Chapitre 14 : Rencontres


Une étroite clairière traversée d'un fin ruisseau aux milles éclats. L'astre solaire projetait fièrement ses rayons depuis maintenant plus de six heures, atteignant bientôt le zénith. Une jeune femme était allongée dans l'herbe sèche, inconsciente. D'elle se dégageait une grâce insoupçonnable : enchâssée dans une armure qui ne faisait que souligner plus encore le galbe de son corps, elle semblait parée d'une lumineuse auréole, sa blonde chevelure étendue harmonieusement autour de sa tête posée au sol. Son visage était d'une finesse sans pareil et ses lèvres pâles rappelaient la couleur de sa peau : immaculée, telle la nacre rosâtre irisée par les faisceaux d'Hélios. Son bras gauche demeurait étendu, tenant fermement ce qui se présentait comme étant un masque d'albâtre incrusté de deux marques écarlates gravées à la verticale, au niveau du regard. Tout autour d'elle, le vent soufflait, lentement, faisant bruisser les feuilles vertes des arbres alentours, traversant les buissons en laissant s'échapper le son des branches se frottant les unes aux autres. Le chant des oiseaux se faisait entendre, haut et clair, apposant à ces lieux la bénédiction d'une perfection qui n'était déjà plus à prouver : un endroit paradisiaque, havre divin, oublié des mortels depuis des temps immémoriaux.

Le ruisseau sembla soudain se détourner de son lit. Un fin chemin aqueux traversa l'air pour retomber sur le visage de la jeune femme. Celle-ci n'eut d'autre réflexe que d'ouvrir les yeux avant de se relever en trombe. Ses pupilles céruléennes cherchèrent alors vivement protection derrière le masque figé qu'elle tenait en sa poigne. Se mettant en position de défense, jambes solidement ancrées au sol, poings serrés à hauteur de la poitrine, elle se risqua à demander, hésitante :

- Qui ?!…

Mais aucun son, si ce n'était celui de la forêt, ne vint en réponse. Elle regarda alors tout autour d'elle, constatant à quel point ce lieu vers lequel elle avait été menée était d'une inégalable splendeur. Depuis combien de temps était-elle ainsi nonchalamment allongée ? Elle n'osait imaginer la réponse. Tout ce qu'elle savait pour l'instant c'était qu'elle avait soif, énormément soif. Ainsi s'approcha-t-elle du ruisseau cristallin, se baissa et ôta son masque, observant sans mot dire son visage dans le miroir d'eau. Cela faisait si longtemps qu'elle ne s'était vue ainsi : pour une fois elle se sentait belle, et les lieux comme pour approuver sa pensée frémirent de concert, un petit poisson pointant hors de l'eau pour l'éclabousser de son saut. Un sourire illumina alors le visage clair de l'éthiopienne étonnement blanche de par ses origines. Puis elle fixa son propre regard et ses yeux semblèrent changer de couleur, prenant peu à peu de profondes teintes ocres et terreuses. Son visage tout entier parut alors se métamorphoser, provoquant en elle une indicible peur entrecoupée d'une incontrôlable fascination. Toutefois, au prix d'un immense effort, elle parvint à détacher son regard des eaux, étreignant promptement de sa main droite un fouet finement ouvragé, en attente d'une quelconque rixe.

Un murmure rauque mais non moins désagréable se fit alors entendre en provenance du cours d'eau.

" Viens à moi. "

La guerrière, car nul doute à présent qu'il s'agissait d'une combattante, avait la sensation de reconnaître ce timbre de voix, mais la prudence lui dictait de rester sur ses gardes. S'approchant résolument, d'un pas agile, elle laissa glisser ses yeux le long des reflets mirifiques s'offrant à elle, résolue à découvrir l'identité de son interlocuteur. Elle resta alors muette face à la vision se dessinant devant elle : le visage apparu lorsqu'elle observait son reflet dans l'eau avait pris relief et arborait maintenant les traits de…

- Rhéa ! Mais comment ?!
- Je suis peut-être vieille mais j'ai encore bien des ressources à mon actif, jeune fille ! Hahaha !

June ne put s'empêcher de sourire face à l'apparition de la Magna Mater, la Grande Mère, séculaire et pourtant si pleine de gaieté, comme si le temps n'avait aucune prise sur son mental, n'ayant pu entamer son insouciance. Mais elle savait au fond d'elle que tout cela n'était qu'une façade…

- Pourquoi cet air si triste mon enfant ? Tu penses à ta déesse et à tes compagnons n'est-ce pas ?

June acquiesça alors, feignant qu'il s'agissait de cela. En vérité ça n'était pas tant de faire face à une quelconque épreuve qui l'angoissait, c'était plutôt de se retrouver seule… devoir découvrir qui elle était réellement…

- Puise ta force en eux, l'amour sera ta plus grande puissance, même si d'autres peuvent te venir en aide. A présent écoute bien mes sages paroles.

Sur ces mots June recula du bord de l'eau, le visage de Rhéa s'avançant hors des flots et prenant totalement forme humaine pour finalement gagner en stature, absorbant le Chevalier dans son ombre opalescente.

