puisque la douleur me gêne, je vais la supprimer."

Eric porta alors la main à son coté blessé, et concentra son énergie. Des cristaux de glace apparurent sur son vêtement, mais le froid intense pénétrait en fait plus profondément.

"Voilà. Avec ca, je suis anesthésié pour un moment. Même si je suis blessé, je ne sentirai rien."

"Idiot ! Tu reste tout de même handicapé. Le froid paralyse tes mouvements, tu n'es plus aussi agile qu'avant. De plus, tu es désormais plus fragile, si je te frappe à cet endroit, tu éclateras en morceaux comme un verre qu'on brise. Tu viens de signer ton arrêt de mort !"

A ces mots, Arkhan jeta un coup d'œil surpris à son compagnon, qui fixait férocement son adversaire. Anubis disait-il la vérité ? Dans ce cas...

"Eric écoute-moi..." commença le guerrier de la Mante.

Mais il n'eut pas le temps de poursuivre. Anubis se jetait de nouveau sur eux, son épée fendant l'air, et les deux jeunes héros durent mettre tous leurs efforts à esquiver les assauts, et de temps en temps, porter un coup ici ou là, toujours sans effet sur l'armure noire.

Eric montra assez vite des signes de fatigue, et Anubis s'en rendit compte. Il concentra la plupart de ses coups vers le guerrier divin, afin de se débarrasser promptement de cet adversaire-ci, mais Eric, poussé par l'énergie du désespoir, s'échappait toujours in extremis. Arkhan de son coté, l'aidait du mieux qu'il pouvait en détournant certains coups, ou en menaçant assez Anubis afin qu'il ne puisse porter de coup fatal à son ami.

Mais la situation n'était pas brillante.



Seiya leva les yeux vers le ciel. Le soleil allait bientôt se coucher sur le Sanctuaire, mais le jour serait encore long au temple du Soleil de Quetzalcoatl. La bataille faisait toujours rage, mais déjà il sentait se lever un nouveau cosmos, qui partait rejoindre le temple.

"Il s'y rend déjà... Alors c'est que la fin de la bataille approche." murmura le chevalier d'Athéna.

Saori s'approcha de lui.

"Seiya... Tu l'as senti, toi aussi ?"
"Oui, bien sûr."
"Son cosmos est si puissant... Il donnera sans doute la victoire à son camp."
"Attendons de voir, mais je ne parierais pas forcément sur lui."

Saori ne répondit pas. Peut-être Seiya avait-il raison ?



"Et maintenant, le coup de grâce !" hurlait, presque hystérique, le dieu noir.

Il abattit son épée sur Eric, tombé au sol, mais la lame ne rencontra qu'une autre lame. Kotori venait d'entrer en scène avec Balmung.

"Cela suffit ! J'en ai assez de vous voir vous battre sans rien faire ! Je ne te laisserai pas massacrer mes amis sans réagir, Anubis !"

Le guerrier d'Egypte eut l'air surpris de découvrir la jeune fille aussi courageuse, et eut un instant d'hésitation. Cet instant lui fut presque fatal, car Eric et Arkhan en profitèrent tous les deux pour lancer un assaut. Mais hélas, le dieu noir échappa encore à ses assaillants, et put reculer pour se mettre hors de portée. Malgré tout, le froid intense d'Eric l'avait touché à la taille, mais seulement en surface sans atteindre les organes. Anubis sentait son armure glacée contre sa peau, comme une ceinture de neige autour de ses reins. Arkhan non plus n'avait pas complètement manqué son but, et le métal de son épaulière montrait une très nette déchirure, attestant de la force du combattant. Mais même la puissance de ces deux attaques n'auraient pas suffi à le tuer, tant son armure était résistante.

"Eh bien jeune fille" ironisait encore le dieu, sûr de sa force, "vous désirez tant mourir que vous voulez, sans armure, rejoindre le combat ?"
"Armure ou pas, je me battrai. Cette bataille n'a que trop duré."
"Bien parlé." fit une voix juvénile à coté d'elle. "Moi aussi, je vais me battre."

Tous regardaient le jeune Viracocha prendre place près d'eux, face au terrible adversaire. Son visage exprimait une grande détermination, et ils n'eurent pas le cœur de le repousser. Le Voyant tremblait en regardant son jeune maître défier ce puissant adversaire, mais il n'esquissa pas un geste pour l'arrêter. Cependant, Arkhan et Eric échangèrent un regard entendu, alors que leur plan se mettait en place. Et il était hors de question de risquer la vie des deux jeunes divinités.

