Chapitre 4 : Dans la Paume du Bouddha


Ils priaient tous, courbés en avant, leur front touchant le sol, les paumes de leurs mains allongées devant eux et leurs lèvres prononçant à une vitesse hallucinante des psaumes religieux qu'ils dédiaient à leur dieu.
C'était la première prière de la journée... et quelle heure pouvait-il bien être? Guère plus de trois heures du matin puisque les étoiles brillaient encore avec un certain éclat à l'extérieur. Cependant, ils ne voyaient pas dehors, car aucune ouverture ne donnait sur les rues de Dehli.
Ils voulaient prier en paix leur divinité, avant de se disperser dans la population pour aider ceux que l'on qualifiait honteusement les "Intouchables". Cela les révoltait et c'est pourquoi ils n'hésitaient pas à rendre justice eux-même, en tentant d'apporter un maigre réconfort à ces personnes qui allaient sans doute mourir.
Dans la salle, on entendait plus qu'un murmure inaudible qui provenait de chaque bouche. Tous les prêtres avaient les yeux fermés. Ils étaient assis sur des coussins rouges, pour être installer un peu plus confortablement, non pas par simple luxe, mais simplement car ils allaient devoir rester dans certaines positions des heures entières durant. Cela ne les dérangeait nullement puisqu'ils honoraient celui dont ils buvaient depuis toujours les paroles.
Et ou était-il d'ailleurs?
Enfin, il avait séjourné dans ce temple pendant près de six années... et même après ce qu'il qualifiait sans cesse comme son entraînement, il avait continué d'évoluer dans ce pays ravagé par tous les diverses maux de l'humanité. Mais cette nation était la sienne, et il n'en avait pas honte, bien au contraire. Il tentait, lui aussi, d'apaiser et de comprendre la souffrance de son peuple.
Alors pourquoi avait-il disparu pendant autant de temps? Cela faisait à présent plusieurs mois qu'on ne l'avait nullement revu. Et le mois de mai passait, sans qu'il donne le moindre signe de réapparition.
Aujourd'hui, était un jour de fête particulier, et c'est pourquoi les prières commençaient si tôt. La cérémonie allait bientôt démarrer, avec ces chants et ces prières et tous les prêtres se tenaient prêt à démarrer... mais sans lui. D'ordinnaire, il les aurait paisiblement regarder, assis en tailleur, le visage impassible et son aura rayonnante et bienfaisante l'entourant. C'est à cet instant que tous les prêtres qui venèraient le Bouddha se rendirent compte d'à quel point le jeune homme blond aux yeux éternellement clos leur manquait. Plus que cela, en partant, il avait emmené une partie de leur âme puisqu'il était leur source de vie.
Celui qui guidait la cérémonie se tenait un peu plus devant les autres et commença à entonner les premières notes du chant d'ouverture de la fête. Derrière lui, tous les autres hommes reprirent de la même voix profonde et pourtant presque inaudible, ce qui le couvrit pourtant.
Le bruit.
Il disparaissait derrière le son de la musique religieuse qui le masquait pratiquement entièrement. Personne dans la salle ne se rendait encore compte que quelque chose se produisait car chacun était trop absorbé par la commencement du rituel.
Alors que la pulsation s'intensifia soudainement pour éclater telle une explosion, le prêtre qui dirigeait la séance frappa le gong avec violence pour annoncer le début des festivités, si bien qu'une nouvelle fois, ils n'entendirent rien.
Pourtant, c'était bien présent, cela se propageait dans la pièce, se dissiminait tout en s'accélerant à la même vitesse que le chant, comme si cela guidait l'étrange pulsation qui rodait dans l'atmosphère. Ce n'était rien de négatif, bien au contraire, cela ressemblait à une aura latente et puissante, comme si une vague de clarté s'insinuait par tous les murs, par toutes les issues de la salle, si discrètement que personne ne s'en rendait compte.
Le sol se mit à trembler doucement, imperceptiblement au début, puis au fur et à mesure que les secondes s'égrenaient, de plus en plus fort, jusqu'à ce que cela devienne remarquable aux yeux de tous. On aurait dit que les épaisses et inégales dalles de pierres se soulevaient légèrement, comme si elles étaient parcourues d'un inexplicable frisson provenant de nulle part.
L'un des prêtres se leva, alors que les murs commençaient à tanguer curieusement. Les autres le suivirent, effrayés.
-Que se passe-t-il? lança l'un d'eux avec une appréhension qu'il ne cherchait nullement à dissimuler dans le ton de sa voix.
-C'est incroyable... on dirait un tremblement de terre, répliqua un autre en balayant avec affolement du regard tout ce qui l'entourait.
Tout à coup, le gong se mit à retentir tout seul, alors que personne ne faisait même que l'effleurer. Il sonnait et sonnait sans s'arrêter comme pour annoncer la venue de...
Une explosion résonna contre toutes les parois des murs de la salle du temple. Les clochettes suspendues aux immenses portes de bronze se mirent à teinter à leur tour, comme pour s'unir avec cette arrivée.
Les prêtres se ressèrerent les uns contre les autres, tout en continuant à chercher rationnellement ce qui se passait.
Le tremblement s'intensifia avec une puissance sans commis mesure, renversant les vétustes meubles disposer partout dans la salle. Les dalles se soulevèrent, se déchaussant de l'endroit ou elles avaient été posées il y avait de cela des siècles. Le vent s'engouffra soudainement par le jour des portes, soulevant les coussins de velours et les disperssant partout autour des prêtres aux yeux agrandis par l'étonnement... mais non plus par la peur.
Ils savaient.
Ils venaient de comprendre que l'impensable était entrain de se produire... sous leurs yeux.