- Tu dois te libérer du côté négatif de ta constellation, apprendre à t'harmoniser avec toi-même. Car tu n'es pas uniquement Caméléon, tu es avant tout June, une jeune femme qui a sa propre personnalité ! Etre capable de se fondre dans l'environnement ne signifie pas forcément perdre tout trait de caractère pour se dissoudre dans la masse. Je t'envoie restaurer un mythe trompé et prendre revanche sur l'antique passé. A présent va au devant de ta destinée et ne faillit pas : tes pairs et ta déesse comptent sur toi. M'est d'avis que le cœur de l'un d'eux bat autrement plus fort pour toi, alors ne le déçois pas ! Ahahah !

Finissant son discours en un rire éclatant, la divinité ancestrale sembla alors se tordre, se pliant sur elle-même en l'apparence de vieilles racines rugueuses et noueuses, pour finalement éclater dans un ruissellement scintillant. Seule une flaque demeurait présente là où, quelques instants auparavant, elle se dressait. Mais le soleil brûlant eut tôt agi en vue de faire disparaître les derniers vestiges aqueux de la mère des dieux, laissant ainsi quelques maigres instants au Chamaeleon Saint pour se remettre de ses émotions.

Que voulait-elle donc me dire ? Aurait-elle entraperçu mes doutes et mes faiblesses ? Folle ou sage, intrigante ou sincère, quelle est donc sa nature profonde ? Et que voulait-elle me dire par sa dernière phrase : " Le cœur de l'un d'eux bat autrement plus fort pour toi. " ?

Ses joues soudain s'empourprèrent sous son masque : elle fut comme sujette à une bouffée de chaleur. Puis sa main se resserra autour de son fouet, lui permettant de reprendre contenance et gravité.

J'espère un jour pouvoir à nouveau m'entretenir avec elle et obtenir enfin des explications à toutes ses paroles.

Elle embrasa alors les lieux d'un dernier regard, pensant qu'il était temps d'aller au-devant de son destin et de celui de la Terre, temps d'enfin se battre pour son idéal et d'honorer par de véritables actions l'enseignement de son maître. Passant la main dans ses cheveux d'or pour les réajuster correctement derrière son bandeau frontal, elle prit appui sur ses jambes et d'une impulsion soudaine sauta sur le faîte d'un haut arbre. Ainsi se déplaça-t-elle rapidement de branche en branche, vers un lieu qui semblait l'appeler à travers son sixième sens. Pas un son ne se faisait entendre, pas un rameau ne céda sous son poids, pas même une feuille ne tomba lors de son passage. A présent June avait laissé place au Caméléon, furtif et invisible dans la végétation…

*
* *

Douze êtres parés d'or et de lumière réunis en un lieu mythique érigé en des temps mythologiques : le Sanctuaire d'Athéna. Douze Chevaliers au service de la déesse aux yeux pers, unis sous la bienveillante stature de son effigie de pierre. Chacun était différent, dissemblable des autres, non seulement physiquement, mais également de caractère et de motivation. Pourtant leurs esprits étaient tous emplis d'une même pensée envers leurs frères d'armes qu'ils savaient détenteurs d'un bien grand poids, celui de l'Humanité.

Cela faisait maintenant un peu plus de trois heures que les Chevaliers de bronze et leurs homologues divins s'en étaient allés par la brèche temporelle ouverte à même la statue de Pallas. Malgré tout, aucune nouvelle n'avait encore franchi l'ouverture béante, symbole à la fois d'espoir et de condamnation : plus que quatre heures et le passage se refermerait à jamais, laissant la déité vierge, mais également onze combattants, se perdre dans les limbes de l'oubli, abandonnant ainsi aux forces du mal la Terre privée de protection…

Shaka et ses connaissances des différents mondes, Masque de Mort et ses capacités de transport entre le monde des vivants et le meikai, mais surtout Mû et ses pouvoirs en télékinésie, ont permis à Saga, il y a quelques instants à peine, de projeter sa volonté à travers le gouffre dimensionnel pour sonder l'autre monde. Mais même ainsi le détenteur de la Gemini Cloth n'a pu en apprendre plus, si ce n'est la grande difficulté dans laquelle se trouvait alors Seiya… Tout cela avant de se faire expulser violemment par une énergie colossale bien plus grande encore que celle de Poséidon, d'Athéna, ou même d'Hadès !

En cet instant les Chevaliers de la Vierge, du Cancer, du Bélier et des Gémeaux avaient été littéralement expulsés en arrière sous le regard étonné des personnes présentes qui s'étaient alors précipitées pour les aider à se relever. Leur cœur n'avait fait qu'un bond lorsque le passage commença à se rétrécir ! Heureusement que, tous réunis, ils avaient pu épauler le repentant Chevalier dans sa lourde tâche consistant à retenir la porte ouverte. Mais cette ouverture n'avait pas échappé aux yeux attentifs d'une divinité aux terrifiants pouvoirs…

- Hallucinant ! Je n'ai jamais ressenti une telle décharge d'énergie me parcourir ! Vous l'avez sentie n'est-ce pas ?
- Qui ne l'aurait pas sentie, Saga ? lui répondit Aiolia en appuyant bien sa voie sur son nom, le toisant fièrement, comme pour le défier.