"Vous l'aurez voulu !" fit d'une voix forte Anubis, "Je vais tous vous tuer en même temps !"

Et le dieu s'élança encore, dirigeant la pointe de son épée vers le cœur de Kotori. Immédiatement, il se rendit compte qu'Eric et Arkhan s'écartaient de la jeune fille, comme la laissant à son destin, et se plaçaient en tenaille autour de lui. Il vit Eric concentrer son cosmos, tandis que Arkhan lui fonçait dessus pour le frapper.

Et Anubis commit une fatale erreur.

Jugeant l'assaut d'Eric plus dangereux pour lui, il s'arrêta en pleine course pour se mettre en garde et bloquer sa technique glaciaire. Arkhan aurait beau le frapper, son armure tiendrait bien un instant ou deux, le temps pour lui de bloquer l'assaut d'Eric, puis de se débarrasser de la Mante, venu trop près pour pouvoir esquiver le coup qu'il lui porterait. Mais le souffle glacé du Cristal fut long à venir, et Anubis ne comprit que trop tard qu'il s'agissait d'un piège. Au moment où le guerrier divin lançait son attaque, Arkhan était déjà sur lui, et son cosmos surgit d'un coup, révélant qu'en fait le bonze préparait une attaque mortelle. Anubis put d'un geste arrêter la vague de froid qui fonçait sur lui, mais pas le grand mouvement circulaire que fit Arkhan de sa main.

"Kill ! Large Cut !"

Le Dieu décocha un coup de genou à la Mante, l'envoyant au loin, puis dissipa l'énergie d'Eric. Il en était à se demander si l'assaut d'Arkhan avait été vain, brisé par la résistance de son armure noire, quand une grande douleur remonta le long de sa colonne vertébrale.

Le torse d'Anubis se sépara de son bassin, et tomba en arrière, tandis que les jambes s'affaissaient et tombaient elles aussi. Mais même coupé en deux, le dieu n'était pas encore mort. Son souffle rauque devint une question : "Comment ?"

"Tu as toi-même donné la réponse." fit Eric. "En te gelant, tout à l'heure, j'ai fragilisé ton armure. L'attaque d'Arkhan a porté sur cette faiblesse, et a pu la traverser."

"Elle s'est brisé sous ma lame comme du verre." approuva son compagnon. "La bataille est terminée."

Sous son masque, Anubis sourit. Oh quels inconscients ils étaient !

Puis il expira.

Kotori et Viracocha rejoignirent les deux guerriers penchés sur le cadavre mutilé.

"Enfin c'est fini." fit la jeune fille. "Mais il nous faut nous occuper des blessés et des morts."

"Presque tous mes guerriers ont péri." dit tristement le jeune Viracocha. "Mais on peut peut-être en sauver quelques-uns."

"Non, aucun d'entre vous ne survivra à cette journée !"

Et alors que tous se retournaient, le cosmos gigantesque d'un dieu s'éleva au sein du temple, tandis que Amon-Râ, Dieu du Soleil de l'ancienne Egypte, faisait son entrée.



L'homme qui venait d'apparaître était de haute taille, et son armure blanche, aux antipodes de celle de son fidèle serviteur, semblait faite de la même matière que le soleil lui-même. Tout comme Anubis, Amon-Râ tenait une grande épée, mais cette fois-ci à lame courbe, et son armure semblait aussi invincible que celle du dieu chacal. Son visage était celui d'un homme encore jeune, aux cheveux d'un noir de jais, mais au regard dur, à l'expression énigmatique. Les mots résonnaient lorsqu'il les prononçait, comme si sa voix était de tonnerre, et la salle du trône une petite vallée qui la renvoyait en échos.

"Ainsi vous avez pu tuer tous mes serviteurs, même le puissant Anubis. Je vous félicite, je ne m'attendais pas à tant de résistance de votre part."

