Chapitre 6 : Nombreuses Blessures


Résumé de la chronologie de St Seiya Next Generation
1986-87 : Batailles de Seiya et ses compagnons
1989 : Bataille de l'Olympe
2010 :
23-27/07 : Le groupe se forme autour de Kotori Kido : Arkhan, Eric, Anton, Krell, Kassim.
27-31/07 : Kotori et ses amis partent aider le Sanctuaire de Quetzalcoatl contre celui de Amon-Râ.
01/08 : La bataille du temple du Serpent : Amon-Râ et ses sbires sont détruits, mais seul Rody survit aux Guerriers Totems et rejoint le groupe de Kotori.



2 jours après la bataille du Temple du Soleil, Mexico
14h heure locale


"Allo ? Allo ?"

Bruits de friture puis enfin une voix.

"Allo ? Kotori Kido à l'appareil. C'est toi Arkhan ?"
"Kotori ! Je suis soulagé, vous allez mieux maintenant ?"
"Oui, j'ai repris des forces, mais je ne suis pas encore tout à fait remise. Mais là n'est pas l'important..."
"Oh que si ! Quand je vous ai vue la dernière fois, vous étiez à la limite de vos forces. Malgré les... soins de Viracocha, l'hémorragie vous avait laissé exsangue."
"Mais ça va mieux je te dis. Allo ? Ah que cette liaison est mauvaise... Allo ?"

Encore de la friture, puis la liaison satellite se rétablit.

"Kotori ? Oui, ici on a une tempête, alors les communications sont très difficiles. C'est dingue, c'est comme si, depuis la mort de Quetzalcoatl, le soleil ne devait plus se montrer !"
"Je ne sais pas si c'est une coïncidence, mais j'espère que oui, ou je vais vraiment culpabiliser."
"Pardon, Kotori. Euh... Je suppose que vous appelez pour prendre des nouvelles des autres ?"
"Oui, et puis je voulais savoir quand vous rentreriez."
"Les docteurs sont optimistes, Ryan survivra malgré le choc physiologique, mais je doute qu'il puisse jamais plus se battre sans ses bras. Quant à Juan, il s'en sortira aussi, mais son visage est définitivement perdu. Jamais une greffe ne lui rendra visage humain, m'a-t-on dit. De plus, il restera aveugle à vie."
"Quelle horreur... Que... Ont-ils repris conscience ?"
"Oui, tous les deux. Rody reste avec eux tout le temps, il culpabilise à mort de n'avoir que des blessures légères en comparaison de tous ses compagnons. Et au final, ce sont les blessés qui lui remontent le moral."
"Je comprends ce qu'il ressent..."
"Kotori ? Ne pensez pas à ça. Imaginez ce que ça aurait été si nous n'étions pas venus les aider, ils seraient sans doute tous morts. Au moins, trois d'entre eux ont survécu."
"Merci, Arkhan."
"Et pour les autres ?"
"Eric n'avait pas grand chose, mais sa fracture mettra du temps à se réduire à cause de la glaciation qu'il a appliquée dessus, cela a diminué ses facultés de récupération. Et pour Kassim..."
"Quoi ? Qu'y a-t-il ?"
"Il n'est toujours pas sorti du coma. Les médecins sont incapables de dire quand il va en émerger, même s'ils sont pratiquement sûrs qu'il survivra."
"Je vois."

La voix d'Arkhan se fit plus lointaine, tandis qu'il parlait à quelqu'un d'autre.

"Quoi ? Déjà ? ... Ah bon ? ... Ok !"

"Allo Kotori ? On me dit que la liaison ne va pas pouvoir être maintenue plus longtemps, je vais raccrocher. Rody et moi devrions être rentrés dans deux jours, le temps de partir en voiture jusqu'à un aéroport hors d'atteinte du cyclone. Ryan et son ami nous rejoindrons plus tard quand ils seront rétablis."
"D'accord ! A bientôt !"
- clic -



Krell frappa à la porte une troisième fois, toujours avec douceur, mais malgré lui un peu plus de vigueur. Etait-elle donc sourde ? Enfin, Kotori lui dit d'entrer.

"Désolée, Krell, mais j'étais au téléphone avec Arkhan. Il devrait rentrer dans deux jours avec Rody."
"Ah, d'accord. D'ici là, j'espère que Kassim sera sorti du coma."
"Pas moi, Krell, pas moi..."

Le jeune chevalier eut un instant de surprise. Il ne s'attendait certes pas à ce genre de réplique ! Kotori avait depuis le début montré sa sollicitude envers les guerriers qui se battaient pour elle, et elle se rongeait même les sangs plus que de raison. Et cette fois, alors que leur ami Kassim était entre la vie et la mort, elle préférait le voir s'éteindre ?? De tels propos le choquaient.

"Ecoutez Kotori, je ne sais pas ce que Kassim vous a fait mais de là à souhaiter..."
"Non, non ! Tu n'y es pas du tout ! Mais je souhaiterais qu'on trouve une solution pour aider Kassim avant qu'il ne se réveille, sinon cela sera plus dur encore pour lui."
"Je ne comprends pas."

La jeune fille poussa un soupir avant de s'asseoir dans un sofa.

"J'ai discuté avec les docteurs. J'ai été surprise quand ils m'ont expliqué la raison de sa miraculeuse survie après le coup d'épée d'Anubis..."

Krell la coupa, connaissant déjà cette histoire.

"Oui, je sais, le fait qu'il ait le cœur à droite, et non à gauche. Et comme Anubis a visé le cercle de métal censé protéger le cœur, il a complètement raté sa cible. Tout cela, je le sais."