Saga détourna alors la tête vers le Pisces Saints arborant un visage blasé, sans équivoque. Conscient qu'un jour ou l'autre il faudrait régler les non-dits et les animosités latentes qui régnaient entre certaines personnes, le Grand Pope coupa court à cet affrontement muet :

- Visiblement une entité supérieure est à l'œuvre dans ce monde adjacent au nôtre. Ne perdons pas espoir, Seiya et ses frères n'ont plus à faire leur preuve je vous le rappelle. Alors…
- Alors quoi ? Attendons-là sagement comme de simples gardes ?!
- Aiolia ! Il suffit ! Ton caractère impétueux est connu de tous, mais surveille ton langage lorsqu'il s'agit du représentant d'Athéna, lui dit sèchement le Virgo Saint, l'air serein les yeux clos, visiblement peu atteint par l'émission de cosmos qui les exclut hors de l'autre dimension quelques instants plus tôt.

Aioros posa alors sa main sur l'épaule de son frère. Ce dernier tourna la tête et se perdit dans son regard, ce qui le calma immédiatement.

Au cours des derniers mois Aioros avait été parfaitement réintégré dans la chevalerie, comme si son départ n'avait été que de courte durée. Malgré tout il demeurait encore une énigme pour beaucoup de ses pairs, car seul son frère Aiolia, Shura, Saga, ainsi que Masque de Mort et Aphrodite dans une moindre mesure, le connaissaient. Et même eux avaient été surpris de la transformation physique et mentale de celui qui, disparu à l'âge de quatorze ans, revenait avec le physique d'un homme de vingt-sept ans, comme si le temps pour lui ne s'était pas arrêté. Mais si le Chevalier du Sagittaire avait changé, il n'avait pas uniquement gagné en charisme et en sagesse, mais également en gravité, car jamais il ne parla à quiconque de ce qu'il advint de lui durant ces treize dernières années…

La quiétude des lieux demeurait à nouveau, même si celle des cœurs était des plus instable. Milo malgré tout dit, d'un ton amer :

- Sincèrement, je ne sais pas comment vous faites Vieux Maître. Je ne puis être comme vous ou encore comme Shaka.

Ce dernier haussa un sourcil d'interrogation à l'évocation de son nom.

- Je ne peux rester là inactif à ne rien faire, reprit le Scorpion. Il me faut de l'action, une occupation. Quelque chose ou je vais devenir fou !

Une lueur inquiétante traversa alors ses yeux si connus pour leur hypnotisant éclat …

- Il a bien raison ! tonna une forte voix. Moi l'attente me donne faim ! Alors qui m'aime me suive. On ramènera quelque chose à ceux qui resteront ici.

Un sourire pointa alors sur les lèvres de certains Chevaliers, tandis que d'autres restaient impassibles. Bien entendu Saga resta là, secondé par Dohko, Shaka, Mû et Masque de Mort. Milo quant à lui força l'Aquarius Saint à les suivre tandis qu'Aldébaran poussa dans les escaliers un Aphrodite légèrement décontenancé par l'attitude bienveillante de son confrère. Derrière eux Aiolia et Aioros discutaient, le deuxième essayant de raisonner son cadet quant à faire fi des griefs passés et de se tourner à présent vers l'avenir. Seul en retrait, derrière ce petit groupe, le Chevalier du Capricorne semblait se demander quel était son rôle. Après tout, mis à part lors des réunions les réunissant tous, il n'avait véritablement eu beaucoup de contacts ces trois derniers mois, ci ce n'est avec son nouveau disciple du Lionnet. Aioros semblait lui avoir pardonné, mais peut-on vraiment pardonner à son bourreau ?… Il avait à tout jamais perdu son meilleur ami, et il le savait. Son regard passa en avant, se dirigeant sur la silhouette de celui qui jadis avait mortellement bravé le tranchant d'excalibur…

- Je me demande pourquoi cela ne te fait rien. Franchement réponds-moi : tu ne vas pas me dire que tu ne tiens pas rigueur à tous ces traîtres pour les ignobles actes qu'ils ont commis par le passé ?
- Aiolia, je n'ai jamais dit que j'ai oublié ce qu'il s'était passé. C'est juste que… Que je suis passé par bien des choses qui m'ont faites relativiser et m'ont enseignées que les gens changent. Le passé nous construit et les erreurs que nous commettons nous forgent de nouvelles forces. Pense à Kanon par exemple : il a abusé dieux et mortels, et pourtant il a trouvé une incommensurable puissance dans le chemin de la rédemption. Apprend à pardonner, car le pardon est bien plus formateur et humble que la fierté et l'orgueil.
- Je ne sais pas comment tu fais. Je ne peux pas, désolé ! Chaque fois que je croise le regard de Saga j'ai une irrépressible envie de le faire disparaître. Quand je pense à tous ceux qui ont péri par sa faute… Ca me dégoûte ! Et l'autre là, Masque de Mort. Sais-tu ce qui trônait dans son temple il y a encore quelques mois de ça ? Je suis sûr qu'il doit y en avoir caché dans son antre de psychopathe, et de belles ! Quant à ton plus fidèle ami ? dit-il sur un ton ironique. Tu sais, celui qui t'a assassiné il y a de cela bientôt quatorze ans ? Et je ne parle même pas du dernier qui ne vaut pas bien mieux que les trois autres ! Tous ne sont que des opportunistes qui se rangent du côté qui les arrange quand ça les arrange !!!