Ce fut Viracocha qui lui répondit :
"Nous nous sommes battus avec l'énergie du désespoir, c'est ce qui nous a permis de vaincre."
"De vaincre ?" s'étonna le dieu égyptien. "Mais vous n'avez pas encore gagné, ce me semble. A moins que tu ne considères que je sois déjà perdu ?"
"Rends-toi à l'évidence, nous sommes quatre et tu es seul ! Tu ne pourras..."
"Quatre ? Mais vous l'étiez déjà contre Anubis, non ? Et vous avez eu beaucoup de mal à le vaincre. Et bien entendu, je suis infiniment plus fort que mon meilleur guerrier. Comprends-tu que tu es perdu ?"

Kotori se permit d'intervenir.
"Et quand bien même ce serait le cas, qu'attendez-vous de nous ? Que nous mourrions en silence, sans nous battre ?"
"Bien entendu, ce serait la meilleure solution. Ainsi je ne gaspillerais pas mon précieux temps. Mais je suppose que ce serait trop vous demander. Je vais sans doute avoir à me salir les mains."

"Et bien viens, alors !" s'exclama Eric, défiant. "On a passé la journée à se battre, alors finissons-en d'un coup ! Ensuite, on pourra soigner nos blessés. Allez, viens !"

"Soit ! Je vais répondre à ton défi. Mais avant cela..."

Et avant que quiconque ait pu faire un geste, Amon-Râ se trouvait près du trône, et faisait face au Voyant, qui se mit à trembler de plus belle. Amon-Râ plongea sa lame dans le corps du vieillard, ignorant le cri d'effroi de Kotori, et la retira d'une torsion, provoquant de grandes éclaboussures qui vinrent maculer de pourpre son armure de lumière.

"Voilà pour toi, sale traître..." grognait le dieu pendant qu'il exécutait le vieil homme.

"Pourquoi ? Pourquoi ?" criait, au bord des larmes, le jeune dieu inca.

"Il m'a servi autrefois, avant de me trahir et de venir se réfugier ici. C'est en partie pour lui que je voulais raser ce temple. Maintenant, je vais m'occuper de la deuxième raison à ma présence en ce lieu. Toi."

Et le dieu égyptien de se jeter en avant, lame brandie, vers le jeune garçon. Ce dernier esquiva de justesse l'épée courbe, et fut vite épaulé par ses compagnons qui s'interposèrent entre les deux divinités. Mais Viracocha parla alors d'une voix forte.

"Non ! Arrêtez ! Ce combat ne concerne que lui et moi !"

"Mais Seigneur..." objecta Arkhan, "vous n'êtes... vous n'êtes qu'un enfant !"
"Et je dois devenir un homme. Maintenant. Laissez-moi."

"A la bonne heure !" fit Amon-Râ. "Je suppose que tu dois aller chercher ton arme ?"

Viracocha hocha gravement la tête, et ignorant les suppliques de ses protecteurs, ainsi que le regard attentif de l'autre dieu soleil, il se dirigea d'un pas ferme vers le trône. Il eut un dernier regard pour le cadavre du vieil homme, et prit quelque chose derrière le haut siège de pierre. C'était un fourreau, contenant une épée courte, une sorte de glaive. Lorsqu'il sortit l'arme de son logement, on vit briller sa lame de reflets cuivrés. C'était une épée courte en bronze, telle qu'on en fabriquait il y a des siècles, mais parfaitement conservée, son tranchant acéré menaçant déjà le dieu égyptien.

"Et c'est avec ce cure-dents que tu comptes me vaincre ?" Amon-Râ se moquait ouvertement.

"Yaaaaah !" hurlait le jeune garçon en se jetant sur son adversaire. Il semblait foncer tête baissée, sans aucune technique, mais à l'instant où Amon-Râ, sur la défensive, s'apprêtait à le faucher de sa lame comme un moissonneur fauche les blés, le garçon bondit vers le plafond, sautant largement au-dessus de la tête de son adversaire, tout en décochant un revers de son glaive. La lame frôla la tempe de son ennemi, y laissant une ligne écarlate, puis le jeune dieu se posa avec grâce au sol, faisant de nouveau face, un léger sourire aux lèvres.

"Oui, c'est avec ce cure-dents que je vais te vaincre." fit-il d'un ton assuré.

Le combat des deux dieux soleil venait de commencer.



"Ici on pourra tout voir."

