Avant que tout ne commence


Les premiers éclats de voix ne tardèrent pas non plus à retentir à l'endroit où se trouvaient Death Mask, Camus, et Milo. Death Mask n'avait pas accordé un regard à ses compagnons, leur avait lancé un " Bonjour " peu amène et manquant grandement de conviction, ce qui avait agacé au plus haut point Camus. Néanmoins, avec la réserve qui allait leur devenir familière, il n'avait rien laissé transparaître. Milo avait lui observé ses deux collègues avec attention. Camus lui semblait sympathique, bien que difficile à cerner, mais une animosité réciproque était née avec DM dès que leurs regards s'étaient croisés. Il en était là de ses réflexions, quand ils arrivèrent. Tous sentaient la tension qui existait entre eux, et ce fut Death Mask qui parla le premier.

" Quelqu'un voit un inconvénient à ce que je prenne le lit près de la fenêtre ? "

Son ton et son regard agressif attendaient une réplique. Elle ne vint pas. Camus et Milo se regardèrent, et se dirigèrent chacun vers un des deux lits restants. Ils ne le savaient pas encore, mais une amitié était née, sorte d'alliance contre l'hostilité de DM.

Ce dernier observa avec stupeur Milo sortir une boîte de ses affaires.

" M...m...mais... ce sont des sc... "

Milo, avec un sourire angélique " Des scorpions, oui. Ils te font peur ? Rassure-toi, ils sont inoffensifs, du moins quand on ne les dérange pas - et il appuya ces derniers mots - De toutes manières, ils ne sortent pas de leur boîte. Voici Shaula, la femelle, et Antarès, le mâle, comme les deux principales étoiles de ma constellation "

Camus, peu rassuré " Est-ce que ça signifie qu'ils vont se reproduire ? "
Milo " Euh... ça se pourrait, oui... "
DM " Tâche de bien les garder... "

Son ton menaçant faillit faire sortir Milo de ses gonds, mais Camus lui lança un regard d'avertissement. Milo ne dit rien, et continua à ranger.

*****

Plus tard

La journée de la veille avait été rude. Humilié par une défaite contre Camus, Death Mask avait prétexté ce matin un mal de crâne pour ne pas sortir. Le soir même, après l'entraînement, Camus et Milo arrivèrent près de leur maison. En entrant, seul le calme les accueillit. Puis, avec stupeur, ils virent Death Mask étendu sur le sol, près du lit de Milo. Ce dernier se précipita : le pouls de Death Mask battait, mais faiblement. Voyant un trou minuscule sur le doigt de son camarade, et sa boîte à scorpions ouverte, il comprit immédiatement ce qui avait dû se passer.

" Camus ! Vite, gèle-le pour arrêter la circulation de son sang ! Il faut ralentir le poison pendant que je prépare l'antidote ! "

Camus obtempéra.
Milo était en train de s'affairer, quand Camus l'interpella :

" Euh... Milo ? Je crois qu'on a un autre problème... Il n'y a plus qu'un scorpion dans la boîte... Ce qui signifie qu'au mieux il est dans la maison... "

Milo " ... au pire il se balade n'importe où dans le sanctuaire ! Oups, vite, va prévenir le maître et les autres ! Et surtout, fais bloquer toutes les issues du sanctuaire ! "

Il lança à Death Mask un regard mauvais.

" J'ai bien envie de te laisser dans cet état. Mais rassure-toi, ce serait m'abaisser à ton niveau... Je parie que ce soir Antarès se serait trouvé dans le lit de Camus... ! "

Toutefois, quand l'antidote fut prêt, il ne le lui administra pas tout de suite.

" Qu'on ait la paix un petit moment ! "

Il se mit alors à la recherche d'Antarès, et dut se rendre à l'évidence ; le scorpion n'était pas dans la chambre. Et le sanctuaire était si vaste... La nuit risquait d'être mouvementée. Lui savait qu'ayant piqué récemment, Antarès était inoffensif pour quelques temps, mais qui y penserait en le trouvant par hasard dans son lit ?! Il grimaça.

*****

Camus avait couru aussi vite qu'il l'avait pu à la chambre du Grand Pope. Sion, voyant son air alarmé, congédia Shaka, avec qui il discutait, et invita Camus à parler. Brièvement, ce dernier lui présenta une version des faits légèrement modifiée : Death Mask, voulant faire le ménage, avait renversé la boîte à scorpions de Milo, été piqué par Antarès qui en avait profité pour s'échapper et était maintenant quelque part dans la nature.
L'air sceptique de Sion fit comprendre à Camus que son maître ne le croyait qu'à moitié. Cependant, il ne posa aucune question, et autorisa Camus à réunir tout le monde pour donner l'alerte.
Habitués à obéir, et alarmés par une convocation si tardive, les futurs chevaliers ne mirent que quelques minutes à répondre à l'appel.
Quand il réussit à obtenir le silence, Camus leur expliqua les choses de la même manière qu'à Sion. Milo, qui venait d'arriver, ne put s'empêcher en entendant cela de froncer les sourcils. Il ouvrit la bouche pour parler, mais Camus le fit taire d'un regard impératif. Cet échange, aussi bref qu'il avait été, n'avait pas échappé à Sion, ce qui le conforta dans l'idée que Camus avait arrangé la réalité. Cependant, les autres chevaliers n'avaient eux rien vu, paniqués à l'idée d'un scorpion lâché dans le sanctuaire.
Milo tenta de prendre la parole au milieu du brouhaha.