Les Saints présents s'étaient tous arrêtés, impressionnés par le déchaînement soudain d'Aiolia. Ce dernier ne s'était même pas rendu compte qu'il ne contenait plus son cosmos et qu'il hurlait littéralement, exposant à l'entente de tous ses paroles amères. Aphrodite s'était contenté de baisser la tête, honteux. Après tout que pouvait-il répondre ? Et même s'il avait su quoi dire, le Chevalier du Lion était dans un tel état que mieux valait le laisser en paix. Quant à Shura… Il s'était esquivé derrière une colonne de marbre, souhaitant conserver son honneur intact. Une larme en effet luisait sur sa joue, larme qu'il se hâta d'essuyer, jugeant qu'elle n'était pas digne d'un Chevalier de son rang. Malgré tout il resta là, assis contre le pilier, attendant d'être enfin seul pour ressortir de sa cachette.

Le jeune guerrier avait enfin achevé de déverser sa colère, son frère le regardant, flegmatique, tout comme Camus un peu en avant. Sur le visage de Milo se dessinait ce sourire plein d'ironie, tant apprécié de certains, redouté d'autres. Enfin, Aldébaran tapa amicalement dans le dos du Chevalier des Poissons en lui intimant doucement l'ordre de continuer sa route, comme si de rien n'était…


Quelques instants plus tard

- Bon ben maintenant que nous y sommes, il ne reste plus qu'à nous préparer quelque chose ! Qui s'y colle ? demanda Aldébaran en dévisageant tour à tour ses frères d'armes.

Tous s'étaient dévêtus de leur armure et se tenaient là, attablés, regardant le Taurus Saint comme s'il venait de demander la lune.

- Il est bien loin le temps où les servantes venaient nous apporter nos repas dans des plateaux dorés… soupira Milo.
- Il va bien falloir s'y mettre alors, répondit Shura, fraîchement arrivé.
- Te voilà enfin. Il t'en a fallu du temps pour nous rejoindre.
- Laisse-le Camus. Il faut croire que ces derniers mois il n'a pas dû beaucoup s'entraîner, sa vitesse a dû régresser au même stade que celle d'un bronze, plaisanta Milo en faisant un clin d'œil au Capricornus Saint.
- C'est ça, moque-toi !

Sur ce tous se mirent à rire, ce qui détendit l'atmosphère. Même Camus et Aiolia ne purent s'empêcher de sourire. Ainsi réunis on aurait pu croire à un moment simple entre sept hommes tout à fait normaux, et, en quelque sorte, c'était ce qu'ils étaient. Car non revêtus de leurs armures ils oublièrent pour quelques instants le lourd poids du destin qui pesait sur eux, tous ces douloureux souvenirs d'un passé par bien des aspects trop amer et douloureux. Soudain une question cruciale vint interrompre ce moment jovial, replongeant les protagonistes dans un monde indéniablement cruel :

- Alors, qu'allons-nous manger ? C'est que nous n'avons pas trop de temps : ils nous attendent aux pieds de la statue, argua le colosse brésilien en regardant les six autres.
- On a qu'à appeler Marine ou Shina ! hâbla avec un grand sourire le Scorpion, se retenant pour ne pas rire.
- Tu peux toujours essayer… si tu veux mourir ! rétorqua Aiolia avant qu'un nouveau fou rire ne les reprenne tous.

Au bout de quelques instants le protégé du signe du Lion reprit la parole :

- D'ailleurs quelqu'un sait où sont passées nos femmes Chevaliers ? Aioros ?
- En mission depuis hier matin me semble-t-il, par ordre du Grand Pope. Mais je n'en sais pas plus que vous. Désolé.
- Décidément, où sont les femmes quand on a besoin d'elles ?!

Tous regardèrent Aphrodite d'un air stupéfié. Ce dernier rougit brutalement, provoquant à nouveau l'hilarité.

Une gigantesque explosion de cosmos retentit alors à travers tout le Sanctuaire, mettant fin à cet instant de normalité qui n'aurait pas dû être… Il n'y avait aucun doute : cette soudaine déflagration provenait des premières marches menant au Temple d'Ariès. Aldébaran et Aiolia se précipitèrent alors, rappelés brusquement à leur dure condition de Chevaliers…

*
* *

Quelque part dans une forêt luxuriante

La main au-dessus des yeux, June scrutait l'horizon du haut d'un arbre. Ici elle se sentait parfaitement à l'aise, dans son élément : la jungle s'étendait à perte de vue, à l'image d'un océan de vert. Pourtant, à quelques kilomètres à peine, elle apercevait une fumée s'élever dans le ciel, signe évident d'une présence en cette contrée perdue. Prenant la décision de se rendre sur les lieux d'où provenait l'effluve grisâtre, elle quitta le toit du monde pour s'enfoncer plus en profondeur dans les entrailles sylvestres, abandonnant par la même ce soleil qu'elle aimait à sentir sur sa peau, ce même astre brûlant qui jadis sévissait sur l'île d'Andromède.