Viracocha, ainsi que ceux qui observaient le fantastique combat, l'ignoraient, mais des yeux les observaient. Veiya et Ayaïn s'étaient installés dans une alcôve et surveillaient le déroulement du combat depuis une fente dans le mur. Cette antichambre avait sans doute été prévue à l'origine pour des raisons d'espionnage politique, et elle se révélait utile maintenant aux observateurs d'Athéna. Kengo, lui, tournait le dos à la scène, adossé au mur. Mais son esprit était concentré sur le combat, et il en suivait chaque mouvement, chaque assaut. Aveugle de naissance, il avait développé ses capacités extrasensorielles au point que s'il ne se contrôlait pas correctement, il pouvait même ressentir la souffrance de ceux qu'il observait.

"Eh il se débrouille pas mal, le petit dieu !" chuchota Ayaïn.

"On dirait que tu assistes à un match de boxe et que tu as parié sur le challenger. Sois plus concentré sur ta mission, je te prie !" Kengo n'était pas le chef du groupe pour rien. Lorsqu'une mission lui était assignée, il n'aimait pas se laisser distraire par des détails, ou par des frivolités. Sans doute le fait que depuis sa naissance il avait été obligé de garder un contrôle absolu de lui-même pour pouvoir compenser sa cécité y était pour quelque chose.

Veiya fit une remarque :
"Vous croyez que Viracocha pourrait vaincre son ennemi ? Ca foutrait tout le plan d'Athéna en l'air, non ?"

"Aucun risque." dit froidement Kengo. "Mais si c'était le cas, il nous faudrait peut-être intervenir. Kotori Kido ne doit pas trouver d'alliés ici."

"De toute façon, il ne reste plus personne de vivant parmi les guerriers totems. Alors ca ne changera pas grand chose." Ayaïn en semblait plus peiné qu'autre chose. Il prenait vraiment les guerriers de Kotori en sympathie.

"Détrompes-toi" fit Veiya, "même si on compte Juan et Ryan perdus, il en reste un en vie. Son adversaire l'a laissé pour mort, mais j'ai senti son pouls, faible mais régulier, quand je me suis penché sur lui sur le champ de bataille. Je suis sur qu'il va revenir avant la fin de ce combat."

"Ah oui ? C'est lequel ? Khal ? Yrugo ?"

"Ah ! Peut-être veux-tu faire un nouveau pari ?"



Viracocha se défendait bien pour un jeune garçon, mais le combat était par trop inégal. La haute taille, la plus longue allonge, et l'endurance plus importante d'Amon-Râ faisaient la différence, et malgré sa vitalité et ses réflexes fulgurants, Viracocha n'était pas de taille. A plusieurs reprises, alors qu'il était en position de dominer son adversaire, un simple mouvement de ce dernier suffisait à renverser la situation, en profitant des faiblesses du garçon.

Eric et Arkhan se rendirent compte très vite que le combat se solderait par la mort du jeune dieu s'ils ne réagissaient pas très vite. Mais il leur avait demandé de ne pas intervenir, aussi se sentaient-ils obligés d'attendre que Viracocha soit vraiment en position de perdre pour entrer dans ce combat.

Pendant ce temps, Kotori s'était penchée sur les corps immobiles de ceux qui gisaient dans la salle du trône. Ryan était encore en vie, même s'il se vidait rapidement de son sang par les deux plaies béantes qu'avaient été ses bras. La jeune fille fit de son mieux pour poser des garrots mais l'hémorragie était très importante, et il faudrait des soins rapides au jeune homme pour s'en sortir. Kassim, par contre, ne donnait pas signe de vie, et Kotori ne put entendre le moindre battement de cœur en posant son oreille à coté de la plaie ensanglantée. De même, le Voyant gisait, yeux grands ouverts, dans une mare de sang, et il était évident en le voyant qu'il était déjà dans l'autre monde.

Lorsqu'elle retourna son attention vers le combat de son jeune ami, elle poussa un cri d'effroi. Viracocha venait de tomber à terre, et Amon-Râ levait déjà sa lame haut au dessus de lui, afin de clouer au sol son rival.

Mais dans l'instant, deux ombres apparurent sur lui, et portaient simultanément leurs attaques les plus puissantes :

"Diamond Dust !"
"Green Queen !"

Amon-Râ ramena vivement ses bras sur son visage pour le protéger, et les deux attaques le touchèrent de plein fouet, au torse et au coté. Mais lorsque les vapeurs d'eau dégagées par l'attaque d'Eric se dissipèrent, les deux guerriers purent constater que le dieu soleil était indemne !