"Mais lorsque les docteurs me l'ont expliqué, je n'ai pas fait attention à toutes les implications que cela comportait, c'est ce que j'essaie de te dire. La lame d'Anubis a perforé le poumon gauche de Kassim sur une grande largeur, il est pratiquement inutilisable. Ce qui veut dire que Kassim devra vivre avec un seul poumon désormais."

"Et bien, oui, sans doute, mais on a déjà vu des hommes vivre avec un seul poumon, je ne vois rien de..."

"Des hommes, oui, mais des guerriers sacrés ? Avec un tel handicap, Kassim ne pourra plus jamais se battre, il ne pourra plus rivaliser avec ses adversaires. Vous vous essoufflez si vite en combat, pour lui ce sera quasi immédiat."
"Il lui faudra abandonner l'armure, c'est ce que vous voulez dire, n'est-ce pas ?"

Kotori hocha gravement la tête.

"Oui. Et ça lui sera insupportable. C'est pourquoi, avant qu'il ne sorte du coma, je voudrais trouver quelque chose, n'importe quoi, qui lui permette de conserver son rang. Le mieux serait bien sûr un remède miracle, mais je n'y crois pas trop."

Krell fit la moue.

"En effet, ça me paraît difficile. Mais sait-on jamais ?"

Il y eut un instant de silence, chacun ruminant ses pensées, puis Krell reprit.

"Mais je n'étais pas venu pour cela. J'ai quelque chose à vous montrer."

Krell sortit un curieux boîtier métallique d'une de ses poches. Il s'approcha de Kotori et le lui mit sous le nez. Le boîtier était tordu, et même brisé, mais encore en un seul morceau. Mais il était évident qu'il n'était plus en état de marche.

"Savez-vous ce que c'est ?"
"On dirait... un composant électronique."
"Exact. Il s'agit d'un amplificateur psy."
"Oh ! Je vois, c'est celui que portait Osiris, c'est bien cela ?"

Krell hocha la tête.

"Oui, en effet. Maintenant, prenez cette loupe" fit-il en lui tendant une petite loupe de philatéliste, "et regardez dans le coin inférieur droit, il y a la marque du fabricant".

Kotori scruta la zone indiquée, et finit par apercevoir les minuscules caractères apposés sur les circuits intégrés.

"GRA... GRAUDE Inc. !? Quoi ! La Fondation !?"
"En effet. Et comme ce genre de gadgets n'est pas encore en vente libre, et n'est trouvable que dans le domaine militaire, je me demande comment Osiris l'a obtenu."

Kotori n'en revenait pas. Elle lisait et relisait l'inscription sans parvenir à se convaincre.

"C'est fou, ça veut dire qu'il y a des gens à la Fondation qui ont revendu ce truc aux guerriers égyptiens, et donc, qui connaissaient leur existence ?"
"Pas forcément, ils peuvent être passés par des intermédiaires. Mais il y a quelqu'un ici qui fait des transactions pas légales, c'est sûr. Mais ce qui m'intéresse, c'est surtout de savoir pourquoi ces guerriers d'un sanctuaire égyptien ont choisi d'acheter ce genre de matériel à la Fondation, connue pour avoir été, il y a des années, en contact avec le sanctuaire d'Athéna. Ils auraient pu choisir un autre fournisseur."

Kotori réfléchit rapidement aux implications.
"Amon-Râ était l'allié d'Athéna..." fit-elle dans un souffle.

"Je le pense aussi" acquiesça le guerrier. "Et c'est par ses anciens contacts avec la Fondation qu'Athéna a pu obtenir ce truc pour le compte d'Osiris."

"Tatsumi ! " s'écria la jeune fille. "Il a été le serviteur de Saori Kido, Athéna, pendant des années. Il doit être au courant !"

"Ou alors, c'est même carrément lui qui sert de contact au Sanctuaire."

Kotori avait une voix beaucoup plus calme quand elle ordonna à Krell :

"Va me chercher Tatsumi, s'il te plaît. Je crois qu'une discussion s'impose."



Eric entra dans la pièce en faisant le moins de bruits possibles. Pourtant, ce n'est pas le bruit qui aurait pu réveiller le pauvre Kassim !

Le guerrier divin se laissa tomber sur une chaise, et appuya sa canne contre le mur. Le corset de plâtre qui lui enserrait le torse le gênait considérablement pour respirer, et il avait même parfois des vertiges, sa canne lui était alors fort utile pour garder son équilibre. Mais il se sentait ridicule avec un tel accessoire, qu'il avait toujours assimilé à la vieillesse et la faiblesse.

"Salut Kassim, ça va mieux aujourd'hui ?"

Depuis deux jours, Eric venait souvent s'asseoir dans cette chambre pour "discuter" avec le malade, prétextant que peut-être le son d'une voix lui permettrait de sortir de sa léthargie. En fait, Eric venait là car il se sentait coupable. S'il avait été moins négligent avec Thot, il n'aurait pas été blessé si stupidement, et serait arrivé beaucoup plus tôt au temple, assez tôt pour empêcher Anubis de plonger sa lame funeste dans le torse de Kassim. Et maintenant, le chevalier du Sagittaire risquait de passer le restant de ses jours dans un coma profond, sans que Eric ait la possibilité d'éponger sa dette. Il lui avait sauvé la vie quand Karen était sur le point de l'achever, et cela, il ne l'oubliait pas. Un guerrier divin règle toujours ses dettes de sang.

"Bon sang, je donnerais n'importe quoi pour que nos places soient échangées..." murmura-t-il.
"Ce n'est pas la meilleure solution" fit une voix. Eric scruta l'obscurité du fond de la pièce, et vit que Anton était là lui aussi, sans doute depuis longtemps.