Aussi subitement que la foudre s'abattait sur terre, une éclatante, non, une aveuglante lumière envahit les lieux, les transformant avec burtalité en océan de clarté. On entendit le toit s'effondrer, des énormes pierres provenant de la toiture s'écraser à terre alors que le bruit se déchaînait avec toujours plus d'intensité et...
Une éblouissante comète arrivait à une folle allure, incapable de freiner sa course et rentra avec violence en collision avec l'immense statue représentant le Bouddha, provoquant la création d'un épais nuage de fumée et de poussière tout autour. Un bruit assourdissant explosa aux oreilles des prêtres qui portèrent naturellement leurs mains à leurs tympans.
Les marches qui menaient à la statue, le sol, le toit, tout s'effondrait et disparaissait car plus rien n'était rendu visible à cause de la gigantesque vague de lumière qui s'abattait du toit.
Et puis, plus rien. Plus rien que le silence et de nouveau la paix. Mais une paix bien différente, car rendue infinie et éternelle par celui qui la provoquait.
Tous les teintements avaient pris fin, le vent avait cessé de s'engouffrer, plus rien ne tremblait et le temple avait retrouvé sa stabilité, même si les dégâts étaient plus que notables.
Le prêtre qui aurait calmement du diriger la cérémonie fit signe à ses frères d'avancer sans peur, de se diriger vers lui pour entrevoir la personne qui avait provoqué cette hallucinante vision. Ils évoluèrent tant bien que mal entre les débrits et durent attendre plusieurs secondes que le nuage poussiéreux se dissipe dans les airs.
Ils lèverent tous les yeux vers la statue du Bouddha... à qui il manquait une main!
Ils posèrent immédiatement leur regard au sol, ou elle reposait dorénavant, sa paume ouverte aux cieux à présent rendus visibles par un immense troue dans la toiture.
C'est alors qu'ils reculèrent tous d'un même mouvement.
Entre les doigts de l'imposante divinité reposait quelqu'un!
Un murmure inaudible parcourut tous les hommes qui s'avançaient avec méfiance, ne voulant pas vraiment croire, de peur d'être déçus, ce que leurs coeurs leur soufflaient.
Mais si!
Un jeune homme à la peau de porcelaine, ses immenses cheveux blonds répandus autour de lui, couvert de sang et de blessures souriait paisiblement alors que sa poitrine se soulevait compulsivement de temps à autre. Ses fines jambes étaient coincées entre les doigts de pierre mais cela n'avait pas l'air de le déranger.
Au contraire, il trouvait cela plutôt ironique malgré son état catastrophique.
Les prêtres mirent uns à uns, s'imitant les uns après les autres, leurs mains devant leurs bouches, incrédules devant le spectacle qu'ils découvraient.
Shaka était allongé dans la paume du Bouddha.


Shaina

Il était le seul à ne pas être revenu et je ne pouvais pas y croire. J'avais l'impression d'errer sans fin dans la plus sombre des nuits dont jamais rien ni personne ne pourrait m'aider à m'extraire. Jamais il ne réapparaîtrait, je venais de le comprendre. Seiya n'était plus.
Je sentis les larmes me brûler les yeux et je portais immédiatement mes mains à mon visage. Je venais de perdre celui que j'avais aimé plus que tout, la seule personne à avoir réellement vu qui j'étais réellement. A présent, je me sentais incomprise, et terriblement seule.
Je me souvenais que pourtant, autrefois, la solitude ne m'avait jamais dérangé. Mais à cette époque j'étais bien différente. Je cachais ma véritable nature derrière un masque d'agressivité et de violence qui ne m'allait guère. C'était une fois de plus Seiya qui me l'avait montré, et qui m'avait aidé à l'enlever. Et maintenant...
Un sanglot me monta à la gorge mais je le retins. Je préférais ravaler mes pleurs, pour au moins me montrer digne de lui au travers de la mort. Peut-être me voyait-il du lieu ou il se trouvait... bien que j'en doutais réellement. Il devait à présent être avec Athéna. Pour l'éternité.
Je me relevais précipitement de la chaise sur laquelle j'étais jusqu'alors assise, comme pour tenter d'essayer de fuir ma propre tristesse. J'appuyais le plat de l'une de mes mains contre le mur de pierres et respirais profondément. Je ne m'étais jamais senti aussi mal de toute mon existence. Et pourtant, j'avais connu un certain nombre de moments difficiles.
-Shaina... je sais bien à qui tu penses.
La douceur de la voix et la mélancolie qui transparessait clairement au travers m'indiquèrent immédiatement qui venait de s'introduire dans la pièce. Shun. Il était d'ailleurs probablement le seul à qui j'acceptais de me montrer dans cet état. Je ne savais pas pourquoi, car je ne le connaissais pas particulièrement bien, mais j'éprouvais en sa compagnie une chaleur humaine, une compréhension que je ne retrouvais pas chez les autres.
Toute son âme éclatait de sollicitude envers les autres, et le sourire fugage qui flottait sur ses lèvres m'invitait à la confidence.
Je me retournais vers lui pour lui faire face et tenter de soutenir son regard. Toute sa physionomie me faisait penser qu'il me comprenais et que plus encore, qu'il vivait les mêmes tourments que moi.
Pendant quelques secondes, nos regards se croisèrent et je vis dans ses yeux une telle pureté, tel un éclat de diamant, que je ne pus m'empêcher de dire, ou plutôt de lâcher involontairement:
-Il ne reviendra plus...
Je mis ma main devant ma bouche, comme pour retenir les mots trop vite envolés. Shun leva les mains devant lui, comme pour me signifier qu'il était inutile d'être gêner de cela en sa présence. Il était vrai qu'il connaissait mieux que quiconque la souffrance, mieux que moi en tout cas...