"Eh oui, vos attaques sont inutiles contre mon armure de lumière. Comprenez-vous à présent que vous ne pouvez me vaincre ?"

"Mais jamais nous ne nous rendrons !" s'exclama Viracocha, à nouveau debout.

"Non, vous mourrez tous !"

Et le dieu égyptien de donner un large coup de son sabre alors que le garçon n'avait pas encore ramassé son glaive. La lame déchira armure et chairs, laissant un sillage sanglant sur la poitrine de l'enfant qui tomba en arrière dans un grand cri. La blessure était profonde, et le sang se mit à jaillir à gros bouillons.

"Viracocha, non !" hurlaient ses trois alliés.

Eric et Arkhan se jetèrent à nouveau vers le dieu, afin qu'il ne puisse achever sa victime. Mais une fois de plus, leur coups furent vains, et le dieu en réchappa sans dommage.

"Vous ne voulez pas comprendre ? Seule une arme divine peut m'atteindre !!"

Amon-Râ para un assaut d'Arkhan, et lui décocha un formidable coup de genou dans la mâchoire, assommant sur le coup le jeune guerrier. Eric eut moins de chance, et reçut un coup de la lourde garde du sabre sur la nuque, ce qui eut pour effet de faire danser devant ses yeux des étoiles luisantes, avant de le plonger dans la nuit.

Mais alors que le dieu faisait un pas vers l'enfant agonisant pour l'achever, Kotori vint s'interposer, tenant Balmung fermement.

"Pas un pas de plus ! Sache que l'épée que je tiens est celle d'Odin, Seigneur d'Asgard, et que c'est donc une arme divine. Si tu ne te retires pas sur-le-champ, je t'abattrai avec elle !"

"Oh oh ! Tu serais donc une Valkyrie ? Pourtant, tu ne sembles pas très assurée, cette arme à la main. Voyons donc si tu pourras faire ce que tu dis. En garde !"

Le dieu se jeta en avant, tandis que Kotori faisait de même. Il y eut des étincelles lorsque les deux épées se heurtèrent, et les deux combattants se séparèrent instantanément, ayant pu chacun mesurer la force de l'autre. Une sueur froide coulait dans le dos de Kotori.

"Dernier assaut !" gronda Amon-Râ, en se lançant en avant.

Viracocha n'avait pas complètement perdu conscience, et en redressant un peu la tête, il put voir les deux épéistes entrer au contact l'un de l'autre. Il y eut un bruit horrible, celui du métal déchirant la chair, mais de là où il était, il ne voyait Kotori et Amon-Râ que de profil, et chacun semblait avoir transpercé l'autre de sa lame.

Mais l'un des deux avait raté son coup, et son arme n'était passée qu'à coté de son adversaire. Une seule épée avait trouvé son but, et allait prendre une vie.

Amon-Râ leva son épée, soulevant Kotori, empalée dessus, à plus d'un mètre du sol. La jeune fille hoquetait, la bouche pleine de sang, les yeux déjà vitreux. D'un mouvement, Amon-Râ la jeta au loin, telle une poupée de chiffon, et la jeune fille était déjà évanouie avant de toucher rudement le sol. Elle ne mettrait pas plus de quelques minutes à mourir dans ces conditions.

Le dieu égyptien jeta un coup d'oeil autour de lui. Tous ses ennemis étaient au sol, hors de combat. Il ne lui restait plus qu'à prendre la tête de Quetzalcoatl, et la bataille serait finie.

Mais à l'instant où il allait abattre son épée sur l'enfant-dieu, un horrible feulement se fit entendre, précédant d'un instant une forme sauvage qui se jetait à sa gorge, tel un fauve affamé.

Rody, le Jaguar, reprenait le combat !



Derrière le mur de l'antichambre, deux paires d'yeux regardaient, horrifiés, le massacre. Rody avait beau s'agripper à Amon-Râ, le griffant - en vain - , le harcelant, l'empêchant surtout de s'en prendre aux blessés, il ne ferait pas le poids bien longtemps. Et cette tuerie commençait à révolter l'un des observateurs.

"Bon sang !" chuchota Kengo, plus pour lui même que pour ses compagnons. "Si ça continue, ils vont tous y passer !"