"Que veux-tu dire ?" grogna Eric, légèrement vexé.
"C'est pas en te sacrifiant que tu l'aideras. Il n'a pas besoin d'un poids de plus sur sa conscience. Il faut plutôt trouver un truc pour l'aider."
"Tu veux dire pour ses poumons, quand il se réveillera ? Mais je vois pas trop ce que je peux faire de plus. Kotori a mis une équipe en place pour fouiller des milliers de documents sur le Net ou dans les banques d'archives de la Fondation. Les rejoindre ne ferait que les gêner."

Anton renifla dédaigneusement.

"J'crois pas qu'ils trouveront quoi que ce soit là dedans. Je suis persuadé que la science moderne n'est pas encore capable de le soigner. Non, faut quelque chose qui touche au cosmos, un truc qui aura l'air magique pour une personne qui n'y connaît rien, mais nous savons, nous, quelles forces se cachent derrière la Vie."

"Un soin 'magique'... Il faudrait plutôt chercher du coté des légendes, non ?"
"Oui, mais pas trop loin dans le temps, sinon on est sûrs de rien trouver. Par exemple, mon maître m'a parlé une fois d'une fontaine de guérison qui se trouverait dans l'Himalaya, mais je sais pas si c'est juste un conte ou s'il y a du vrai dedans."
"Et t'es pas allé vérifier ? Tu disais qu'il fallait aider Kassim !"
"J'ai demandé à l'équipe de recherche de prendre ça en compte, pour m'aider à localiser cette fontaine. C'est grand, l'Himalaya."
"Et ton maître ? Tu peux pas lui poser la question ?"
"C'est ça. Et tu veux pas que je me coupe la tête tout seul aussi ? D'ailleurs je peux te retourner la question : pourquoi tu rentres pas en Asgard pour poser des questions ?"
"Ok, j'ai rien dit."

Un silence. Sombre.

"Je... Je vais faire un tour" fit Eric. "Je te confie Kassim."
"C'est ça."

Le guerrier du Cristal fit une pause en ouvrant la porte, jetant un coup d'œil vers son compagnon alité. Puis il sortit.

"Désolé, Eric, c'est pour ton bien que je te malmène." Murmura pour lui-même le chevalier des Gémeaux.



Quelque part sous le mont Olympe, le même jour.


"Non, non, et non ! Il n'est pas question d'accepter ça !"
"Et moi, je te dis qu'il faudra bien en passer par-là ! On a déjà perdu Amon-Râ ! "

Dès ce premier échange entre les deux femmes, Seiya laissa tomber sa tête sur la table, la lassitude l'ayant emporté définitivement sur le maintien. Shun lui secoua l'épaule.

"Seiya, un peu de tenue, s'il te plaît. C'est quand même une Grande Assemblée."
"Oh, je peux bien dormir un peu. Avec ces deux mégères " fit-il en désignant du doigt Hestia et Héra "qui recommencent à se crêper le chignon, on en a facilement pour deux heures de plus. Et dire que je devais rentrer tôt chez moi..."

Shun esquissa un sourire. Seiya avait raison, la plupart des réunions de ce genre finissait en retard à cause de divergences personnelles entre les participants. Parfois, ils en sortaient même sans rien avoir décidé du tout !

"C'est pas une raison pour te faire remarquer" chuchota-t-il en croisant le regard désapprobateur de Périclès, le garde du corps de Arès.
"M'en fiche. On voit bien que eux, ne passent pas leurs nuits à surveiller les mouvements des espions de Némésis. J'en ai marre que ce soient toujours les mêmes qui se tapent les sales boulots. J'en ai marre et j'ai sommeil. Et j'ai envie de passer du temps avec ma femme."

Shun sourit doucement. Lui aussi était dans le même cas.

"... et pourquoi pas donner l'épée d'Odin à Eric tant qu'on y est ?"

Seiya bondit sur sa chaise en entendant la dernière réplique d'une des déesses. Sans se soucier de protocole ou de hiérarchie, il coupa net à la dispute.

"Ne plaisantez pas avec ça !"

Immédiatement, le silence se fit et tous les regards convergèrent vers Seiya, très réveillé désormais.

"Vous savez tous que Balmung contient l'âme d'Odin, et que celle-ci sera réveillée lorsqu'elle entrera en contact avec un guerrier divin. C'est pourquoi on peut autoriser Kotori à s'en servir, mais certainement pas Eric. Odin ne doit surtout pas être réveillé pour le moment, ou sa réincarnation sera fichue. Il serait vraiment dommage de perdre un allié si précieux avant la bataille contre Némésis."
"Si précieux ? Peuh..." persifla Arès. "Ce n'est qu'un dieu parmi d'autres. Il n'est pas indispensable."
"Mais c'est à sa suite que viendront les autres Ases, Odin n'est pas le seul que nous perdrions. Et nous aurons bien besoin des dieux de glace, afin de lutter contre les Efreet, ces génies de feu que Némésis a dévoyés. A moins que vous ne vouliez les affronter tout seul, Seigneur Arès ? Quoique, il paraît qu'un simple contact de leur poigne brûlante peut vous carboniser le coeur, vous ne devriez donc pas les craindre, vous n'en avez pas."

Shun réprima un gloussement. Seiya aimait à envoyer des piques à Arès, qui ne savait jamais comment les lui retourner. Le dieu resta en effet interdit quelques instants, à la recherche d'une réplique cinglante, mais il fut trop long et Seiya put terminer.

"Ne prenons pas à la légère cette histoire d'épée. C'est vrai qu'il est risqué de laisser Kotori utiliser cet artefact en sachant que Eric est si proche, mais nous n'avons guère le choix. Il faudrait soit se débarrasser de Eric, soit retirer Balmung à Kotori. Dans les deux cas, ce serait se dévoiler à Némésis, qui pourrait comprendre nos objectifs. Pour l'instant, il vaut mieux ne rien faire."