" Ne paniquez pas ! Comme Antarès a déj... "

Mais il fut interrompu :

Aphrodite " Oh toi, hein, ça va ! Quelle idée de garder des scorpions, aussi ! C'est facile à dire, " ne paniquez pas ! " ! "

Il venait de dire tout haut ce que tout le monde pensait tout bas, mais ses imprécations se perdirent dans le désordre consécutif à leur départ.
Saga se retira le dernier :

" Milo... tu ne me feras pas croire que tu n'as pas paré à ce genre d'incident, et que ta boîte s'ouvre si facilement en tombant... Alors ? "

Camus, s'étant rendu compte que son mensonge allait faire rejeter la faute sur Milo, répondit ironiquement :

" Je pense que Death Mask a dû vouloir nettoyer l'intérieur... "

Le sourire de Saga exprimait pour une fois de la sympathie. Comme les autres, il n'aimait guère Death Mask, et de plus, il respectait beaucoup Camus et Milo, qui étaient les seuls avec Shaka à ne pas se montrer gênés avec lui.
En sortant, il s'empressa donc d'aller rétablir la vérité parmi ses condisciples. Il en avait cependant quelques remords, mais se raisonna en se disant que de toutes manières, la réputation de Death Mask ne pouvait pas être plus exécrable qu'elle ne l'était déjà. Et puis leur maître avait assisté à la discussion sans s'en mêler, alors qu'il devait savoir ce que son disciple allait faire. Saga aurait même juré qu'il y avait une sorte d'assentiment dans son regard.
Saga ne supportait pas l'injustice.

*****

Camus et Milo retournèrent ensemble à leur maison. Ils ne parlaient pas, mais Milo finit par ne plus y tenir.

" Pourquoi avoir essayé de couvrir Death Mask ? A ton avis, Antarès, il l'a sorti pour le promener ?! "

Camus " Je ne suis pas si naïf, je sais parfaitement qu'il n'a pas digéré sa défaite d'hier. Mais j'ai pensé qu'il n'était pas utile que tout le monde soit au courant qu'il avait voulu me tuer. "
Milo, secouant la tête " Ta bonté te perdra... Ce misérable ne mérite pas qu'on le protège ou qu'on le plaigne. Et pourquoi avoir changé d'avis ? "
Camus " Je n'avais pas pensé que les autres rejetteraient la faute sur toi, et te tiendraient pour responsable. Ça n'était pas mon but. Mais bon, Saga va se charger de rétablir la vérité. "
Milo sourit " Au fait, on le réveille quand, l'autre ? "
Camus " Tu ne lui as pas encore donné l'antidote ?! "
Milo " Tu veux rire ! Pour une fois qu'on était tranquille, sans craindre un coup foireux ! "
Camus " ... Demain matin ? "

Milo acquiesça en souriant.
Arrivés chez eux, ils se turent, et se couchèrent sans avoir accordé le moindre regard à Death Mask.
Milo avait l'impression qu'il venait à peine de poser sa tête sur l'oreiller quand un hurlement le tira de sa torpeur. Il consulta le réveil, qui, impitoyable, indiquait trois heures du matin.

" Oh non ! " dit-il en s'enfouissant plus profondément sous les couvertures.

Camus avait été réveillé lui aussi, et secoua son ami.

" Milo ! Lève-toi ! Ils ont dû retrouver Antarès ! "

Toujours grommelant, Milo finit par se lever. Il avait horreur d'être réveillé en sursaut, et c'était encore à cause de Death Mask.
Camus l'accompagna, et ils coururent à l'endroit d'où venaient les cris. Lorsque Milo vit que tout le monde était sorti, en pyjama, et qu'ils encerclaient un scorpion pas plus rassuré qu'eux, il ne put réprimer son fou-rire, ce qui lui valut un regard courroucé de Shura.

Milo, gaiement " Alors, quel est l'heureux élu qui a retrouvé Antarès ? "
Shura, avec un regard noir " Ton cher Antarès vient de me monter dessus ! Vire-moi cette bestiole de là avant que je ne fasse un malheur ! "

Milo se pencha, et Aphrodite émit un cri apeuré quand le scorpion monta docilement sur sa main. Il l'approcha d'Aphrodite, qui recula précipitamment.

Camus " Bon, allez, ça suffit maintenant ! Vous voyez bien qu'il est inoffensif ! "

Milo lui lança un regard surpris.