-Détrompe-toi, Seiya est loin d'être n'importe qui et s'il existe la plus infime chance pour lui de se battre une nouvelle fois contre la mort, sache qu'il la saisira et qu'il reviendra parmi nous. Il faut avoir confiance en lui comme il a toujours eu confiance en nous. C'est ainsi et...
Il hésita sur ce qu'il allait dire et détourna quelques instants son visage avant de hausser les épaules, non sans résignation.
-Oh.. et puis je peux bien te le dire.
Je vis subitement dans ces yeux un éclair de lumière différent.
-Ikki et Shiryu sont persuadés d'avoir senti son énergie derrière nous, alors que nous parcourions les dimensions qui nous permettaient de regagner la terre.
Comment?
Mon coeur s'arrêta au son de cette phrase. Seiya... Seiya était peut-être en vie!
Je sentis ma respiration devenir plus rapide alors que la joie s'emparait de moi. Le bonheur que je ressentais était si soudain, si violent, qu'à ce dernier se mêlait en même temps à un peu d'incrédulité. Mais j'avais tellement envie de croire qu'un jour, j'aurais la chance de revoir celui pour qui j'aurais sans hésiter donner ma vie pour raviver la flamme de son existence, que je fis fi de cette dernière émotion. J'avais envie d'être tout à cette exaltation que Shun avait su provoquer en moi.
Mes yeux s'agrandissaient sous l'effet de la suprise et je vis le chevalier d'Andromède hocher pensivement la tête avant de se détourner de moi, ravi d'avoir pu me redonner cet espoir qu'il avait visiblement lui-même perdu.
J'aurais aimé pouvoir trouver les mots justes pour comprendre ce qui lui arrivait tout à coup, mais je ne trouvais déjà pas assez éloquente en temps normal... alors pour alléger une peine. De plus les chevaliers de bronze revenus depuis quelques jours étaient pour moi un véritable mystère. Un gigantesque fossé, creusé par la guerre Sainte dans l'Hadès, était apparu entre nous, nous séparant irrémédiablement.
Ils ne racontaient qu'à peine ce qui leur était arrivé, d'ailleurs pas seulement eux, mais Kanon aussi. Personne ne paraissait vouloir souffler mot de ce tragique affrontement, si bien que j'avais du mal à m'imaginer ce qu'il avait pu ressentir.
Je ne pouvais qu'envisager à peine le quart des souffrances qu'ils avaient du vivre et je regrettais de ne guère pouvoir faire plus pour eux. Et pour lui.
J'aurais tellement souhaité l'aider à revenir parmi nous. Mais je savais que je n'avais aucune solution pour accélérer ce retour, si toutefois il devait avoir lieu. J'avais évidemment envie de croire ce que Shun m'avait dit de sa voix légèrement mélancolique, mais en même temps, j'avais l'impression qu'un double fond subsitait dans cette déclaration.
Je fermais les yeux. Seiya allait revenir. Je devais m'accrocher à cette chimère si je voulais continuer à vivre.


Saga

Je ne sentais plus ma langue dans ma bouche tant elle avait doublé de volume. J'errais sans fin dans les étendues de sable fin, brûlant comme des braises qui pouvaient presque traverser la toile de fines chaussures exotiques que je portais.
Je ruisselais littéralement de sueurs, mes vêtements s'attachaient à ma peau, collant à mes plaies si bien que je ne pouvais pas décoler les fins tissus que mon sang attachait. J'avais beau serrer les dents, la douleur ne faisait qu'empirer alors que les secondes s'enfuyaient.
Je passais de temps à autre par des villes ou de petits villages, ou des personnes hospitalières acceptaient de me recevoir pour un repas. La générosité humaine existait encore, et j'étais fier de m'être battu pour eux, pour toutes ces personnes aux visages accueillants. Evidemment, on me fermait bien souvent la porte au nez, me cela n'avait guère d'importance.
Je ne possèdais plus qu'un seule objectif, rejoindre le Sanctuaire. Et j'étais prêt à endurer n'importe quel sévice pour parvenir aux ruines sacrées que je vénèrais depuis toujours.
J'avais l'impression que le vent était inexistant à certains moments, et terriblement puissant, au point de me renverser en arrière, à d'autres. J'avais maintenant réussi à identifier tant bien que mal le pays dans lequel j'évoluais et qui me semblait être la Tunisie.
Je n'étais encore jamais allé dans cette partie du monde, même si ma curiosité m'avait déjà poussé à plusieurs reprises à imaginer les merveilles dont recellait cette nation. De plus, mon maître m'avait raconté que se trouvait dans ce pays le temple d'une déesse... d'une déesse qui nous devions tous vénérer car elle était éprise de pacifisme: Aphrodite.
Son temple existait encore, même de nos jours, il était simplemement caché au milieu d'une mer de sable ou nulle ne pouvait le déranger. Ces prêtresses vivaient encore à l'intérieur, et je finissais par regretter de ne pas être tomber à cet endroit. Elles auraient su comment me renvoyer au Sanctuaire, moi qui brûlait en ce moment mes dernières réserves d'énergie afin de poursuivre mon chemin.
Et ou étaient les autres chevaliers d'Or? Je n'arrivais pas à admettre qu'ils soient encore entrain d'errer dans d'autres dimensions. Si j'étais parvenu à accomplir le tour de force de rejoindre notre planète, je les savais à même de m'imiter. Oui, j'avais confiance et eux et lorsque mon optimisme légendaire commençait à me quitter, je songeais que quelque part dans le monde, ils marchaient peut-être eux aussi pour rejoindre leur destin. Le domaine sacré autrement dit.