Andromède… J'aimerais bien savoir où tu es en ce moment. Malgré le fait que tu aies survécu à tant de guerres, je ne peux m'empêcher de penser qu'un jour il t'arrivera malheur. Après tout la chance est bien imprévisible, et elle t'a trop souvent sauvée pour faire encore effet. Shun…

La femme Chevalier ferma les yeux, aspirant une grande bouffée d'oxygène. Soudain un éclair violacé fonça droit sur elle, l'obligeant à se décaler pour ne pas en subir l'impact.

Et merde !

Rouvrant brutalement les yeux, June mit quelques secondes à se remettre du choc. Elle connaissait cette attaque, elle l'avait vue des centaines de fois au cours de ces derniers mois.

" La Griffe du Cobra ?! Shina ? "

Quelle était donc cette étrange vision qu'elle venait d'avoir, l'interrompant si soudainement dans ses pensées ? Un étrange bruit se fit entendre, un son que l'Ethiopienne eut bien du mal à identifier, si ce n'est trop tard. La ramure sur laquelle elle se trouvait venait de se briser et l'emportait dans sa rude chute. Malheureusement pour elle, aucune prise n'était à sa portée. Alors qu'elle se rapprochait du sol, résignée à subir le choc, un nouvel éclair vint frapper son esprit, non pas une vision cette fois, mais plutôt un éclair de génie. Aussi rapidement que sa condition de Chevalier de bronze le lui permettait, elle dégaina son fouet et propulsa la lanière autour d'une épaisse branche. Ainsi stoppée dans sa chute, elle profita de l'élan que lui donnait sa vitesse pour se rétablir en un superbe salto sur le faîte de l'arbre.

- Clap ! Clap ! Clap !

La Chamaeleon Saint se retourna vivement et aperçut, debout sur une branche, à quelques mètres à peine, une femme d'âge mûre qui applaudissait sa prestation. Les rayons du soleil perçaient à travers la voûte sylvicole et tombaient en cascade sur les boucles de ses cheveux bruns, de même que ces derniers retombaient en ondoyant sur ses épaules. Ses épaules justement, tout comme le reste de son corps, étaient recouvertes de pièces d'armure d'une teinte allant du vert sombre à l'olivâtre. Cette protection était finement ouvragée, non pas imposante, mais harmonieuse, recouvrant juste ce qu'il fallait. Ce fut soudain comme si sa protection brillait, impulsée de l'intérieur… Mais en réalité ce qui donnait cette impression n'était rien d'autre qu'une des pièces de l'armure : une lanière de couleur turquoise enchâssée au niveau de la taille et rehaussée d'une pierre de feu. Le Chevalier ramena alors son regard vers celui de la nouvelle apparue : des yeux pers la fixaient intensément, un air malicieux y transparaissant, appuyé en cela par un sourire en coin.

- Je peux savoir ce qui vous fait sourire ? la questionna June, visiblement agacée.
- Toi justement. C'est pas pour me vanter mais j'étais sur le point d'intervenir, lui répondit l'inconnue aux cheveux ondulés, lui montrant par la même la liane qu'elle tenait dans sa main, visiblement prête à s'élancer pour la rattraper.
- Comme vous pouvez le constater je sais me débrouiller par moi-même ! Alors maintenant vous pouvez reprendre votre route et me laisser à la mienne.

Sur ce June bondit en sens opposé. Malheureusement, lorsqu'elle se réceptionna, une vive douleur l'élança à la cheville, lui tirant un douloureux rictus. Se baissant pour examiner sa jambe, elle constata qu'effectivement elle avait dû faire un mauvais mouvement lors de sa précédente réception… Dépitée, elle releva la tête pour se retrouver face à :

- Vous ! Encore ! Vous voulez bien me lâch…
- Chut, lui dit l'inconnue en ôtant le masque de la blessée, posant son index sur les lèvres closes de la protestataire.

L'élève d'Albior s'empourpra soudain, observant son vis-à-vis lui enlever sa bottine pour y appliquer une sorte d'onguent transparent qui, au vu des exhalaisons, devait être à base de plantes sauvages.

- Me… merci.
- De rien ! Entre femmes il est normal qu'on s'aide, lui dit-elle d'un clin d'œil.

June acquiesça d'un hochement de tête, lui rendant pour la première fois son sourire. La nouvelle venue se permit alors :

- Dis-moi, tu es une guerrière n'est-ce pas ?
- Au même titre que vous, au vu de votre armure.
- Elle est belle n'est-ce pas ? Elle représente le Varan, un grand reptile possesseur d'une terrible force.
- Le Varan ?
- Oui exactement. Pour mon peuple le Varan est un animal sacré détenteur de bien des pouvoirs. Et toi alors ?
- Ma protection est l'une des 88 armures sacrées d'Athéna. Elle est sous la bénédiction du Caméléon.
- Le caméléon ?! répéta alors la brune tout à coup immobile et prostrée, l'air totalement hébété.
- Qu… qu'est-ce qu'il y a ? demanda la blonde en la fixant du regard.
- Rien, non rien… fit-elle en un signe négatif de la tête. Enfin… Je dois y aller. Au revoir.