Veiya le regarda en silence, comprenant très bien ce qui révoltait son ami. Lui d'habitude si froid, si respectueux des ordres, avait dû ressentir la souffrance des combattants, pour être ainsi prêt à transgresser les consignes de discrétion.

"Je sais ce que tu ressens, Kengo. Mais les ordres…"
"Je sais ! Je ne le sais que trop ! Mais ils n'étaient pas prêts pour ça ! Arkhan est fort mais…" Kengo se tût un instant, puis reprit : "Je ne peux pas obéir et rester là sans rien faire. Je dois les aider."

Veiya le retint par le bras alors que Kengo s'apprêtait à passer dans le couloir pour rejoindre la salle du Trône.

"Tu es fou ? Si tu les aides, tu seras considéré comme traître ! Tu sais très bien qu'Athéna ne veut pas que nous les aidions, le destin doit suivre son cours."
"Je me fous du destin ! Ils ne s'en sortiront pas seuls. Lâche-moi, je dois y aller !"

"S'ils doivent mourir aujourd'hui, nous n'avons pas le droit de changer cela. Tu sais que moi aussi, cela me fait mal."

"Alors aide-moi, plutôt que de me retenir."

Ayaïn, qui continuait à espionner, les interrompit.

"Les gars, pas la peine de discuter, il y a du nouveau."

Veiya revint à son poste d'observation et Kengo dirigea son esprit vers la salle voisine. Pendant qu'ils parlaient la situation n'avait en apparence pas changé. Pourtant, Eric était en train de ramper lentement en direction de Balmung, tandis que Rody luttait contre Amon-Râ qui essayait de se débarrasser du jeune homme agrippé à son armure.

"Merde !" fit Veiya. "Eric ne doit surtout pas se servir de Balmung ! Athéna a dit que cela ne devait en aucun cas arriver ! Qu'est ce qu'on fait, Kengo ?"
"On a pas le choix, il faut intervenir. J'y vais."

Kengo allait sortir quand Ayaïn eut une idée.

"Attends Kengo ! Je crois qu'il y a une solution pour agir sans être vus. Veiya, peux-tu décocher une de tes flèches à Eric ?"
"Mais pourquoi faire ?"
"Endors-le. Il ne s'en rendra même pas compte, dans l'état où il est."
"Mais si tu fais ça, ils sont tous condamnés !" Kengo refusait de laisser les jeunes guerriers mourir.
"Non, j'ai un plan. Il y a encore quelqu'un qui peut se servir de Balmung, même si c'est risqué."

Veiya comprit. Ayaïn avait les pouvoirs télékinésiques nécessaires pour exécuter son plan. Reportant son attention vers Eric qui n'était plus qu'à quelques dizaines de centimètres de l'épée d'Odin, il le prit pour cible et lui décocha un projectile minuscule qui vint se ficher dans son bras. Eric, trop affaibli, ne résista pas et perdit immédiatement conscience. C'était maintenant à Ayaïn de jouer. S'il ratait son coup, Eric, Arkhan, et leurs amis, mouraient dans les minutes qui suivraient.



Arkhan entendit un bruit, une sorte de raclement, assez désagréable pour le tirer de sa torpeur. Il ouvrit les yeux, et roula sur lui-même pour se tourner vers la provenance du bruit. Il vit que Rody se battait contre Amon-Râ, l'attaquant sans relâche, mais en vain, tandis que le dieu luttait pour se débarrasser de cet insecte collant. Mais le bruit ne venait pas de ce combat.

Arkhan regarda vers la gauche, et vit un mouvement au ras du sol. C'était Balmung qui glissait sur les dalles, en produisant ce raclement désagréable du métal sur la pierre. Arkhan fronça les sourcils, car l'épée se dirigeait vers lui ! Le guerrier de la mante se redressa péniblement, s'appuyant sur ses avant-bras, au moment où l'arme arrivait à lui, et pivotait sur elle-même, comme pour l'inviter à saisir la garde qu'elle lui présentait.