Je secouais la tête tout en regardant l'horizon.
Du sable... toujours du sable.


Shaka

Un visage se penchait au dessus de moins, un visage familier que j'avais souvent vu dans ma jeunesse mais dont les traits étaient particulièrement floues en raison de ma difficulté à reprendre contact avec la réalité. Mais je n'avais pas besoin de discerner sa physionomie pour savoir qui il était. Je voyais avec l'âme depuis toujours, ayant décider de clore mes yeux éternellement depuis mon enfance...
Je me tournais légèrement dans mon lit alors que j'entendais des voix au-dessus de moi. Je devinais sans peine ou j'avais attéri et je me félicitais d'être si bien tombé. Mais je savais que ce n'était pas uniquement grâce à ma propre personne, même si mon cosmos expliquait une partie de la situation, si j'étais revenu dans le temple même ou j'avais vécu mon entraînement et les premières années d'une existence que j'avais placé sous le signe de la méditation et de l'introspection.
Ils m'avaient aidé, tous ensemble, consciemment ou non, à les rejoindre alors qu'ils récitaient leurs prières. Leurs voix m'avaient attiré vers l'endroit d'ou les psaumes provenaient et mon aura avait ressenti l'appel qu'ils m'envoyaient tous ensemble. Et j'étais parvenu à rejoindre la terre.
J'aurais probablement soupiré si je n'avais pas été certain que l'un de mes poumons aurait lâché si j'avais fait cela.
J'étais de retour sur terre... et quelle ironie, j'étais tombé dans mon propre temple dans la paume du Bouddha!
J'eus envie de rire de l'incongrue de la situation qui prouvait qu'aucun statue n'était jamais acquis. Pour personne, pas même pour moi. J'étais certes la réincarnation de Sakyamuni, mais cela ne m'empêchait pas, comme tous les hommes, de connaître les facécies du destin. Cependant, je différais radicalement des êtres humains, sur un point. Jamais je ne doutais.
Alors que j'avais voyagé dans les limbes de dimensions parallèles, seul dans une infinie obscurité, j'avais toujours su que je parviendrais à accomplir un miracle. La terre avait encore besoin de gardiens et c'est pourquoi j'avais sereinement continuer ma route, acceptant les souffrances que mon enveloppe charnelle me forçait à subir alors que mon âme s'élevait dans les sphères du Nirvana.
Et mon instinct m'avait donné raison puisque j'étais à nouveau dans le monde des vivants.
Je tentais de rassembler mes souvenirs alors qu'un prêtre me soulevait délicatement la tête pour m'aider à boire de l'eau car j'étais véritablement déshydraté.
Le mur des Lamentations, l'ultime explosion de douze êtres ne formant plus qu'un... et le noir. Toutes nos particules avaient été projetées dans l'univers et nos corps avaient dérivé pendant plusieurs jours dans les dimensions... mais sur terre, cela devait représenter des mois. Nous avions tous été séparé, incapable de rester ensemble car nos différences de force rendait notre côtoyement impossible. Nous étions certes presque des chevaliers égaux en puissance, mais les meilleurs d'entre nous avaient irrémédiablement pris de l'avance, alors que les autres s'étaient peu à peu laisser distancer. Cela expliquait donc probablement pourquoi je m'étais retrouver à dériver dans les ténébres en solitaire.
J'étais donc probablement l'un des premiers à avoir toucher le sol de cette planète, même si j'avais deviné durant mon voyage dans l'inconnu la présence d'une puissance devant moi. Je hochais la tête, me servant de mon infaillible instinct pour deviner de qu'il s'agissait.
J'esquissais un sourire, ce qui arracha un cri de joie au prêtre qui me tenait toujours doucement par la nuque, en veillant bien à ne pas tirer mes cheveux ou agrandir davantage mes inombrables blessures.
Il était probablement tout comme moi perdu dans un pays qu'il ne connaissait pas, même si je devais reconnaître avoir été chanceux, puisque nous n'avions plus eu la puissance nécessaire, après des jours d'effort, de nous orienter vers le Domaine Sacré alors que nous rentrions dans l'atmosphère de la terre, telles des étoiles ayant décidé de s'écraser parmi les hommes.
-Il essaye de dire quelque chose... cria un prêtre alors qu'il voyait mes lèvres bouger pour former un mot... ou plutôt un nom.
En réalité, j'appelais Athéna, rester en enfer puisque je ne sentais pas son énergie sur terre. Je secouais légèrement la tête, mes cheveux s'agitant autour de moi et se répandant sur l'oreiller que l'on avait placé sous ma tête et qui se recouvrait peu à peu de sang.
J'avais dit, il y avait de cela bien longtemps, que les hommes étaient fait de sang mais aussi et surtout de lumière. Et une fois encore, la vie me donnait raison. J'étais arrivé tel un éclat de clarté venant illuminé mon temple et maintenant, je me rendais compte que même si mon âme était faites de volutes de lumières, je gardais néanmoins un corps mortel, capable de souffrir.
Je retins un gémissement qui me montait naturellement aux lèvres alors que je songeais à tout ce qui c'était produit depuis que les chevaliers d'Or réssucités par Hadès avaient pénétré dans le Sanctuaire. J'avais l'impression que cet évènement s'était produit quelques heures auparavant et pourtant... la réalité devait être tout autre.
Et les chevaliers de Bronze? Ils étaient en vie, il en était impossible autrement. Jamais Athéna n'aurait permis que leurs vies se consumment après tout ce qu'ils avaient accompli pour elle, et pour la terre. Elle était une déesse de justice et avait du créer un miracle pour les renvoyer parmi les vivants. Cela, je m'en doutais. Mais ce qui m'inquiètait, c'était qu'elle avait probablement décidé de cela en échange de sa propre existence.