Sur ce elle sauta au sol avec la vivacité d'un reptile.

- Hé ! Je ne sais même pas qui je dois remercier ?! Moi c'est June, et vous ? hurla la protectrice d'Athéna à l'encontre de celle qui s'enfuyait.

Se retournant alors elle lui dit :

- Hippolyte ! C'est mon nom.

…avant de lui faire un signe de main en guise d'au revoir. Puis elle s'enfonça dans l'obscurité et la chaleur moite de ces lieux couverts…


Environ une heure plus tard

Tout ceci est hallucinant… Voilà maintenant plus d'une demi-heure que je suis arrivée ici et je n'en reviens toujours pas. Un village en cet endroit, en pleine autarcie, abandonné en plein milieu de la jungle sauvage. Je comprends mieux maintenant d'où vient cette Hippolyte.

Dissimulée sur un toit en abord de l'artère principale de la ville, June observait les lieux et cherchait à se faire une idée de l'endroit dans lequel elle avait pu atterrir. Les maisons étaient toutes faites d'une matière semblable à l'argile. Sur le toit, par-dessus le limon, étaient posées de larges feuilles de palmier disciplinées de telle sorte que lors des grandes pluies elles devaient probablement égoutter l'eau en contrebas afin que l'humidité ne stagne pas sur le haut. De fines fenêtres, destinées uniquement à laisser entrer l'air et à conserver la fraîcheur interne, égayaient les murs bruns ornés pour la plupart de mystérieuses peintures, peut-être simplement des épigraphes. Ses connaissances linguistiques étaient limitées, mais elle savait qu'il ne s'agissait ni de grec ni de japonais, et encore moins d'une langue latine. Les pictogrammes utilisés laissaient plutôt à penser qu'il y avait là un dialecte local tel qu'elle avait pu en observer jadis chez certaines tribus africaines. Pourtant ce n'était pas tant le décor en lui-même qui la surprenait, mais plutôt l'unicité de la population en contrebas. En effet, sur la route vaquaient à leurs occupations d'innombrables femmes, certaines jeunes, d'autres moins, mais aucun homme en vue.

Souhaitant pousser son étude des lieux, elle repéra un pilier dépassant légèrement d'une maison de l'autre côté de la rue.

Par là-bas. J'en apprendrai sûrement plus si je puis me mêler à la population, alors il faut que je me trouve des vêtements adéquats. Ca n'est pas en armure que je passerai inaperçue.

Sur cette pertinente réflexion elle recula de quelques pas juste avant se précipiter par-dessus la rue en un saut gracieux et de se rattraper sur la poutre préalablement remarquée. Tournant deux fois autour de la saillie grâce à l'élan acquis, elle s'élança alors pieds en avant pour atterrir en un équilibre parfait et sans aucun bruit sur le toit.

Elle était fière de son agilité, elle avait axé pratiquement toutes ses années d'entraînement à parfaire sa maîtrise de la furtivité, en dépit de sa puissance pourtant. C'était d'ailleurs cela que Shina ne supportait pas : pour elle la seule manière de vaincre était d'utiliser son cosmos de façon offensive en le maîtrisant à un niveau optimum. Pourtant le Chevalier du Caméléon restait intimement persuadée que l'utilisation de la force n'était qu'un ultime recours et que si l'on ne se faisait pas prendre, il n'y aurait pas même question d'affrontement. Voilà pourquoi depuis sa plus tendre enfance elle s'exerçait à la dissimulation.

Son maître Albior, ainsi que Shun, étaient les deux seuls êtres à savoir cela à propos d'elle. Ce n'était d'ailleurs pas pour rien qu'elle et le jeune homme aux cheveux verts s'étaient tout de suite entendus : ils avaient la même appréhension de la violence, même si June paraissait plus terre à terre. Mais au fil du temps ils ont traité différemment cette répugnance à faire couler le sang : Shun avait assumé sa puissance latente à travers le sacrifice, symbole inhérent à Andromède, alors qu'elle avait choisi la dissimulation, en parfaite symbiose avec sa constellation. Tel était le résultat : agilité, souplesse, discrétion, mais également solitude et souvent incompréhension… jusqu'à ces derniers mois d'entraînements acharnés avec l'Ophiucus Saint, cette période qui lui a fait entrevoir de nouvelles perspectives : une utilisation offensive de son cosmos, une autre réalité, à la fois plus dure et plus noble, mais également l'amitié, ce sentiment qui lui faisait jusque là défaut depuis son départ de l'île dévastée d'Andromède. Et puis il y avait aussi, lui…

Souriant derrière son masque à la pensée de ces derniers mois, elle n'en oubliait pas pour autant l'enjeu de sa quête : le réveil d'Athéna. Etrangement cependant, elle n'agissait pas pour la déité, mais bien plus pour elle-même : elle souhaitait avant tout honorer l'entraînement d'Albior et de Shina et se prouver à elle-même que, tout en étant un Chevalier de l'ombre, femme qui plus est, elle pouvait réussir là où d'autres en seraient incapables. Elle désirait se montrer à la hauteur des autres Saints de son ordre, même si elle se savait pouvoir rivaliser avec certain d'entre eux. Elle désirait surtout, par cet acte, prouver aux autres et à elle-même qu'elle existait. Etrange paradoxe que de vivre dissimulée lorsque l'on ne se sent vivante qu'à travers les yeux des autres. Ainsi parfois, même lorsqu'elle se trouvait seule, elle se sentait invisible… peut-être commençait-elle doucement à entrevoir une partie de ce que la Magna Mater avait voulu lui expliquer.