Tout le monde acquiesça, puis Seiya se rassit.

"En tout cas" chuchota-t-il dans l'oreille de Shun, "cette parenthèse aura eu le mérite de clore la dispute entre les deux déesses."



"Krell, je peux vous parler ?"

Le chevalier se retourna en direction de la voix féminine. C'était Tomoko, l'amie de Kotori.

Krell se demandait toujours quelle était la relation exacte entre les deux jeunes filles. Avaient-elles étudié ensemble ? Etaient-elles parentes ? Tomoko était rare à la Fondation, ne rentrant qu'épisodiquement et s'enfermant alors avec Kotori pour discuter pendant des heures, échanges dont il ignorait tout. Et lorsqu'elle était là, Tomoko était peu bavarde avec les alliés de son amie, si ce n'est pour les politesses d'usage. Quant à Kotori, elle se débrouillait toujours pour éluder les questions concernant la jeune fille.

Mais Krell était sûr d'une chose : Tomoko avait quelque chose à lui dire, et c'était trop rare pour être inintéressant.

"Oui ? Que puis-je pour vous ?" fit-il en guise d'introduction.

"C'est moi qui peux quelque chose pour vous. Ou plutôt pour votre ami Kassim. Tenez, regardez ce livre."

Elle lui tendit un ouvrage apparemment ancien, au titre écrit d'une langue inconnue de Krell. Il l'ouvrit en plusieurs endroits, tout le texte était écrit de la même façon.

"Désolé, je ne comprends pas un mot. Ca vient d'où ?"
"C'est un mélange de sanskrit et de bas chinois, ça vient d'une région reculée de la Chine. Ce bouquin a près de cent ans."
"Ah. Et ça parle de quoi ?"
"De légendes locales, dont une en particulier m'a intéressée. On y parle d'un vent capable de guérir toutes les maladies pulmonaires."

Krell ne put s'empêcher de marquer son étonnement.

"Un vent ? Qu'est-ce que ça veut dire ?"
"Il y aurait- d'après ce livre - une caverne à l'intérieur de laquelle souffle un vent bénéfique. Celui qui le respire va tout de suite mieux, quelle que soit la gravité de son état. C'est tout ce qui est dit."
"Et vous prenez cette fable au sérieux ?" Krell sentait l'hilarité le gagner.
"N'eut été l'état de santé de Kassim, j'aurais sans doute considéré cela comme une fable moi aussi. Mais vue la situation, je ne sais pas si on peut se permettre de laisser passer la moindre piste."

Krell perdit toute envie de rire. Tomoko n'était pas vraiment crédule, elle cherchait surtout à les aider, et n'avait rien de mieux pour le moment. Malgré cela, elle ne se décourageait pas pour autant et considérait cette option a priori farfelue comme la meilleure qu'ils aient à l'heure actuelle. Krell se rallia immédiatement à cette idée, ils devaient tenter cette chance. Après tout, qu'auraient-ils à perdre ?

"Pardonnez-moi, Tomoko, je n'aurais pas dû me moquer de vous. Venez, il faut en parler à Kotori."



Tôkyô, Manoir de la Fondation, le 5 Août.

"Mademoiselle Kido, je suis enchantée de faire votre connaissance."
"Moi de même, madame Takaya. On m'a dit beaucoup de bien de vous, et je voulais vous rencontrer avant que vous ne preniez vos fonctions de directrice."
"Je vous remercie. Mais vous le savez, ce ne sera pas un grand changement pour moi, j'assure déjà l'intérim du précédent directeur. Et puis, l'Orphelinat de la Fondation, c'est toute ma vie, je le connais par cœur."
"Vous y avez été vous-même élevée, il me semble ?"
"En effet."

Madame Takaya baissa les yeux, tandis qu'un flot de souvenirs remontait à l'évocation de ce passé. Ses cheveux blonds tirés en un chignon impeccable, son tailleur sombre et sévère, la vieillissaient terriblement, mais elle n'avait pas encore quarante ans. Et pourtant dans ses yeux, c'était une émotion lointaine qu'on voyait passer tandis qu'elle déroulait mentalement le fil de sa vie.

"Je suis sûre que vous serez une mère pour tous ces enfants." Fit Kotori, un peu gênée par la situation.
"Merci."

La discussion fut interrompue soudain lorsque la porte s'ouvrit sur un Arkhan trop pressé pour penser à frapper avant d'entrer. Le jeune homme se porta en avant dans le bureau, ne réalisant même pas la présence de la future directrice.

"Kotori !"
"Arkhan ! Enfin te voilà !"

Kotori se leva, on eût pu croire un instant qu'elle allait se jeter dans les bras d'Arkhan, mais elle n'en fit rien, et s'arrêta à un pas de lui. Ils restèrent figés un instant face à face, puis le guerrier effectua une vague révérence, un petit sourire aux lèvres.

"Me voici à vos ordres, Princesse."
"Ne te moque pas, Arkhan. Je suis heureuse que tu sois rentré."

Puis la jeune fille se souvint de la présence de son invitée.

"Viens ici, je vais te présenter quelqu'un. Il s'agit de..."
"Madame Erii ! Comme je suis heureux de vous revoir !" s'exclama le jeune homme.

Les deux femmes eurent le souffle coupé, tant elles ne s'attendaient pas à une telle remarque. Surtout Erii Takaya, qui ne reconnaissait pas cet homme.

"Voyons, madame Erii, vous ne vous rappelez pas ? Il est vrai que je ne suis resté que trois jours à l'orphelinat de Tokyo, avant d'être envoyé à Osaka, puis au Tibet. Mais moi je me souviens bien de vous, vous étiez si gentille avec moi."
"Arkhan..." fit-elle pour elle-même. "Oui, ça me revient maintenant ! On t'avait confié à moi pour quelques jours. Mais tu n'étais qu'un tout petit enfant à l'époque !"
"Il faut croire que les bons souvenirs ne s'effacent pas. Je suis bien content de vous revoir."