Mes doigts de raidirent sous la brusque montée de douleur qui m'enserra le coeur comme dans un étau. Pendant quelques secondes, je crus que la pression allait venir à bout de moi, mais je résistais à cet assaut de souffrance comme j'en avais dorénavant l'habitude. Je devais surmonter ces douleurs qui n'étaient que physiques et atteindre les sphères de la sérénité.
Et dire que j'étais rentré dans le temple ou j'avais passé toute mon enfance en plein milieu d'une cérémonie. Je n'avais ainsi jamais manqué à une fête bouddhiste. J'eus envie d'esquisser un sourire mais ne le put nullement.
Dans la paume du Bouddha... je n'arrêtais plus d'y repenser tant l'ironie me frappait. C'était comme si l'on avait essayé de me donner une leçon, de me prévenir que nul n'était parfait, surtout pas moi, qui n'était après tout qu'un mortel comme un autre, bien que je possèdais des pensées un peu plus évoluées. Mais chaque homme pouvait en arriver là ou je me trouvais s'il le désirait réellement. Le tout était de tendre son oreille aux paroles des dieux et de faire preuve de volonté.
J'aurais aimer hocher la tête pour appuyer mes paroles d'un mouvement, mais je n'en avais pas le courage. Je décidais de me plonger moi-même dans un semi-coma pour reprendre mes forces et pour redevenir moi-même à mon réveil. Je n'étais peut-être pas certain de revenir à moi si je faisais cela, mais aucune autre solution ne me paraissait envisageable. Si je n'agissais pas rapidement, j'allais dériver entre le concret et l'abstrait durant des semaines entières et j'avais d'autres affaires bien plus importantes à règler.
Je devais regagner le Sanctuaire.

Des voiles d'un blanc immaculé s'agitaient autour de moi... des voiles ou... je n'arrivais pas à distinguer ce qui se trouvait devant moi.
J'étais entrain de rêver. C'était étrange car la sensation de bien-être qui m'envahissait était phénoménale, si puissante qu'elle me soulevait de terre, alors que mon coeur se remplissait autant de liesse que de bien-être. Oui, jamais je ne m'étais senti aussi proche de la paix suprême.
Et ce blanc... mélangé à cette couleur or qui brillait et scintillait paisiblement, sans éblouir, en se contentant de m'englober dans sa douceur.
Ou étais-je? Ou plutôt avec qui...
Athéna.
J'étais avec la déesse Athéna. Elle se tenait devant moi, ses immenses cheveux mauves se répandant sur ses épaules et dans son dos, ses grands yeux bruns fixés sur moi avec une tendresse que seule une personne divine était capable de ressentir. Un léger sourire flottait sur ses lèvres alors qu'elle tenait d'une main son sceptre et que son bouclier reposait à terre, près d'elle.
Elle tendit ses longs doigts fins vers moi en inclinant légèremment son visage avec une grâce presque majestueuse.
-Shaka, chevalier de la Vierge, tu as lutté avec tes frères, et maintenant, le moment est venu pour toi de rejoindre mon domaine. Certains si trouvent déjà, ils ne sont pas encore très nombreux mais bientôt... tout sera différent. Je sais que je peux compter sur vous, qu'aucun ne me décevra et qu'une nouvelle fois, par votre intermédiaire, un miracle se produira. Comme toujours.
"Ecoute-moi bien, Shaka. Je veux que tu retournes dans mon Sanctuaire, je veux que tu préviennes les autres des retours qui vont se produire, je veux que tu guides chacun sur les voies de la sagesse. Et je veux que tu retrouves Seiya. J'ai réussi à le sauver, et je l'ai projeté avec ses frères dans une autre dimension mais il était beaucoup plus affaibli qu'eux et je ne crains qu'il n'erre toujours dans l'infini. C'est pourquoi tu dois trouver comment l'aider, si toutefois c'est possible. Je mets son destin entre tes mains. Je compte sur toi, Shaka, et ce depuis le premier jour.
Je secouais la tête, submergé par l'aura qui se dégageait de sa personne. C'était comme si elle m'englobait dans la sphère de sa présence bienfaisante. Une douce chaleur s'infiltrait dans mon corps et le rendait plus léger, comme si plus aucune contrainte n'avait existé.
-Pourquoi moi, Athéna, dites moi pourquoi m'avoir choisi pour cette mission?
Saori sourit et je crus pendant quelques secondes que ses yeux étaient emplies de larmes de mélancolie, comme si elle savait qu'elle était condamnée à ne plus jamais revenir sur terre.
-Mais chevalier, parce que tu es le seul encore capable de communiquer avec moi. Tu es l'être le plus proche des dieux, et donc, l'unique personne apte à entendre ma voix qui ne résonne pour l'instant que dans le sombre néant.
-Mais ou êtes-vous? demandais-je alors que la sérénité et le calme que je ressentais de faisait que s'accroître en sa présence de seconde en seconde.
-Nulle part, Shaka. Je n'existe plus... que dans vos mémoires.


Ikki

Seiya allait revenir, je le sentais plus encore que je le savais. Mon instinct ne m'avait encore jamais trahi, et je comptais bien que cela n'allait pas commencer ajourd'hui. Je savais évidemment avoir perdu une partie de mes facultés, du moins pour l'instant, mais je faisais tout de même confiance à mon sixième sens.
Je pensais à cela alors que j'étais allongé sur un rocher, entrain de profiter du soleil qui formait comme une couverture sur ma peau qui ne recherchait plus que la lumière depuis que j'avais erré dans les ombres des enfers.