Arkhan eut un instant d'hésitation. Comment cette épée pouvait-elle se déplacer seule ? Etait-ce la volonté d'Odin qu'il la saisisse et s'en serve pour lutter contre le dieu égyptien ? Ou était-elle contrôlée par quelqu'un d'autre ? Le jeune guerrier regarda autour de lui, mais personne n'était en mesure de diriger l'épée vers lui. Eric et Ryan étaient inconscients, tout comme Kotori, qui saignait abondamment. Quetzalcoatl gisait dans un coin, son visage de petit garçon sage déformé par la souffrance. Qui donc pouvait manipuler Balmung si ce n'est Odin lui-même ? Arkhan ferma sa main sur la poignée de l'arme.

Le choc fut intense, et Arkhan retint avec peine un hurlement lorsque l'électricité traversa son corps. Dix ou peut-être vingt mille volts. Un corps humain normal aurait grillé sur le coup, mais Arkhan était un bonze, et il était endurant. Mais il ne comprenait pas pourquoi l'épée refusait maintenant sa présence alors que l'instant précédent, elle l'invitait à l'utiliser ?

Arkhan serra les dents. L'électricité qui le traversait le faisait souffrir horriblement, mais redonnait aussi de la mobilité à ses muscles engourdis. Il se releva, tenant fermement l'épée des deux mains, et la brandit devant lui.

"Odin ! " pria-t-il en son for intérieur, "si tu veux que j'utilise cette épée, je te demande de cesser de me repousser. Si je dois être ton bras, cesse de me torturer."

Mais ses prières restèrent vaines, et la douleur était toujours là, le courant crépitant dans tous ses muscles et ses os. Les yeux pleins de larmes arrachées par la souffrance, Arkhan leva l'épée au-dessus de sa tête, et hurla à pleins poumons :

"Odin ! Aide-moi !"

A ce cri, Amon Râ et Rody portèrent leur attention vers le guerrier de la Mante, et Amon-Râ en profita dans le même temps pour jeter le guerrier totem inattentif au sol. Voyant le danger que représentait l'arme divine, le dieu égyptien s'avança vers Arkhan, une boule de lumière brillant déjà sur son poing.

Et soudain les éclairs cessèrent, et Arkhan sentit une force nouvelle l'envahir.



"Bon sang ! Tu as une chance de cocu, Ayaïn !"

"Merci, ca fait plaisir à entendre..." maugréa l'intéressé, pensant à la jolie fille qui vivait à Jamir.

"Tu te rends compte, si l'épée n'avait finalement pas accepté Arkhan, il aurait pu finir carbonisé !" Veiya était sérieux.

"Moi, ce que je ne comprends pas, c'est que justement, l'épée l'ait accepté. Je croyais que seuls les dieux ou ceux en qui Odin place sa confiance pouvaient s'en servir." Perplexe, Kengo s'interrogeait, tout en continuant de suivre mentalement ce qui se passait dans la pièce à coté.

"Peut-être... Peut-être que Odin s'est réveillé ?" risqua Ayaïn.

"Impossible ! Il est profondément endormi, et il ne doit pas se réveiller avant un bon moment encore."

"A moins que..." Kengo commençait à comprendre. Mais ses pensées furent interrompues par un choc psychique, lorsqu'une vie s'éteignit.



Pendant ce temps, dans la salle du trône, Arkhan entamait un nouveau combat contre le cruel dieu du soleil. Mais cette fois, c'était très différent. A l'instant où l'épée cessa de lui envoyer de l'électricité, il sentit une force immense l'envahir, et depuis cet instant, cette force ne l'avait pas quitté. Elle le portait, le soutenait, alors que son corps était fourbu. Elle augmentait même sa vitesse, sa puissance physique. Chacun des coups d'estoc ou de taille qu'il donnait de l'épée était mortel, et seule la grande dextérité de son adversaire, sa maîtrise hors du commun des arts de la guerre, l'empêchaient de vaincre.

Cependant, Amon-Râ avait bien compris que Arkhan, ainsi guidé par Odin lui-même, était désormais un danger mortel. Il s'employait à tuer le plus vite possible cet adversaire redoutable, mais Balmung semblait parer d'elle-même toutes ses attaques.

Quiconque aurait assisté à cette lutte titanesque, hormis ceux qui possèdent déjà le pouvoir de se déplacer plus vite que le son, aurait cru voir des dieux armés chacun de plusieurs lames porter simultanément des dizaines de coups. La vitesse de chacun des échanges était si grande, qu'un mur de métal semblait séparer les deux combattants.