Kotori intervint.
"Tu es passé par l'orphelinat de la Fondation ? Mais c'est incroyable ! Et tu nous en as rien dit ?"
"Ca vient juste de me revenir en revoyant madame Erii. Euh... enfin, c'est comme ça que je vous appelais à l'époque, mais je suppose que ce n'est pas votre nom aujourd'hui, non ?"
"Je m'appelle Takaya, c'est le nom de mon mari. Mais tu peux continuer à m'appeler Erii si tu veux, à condition d'oublier le 'madame' !"

Arkhan éclata de rire en acquiesçant, et Kotori se retint de pouffer elle aussi, entraînée par la bonne humeur ambiante.

"En tout cas, c'est la journée des souvenirs" fit Erii. "Il y a un instant, en vous voyant tous les deux figés face à face, ça m'a rappelé à moi aussi des moments oubliés. L'espace d'une seconde, j'ai cru revoir la même scène qu'il y a plus de vingt ans. Des retrouvailles entre deux amants longtemps séparés."
"Euh... oui mais non... nous..." Arkhan était tout rouge.
"Oui... nous... nous sommes seulement... amis..." poursuivi Kotori, tout aussi écarlate.
"Bien sûr." approuva Erii. "Bien sûr..."

"Euh..." Arkhan voulait dissiper la gêne ambiante. "Et donc, ces souvenirs, c'était à propos de quoi ?"
"A propos de ma meilleure amie, et de son chevalier servant tombé au combat."



Tôkyô, 25 septembre 1989.

"Ma'moizelle, y a un drôle de monsieur dehors."

Miho se retourna en entendant la petite Chiyiko l'appeler. Que pouvait donc faire un homme dans la cour de l'école ce jour-là ? Il pleuvait à verse, et tous les enfants étaient à l'intérieur. Miho et Erii s'occupaient des petits aujourd'hui, et elles aidaient les enfants à faire un puzzle, accroupies avec eux au milieu du tapis de jeu.

Miho vint à la fenêtre, près de Chiyiko, et effaça de la main la buée qui empêchait de voir au dehors. En effet, un homme se tenait au milieu de la cour, sous la pluie battante. Il devait être trempe. Miho voulut ouvrir la fenêtre pour lui dire de rentrer et soudain se figea. Non, c'était impossible !!

Elle se jeta sur la porte, l'ouvrit toute grande et se précipita dehors, à la grande incompréhension des enfants et de Erii, qui la regardèrent depuis la porte et les fenêtres courir sous la pluie vers l'inconnu.

Miho s'arrêta à un pas de lui, et resta immobile, le dévisageant. L'eau dégoulinait le long de ses cheveux bruns, les plaquants contre son front. Le jeune homme ne dit rien, ne fit pas un geste, mais esquissa un sourire.

La gifle claqua comme un coup de fouet, et la joue du jeune homme rougit sous le coup. Mais il ne dit rien, et Miho se jeta contre lui, enfouissant son visage dans le grand pull rouge, comme pour masquer ses larmes.

"T'es vraiment un salaud, Seiya. Un salaud." Sa voix était brisée par les sanglots.
"Je suis désolé, Miho.."
"Désolé !" Miho se détacha de lui, le regardant dans les yeux, se moquant maintenant des larmes. La pluie raidissait ses longs cheveux noirs, qu'elle portait désormais libérés des couettes de petite fille, jusqu'à l'épaule. "Désolé, tu dis ? Tu disparais pendant deux ans pour revenir tout d'un coup et tu es seulement désolé ? Je croyais que tu étais mort !!"

Seiya baissa les yeux. "Je l'étais. Mes amis ne t'ont pas menti. Mais un dieu m'a rendu la vie. Maintenant, je suis revenu."

Miho ne dit rien, tentant de comprendre ce que Seiya disait. Le garçon en profita pour dévisager son amie. Elle avait vraiment changé. Saori lui avait dit que Miho avait abandonné ses couettes le jour où elle avait appris sa mort, et était passée d'un seul coup de l'enfance à l'âge adulte. Et en effet celle qui lui faisait face n'était plus la gentille petite fille qu'il avait connue, mais une jeune femme séduisante.

"Seiya... tu es revenu... pour de bon, cette fois ?" La voix de Miho était anxieuse.

Seiya prit les mains de la jeune fille dans les siennes, et sourit.

"Je suis là pour longtemps."
"Seiya, réponds, je t'en prie. Tu resteras toujours, n'est ce pas ? Plus de batailles, plus de départs ?"

Seiya hésita un instant puis commença à marcher vers l'école, entraînant Miho avec lui.

"Allez, viens, on va attraper froid."

Miho voulut reposer sa question, mais elle connaissait assez Seiya pour deviner la réponse qu'il ne voulait pas donner.

Elle le suivit quand même. Seiya était revenu !



Jardins de la Fondation, 5 Août 2010

"Alors comme ça ils sont partis ?"

Arkhan était à la fois étonné, ravi et en colère. Etonné par le fait que Krell, qu'il prenait pour un garçon censé, suive les traces d'une vieille légende tirée d'un livre pour enfants. Ravi, car si la légende contenait une part de vérité, ils auraient peut-être une piste pour aider Kassim. Et en colère, car Krell et Anton étaient partis tous les deux, laissant la protection de Kotori au seul Eric, toujours diminué. Maintenant que Rody et lui-même étaient revenus, Kotori ne risquait plus rien, mais pendant plus de 24 heures, le risque avait été grand.