Camus " Et toi, arrête de jouer le malin ! Maintenant, si ça ne vous fait rien, je retourne me coucher. ET TOI AUSSI MILO, LAISSE APHRODITE TRANQUILLE ! "
Milo " Bon ben... Bonne nuit tout le monde... "

Camus le suivit, et Milo ne put s'empêcher de sourire en remarquant que son ami marchait à une distance respectable de sa main.

" Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Je sens mauvais, ou alors c'est Antarès dont vous-voyez-bien-qu'il-est-inoffensif qui te fait peur ? "

Camus le fusilla du regard, et releva le menton d'un air offensé, ce qui déclencha l'hilarité de Milo. Finalement, ça faisait bien longtemps qu'il ne s'était pas autant amusé.
Avant de se coucher, ils réchauffèrent Death Mask, et lui administrèrent l'antidote.

Milo " Il sera probablement un peu nauséeux demain matin, il va sûrement rester au lit "
Camus " A mon avis, rien qu'à l'idée de rester seul avec tes scorpions, il se sentira beaucoup mieux ! "

*****

De sa chambre, Sion avait entendu les cris, et deviné ce qui se passait, mais n'avait pas jugé utile de se lever. Et effectivement, le silence n'avait pas tardé à revenir.
Cependant, il ne parvenait pas à retrouver le sommeil. L'attitude de Death Mask, tellement inattendue, l'avait sidéré. Quel était donc cet homme, capable d'attenter à la vie d'un de ses camarades, simplement par orgueil ? Il ne comprenait pas. Etait-ce juste de l'impulsivité -certes loin d'être inoffensive- qu'il allait falloir canaliser au plus vite, ou était-il fondamentalement mauvais ?
Il allait devoir agir, et rapidement. L'ordre des Chevaliers ne pouvait accueillir un tel personnage en son sein. Il fallait qu'il parle à Death Mask, dès le lendemain. Ou alors... Oui, c'était une meilleure idée. Ouvrant la porte, il appela un des gardes, à qui il murmura quelques mots. Ce dernier lui lança un regard surpris, mais partit sur-le-champ.

*****

Sept heures.
Milo préparait activement le feu, tandis que Camus tentait de se réveiller sous une douche glacée - habitude que Milo ne parvenait pas à comprendre. Il espérait que Camus ne s'y attarderait pas trop ; il ne tenait pas particulièrement à être seul pour affronter la mauvaise humeur de Death Mask lorsque qu'il se réveillerait.
Des coups frappés à la porte le firent sursauter. Il fut encore plus surpris quand Saga franchit le seuil de la maison.

" Je suis venu aux nouvelles "

Il vit bien que sa présence soulageait Milo. En attendant le réveil de Death Mask, il l'aida un peu. Passant près le la boîte à sorpions, il s'arrêta pour l'examiner.

" Hmm... Verre incassable, serrure solide... Impossible de l'ouvrir sans le vouloir... "
Milo " Comme tu peux le constat... "

Le premier gémissement de Death Mask les fit se retourner. Ils patientèrent, le temps qu'il émerge totalement. Il allait se lever, sans avoir ouvert la bouche, sans même paraître avoir remarqué la présence de Saga, Milo et Camus, arrivé entre-temps.
Milo l'arrêta :

" Bois-ça " dit-il en lui tendant un verre. " C'est l'antidote, ça t'évitera des effets secondaires indésirables "
DM " Je vais très bien, poussez-vous "

Il leur lança un tel regard, que même Saga, que rien ne démontait, eut un sursaut. Sans rien dire, ils le regardèrent se diriger vers la salle de bain.

*****

Laissant couler l'eau sur lui, DM réfléchissait. Il était parfaitement au courant de tout ce qui était arrivé depuis la veille... Il avait voulu faire une mauvaise surprise à Camus, mais le scorpion, ne reconnaissant pas la main de son maître, l'avait piqué.
Il en voulait à la terre entière. Ce n'était plus la défaite qui le préoccupait. Il devait la vie à Camus et Milo qu'il méprisait, et ça, il ne pouvait le supporter. Et le regard ironique de Saga posé sur lui quand il était redevenu conscient ! Oh ! Il les haïssait tous ! Un jour, il se vengerait !

*****

Milo bouillait sur place. L'attitude de DM l'avait rendu furieux, et si Camus ne l'avait pas retenu, il se serait jeté sur lui sur-le-champ.

Camus " Milo ! Arrête ! ça ne sert à rien ! Allez, viens, le Grand Pope nous attend ! "

Mais Milo ne voulait rien entendre :

" Non mais regardez-le ! On lui sauve la vie, et lui nous regarde comme s'il allait nous tuer ! "
Saga " On a tous remarqué, et ne t'inquiète pas, on ne sera pas les seuls... Allez, calme-toi un peu et viens. "

Sur ces mots, il l'attrapa résolument par le bras, et l'entraîna.

Retour au sommaire

www.saintseiya.com
Cette fiction est copyright Virginie Garroux.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.