Ce combat mortel dura peu de temps. Le temps pour Kengo et ses compagnons d'échanger ces quelques mots sur le réveil éventuel d'Odin. Le temps pour Rody de se remettre de sa surprise, et de se porter au secours de son jeune maître. Le temps pour Eric de sortir lui aussi des brumes du sommeil où il avait été plongé à son insu.

Le temps pour Balmung de fendre un crâne.

Amon-Râ s'effondra dans un flot de sang, et à l'instant même, Arkhan sentir la puissante énergie vitale quitter son corps. Il laissa tomber son épée, devenue soudain si lourde, et plia genou, épuisé.

Mais la bataille était bel et bien terminée.



"Kotori ! Kotori ! Tu ne dois pas t'endormir ! Reste avec nous !"

Arkhan gifla la jeune fille, après une brève hésitation, afin qu'elle revienne à elle. Kotori avait les yeux dans le vague, et son esprit n'était que confusion. Mais elle essayait tant bien que mal de se raccrocher à cette voix familière qui lui disait de tenir.

Mais malgré l'acharnement d'Arkhan, il était clair qu'elle vivait là ses derniers instants.

"Arkhan de la Mante, laisse-moi faire." fit une vois lasse derrière lui.

Arkhan se retourna, pour voir Viracocha, les traits tirés, qui lui souriait doucement. L'enfant était soutenu par Rody, qui le regardait avec inquiétude. Arkhan hocha la tête et se poussa un peu, toujours en soutenant la tête de Kotori.

Viracocha posa sa main sur la blessure de la jeune fille, qui continuait à dégorger des flots de sang, et augmenta son cosmos. On sentit une douce chaleur autour de lui, comme le soleil du printemps qui caresse la peau de ses rayons, une chaleur bénéfique, un souffle de vie.

La blessure saignait moins, puis ne saigna plus du tout. La plaie était refermée. Kotori ouvrit doucement les yeux, se sentant extrêmement lasse, mais ne ressentant plus la moindre douleur.

"C'est... magique..." dit-elle avec un sourire. "Comment avez-vous fait ?"

"Très... simple..." murmura l'enfant, les yeux plein de larmes. "Je vous... ai offert... ma vie..."

Rody et Arkhan, puis Kotori un instant plus tard, comprirent le sens de ces paroles, tandis que les yeux de l'enfant se fermaient, et que son corps s'affaissait dans les bras de son guerrier totem.

"Seigneur Quetzalcoatl ! Seigneur ! Viracocha ! Nooooon !" hurla le Jaguar.

Personne n'entendit vraiment Eric qui criait, penché sur un corps immobile : "Hé, Kassim est encore en vie !"



Kengo rejoignit ses amis, debout devant les tombes fraîches. Ceux-ci adressaient une dernière prière aux défunts.

"Ils ont réussi, finalement. Je crois que nous avons bien fait."

Veiya le regarda d'un air sévère.

"Mais nous sommes intervenus, alors que les ordres nous l'interdisaient. Nous risquons gros, maintenant."
"Non, je ne crois pas." fit Ayaïn. "Notre intervention a permis de respecter un autre ordre d'Athéna, puisque nous avons empêché Eric de prendre Balmung. Nous n'avons pas désobéi."

Veiya réfléchit un instant, et approuva.

"C'est vrai. Vu comme ça…" puis à Kengo : "Et maintenant, nous rentrons au Sanctuaire ?"

Kengo était tourné dans la direction qu'avait prise la Jeep. Il semblait hésiter, comme s'il voulait rejoindre Kotori et ses guerriers. Avec la première Jeep, Arkhan et Krell avaient emmené les blessés, Kotori, Kassim, Ryan, et Juan, vers la ville, où ils seraient soignés. Eric, Anton et Rody étaient restés quelques heures de plus, afin d'enterrer les morts, et venaient de partir à leur tour.

"Oui. En attendant notre prochaine mission. J'espère que mon père fera encore appel à nous pour surveiller Arkhan et les autres. Je voudrais tant faire partie de leur groupe…"
"Moi aussi" fit Veiya, posant sa main sur l'épaule de Kengo, "et je ne sais pas pourquoi, mais je suis sûr qu'un jour nous nous battrons côte à côte avec eux."

Puis les trois guerriers disparurent, abandonnant le temple désert.

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Cette fiction est copyright Patrick Huart.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.