"Oui, j'aurais bien voulu les accompagner, mais il fallait bien quelqu'un pour veiller sur Kotori." Eric non plus n'avait pas l'air d'avoir réalisé que Kotori s'était pratiquement retrouvée sans protection pendant toute une journée. Arkhan préféra ne pas en parler.

"Et tu crois que ça peut marcher ? Moi, ça m'a tout l'air d'un conte."
"Tomoko dit que le bouquin est très sérieux, et très ancien."
"Mouais. Je suis pas convaincu. Quand doivent-ils rentrer ?"
"Ils doivent nous envoyer un message dès qu'ils auront atteint la région, et un autre toutes les 48 heures, pour pas qu'on s'inquiète. Krell pense que localiser la caverne leur prendra du temps."

Arkhan acquiesça mentalement. Krell avait pris des précautions, tant mieux. Finalement, il n'était pas si étourdi.


En marchant, les deux jeunes hommes arrivèrent devant la pierre tombale de Karen. La femme chevalier avait été inhumée dans un recoin ombragé des jardins, et une simple dalle de granit poli gravée d'une croix signalait la tombe. Evidemment, cette sépulture était illégale, mais Kotori avait voulu à la fois que Karen ait une tombe décente, et à la fois que ce décès reste secret. Aussi aucun nom n'était marqué, mais chacun des cinq guerriers qui avaient assisté aux derniers instants de Karen était pourtant passé prier sur cette tombe.

"C'est étrange" fit Eric, "mes pas me ramènent souvent ici. A chaque fois, je pense que si on avait eu le temps de s'expliquer avant de se battre, elle serait toujours en vie."
"Ca me semble évident. Mais elle ne nous a pas laissé le temps de parler."
"J'aurais dû essayer... J'aurais pu..."
"Te mine pas, c'est du passé. Viens, on va s'entraîner un peu, t'as besoin de retrouver toutes tes capacités."

Les deux garçons s'éloignèrent. Eric fit halte un instant, jetant un dernier coup d'œil sur la dalle de pierre.

"Qu'est-ce qu'il y a ?" fit Arkhan.
"Non rien." Répondit son ami. "Juste une impression."



"On y est." Déclara Anton, malgré l'inutilité d'un tel propos.

Cela faisait trois jours qu'ils écumaient les montages de la région, à la recherche de la fameuse caverne. Les quelques indications sommaires données dans le livre, et traduites par Tomoko, s'étaient révélées trop vagues pour servir de plan, aussi ils avaient dû se fier au hasard pour tomber sur la grotte.

Finalement, ils l'avaient trouvée. Les symboles gravés au-dessus de l'entrée correspondaient en tous points à ceux donnés dans le livre, le doute n'était plus alors permis. Une stylisation du vent et un symbole de vie étaient accolés comme pour donner le secret de la caverne.

Krell examina les alentours, mais ne trouve aucune trace de passage humain depuis des lustres. La caverne était bel et bien oubliée de tous, et personne ne devait y être entré depuis des décennies.

"Méfie toi quand même, y a peut-être un ours !" plaisanta Anton. Krell haussa les épaules.

Krell fixa l'extrémité du fil à un arbre, et s'assura que le rouleau tournait bien. Ils allumèrent leurs lampes torches, et s'engouffrèrent dans l'obscurité.

Leur marche dura presque une heure, dans un silence presque total. Trois fois, ils atteignirent un cul de sac et durent rebrousser chemin, guidés par leur fil d'Ariane. Puis ils débouchèrent dans une grande salle, étrangement lumineuse.

Un homme les y attendait.

"Soyez les bienvenus, étrangers. Voilà bien longtemps que nous n'avions pas eu de visiteur."

Krell et Anton attendirent de s'être accoutumés à la luminosité ambiante, puis dévisagèrent l'inconnu. Il était grand, sa peau pâle et ses longs cheveux blonds prouvaient qu'il n'était pas de cette région. Il portait une sorte de longue tunique descendant jusqu'aux chevilles, mais fendue sur le devant, et surtout, il portait une armure. Faite d'un métal blanc et or, elle ne protégeait pas énormément son propriétaire, se composant principalement d'un plastron, de deux larges épaulières couronnées par deux curieuses anses, et de protection pour les jambes et les bras. Au sanctuaire d'Athéna, les armures d'argent offraient à peu près le même type de protection. Mais Anton sentit que cette armure serait sans doute bien plus résistante qu'une simple armure d'argent, le guerrier inconnu semblait puissant et expérimenté, pourquoi n'aurait-il qu'une armure de bas étage ?

L'inconnu attendit en silence que les deux arrivants aient fini de l'examiner, puis il reprit le dialogue.

"Mon nom est Zéphyre, le Vent de l'Ouest. Vous êtes ici dans la Caverne des Vents. Je suppose que c'est pour obtenir le Souffle de Vie ?"
"Le Souffle de Vie ? Je suppose que ce doit être ça, oui. Un de nos amis en a besoin en effet. Nous le donneras-tu, Zéphyre ?"

Le guerrier du vent attendit quelques instants avant de répondre.

"Voyez cette ouverture derrière moi. Elle mène vers le cœur de la caverne, là où se trouve le Souffle de Vie. Vous pourrez y accéder si vous faites ce que je dis. Si vous désobéissez, je serais contraint de vous affronter et de vous tuer. Qu'en dites-vous ?"

Krell et Anton échangèrent un regard puis acquiescèrent.

"Dis toujours, on verra si c'est dans nos cordes."

"Bien. Que l'un de vous m'apporte la tête de l'autre, et je vous laisserai passer."



Sanctuaire d'Athéna, le même jour


Shiryu s'avança jusqu'au trône, et s'agenouilla devant sa déesse et le Grand Pope. Saori l'invita à se relever pour faire son rapport.