Mais quoi qu'il en soit, ça n'était pas le moment de bailler aux corneilles. Avançant prudemment le long des toits, elle entrevit quelque chose qui pourrait faire son affaire : une corde à linge sur laquelle étaient suspendus quelques vêtements visiblement secs. En faction durant une bonne dizaine de minutes, attendant patiemment que la rue se vide, elle profita d'une accalmie pour descendre de son perchoir et s'enrouler dans une longue tunique damassée de couleur sable. Ainsi vêtue il ne lui restait plus qu'à ôter son masque et elle passerait totalement inaperçue dans la foule, chose faite puisqu'à présent elle était déjà dans l'avenue principale mélangée à la population.

Mais dissimulée dans l'ombre deux yeux brillants d'un inquiétant éclat scrutaient ardemment la jeune femme.

Se promenant au gré du hasard, l'éthiopienne se rendit vite compte que les villageoises parlaient un dialecte qui lui était inconnu. Toutefois, il lui arrivait parfois de surprendre des conversations en grec, irréfutable preuve que cette langue malgré tout devait être connue de tous, preuve en était les rares livres qu'elle avait pu voir dans une des quelques boutiques. Avançant dans son exploration elle arriva, étonnée, devant une sorte d'hémicycle au sein duquel quelques jeunes femmes se livraient à de rudes joutes. Elles étaient toutes de cuir vêtues, s'exerçant au maniement d'armes plus diverses les unes que les autres : javelot, glaive, épée, fouet, mais surtout arc et flèches. Dans un coin en effet, d'habiles archers s'entraînaient sur des silhouettes faites de sacs de toile rembourrés et représentant à ne pas se tromper… des hommes !!

Contenant difficilement sa stupeur, June ressentit une légère pression sur son épaule qui la fit se retourner et réagir de manière bien imprévisible. Saisissant la main de celle qui l'empoignait elle la tordit tout en balayant d'un ample mouvement de jambe le corps de l'infortunée qui avait osé la toucher. Se rendant soudain compte d'à quel point son impulsivité l'avait conduite à se comporter violemment elle rougit et aida la pauvre jeune femme à se relever, bafouillant quelques confuses excuses. Quand soudain elle la rejeta brutalement au sol et se retourna vivement. Et, sous les yeux hallucinés de ceux qui assistaient à la scène, June arrêta d'une main une flèche perdue. La brisant d'un coup sec, on pouvait voir frémir tout autour d'elle une fine aura rosée, à peine perceptible, mais pourtant bien présente. Malheureusement si elle souhaitait passer inaperçue c'était raté maintenant : presque toutes les personnes présentes s'étaient retournées et avaient assisté au spectacle. La prenant alors sous son aile, Antiope, la victime involontaire de June grâce à qui cette première avait été sauvée, chassa alors les curieuses et l'emmena dans un coin plus tranquille, une sorte d'arche au bord d'un fin ruisseau bordé de galets. Assises toutes deux sur un banc de pierre, elles s'observaient mutuellement. La guerrière d'Athéna ne put s'empêcher de remarquer à quel point Antiope était d'une grande beauté : ses lèvres pulpeuses s'harmonisaient à merveille avec le teint halé de sa peau. Sa chevelure noire de jais encadrant un délicat visage retombait en larges boucles sur ses épaules. Le seul bémol à l'équilibre parfait de ce corps se trouvait être ses yeux : des pupilles d'un bleu aussi clair qu'un glacier, saisissant contraste qui aurait fait chavirer le cœur de plus d'un homme. La contemplation fut soudain interrompue.

- On ne peut pas dire que tu ne saches te défendre toi, lui fit remarquer Antiope en un grec parfait.
- Disons qu'il m'a bien fallu apprendre, répondit June du tac au tac. D'ailleurs excuse-moi pour tout à l'heure
- Ca n'est rien tu sais, j'ai déjà connu bien pire. C'est juste que c'était très "surprenant", dit-elle en riant.
- Question d'habitude.
- Tu dois être une grande guerrière alors. Mais je suis quand même surprise, je ne te connais pas et pourtant notre ville n'est pas si grande. Tu es étrangère je me trompe ?
- Non tu as raison. Je viens d'une contrée lointaine.
- En tout cas sois sûre que vu tes prouesses la nouvelle de ta venue ne tardera pas à se répandre. Ici nous sommes toutes des guerrières et je suis certaine que quelques-unes unes vont vouloir te défier.
- Quelques-unes ? N'y a-t-il que des femmes dans cette ville ?
- Ben oui pourquoi ? Que voudrais-tu qu'il y ait d'autres ? Nous avons bien des chevaux et quelque bétail…
- Et des hommes ?