Je fermais les yeux. Je n'avais plus envie de penser à cela et pourtant. Tout ceci m'obsédait. De façon terrifiante. Les Spectres hantaient mes rêves, Hypnos et Thanatos aussi... sans parler de ce dieu... de cet être de né de la haine et du mépris, Hadès. Je voyais son visage durci... non, ravagé par les sentiments qu'il éprouvait envers la race humaine et envers nous. Cela avait été épouvantable, je n'avais jamais assisté à un tel spectacle mais je n'avais pas été impressionné. Choqué peut-être, voire même sans doute, mais il n'était pas question que je recule face à une personne comme cette divinité.
Je soupirais bruyamment alors que mes songes me conduisaient justement à l'endroit ou je ne voulais pas me rendre.
Pandore...
Je fermais les yeux, incapable d'éviter la remise en marche de ma mémoire qui me refaisait inlassablement vivre ces derniers instants. Je la sentais encore, s'appuyant contre mon dos. Je voyais encore ses yeux s'emplirent de larmes, non pas de colère comme j'aurais pu en éprouver à sa place, mais de regrets et de tristesse. Je sentais encore la douleur qui émanait de sa personne sans qu'elle ne puisse plus camoufler ce qu'elle ressentait. Et puis, elle avait commencé à vasciller, tout en continuant à me livrer les secrets de son âme, qu'elle n'avait jamais été raconter à quiconque.
Jamais personne ne m'avait ému de cette façon depuis... depuis Esméralda. Il fallait que je me rende à l'évidance. Pandore avait été l'une des seules femmes, non l'un des seuls êtres à avoir réussi à me toucher, au plus profond de ma personne. Elle avait atteint ce coeur que je croyais fermer à tous. Je me souvenais qu'à la fin de son discours, j'aurais tout fait pour la garder auprès de moi. Mais je n'avais pas pu agir contre l'inéluctable. Et je m'étais juré de la venger, de lui rendre son honneur perdu, même si cette jeunesse, non, cette vie qui lui avait été volée ne pourrait jamais lui être restituer, ni par moi, ni par personne.
Avais-je réussi? Non. Et c'était cela qui me tourmentait sans cesse et qui m'empêchait d'aspirer à la même joie que mes amis que j'entendais parler plus loin. J'avais échoué car rien ne l'avait ramené. Athéna avait certes réussi à détruire le corps d'Hadès... et alors? Pandore n'était par revenue à la vie pour autant, elle n'avait pas eu le droit à une seconde chance pour autant.
Je secouais la tête tout en serrant les dents de rage. Pourquoi certaine personne avait-elle le droit, comme moi, à une deuxième existence et d'autres pas? Il était décidement des lois du destin que je ne comprenais guère.
Une image me revint brusquement en mémoire. Je la revoyais, ses immenses cheveux bruns tombant sur ses épaules et dans son dos, alors qu'elle était allongée à terre, les yeux éternellement clos, les mains croisées sur sa poitrine et le chapelet de Shaka, rendu entièrement noir par la mort de tous les Spectres, entre ses doigts gracieux. Ce souvenir était à jamais graver en moi, comme un héritage qu'elle m'aurait laissé, pour qu'au moins une seule personne se souvienne de son passage sur cette planète.
Je serrais convulsivement les poings de colère, ravivant les douleurs que je ressentais avec brutalité à la poitrine. Je ne devais pas m'énerver si je ne désirais pas connaître de nouvelles souffrances.
Comment Kanon pouvait-il mettre ma parole en doute à propos du chapelet de Shaka? J'étais incapable d'oublier la dernière fois ou j'avais cotoyé la triste Pandore, alors je n'avais pas la moindre chance d'émettre un mauvais jugement. Les 108 perles étaient devenues sombres, cela ne faisait aucun doute. Aucun. Je lui avais affirmé à maintes et maintes reprises mais il avait à chaque fois nier l'évidence.
Je ne m'entendais pas extrêmement bien avec lui, sans doute parce que nos caractères étaient parfois trop similaires, du moins d'après Shiryu. Je ne partageais pour ma part qu'à moitié cette opinion. Certes, nous possèdions un passé assez semblable, et nous étions deux repentis et... bon, je devais admettre que le chevalier du Dragon n'avait pas totalement tort.
-Ikki... j'espère que tu ne te tracasses pas trop, déclara Shun en se glissant agilemment à mes côtés et en me regardant de ses grands yeux verts.
Je détournais à peine la tête du côté de mon frère, qui semblait de plus en plus pensif ces derniers temps. Je sentais parfaitement qu'il n'arrivait pas à se remettre de ce qui lui était arrivé. Il avait été Hadès lui-même. Et cela avait du être terrifiant. J'étais même incapable d'envisager ce que mon cadet avait pu ressentir. Et pourtant, je m'étais retrouvé en face de lui, à le combattre, et prêt à le tuer comme il me l'avait demandé. Non, Shun n'avait décidemment pas à se sentir coupable, il avait tout fait pour lutter, pour se rendre mettre de ce corps qui était le sien et que l'on tentait de lui ravir. Et il avait réussi, jusqu'à un certain point. J'avais été si fier de lui, et je l'étais maintenant encore...
Je posais quelques secondes un regard sérieux sur lui alors que je fronçais les sourcils. Il n'était plus tout à fait le même maintenant, depuis que tout ceci était arrivé. Je le sentais plus mature, plus adulte qu'autrefois, comme si cela l'avait aidé à grandir, ou plutôt forcer à grandir, car il n'avait décidemment pas eu le choix.
-Eh! Qu'est-ce que vous faites sans nous? s'écria Hyoga en se précipitant vers les rochers alors que Shiryu le suivait d'un pas calme et assuré qui lui était maintenant coutumier.