"Deux des guerriers de Kotori sont arrivés à la Caverne des Vents. Il s'agit de Krell et Anton."
"C'était prévisible" fit le Pope, "Arkhan et Rody étaient encore au Mexique, Eric et Kassim sont hors course pour le moment."
"Tu ne les as pas suivis à l'intérieur ?" demanda Athéna.
"Non, c'était un peu risqué, j'aurais pu me faire repérer. J'ai laissé mon fils Ayaïn à l'entrée pour continuer la surveillance. Mais je fais surtout confiance aux quatre vents pour s'occuper des deux guerriers de Kotori."

Athéna réfléchit un instant avant de parler.
"Tu crois qu'ils vont obtenir ce Souffle de Vie ? Les quatre vents sont intransigeants sur les épreuves, et je doute que Krell et Anton soient la meilleure équipe pour les passer toutes. Arkhan est plus malin, et il a un enseignement bouddhique qui lui donnerait les clefs des épreuves. Anton est tête brûlée, il y a des chances qu'il échoue."

"Humm... Bonne question, Saori... euh pardon, Athéna" se rattrapa Shiryu en voyant le Pope se hérisser, "Krell est quand même assez rusé pour deux, il peut déjouer les pièges même sans Anton. De toutes façons, maintenant, nous ne pouvons rien faire qu'attendre."

"Bien." Conclut le Pope. "Je préconise que tu retournes sur les lieux pour vérifier que les quatre vents sauront remplir leur mission. Tu peux disposer, chevalier."

Shiryu s'inclina devant les maîtres du Sanctuaire, puis fit demi-tour.



"Ca va pas la tête ?? C'est quoi cette arnaque ?? T'avais dit que si on t'obéissait, tu nous laisserais passer, et tu nous demandes carrément de nous entre-tuer ??" Anton était sur le point de péter un fusible.

"Calme-toi, Anton, ça sert à rien de s'énerver." Puis Krell s'adressa à Zéphyre. "Tu comprends bien que ta demande est hors de notre portée, on ne peut pas se décapiter pour ton bon plaisir. Demandes-nous autre chose, mais là, on peut pas t'aider."

Zéphyre eut un petit sourire.

"Ce qui est dit, est dit. J'exige que l'un de vous m'apporte la tête de son compagnon, c'est ma volonté et je n'en changerai pas. Débrouillez-vous comme vous le voulez, mais c'est le seul souhait que j'ai, et il devra être respecté à la lettre pour que je vous laisse passer sans combattre."

Anton se tourna vers son compagnon.

"Tu l'as entendu, c'est pas la peine de perdre du temps, il est têtu. Alors on va lui botter les fesses, et on passe en force. Tu me suis ??"

"Attends un instant..." Krell avait l'air pensif. "Oui, je crois que c'est ça..." murmurait-il pour lui-même.
"De quoi tu parles ? Alors on y va ou pas ??"
"Non, j'ai mieux. Anton, tu vas faire exactement ce que je dis, j'ai trouvé comment passer sans combattre."
"Hein ?? Comment ça ??"
"T'occupe. Fais ce que je dis. Penche toi en avant."

Anton regarda son ami pendant une seconde, se demandant s'il n'était pas devenu fou, mais devant son air sérieux, il obtempéra.

Krell posa ses mains sur les deux oreilles d'Anton, puis lui ordonna d'avancer vers Zéphyre, toujours penché en avant.

"Krell, j'me sens ridicule, t'es sûr de ton coup, là ??"

Arrivés devant Zéphyre, Krell fixa le guerrier du vent dans les yeux et lui dit : "Je t'amène la tête de mon compagnon, comme convenu. Tu n'as pas précisé si elle devait être détachée ou pas de son corps, aussi j'ai respecté ta demande à la lettre."

Zéphyre sourit. "Bien vu, jeune guerrier. Tu as su trouver l'astuce pour éviter le combat, c'était finement joué. Mais tu n'avais pas besoin d'obliger ton ami à marcher dans une position si humiliante."

"Je sais." Fit Krell dans un sourire. "Mais j'ai trouvé ça plus rigolo..."
"Quoi ?? " s'étranglait Anton. "Attends un peu, tu vas voir !!"

"Vous avez respecté ma demande, je vous laisse passer. Mais je vous préviens : nous sommes quatre vents, il y aura quatre épreuves, et je suis le plus débonnaire de tous. Peut être que l'un de vous y laissera la vie avant d'arriver au centre de la grotte."

"On verra bien." S'exclama Krell avant de s'engager dans le passage.



Vent.

Souffle.

Courant.


La Vie et la Mort sont intimement liés au vent, dans toutes les cultures, dans toutes les religions. Le vent apporte la vie, répandant les pollens qui donneront les fruits dont se régalent les enfants ; l'air que l'on inspire en un souffle prouve à lui seul que l'on est en vie ; et le courant est un mouvement, symbole de la vie qui avance. Mais le vent apporte aussi la peste et les intempéries qui détruisent les récoltes ; le dernier souffle est celui qui s'échappe de vos lèvres à l'instant fatal ; et le courant peut vous emporter comme un fétu de paille à la rencontre d'un cruel destin.

Le Vent est la Vie. Le Vent est la Mort. Les Quatre Vents ont en eux ce choix terrible de donner l'un ou l'autre, de se montrer magnanimes ou impitoyables, suivant leurs convictions ou seulement leur humeur.

Deux hommes entrent dans ma tanière. Je suis Euros, le Vent de l'Est. Je vais leur apprendre ce qu'est le Vent.



"Euros, dis-tu ?"

"En effet. Mon frère Zéphyre vous a laissé passer, il est bien trop gentil. Je serai pour ma part parfaitement juste, mais inflexible."