Antiope arbora une mine surprise, comme si June venait de dire la plus grosse bêtise qu'elle ait jamais entendue de sa vie.

- Des hommes ? Pourquoi veux-tu qu'il y ait des hommes ici ? Cela fait déjà bien longtemps, avant même ma naissance, que plus aucun homme n'a souillé nos terres de sa présence.
- Souillé ?
- Heureusement nos mères ont bien pris soin de les exiler, instaurant à nouveau l'ordre dans le chaos masculin.
- Alors c'est pour ça les silhouettes d'hommes destinées aux archers ? Et pour cela aussi que vous vous entraînez toutes ?
- Chaque femme de ce village possède la totale maîtrise d'une arme. Nous sommes toutes des guerrières émérites, mais l'une d'entre nous fait plus particulièrement la fierté de notre peuple : elle excelle en l'art du combat et est experte en maniement de bien des armes. Et c'est dans le but de l'égaler que nous nous entraînons toutes.
- Mais pourquoi donc vous entraîner alors que vous vivez si profondément dissimulées dans la jungle ?
- Car il est dit que les hommes reviendront un jour pour prendre leur revanche sur nous. Néanmoins, tant que notre reine sera sur le trône, aucun risque que cela n'arrive. Par malheur une triste prophétie plane au-dessus d'elle depuis sa naissance…
- Les prophéties ne sont rien de plus que les paroles d'illuminés, il ne faut pas croire en ces balivernes.
- Ne sois pas si sceptique : les prophéties relatives à notre peuple se sont jusqu'à présent toujours révélées justes. En vérité si nous nous entraînons si ardemment, c'est avant tout pour prévenir au mauvais sort qui risque de nous frapper : il est dit qu'un jour prochain l'envoyé de la mort foulera notre sol et viendra, sous la forme d'un reptile, apporter souffrance et désolation à notre peuple. Pour ce faire il nous trompera et dissimulera son vrai visage. Notre haruspice a récemment perçu de mauvais signes, les mêmes signes qui accompagnaient la naissance de notre souveraine…
- Haruspice ?
- Oui, notre prophétesse. En tout cas je souhaite que tu aies raison quand tu penses que tout ça n'est que sornettes…

Puis, passant d'un regard grave à une grande gaieté, Antiope se leva et demanda à June :

- Au fait tu ne m'as pas dit : qu'est-ce que tu fais dans notre ville ?
- Si seulement je le savais…
- En tout cas une guerrière de ton rang a tout à fait sa place parmi nous. Si tu ne sais pas où loger, je t'invite.
- Ca sera avec grand plaisir alors, lui répondit June satisfaite, un sourire aux lèvres.

Puis elles se serrèrent la main et Antiope invita la femme Chevalier à la suivre.

Et c'est ainsi qu'en cette fin de journée June fit la connaissance d'Antiope et s'en alla chez elle prendre une bonne nuit de repos avant une journée qui s'avérerait probablement des plus imprévisibles…

*
* *

Quelque part dans une pièce richement décorée

- Tu me dis que cette fille a évité ta flèche ?!? Mais comment est-ce possible ! Espèce d'incapable !!
- Mais c'est que… Elle est bien plus forte que ce que je m'imaginais. Elle aussi a la maîtrise.
- La maîtrise ?! Mais n'importe qui peut l'avoir ! C'est juste que la plupart d'entre vous n'êtes que des incapables. Je t'ai laissé ta chance Valénia, tu n'as pas su la saisir. A présent tu vas payer ton incompétence de ta vie !
- Non maîtresse, non. Je vous en prie… sanglota la femme en se traînant au sol et en suppliant.
- Assez !

Une cosmoénergie vert sombre presque noire émana soudain du corps de la femme emmitouflée dans un châle bordeaux. Un trait d'énergie sombre partit soudain de son doigt pointé en direction de la larmoyante… qui s'écroula d'une traite, crachant des gerbes écarlates.

- Bien fait pour toi incapable, je t'avais prévenu de ne pas échouer. Tel est le prix à payer pour ceux qui désobéissent aux ordres de la reine !

Un rire sardonique se fit alors entendre et sur ce l'inconnue quitta la sombre salle, laissant derrière elle le cadavre d'une femme blonde d'environ la trentaine sur la tombe de laquelle bientôt sera gravé le funeste nom de Valénia…

*
* *

Cette nuit là June se réveilla en sueur : elle venait à nouveau d'avoir cette vision de Shina lui envoyant sa terrible Griffe du Tonnerre. Mais ce qui l'intriguait bien plus encore était l'oppressante impression que quelque chose ne tournait pas rond… Une profonde sensation de malaise s'emparait progressivement d'elle, s'insinuant dans les moindres recoins de son esprit.

Toutefois au prix de grands efforts elle parvint à se rendormir, se promettant que dès le lever du jour elle partirait en quête de ce qui perturbait si perfidement son sixième sens.

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Cette fiction est copyright Elissa Eid et Frédéric Biedermann.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.