-Rien d'intéressant, Cygnus, répliquai-je d'un ton impassible.
-Toujours aussi gracieux, Phénix.
Je me surpris à rire alors que Hyoga se moquait de moi en me faisant une révérence. Nous n'avions encore jamais été aussi proche les uns des autres. Notre complicité avait été décuplée dans les entrailles des enfers et j'avais l'impression, en regardant mes frères, de m'observer dans un miroir. Nous étions certes très différents les uns des autres, mais nos points communs, notre histoires, nos malheurs et nos joies vécus ensemble faisaient notre ressemblance.
Les chevaliers du Cygne et du Dragon se hissèrent à côté de moi et de Shun, nous encadrant. Le soleil me chauffait la peau et la sensation de bien-être qui m'envahissait finissait par me faire peur. Je n'avais pas ressenti cela depuis des mois et des mois. Cependant, il existait malgré tout une ombre, de taille, à ce tableau qui aurait pu être idyllique puisque la terre n'était plus menacée. Seiya était abscent. Et Saori aussi... sans parler des autres chevaliers d'Or.
-Qu'est-ce que vous allez faire à présent? demanda soudainement Hyoga en s'étirant alors que j'entendis ses os craqués sous le mouvement qu'il venait d'effectueur.
Son corps était visiblement dans un état aussi lamentable que le mien.
-Je ne comprends pas, répliqua Shun... qu'est-ce que tu entends par là?
-Bah... allons-nous maintenant vivre au Sanctuaire ou allons nous chacun rentrer dans nos patries respectives?
Un silence tomba entre nous, car personne n'osait relever le défi que Cygnus venait de lancer en posant cette question. Voulions-nous vraiment être séparés les uns des autres après tout ce que nous avions vécu? Non, cela ne faisait aucun doute, mais d'un autre côté, nous devions, pour retrouver un certain équilibre, tenter de reprendre des vies normales.
Shiryu toussota pour tenter de dissiper la pesante disparition de nos voix alors que Shun détournait son regard vers l'horizon, comme pour s'y enfoncer ou plutôt s'y fondre. Il aurait voulu être ailleurs et je devinais déjà ce qu'il pensait. Il ne voulait pas être séparer de nous, et n'envisageait pas son existence autrement qu'à nos côtés, mais comme je l'avais remarqué précedemment, même si nous étions semblables en bien des points, nous différions radicalement sur d'autres.
Pour ma part, j'avais toujours bénéficié d'une nature solitaire, non pas à cause de ce que j'avais vécu sur l'île de la mort, l'île de la haine comme je l'appelais plus fréquemment dans mon inconscient, bien que ce drame y soit pour quelque chose, mais parce que j'étais né ainsi. J'avais besoin de perdre le contact avec les personnes pendant un certain temps pour pouvoir les retrouver après. Il n'était pas nécessaire pour moi de côtoyer une personne chaque jour pour l'apprécier car au contraire, des rencontres espacées suffisaient à maintenir le contact et surtout l'intensité des émotions que l'on ressentait vis à vis des autres. Je soupirais en me demandant comment j'allais pouvoir expliquer cela à Shun. Enfin, les autres n'allaient peut-être pas voir cela du même oeil que moi...
-J'aimerais retourner en Sibérie, c'est pour cela que je dis cela... enchaîna soudainement Hyoga pour couper court à mes reflexions. Je me sens loin de ma terre et après tout ce que j'ai vécu, après toutes les images d'horreur qui dansent encore devant mes yeux, il faut que je retourne dans cette patrie qui est mienne, me noyer dans l'infiniment blanc, l'infiniment pur...
Il se tut et Shiryu hocha gravement la tête pour lui donner raison.
-Quant à moi, je dois aller retrouver Shunreï qui me croit probablement mort. Je dois donc m'absenter aux Cinq Pics quelques temps, je ne sais pas exactement quand je reviendrais...
Shun se mordit la lèvre inférieure avant de nous regarder tour à tour. Il n'avait nullement envie de nous voir nous éloigner les uns des autres.
-Je n'ai besoin de voyager nulle part, articula-t-il avec difficulté, j'ai retrouvé June ici même puisque Shaina l'a ramené et je n'éprouve pas le besoin de repartir sur l'île d'Andromède dans l'immédiat pour la reconstruire. Je préfererais donc rester ici.
Un nouveau silence s'empara de l'endroit ou nous nous trouvions. Il était difficile de nous dire adieu, ou plutôt aurevoir, bien plus que je ne l'aurais supposé en tout cas.
-Je ne pars pas pour toujours! s'exclama subitement Hyoga afin de nous ramener à la réalité. Non, je voudrais juste me recueillir dans ce lieu qui a fait de moi ce que je suis.
-Moi, j'aimerais ramener auprès de moi Shunreï quelques temps, pour que nous vivions en Grèce pendant un moment...
-Je vais repartir me ressourcer quelque part... je ne sais pas ou mais je trouverais bien, dis-je pour terminer la conversation que je me tenais intérieurement depuis maintenant plusieurs minutes.
-Je veux vivre en Grèce à présent, continua Shun. Bien-sûr je repartirai pour le Japon un jour, mais pas dès à présent, c'est trop tôt, beaucoup trop tôt.
-Moi aussi, déclara résolument Hyoga.
Shiryu approuva d'un geste de la main alors que je perdais mon regard dans la nature qui nous environnait. Je n'avais jamais vécu dans un endroit précis, j'étais un voyageur, l'une de ces personnes qui éprouvent du plaisir à se retrouver sur la route, sans savoir ou elles dormiront le soir venu ou ce qu'elles mangeront le lendemain. Telle était ma nature et je ne pouvais pas la changer. Mais s'il y avait bien une chose dont j'étais certaine, c'était que jamais, ou que je sois, ou que je me rende, l'image de mes frères ne disparaitrait de ma mémoire. Ils feraient à jamais partie intégrante de moi-même.