Euros toise les deux guerriers de haut. Un peu plus grand que son frère, il porte une armure identique en tout point à celle de ce dernier, mise à part la couleur, d'un vert profond. Verts aussi sont ses longs cheveux, qui surplombent des yeux de jade à l'expression laconique. Euros n'exprime ni sympathie, ni méfiance. Son rôle est de garder cette caverne, et il s'y tient.

"Je suppose que toi aussi tu vas nous poser une énigme que l'on doit résoudre ? Essaie de faire mieux que ton frère alors !!" Anton parade, sous le regard un brin amusé de son camarade.

"Non, il n'y aura pas d'énigme." fait calmement Euros. "L'épreuve consistera juste à atteindre la sortie de cette caverne."
"C'est tout ?" fit Krell, soupçonneux.
"Oui. Evidemment, je vais ajouter une petite difficulté."

Et soudain se leva un courant d'air d'une intensité formidable, une tempête incroyable en ce lieu clos. Le vent rugissait aux oreilles des deux chevaliers, qui protégeaient leurs visages de leurs bras, incapables de garder les yeux ouverts dans la tourmente. Et par delà le vacarme assourdissant, la voix calme d'Euros, portée par les vents eux-mêmes, se faisait entendre.

"Voilà l'épreuve. Que l'un de vous atteigne la sortie, qui est à environ dix mètres devant vous, et vous serez saufs. Vous avez dix minutes, après quoi je vous occis."

"Facile !" se dit Anton, qui se lança en avant. Déployant tout son cosmos, il appuya de toutes ses forces sur ses jambes pour se jeter vers la sortie qu'il distinguait vaguement à travers les nuages de poussières tourbillonnants. Mais le vent s'opposait à lui avec une force incroyable, le clouant littéralement sur place. Petit à petit, le visage déformé par l'effort, Anton parvint à avancer, chacun de ses pas était une torture. Il ne voyait plus Krell, mais se doutait que celui-ci était derrière lui, ils parviendraient au bout de cet obstacle.

La voix d'Euros résonna à nouveau.

"Bravo Anton, tu as déjà parcouru trois mètres. Plus que sept et tu auras atteint la sortie. Mais je vous signale qu'il ne vous reste déjà plus que cinq minutes."

Anton frémit, n'ayant pas réalisé depuis combien de temps il luttait contre le terrible ouragan. Il jeta un coup d'œil par dessus son épaule vers Krell, mais celui-ci n'était pas là.

"Ne perds pas de temps, Anton. Ton pauvre ami est loin derrière toi, il ne faudra compter que sur toi-même."

Anton serra les dents et continua sa difficile progression. Mais bientôt il eut l'impression que tous ses efforts étaient vains, il ne bougeait plus d'un pouce.

"Comme c'est dommage, j'ai oublié de vous prévenir. Le cœur de la tornade est bien évidemment plus difficile à franchir que la périphérie. Encore trois minutes, et six mètres. Adieux, chevaliers."



Le cosmos !!

Arkhan se précipita dehors en ressentant la présence étrangère qui s'approchait. Eric le suivait de près, son visage inquiet trahissait son incertitude quant à sa capacité à reprendre le combat. Mais il ferait de son mieux, c'était certain.

Les deux guerriers rejoignirent Kotori sur la terrasse, immédiatement rejoints par Rody, vêtu de son armure. Ils n'eurent pas le temps d'échanger un mot que déjà, à l'ombre de la végétation, se profilaient quatre silhouettes. Des hommes à l'allure inquiétante, vêtus d'armures, avançaient calmement.

"Oh !" s'exclama Arkhan, surpris. Il venait de reconnaître l'un des arrivants, un bonze guerrier tout comme lui, serviteur de Bouddha. Il s'appelait Maardhat, et portait l'armure du Tigre, prouvant son appartenance au Cercle Intermédiaire. Arkhan ne le connaissait que de vue, car Maardhat était plus âgé que lui, et ils étudiaient dans des classes séparées, mais il était présent au moment de la consécration du jeune homme, lorsqu'il surmonta l'épreuve qui fit de lui un guerrier. Cet homme là était à craindre, car il était puissant.

Les quatre guerriers prirent le temps de se présenter, avant toute chose. Outre le bonze, il y avait là Marty, chevalier d'argent du Grand Chien, Ramon, chevalier d'argent de l'Aurige, et Lazla, une belle jeune femme au service de Poséidon, qui portait l'Ecaille de la Nymphe.

"Quel est votre but ?" demanda calmement Kotori. "Je suppose que vous voulez encore m'assassiner ?"
"Non, cela ne fait pas partie de notre mission." Répondit Marty. "Nous avons juste ordre de nous emparer de Balmung afin de la remettre à Athéna."

"C'est absurde !!" s'écria Eric. "Balmung est l'épée d'Odin, elle revient naturellement à Asgard ! Pourquoi Athéna veut-elle la voler ?"
"Nos ordres ne le disent pas, guerrier divin. Mais ils sont impératifs, nous devons ramener Balmung au Sanctuaire. Et nous avons l'autorisation de tuer toute personne tentant de nous en empêcher." Ramon prit deux disques à sa ceinture, les assurant dans ses mains.

"Nous ne pouvons pas accepter, désolé." Fit Arkhan. "Kotori a encore besoin de ce pouvoir pour le moment, vous devrez nous battre pour l'approcher."

"Ainsi soit-il." Ironisa Maardhat.
"En avant !" hurlèrent les quatre guerriers en se jetant vers le jeunes héros.
"En avant !! " répondirent leurs trois adversaires en faisant de même.

Kotori sentit à quelques dizaines de mètres un nouveau cosmos qui s'éveillait doucement. Elle sourit.

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Cette fiction est copyright Patrick Huart.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.