Hyoga s'allongea sur le rocher, mettant du mieux qu'il le pouvait ses bras derrière sa tête avant que nous ne l'imitâmes tous dans cette position qui nous faisait souffrir tout en nous détendant. Nous ressemblions soudainement à de simples gamins, certes très abîmés mais tout de même, entrain de discuter de tout et de rien tout en se dorant au soleil. Mais la réalité était différente car nous étions déjà adultes et entrain de choisir comment guider notre destin.
-Je vais partir dès cette semaine, avança Shiryu, car j'ai un mauvais présentiment à propos de Shunreï. Mais je reviendrai presque tout de suite après. Ne vous inquiètez pas.
Shun ferma les yeux alors que j'observais les nuages passer doucement dans ces cieux d'ou nous étions tombés.
-Je ne m'en irai en Sibérie que lorsque nous aurons retrouvé Seiya, pas avant, car je compte bien l'emmener avec moi dans mon paysage neigeux. Toi aussi, tu pourrais venir Shun, si cela te disais évidemment...
Mon frère releva subitement la tête en se tournant vers le chevalier du Cygne.
-Oh! Je suis partant, et maintenant que tu l'as proposé, plus question de te débarasser de moi!
-Bah ça... j'avais remarqué! répliqua Hyoga en riant.
Seiya... oui bien-sûr, il fallait le retrouver. Mais comment et surtout ou, je n'en avais pas la moindre idée!
J'avais décidé de ne m'éloigner du Sanctuaire que lorsque la situation serait meilleure. J'avais toujours soutenu mes compagnons d'armes dans les moments difficiles et il n'était pas question que je perde mes bonnes habitudes. Deux points étaient actuellement de toute urgence, remettre à flots le Domaine Sacré, même si Kanon était là pour cela et que j'avais une confiance absolue en ses qualités de dirigeant, et chercher Seiya.
-Pégase, murmura Shun alors qu'un nuage projetait une ombre sur tout notre groupe, refroidissant soudainement l'atmopshère, Pégase, ou es-tu?


Shaka

Je m'éveillais en sursaut. Je venais de rêver d'Athéna, pour la première fois depuis des années, elle m'était apparue dans mon sommeil. Cela ne m'était pas arrivé depuis ma plus tendre enfance, à l'époque ou j'avais découvert ma vocation et ma véritable identité.
Je sentais des gouttes de sueurs glisser doucement le long de mon visage alors que je tentais de reprendre une respiration plus régulière.
Non, cela n'avait pas été un rêve et je le savais fort bien. Les dieux pouvaient entrer en contact avec moi depuis toujours et il ne fallait donc pas que je m'étonne de ce message que m'avait envoyé la maîtresse du Sanctuaire.
Il fallait que j'y retourne, au plus vite. Il n'était plus question de perdre du temps en une quelconque et inutile convalescence dont mon âme n'avait pas besoin. Pour mon corps, il suffisait d'en faire fi et d'atteindre la perfection de l'être, lorsque l'enveloppe charnelle ne ressent plus rien.
Je hochais la tête avec volonté, ignorant le mal de crâne que cela engendrait. J'écartais avec rapidité la moustiquaire qui entourait le lit ou l'on m'avait déposé et qui n'était pas le mien. Je dormais d'ordinnaire dans une chambre bien plus vétuste car j'avais toujours refusé les luxes que les prêtres voulaient m'offrir. Comment aurais-je pu dormir confortablement à l'abir des éléments et des famines alors que dehors, la population de l'Inde se mourrait?
Je posais un pied à terre alors qu'une douleur poignante s'élança de ma cheville au haut de ma cuisse. Mon visage restait pourtant impassible car ma volonté devait être plus puissante que ces maux.
Je me levais péniblement de ma couche et m'extirpais au sol ou je faillis glisser avant de reprendre mon équilibre en m'accrochant à une table basse. Bouddha n'avait soudainement plus la fière allure qui provoquait d'habitude respect et crainte sur son passage.
Je m'avançais doucement vers les vêtements que l'on avait déposé pour moi sur une chaise. Une toge de couleur sombre, noir, comme l'Hadès... je l'enfilais en stoppant immédiatement ses pensées qui me ramenaient vers le passé alors que je devais uniquement me fixer sur le futur.
J'allais saluer les prêtres que je connaissais depuis toujours et les remercier de leur aide, puis partir pour le Sanctuaire. Athéna m'avait confié une mission et d'ou il était, Seiya comptait probablement lui aussi sur moi, peut-être même sans le savoir.
J'enfilais les chaussures lacées que l'on m'avait déposées et passais mes mains sur mon visage. Il était comotionné et j'avais du mal à le reconnaître. Je ne ressemblais probablement plus à grand chose mais les apparences n'étaient que provisoire, en cet instant et en ce monde...
-Princesse Athéna, déclarai-je d'une voix forte et parfaitement audible alors que je faisais subir un mauvais choc à mes cordes vocales, pour vous, je rentrerais au Sanctuaire et je vous jure, sur mon armure, de retrouver votre chevalier Pégase. Et s'il le faut, je retournerais dans les dimensions voisines de la nôtre pour le guider sur cette planète. De toute manière, je ne suis pas seul... et je ne l'ai jamais été.
Je sortis à cet instant de ma chambre et posais les yeux vers la main du Bouddha, à terre, la paume offerte au cieux.

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Cette fiction est copyright Caroline Mongas.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.